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JURISURBA - Page 44

  • Veille Jurisprudentielle n°45/2012 : 11 décisions signalées

    INTERPRETATION & APPLICATION DES NORMES :

    CAA. Douai, 10 octobre 2012, Alain A…,req. n° : 11DA01725 : « Considérant qu'ainsi qu'il a été dit, les dispositions du préambule du chapitre du règlement du plan local d'urbanisme relatif à la zone N énonce que le secteur Nh est une " zone équipée devant conserver son caractère rural. L'habitat individuel dispersé sur de grandes parcelles y est néanmoins autorisé " ; que les dispositions de l'article N 1 concernent les " Types d'occupation et d'utilisation des sols interdits ", celles de l'article N 2, les " Types d'occupation et d'utilisation des sols soumis à conditions spéciales " - celles de l'article N 2.2 étant propres au secteur Nh autorisent notamment " les constructions à usage d'habitation " -, et celles de l'article N 8, portent sur l'" implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété " ; qu'aucune de ces dispositions particulières, ni aucune autre concernant la zone N, ne prévoient que l'habitat individuel dispersé sur de grandes parcelles soit autorisé en zone Nh ou y font obstacle ; que, dans cette mesure, le préambule précité comporte une disposition normative dont les parties peuvent utilement se prévaloir ;
    Considérant que M. B a fait valoir devant les premiers juges que le projet présenté par M. A relatif à six habitations regroupées sur une même parcelle par bloc de deux logements jumelés, constitue un projet collectif et non un habitat individuel dispersé ; que, toutefois, compte tenu de l'aspect architectural du projet, et notamment de l'agencement sur la parcelle des trois maisons jumelées d'ailleurs dépourvues de parties communes, de sa taille limitée et du nombre de logements concernés, il ne peut être regardé comme un projet d'habitat collectif mais comme un projet concernant un habitat individuel ; qu'il répond également aux exigences du préambule de la zone Nh relatives au caractère dispersé de l'habitat sur une grande parcelle ».

    CAA. Lyon, 9 octobre 2012, Cne de Lans-en-Vercors, req. n°11LY01166 : « Considérant, toutefois, que le dossier de permis de construire constitué par Mme A, autorisée par son père, M. B, à présenter cette demande, comporte une attestation notariée datée du 19 octobre 2007, selon laquelle ce dernier entend faire donation à sa fille d'une parcelle de 1 200 m² à détacher de la parcelle cadastrée section C n° 156 lui appartenant avec création d'un droit de passage sur la parcelle C 875 ; qu'en outre, le dossier mentionne expressément la création d'un chemin d'accès sur la parcelle section AE n° 66, dont il précise les caractéristiques et dont les modalités de raccordement à la voie publique sont matérialisées notamment par un document graphique joint au dossier ; que, dans ces conditions, et alors même que le chemin d'accès litigieux serait situé en zone NC st, la commune de Lans-en-Vercors n'est pas fondée à soutenir que la parcelle d'assiette de la construction projetée est enclavée au sens des dispositions de l'article NB 3 du plan local d'occupation des sols ».

    CAA. Bordeaux, 4 octobre 2012, Ministre du développement durable, req. n°11BX01853 : « Considérant, en premier lieu, que la zone A du plan local d'urbanisme, dans laquelle la parcelle d'assiette du projet en cause est située, est définie par le règlement de ce plan comme couvrant les secteurs agricoles de la commune, équipés ou non, à protéger en raison de leur potentiel agronomique, biologique ou économique ; que le secteur Apf correspond " principalement ", selon ce même règlement, " à la zone agricole de protection forte définie par le schéma d'aménagement régional de La Réunion ", qui " couvre le plus souvent les espaces cultivés en canne à sucre [devant] être protégés et confirmés dans leur vocation exclusivement agricole " ; qu'aux termes de l'article 1.2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme : " A l'exception de ceux visés à l'article A 2, sont interdits les constructions, ouvrages et travaux non liés et nécessaires à une exploitation agricole, ainsi que le changement de destination des bâtiments à usage agricole (...) " ; qu'aux termes de l'article 2.2 de ce même règlement : " Sont admis sous conditions : / (...) 8. Les constructions, ouvrages et travaux liés aux différents réseaux, à la voirie, au stationnement, à la production et à la distribution d'énergie, notamment les énergies renouvelables, dès lors qu'ils s'insèrent dans le milieu environnant et que leur implantation n'altère pas la production agricole (...) " ;
    Considérant qu'il résulte tant de la lettre de ce règlement que des objectifs qu'il poursuit, et qui sont énumérés à l'article L. 121-1 du code de l'urbanisme, qu'en autorisant certains projets de construction à la condition qu'ils n'altèrent pas la production agricole, il n'a pas exclu par principe tout projet ayant pour effet un changement dans la nature des essences cultivées ; que dès lors, et contrairement à ce que la MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT soutient, en estimant que la substitution de la culture du géranium à celle de la canne à sucre n'altérait pas par elle-même la production agricole de la parcelle au sens dudit règlement, le tribunal administratif n'a pas commis d'erreur de droit ;
    Considérant, en second lieu, que la MINISTRE DE L'ECOLOGIE, DU DEVELOPPEMENT DURABLE, DES TRANSPORTS ET DU LOGEMENT fait valoir notamment que les travaux en cause impliquent l'abandon de la culture de la canne à sucre sur les parcelles concernées, et que la culture du géranium qu'il est prévu d'y mener n'occupera que la moitié de la parcelle ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que l'exploitation agricole à laquelle le projet entend se substituer connaît des problèmes de rentabilité ; que sur la superficie totale de la parcelle, qui est de 5 hectares, la moitié doit être affectée à la culture du géranium pour la production d'huiles essentielles ; que l'autre moitié, recouverte par les panneaux solaires, doit être affectée à l'entreposage du géranium à l'abri des intempéries, d'autant plus nécessaire compte tenu du temps requis pour la récolte, faiblement mécanisée, de cette plante ; que la production attendue est de 120 kilogrammes d'huiles essentielles par an ; que la conjonction de cette culture avec la production d'énergie renouvelable par l'entremise des panneaux solaires doit assurer la rentabilité de l'exploitation agricole ; que dans ces conditions, en accordant tacitement le permis de construire sollicité, le préfet de la Réunion n'a pas commis d'erreur d'appréciation au regard de l'exigence, prévue par le règlement d'urbanisme, que le projet n'altère pas la production agricole ; qu'ainsi, contrairement à ce que soutient la ministre et comme le tribunal administratif l'a jugé, le permis tacite en cause n'était pas illégal à ce titre ; que dès lors, le préfet de la Réunion n'a pu légalement le retirer pour ce motif ».

    CAA. Lyon, 2 octobre 2012, Préfet du Puy-de-Dome, req. n°12LY00292 : « Considérant qu'aux termes de l'article UB 7 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Clermont-Ferrand, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : " (...) Dans le cas de propriétés d'angle, les bâtiments doivent être implantés de limite latérale à limite latérale au droit de la limite actuelle ou future des voies ou emprises publiques, des emplacements réservés à usage de voirie ou au droit de la marge de recul imposée. La profondeur de l'implantation en limite de propriété n'est pas fixée (...) " ; que ces dispositions, qui ne prévoient aucune dérogation à la règle d'une implantation en limite latérale au droit de la limite des voies, imposent, par suite, que la construction soit implantée sur toute sa hauteur en limite séparative de propriété ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est situé à l'angle de la rue Eugène Gilbert et de la rue Emmanuel Chabrier, sur le territoire de la commune de Clermont-Ferrand ; qu'en application des dispositions précitées, la construction projetée doit donc être implantée de limite latérale à limite latérale au droit de la limite des voies ; qu'en limite latérale sud, seuls les trois premiers niveaux de la construction projetée, sur une hauteur d'environ 8,50 mètres, sont implantés en limite séparative, les quatre autres niveaux étant situés en retrait de cette limite, à une distance d'environ 5,30 mètres ; que le projet n'est ainsi pas implanté sur la totalité de sa hauteur sur la limite latérale sud ; que, dès lors, il méconnaît les dispositions précitées de l'article UB 7 du règlement du plan d'occupation des sols »

    LOTISSEMENT & DIVISIONS FONCIERES :

    CAA. Paris, 2 octobre 2012, Sté Guallaguet, req. n°11PA02808 : « Considérant qu'aux termes de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme en vigueur depuis le 1er octobre 2007: " Constitue un lotissement l'opération d'aménagement qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet la division (...) d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments. " ; qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article UB 5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Germigny-l'Evêque approuvé le 7 juillet 2000 : " [...] / Les parcelles d'un lotissement (au sens de l'article R. 315.1 à 7) doivent présenter une superficie d'au moins 800 m² et une façade sur voie de desserte au moins égale à 15 m / [...] " ;
    Considérant, en premier lieu, qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que le terrain d'assiette du permis de construire litigieux délivré par le maire de la commune de Germigny-l'Evêque le 25 janvier 2008, d'une surface de 500 m², est issu d'une division en deux lots, A et B, de la parcelle cadastrée F 819-820-821 intervenue par déclaration le 22 août 2007, en application de la procédure définie par l'ancien article R. 315-54 du code de l'urbanisme abrogé depuis le 1er octobre 2007 ; que la construction litigieuse étant destinée à être accolée à une maison à usage d'habitation, construite sur le lot adjacent depuis moins de 10 ans à la date de cette division, ce projet constitue un lotissement au sens des dispositions précitées du code de l'urbanisme, sans que les requérantes puissent se prévaloir utilement des dispositions antérieures de l'article R. 315-1 du code de l'urbanisme, qui n'étaient plus applicables à la date à laquelle le permis de construire litigieux a été délivré, alors même qu'elles sont expressément mentionnées par les dispositions précitées du plan d'occupation des sols, lesquelles ne sauraient prévaloir sur celles du code de l'urbanisme, ni d'une réponse ministérielle du 26 février 2008 qui n'a pas de valeur juridique ; qu'en accordant le permis de construire contesté à la SARL Agence Immobilière Gaillaguet, alors que la superficie du terrain d'assiette du projet présente une superficie inférieure à 800 m², le maire de Germigny-l'Evêque a donc méconnu les dispositions précitées du deuxième alinéa de l'article UB 5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune ;
    Considérant, en second lieu, qu'il ressort des pièces du dossier que, contrairement aux énonciations du permis de construire litigieux, le projet consiste à édifier deux maisons accolées et non un seul bâtiment comportant deux logements ; que, par suite, les requérantes ne sont fondées à soutenir ni que le tribunal aurait commis une erreur de fait, ni que la division précédemment effectuée ne pouvait être regardée comme constitutive d'un lotissement, au sens des dispositions précitées de l'article L. 442-1 du code de l'urbanisme, puisqu'elle avait été effectuée en vue de l'implantation de plusieurs bâtiments sur un même terrain »

    TRAVAUX SUR EXISTANT :

    CAA. Douai, 10 octobre 2012, Micheline B…, req. n°11DA01798 : « Considérant que, lorsqu'elle est saisie d'une demande de permis de construire tendant à la régularisation d'une construction déjà édifiée, l'administration doit statuer seulement au vu du dossier qui accompagne la demande, sans rechercher si la construction réalisée est conforme ou non aux règles applicables ;
    Considérant que le plan de masse figurant dans le dossier de demande déposé par Mme B le 15 janvier 2009 fait apparaître un retrait du chalet par rapport à la voie publique de 3 mètres ; qu'il résulte de ce qui précède que Mme B ne peut utilement se prévaloir du constat d'huissier du 9 septembre 2011 selon lequel la construction réalisée serait éloignée de plus de 5 mètres de la voie publique, ni du nouveau plan de masse qu'elle a produit par courrier enregistré au greffe de la cour le 7 mai 2012, dont il n'est pas établi, ni même allégué, qu'il figurait dans le dossier de demande au vu duquel le maire de Talmas s'est prononcé ».

    AUTORISATIONS D’URBANISME :

    CAA. Douai, 10 octobre 2012, Cne de Neuville-Chant-d’Oisel, req. n°11DA01137 : « Considérant que la circonstance que l'exploitant de l'installation classée ne respecte pas les prescriptions prévues au permis de construire ne suffit pas à établir que ces prescriptions étaient par elles-mêmes insuffisantes lorsque l'auteur du permis les a édictées ; que, par suite, les nuisances sonores ou visuelles éprouvées par M. et Mme A en raison de la mise en oeuvre de l'activité de la centrale à béton et du bâtiment de fabrication, telles que notamment constatées par l'expert judiciaire, ne sont pas en elles-mêmes de nature à révéler une méconnaissance des dispositions pertinentes du plan local d'urbanisme ; qu'il en va ainsi notamment des nuisances visuelles provoquées par l'installation de projecteurs provoquant un éblouissement, non conformes à la prescription dont est assorti le permis de construire ;
    Considérant, en revanche, qu'il ressort également du rapport de l'expert que les nuisances sonores prévisibles auraient pu être sérieusement atténuées voire supprimées par des prescriptions supplémentaires consistant, d'une part, en la réalisation d'un mur d'une hauteur de quatre mètres entourant la propriété où se situe l'installation notamment dans sa partie Nord et, d'autre part, en un système de fermeture automatique des portes, lesquelles sont d'ailleurs orientées vers les habitations et non exclusivement vers les champs ; que le permis de construire se borne à prévoir un " mur de protection " " le long de la haie, séparant la centrale du voisinage - hauteur 3 mètres " ; que cette protection ne vise que l'habitation qui jouxte à l'Est la centrale à béton ; qu'en revanche, cette protection ne concerne pas l'habitation des époux A, située au Nord, et, qui bien que plus éloignée, est néanmoins, dans le contexte rural, atteinte par les mêmes nuisances ; qu'ainsi, le permis de construire comporte des prescriptions insuffisantes au regard des exigences des dispositions de l'article 2AU 2.3 du plan local d'urbanisme ;
    Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que ces insuffisances entachent d'illégalité la totalité du permis de construire accordé »

    CAA. Lyon, 2 octobre 2012, Sté « Domaine du Pas Ventoux », req. n°12LY00334 : « Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article R. 423-23 du code de l'urbanisme : " Le délai d'instruction de droit commun est de : (...) b) Deux mois (...) pour les demandes de permis de construire portant sur une maison individuelle, au sens du titre III du livre II du code de la construction et de l'habitation (...) ; c) Trois mois pour les autres demandes de permis de construire (...) " ; que l'article R. 423-28 du même code dispose : " Le délai d'instruction prévu par le b et le c de l'article R. 423-23 est (...) porté à six mois : (...) c) Lorsqu'un permis de construire porte sur des travaux relatifs à un établissement recevant du public et soumis à l'autorisation prévue à l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation " ; qu'aux termes, par ailleurs, de l'article R. 423-42 dudit code : " Lorsque le délai d'instruction de droit commun est modifié en application des articles R. 423-24 à R. 423-33, l'autorité compétente indique au demandeur ou à l'auteur de la déclaration, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie : a) Le nouveau délai et, le cas échéant, son nouveau point de départ ; b) Les motifs de la modification de délai ; c) Lorsque le projet entre dans les cas prévus à l'article R. 424-2, qu'à l'issue du délai, le silence éventuel de l'autorité compétente vaudra refus tacite du permis " ; qu'enfin, l'article R. 423-43 prévoit que " les modifications de délai prévues par les articles R. 423-24 à R. 423-33 ne sont applicables que si les notifications prévues par la présente sous-section ont été faites " ; qu'il résulte de ces dispositions que, dans le cas où l'autorité d'urbanisme a notifié à tort, à la réception du dossier complet d'une demande de permis de construire, le délai d'instruction de droit commun de trois mois alors que cette demande entre dans le champ d'application de l'article R. 423-28, elle dispose d'un délai d'un mois pour notifier au pétitionnaire le délai d'instruction modifié de six mois ; que, passée cette échéance, et nonobstant la circonstance que le délai d'instruction de droit commun ne serait pas lui-même parvenu à expiration, faisant ainsi naître un permis tacite, elle ne peut plus légalement procéder à une telle notification ; que par ailleurs, la légalité de la décision fixant le délai d'instruction modifié peut être contestée par voie d'exception à l'occasion du recours pour excès de pouvoir dirigé contre le refus ou le retrait de permis de construire finalement opposé par l'autorité d'urbanisme, y compris dans le cas où elle ne serait plus elle-même susceptible de faire l'objet d'un tel recours, ces deux décisions relevant de la même opération administrative ; qu'il en va ainsi alors même que, comme en l'espèce, un recours pour excès de pouvoir a déjà été engagé contre cette décision et a été rejeté par un jugement devenu définitif ».

    RETRAIT & CONTENTIEUX :

    CAA. Nantes, M. & Mme X…, req. n°11NT02900 : « Considérant, d'autre part, qu'il est constant que le permis de construire contesté a été délivré en vue de l'édification de quatre maisons individuelles, de la démolition de la maison d'habitation existante et de la division en quatre lots du terrain ; qu'il ressort des pièces du dossier que le panneau d'affichage portait la seule mention " maisons individuelles ", et ne comportait, contrairement aux prescriptions précitées de l'article A. 424-16 du code de l'urbanisme, aucune mention relative, notamment, à la maison d'habitation existante devant être démolie ; que, dans ces conditions, l'affichage sur le terrain ne peut être regardé comme ayant été régulièrement effectué et n'a pu, également, pour ce second motif, faire courir le délai de recours contentieux mentionné à l'article R. 600-2 précité du code de l'urbanisme ».

    CAA. Douai, 27 septembre 2012, Association Vent de Travers, req. n°12DA00017 : « Considérant que les articles L. 421-5 et R. 421-8-1 du code de l'urbanisme issus des articles 90 de la loi du 12 juillet 2010 et 1er du décret du 12 janvier 2012 dispensent de permis de construire, en raison de leur nature et de leur implantation sur le domaine public maritime immergé au-delà de la laisse de la basse mer, les installations de production d'électricité à partir de sources d'énergie renouvelable, y compris leurs ouvrages de raccordement aux réseaux publics d'électricité ; que, par suite, le projet de construction contesté d'un parc éolien en mer et d'un poste de transformation sur le territoire de la commune de Veulettes-sur-Mer n'est plus soumis à autorisation de construire au titre du code de l'urbanisme ; que, dans ces conditions, et dès lors, d'une part, que ces nouvelles dispositions sont entrées en vigueur le 14 janvier 2012, soit postérieurement à l'introduction de la présente requête et, d'autre part, que l'arrêté attaqué n'a reçu aucun commencement d'exécution, il n'y a plus lieu pour la cour administrative d'appel, quels que soient les moyens invoqués par les appelants, d'examiner leur requête tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er septembre 2008 par lequel le préfet de la Seine-Maritime a autorisé la construction du parc éolien dont il s'agit ; que, par suite, la présente requête doit être regardée comme devenue sans objet ».

    CAA. Versailles, 16 juillet 2012, société COMPAGNIE D'INVESTISSEMENTS IMMOBILIERS ET FONCIERS, req. n°10VE02591 : « Considérant, d'une part, que la demande présentée le 4 février 2002 ne concernait, comme cela résulte du marquage de la rubrique 368 du formulaire utilisé, que la réalisation de 3 maisons individuelles de grande taille comportant 6 pièces et plus et non la réalisation d'un habitat collectif ; que les plans joints à l'appui de cette demande de permis de construire, qui ont été complétés par une transmission effectuée le 19 février 2002 à la demande expresse de la commune concernant l'agencement intérieur des constructions, concernaient, comme l'indiquait la société elle-même dans le courrier en question, la réalisation de 3 maisons de grande taille néanmoins destinées à l'habitat individuel ; que, par ailleurs, la décision précitée du 10 mai 2002 indiquait, tant dans sa version initiale que dans celle issue de la décision modificative du 28 avril 2003, qu'elle était délivrée pour la " construction de 3 maisons individuelles (1 logement par maison) ", les mêmes mentions étant reprises dans la déclaration d'ouverture de chantier faite le 30 janvier 2004 et dans la déclaration d'achèvement des travaux faite le 9 janvier 2006 ; que, cependant, les services de la commune de Garancières ont constaté, en novembre 2006, lors de l'instruction de la demande de délivrance du certificat de conformité, que la pétitionnaire avait, en fait, fait réaliser 3 constructions comprenant 18 logements ; que c'est par suite à bon droit que le maire de Garancières a pu estimer que les pièces du dossier présenté à l'appui de la demande de permis de construire n'avaient été établies que dans le but de tromper l'administration sur la destination finale des constructions, à savoir des immeubles à usage d'habitat collectif non conformes aux prescriptions du plan d'occupation des sols, et que cette volonté de fraude justifiait en conséquence, en dépit de l'expiration des délais de recours contentieux, le retrait de ce permis de construire ;
    Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutient la requérante, la réalisation des habitats collectifs litigieux a été effectuée dans le cadre des travaux autorisés par le permis de construire délivré le 4 février 2002 ; qu'en outre, cette construction n'a, ainsi qu'il l'a été précisé ci-dessus, fait l'objet d'aucun certificat de conformité ; que, par suite, la société requérante n'est pas fondée à soutenir que les changements de destination du projet initial justifiant la décision du maire de Garancières résulteraient de circonstances indépendantes de l'exécution du permis en cause au motif qu'elles seraient intervenues ultérieurement à la délivrance de cet acte ;
    Considérant, enfin, que compte tenu de la volonté ainsi établie de la société requérante de réaliser, sous couvert d'une demande portant sur la réalisation de trois habitations individuelles, son projet initial de construction de 18 logements pour lequel elle avait fait l'objet d'un refus du maire de Garancières le 25 janvier 2001, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que le seul fait d'induire sciemment en erreur l'administration sur la destination réelle de l'immeuble envisagée justifiait, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur le bien-fondé de l'interprétation de l'article UHA-5 à laquelle s'était alors livré le maire de Garancières, le retrait pour fraude du permis délivré le 4 février 2002 ».

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Quelques nouvelles précisions relatives aux possibilités d’annulation partielle des autorisations d’urbanisme

    Le permis de construire est divisible en tant qu’il tient lieu d’autorisation « ERP » au titre de l’article L.111-8 du Code de la construction et de l’habitation. Malgré le lien physique entre les locaux « ERP » en cause et les autres parties de l’immeuble, les vices affectant la délivrance de l’autorisation « ERP » dont tient lieu le permis de construire n’affectent pas d’illégalité la totalité de ce permis.

    TA. Cergy-Pontoise, 11 mai 2012, P.Boyer & autres, req. n°10-07061

    Un permis de construire peut n’être annulé au titre de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme qu’en tant qu’il a été délivré au vu d’un plan masse ne figurant pas précisément les arbres à planter, à supprimer ou à conserver.

    TA. Marseille, 28 juin 2012, Portalis & autres, req. n°10-04898



    1/ Dans la première affaire, le Maire de Levallois-Perret avait délivré un permis de construire un ensemble immobilier composé de plusieurs bâtiments devant accueillir en rez-de-chaussée des commerces, c’est-à-dire des locaux soumis à règlementation sur les Etablissements Recevant du Public (« ERP »). Par voie de conséquence :

    • le dossier produit par le pétitionnaire devait satisfaire à l’article R.431-30 du Code de l’urbanisme ;
    • le projet objet de la demande ou, plus précisément, ces commerces devaient recueillir l’avis des commissions compétentes en matière de sécurité et, en toute hypothèse, d’accessibilité aux personnes à mobilités réduites.

    Précisément, ce permis de construire devait être attaqué au motif tiré notamment, d’une part, de l’irrégularité du dossier de demande au regard des prescriptions de l’article précité et, d’autre part, de la circonstance que la commission compétente n’avait pas émis d’avis sur cette partie du projet.

    Dès lors que ces faits étaient avérés, ce moyen aurait dû « faire mouche » au regard de la jurisprudence rendue en la matière, et en d’autres termes emporter l’annulation de la totalité du permis de construire contestée ; d’autant plus que les locaux « ERP » en cause, à aménager en rez-de-chaussée, n’étaient pas physiquement dissociables de l’immeuble à construire.

    Pour autant, ce moyen devait certes être accueilli mais finalement, compte tenu du rejet de l’ensemble des autres moyens présentés par les requérants, pour n’aboutir qu’à l’annulation partielle du permis de construire contesté :

    « Considérant qu’il est constant que le rez-de-chaussée du bâtiment a vocation à accueillir des commerces et que le maire a entendu délivrer aussi l’autorisation de réaliser de tels établissements recevant du public ; qu’il ressort des pièces du dossier que le dossier de permis de construire litigieux ne comprenait pas l’ensemble des documents exigés par les dispositions de l’article R. 431-30 du code de l'urbanisme et que la commission de sécurité n’a pas émis d’avis sur les dispositions de cette partie du projet au regard des règles d'accessibilité des personnes handicapées et des règles de sécurité ;
    Considérant, toutefois, que, si de telles irrégularités affectent la légalité de l’autorisation prévue par l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation dont tient lieu l’autorisation d’urbanisme, elles sont sans influence sur le respect des règles sanctionnées par cette dernière, à savoir celles rappelées par les dispositions précitées de l’article L. 421-6 ; que, par suite, ces autorisations n’ont pas entre elles de lien indivisible
    ».


    Outre que la solution retenue ne procède pas expressément de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, et surtout procède d’un moyen fondé sur un double vice de procédure, cette décision est surtout intéressante en ce qu’elle a trait à un permis de construire délivré sous l’empire de l’article L.425-3 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction en vigueur avant le 1er mars 2012.

    Néanmoins, celle-ci apparait difficilement contestable et, en tout état de cause, nous semble parfaitement cohérente ; sans compter qu’elle tend à confirmer pour partie (mais pour partie seulement c’est vrai) les observations que nous avions formulées au sujet de la véritable utilité des modifications apportées à l’article L.425-3 par l’ordonnance du 22 décembre 2011.

    Il est vrai que le jugement commenté ici va a priori dans le sens contraire de la jurisprudence significative rendue en la matière, et notamment de l’une des plus récentes décisions rendues sur le sujet d’ailleurs dans une affaire totalement transposable à notre cas d’espèce.

    Il reste que cette jurisprudence a été rendue sous l’empire du dispositif applicable avant le 1er octobre 2007 (voir toutefois : TA de Montreuil, 3 juin 2010, req. n°08-099714) et, plus précisément, en application de l’article L.421-3 du Code de l’urbanisme qui disposait que « le permis de construire ne peut être accordé que si les constructions projetées sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires concernant l'implantation des constructions, leur destination, leur nature, leur architecture, leurs dimensions, leur assainissement et l'aménagement de leurs abords et si le demandeur s'engage à respecter les règles générales de construction prises en application du chapitre Ier du titre Ier du livre Ier du code de la construction et de l'habitation » mais précisait, plus spécifiquement, qu’en « outre, pour les immeubles de grande hauteur ou les établissements recevant du public, le permis de construire ne peut être délivré que si les constructions ou les travaux projetés sont conformes aux règles de sécurité propres à ce type d'immeubles ou d'établissements, que les locaux concernés soient ou non à usage d'habitation. Pour les établissements recevant du public, le permis de construire ne peut être délivré que si les constructions ou les travaux projetés sont conformes aux dispositions de l'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation ».

    Il s’ensuivait que sous l’empire de ce dispositif, les règles de sécurité et d’accessibilité applicables aux « ERP » étaient placées au même rang que l’ensemble des normes d’urbanisme qu’un permis de construire avait « naturellement » vocation à sanctionner ; le respect de l’ensemble de cette règlementation étant une condition sans laquelle « le permis ne p(ouvai)t être délivré ».

    Or, le dispositif en vigueur sur ce point depuis le 1er octobre 2007 est substantiellement. En effet, si l’article L.421-6 (al.1 du Code de l’urbanisme s’est « substitué » à l’ancien article L.421-3 en ce qu’il constitue toujours l’article déterminant le corps de règles qu’un permis de construire a vocation à sanctionner, il se borne toutefois à disposer que : « le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique », et n’intègre donc plus les règles d’accessibilité et de sécurité opposables aux « ERP » en application des dispositions du Code de la construction et de l’habitation, lesquelles constituent une législation distincte et indépendante de celle de l’urbanisme.

    En outre, l’article L.425-3 du Code de l’urbanisme dispose pour sa part que : « lorsque le projet porte sur un établissement recevant du public, le permis de construire tient lieu de l'autorisation prévue par l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord de l'autorité administrative compétente qui peut imposer des prescriptions relatives à l'exploitation des bâtiments en application de l'article L. 123-2 du code de la construction et de l'habitation. Le permis de construire mentionne ces prescriptions ».

    En résumé, ces règles propres aux « ERP » ne font plus partie de celles que le permis de construire a vocation à sanctionner au titre de l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme et, aux termes de l’article L.425-3, le permis de construire tient seulement lieu de l’autorisation « ERP » prévue par l’article L.111-8 du Code de la construction dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord de l'autorité administrative compétente.

    Il s’ensuit que pour être édictée sous la forme d’un même arrêté la décision prise en application de l’article L.425-3 précité porte en fait deux autorisations différentes dont chacune sanctionne un corps de règles propre. Pour ce rapporter à un même projet, voire à un même bâtiment, « ces autorisations n’ont pas entre elles de lien indivisible ».

    Il est vrai toutefois que les vices allégués au cas présent ne se rapportaient à la méconnaissance du corps de règles propre aux « ERP » mais à la procédure de délivrance du permis de construire attaqué et, plus spécifiquement, à la composition du dossier de demande au regard de l’article R.431-30 du Code de l’urbanisme, d’une part, et à l’avis émis par la commission compétente à l’égard des « ERP ».

    Il reste que cette divisibilité de l’autorisation obtenue en application de l’article L.425-3 du Code de l’urbanisme se retrouve dans le cadre de l’instruction de la demande puisque :

    • les pièces constituant le « volet ERP » du dossier de demande ne doivent être produites qu’en trois exemplaires ;
    • dans la mesure où elles sont uniquement destinées à être transmises aux commissions compétentes aux seuls fins que celles-ci instruisent cet aspect du projet dans les conditions visées aux articles R.111-19-23 et R.111-19-25 du Code de la construction et de l’habitation.

    Reste la principale question : la solution retenue dans cette affaire, et dont l’utilité demeure au sujet des demandes ne mettant pas en œuvre la faculté introduite l’article L.425-3 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de l’ordonnance 22 décembre 2011, sera-t-elle transposée à tous les cas où le permis de construire tient lieu de l’autorisation prévue par une autre législation en application des articles L.425-1 et suivants du Code de l’urbanisme, voire à d’autres autorisations globales mais délivrées au titre de la seule législation d’urbanisme, tel au premier chef un permis de construire autorisant les démolitions ?

    2/ Dans la seconde affaire, le permis de construire devait être contesté notamment au motif que le plan masse produit par le pétitionnaire ne satisfaisait pas à l’article R.431-8 du Code de l’urbanisme en tant qu’il impose que ce document figurent les arbres à planter, à supprimer et/ou à conserver.

    Il s’agit toutefois du seul vice retenu par le Tribunal administratif de Marseille : se posa alors la question de la mise en œuvre de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme et, concrètement, de l’annulation totale ou partielle du permis de construire attaqué.

    Dans la mesure où l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme se réfère à la « partie du projet », cette rédaction peut en effet générer certaines interrogations sur les vices susceptibles de n’emporter qu’une annulation partielle de l’autorisation contestée puisqu’en première analyse, ce serait donc le projet lui-même qui devrait être partiellement illégal. A priori, seul un vice de fond affectant l’autorisation contestée d’illégalité interne pourrait donc permettre son annulation partielle.

    S’il a effectivement pu être jugé que l’irrégularité des documents graphiques produits par le pétitionnaire affectait d’illégalité l’ensemble du permis de construire contesté et s’opposait ainsi à l’annulation partielle de ce dernier (CAA. Bordeaux, 30 octobre 2007, SCI Les Terrasses de Marie, req.n° 05BX01764. Dans le même sens, au sujet de l’irrégularité d’un avis formulé dans le cadre de la construction de la demande : CAA. Nantes, 25 juin 2008, Cne de Bucy, req. n°07NT03015) la circonstance que l’autorisation d’urbanisme en cause soit affectée d’illégalité externe de nous parait pas nécessairement exclure que celle-ci ne donne lieu qu’à une annulation partielle.

    Dans certains cas, en effet, l’incomplétude du dossier ou le caractère insuffisant de certaines des pièces produites par le pétitionnaire peut n’avoir faussé l’appréciation des services instructeurs qu’à l’égard d’une des composantes du projet pouvant être caractérisée comme une « partie » de celui-ci au sens de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme. D’ailleurs, avant l’entrée en vigueur de ce dernier, il avait pu être jugé qu’un permis de construire portant, d’une part, sur un ensemble pavillonnaire, et d’autre part, sur un hôtel mais délivré au vue d’un dossier ne comportant pas la justification de la demande d’autorisation d’exploiter alors requise par le Code du commerce pour l’exploitation de ce dernier n’encourrait à ce titre l’annulation qu’en tant que ce permis avait autorisé l’hôtel (CAA. Nantes, 18 avril 2006, Sté Investimmo Régions, req. n°04NT01390).

    Or, on comprendrait mal que non seulement que l’article L.600-5 ne permette plus ce qui était possible avant son entrée en vigueur mais surtout qu’alors que

    • la méconnaissance de l’article 13 du règlement d’urbanisme applicable semble permettre l’annulation partielle du permis de construire contesté qu’en tant que le projet litigieux ne prévoie pas un nombre d’arbres suffisant (CAA. Marseille, 16 juin 2011, Michel A., req. n°09MA02840) ;
    • la production de pièces formellement insuffisantes sur ce point préjuge d’une méconnaissance de cet article 13 (CAA. PARIS, 3 juillet 2009, Guy X., req. n°07PA00677) ;

    l’irrégularité formelle du plan masse s’agissant de la représentation des arbres à planter, à abattre ou à conserver doive nécessairement emporter l’annulation totale du permis de construire délivré au vue d’un tel plan.

    Mais précisément, et en application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, le Tribunal administratif de Marseille vient donc de juger que, tout en soulignant la méconnaissance de l’article R.431-8 du Code de l’urbanisme sur ce point affectait d’illégalité la totalité du projet, un permis pouvait néanmoins n’être annulé qu’en tant qu’il avait été délivré au vu d’un plan masse ne permettant pas d’apprécier la prise en compte de l’article 13 du règlement d’urbanisme local.

    La propension du ou des vices retenues à être régulariser par un simple « modificatif » semble donc bien devenir le seul critère d’application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme ; ce qui semble toutefois appeler le juge à s’assurer, pour les vices de fond, d’une telle possibilité de régularisation dans le cadre d’un simple permis modificatif (pour exemple: CAA. Bordeaux, 2 mai 2012, EURL GTI Promotion, req. n°11BX00803).

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat associé au barreau de Paris

    Cabinet Frêche & Associés

  • Les POS/PLU ne peuvent légalement pas interdire les lotissements ou limiter les divisions foncières productives de terrain à bâtir

    Le législateur n’a pas conféré aux auteurs des POS/PLU une compétence leur permettant d’interdire par principe les lotissements ou de limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments.

    CE. 27 juillet 2012, Franck Hoffman, req. n°342.908

    Comme on le sait, l’administration centrale avait souvent précisé qu’un POS ou un PLU ne pouvait légalement pas interdire les lotissements dans la mesure où ces documents ne peuvent légalement édicter que des règles de fond (pour exemple : Rép. Min n°13258, JOAN 25/03/2008 ; p.2606). Selon l’administration, la notion de lotissement n’était donc pas un type d’occupation du sol.

    Pour autant de nombreux arrêts d’appel devaient faire application de règlements d’urbanisme locaux interdisant les lotissements. Et surtout, certaines jurisprudences devaient clairement valider la légalité des dispositions d’un règlement local d’urbanisme interdisant purement et simplement les lotissements au motif qu’il s’agissait d’un type d’occupation du sol que ces documents pouvaient réglementer en application des dispositions des actuels articles L.123-1 et R.123-9 du Code de l’urbanisme (CAA. Versailles, 6 novembre 2008, Sté Foncière de l’Ouest, req. n°07VE01713 ; CAA. Marseille, 31 mars 2011,M. X…, req. n°09MA01536).

    Le Conseil d’Etat vient ainsi de trancher cette question en jugeant, à l'inverse de ces arrêts d'appel, que :

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B, propriétaire d'un terrain situé sur le territoire de la commune de Callian, dans le département du Var, classé en zone naturelle NB du plan d'occupation des sols, a déposé une déclaration préalable afin de procéder à la division de son terrain et de créer un lot destiné à accueillir une construction ; que, par un arrêté du 2 avril 2008, le maire de Callian s'est opposé à cette déclaration préalable, au motif que l'article NB2 du règlement du plan d'occupation des sols interdisait les lotissements dans cette zone ; que, par un jugement du 2 juillet 2010, contre lequel M. B se pourvoit en cassation, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
    Considérant que le livre IV du code de l'urbanisme fixe le régime des constructions, aménagements et démolitions et définit notamment les procédures administratives d'autorisation ou de déclaration auxquelles ils sont préalablement soumis ; qu'en vertu des dispositions de son article L. 442-1, applicables au présent litige, le lotissement constitue une division d'une ou plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments ;
    Considérant qu'en vertu de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée, le règlement du plan d'occupation des sols, comme celui du plan local d'urbanisme qui lui a succédé, a pour objet de fixer les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés, dans sa rédaction applicable au litige, à l'article L. 121-1, lesquelles peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones à urbaniser ou à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions ; qu'il ne ressort, en revanche, ni de ces dispositions ni d'aucune autre disposition législative que les auteurs du règlement d'un plan d'occupation des sols aient compétence pour interdire par principe ou pour limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder, dans les conditions prévues au livre IV précité du code de l'urbanisme, à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments, faculté qui participe de l'exercice de leur droit à disposer de leurs biens, dont il appartient au seul législateur de fixer les limites ;
    Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en interdisant par principe les lotissements dans une ou plusieurs zones qu'il délimite, le règlement d'un plan d'occupation des sols ou d'un plan local d'urbanisme édicte des règles qui excèdent celles que la loi l'autorise à prescrire ; que, dès lors, en jugeant que le plan d'occupation des sols de la commune de Callian a pu légalement interdire les lotissements en zone NB, le tribunal administratif de Toulon a commis une erreur de droit ; qu'il suit de là, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, que M. B est fondé à demander l'annulation du jugement attaqué
    ».


    Si tel étaient le sens des conclusions du rapporteur public dans cette affaire et bien que l’arrêt précité vise l’article L.442-1 du Code de l’urbanisme, la solution retenue n’apparait cependant pas spécifiquement résulter de l’analyse selon laquelle le lotissement n'est qu'une règle de procédure.

    Outre que l’article L.442-1 n’a pas pour objet de définir une procédure mais vise à la qualification d’un type d’opérations foncières, la référence à cet article par le Conseil d’Etat (dans le second "considérant") nous semble tendre au premier chef à définir la notion de lotissement utilisée par le POS litigieux aux fins d’apprécier (dans le "considérant suivant") si elle comptait ou non parmi les opérations couvertes par l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction applicable au cas d’espèce.

    Cela étant, il n’est pas inintéressant de relever qu’alors que le document d’urbanisme en cause était un POS, le Conseil d’Etat a retenu la définition du lotissement telle qu’elle était fixée par le Code de l’urbanisme à la date de la décision d’opposition en litige et non pas celle en vigueur à la date d’approbation du POS en cause et ce, contrairement à la démarche qui avait pu être suivie sur ce point par le Tribunal administratif de Marseille qui pour juger que l’interdiction de lotir édictée dans cette affaire par le POS n’était pas applicable à une déclaration préalable pourtant formulée au titre de l’article R.421-23 a) du Code de l’urbanisme mais se rapportant à une opération de divisions foncières ne constituant pas un lotissement au sens de l’article R.315-1 en vigueur à la date d’approbation de ce document local d’urbanisme (TA. Marseille, 12 janvier 2001, Raffini & autres).

    Il est vrai que la démarche inverse n’aurait eu que peu d’incidence pour ce qui concerne non pas leur applicabilité à la décision contestée mais la légalité des dispositions du POS en cause dès lors que :

    • la finalité des divisions foncières relevant de la procédure de lotissement sous l’article R.315-1 du Code de l’urbanisme n’était pas fondamentalement différente de celle résultant de l’article L.442-1 alors en vigueur ;
    • l’article L.123-1 dans sa dernière rédaction demeurant applicable au POS (art. L.123-19 ; C.urb) n’était pas si éloigné sur ce point de celles citées par le Conseil d’Etat dans cette affaire.

    Il n’en demeure pas moins que, d’une façon générale, il semble donc falloir en déduire que les notions du Code de l’urbanisme que peuvent le cas échéant utilisées les POS ou les PLU doivent être interprétées au regard de la définition retenue pas ce code dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision individuelle d’urbanisme en litige et non pas donc en considération de celles qui pouvaient être applicables à la date d’approbation du document d’urbanisme en cause.

    Pour le reste, la solution retenue par le Conseil d’Etat dans cette affaire procède donc de l’analyse selon laquelle seul le législateur peut fixer des limites au droit de lotir en tant que démembrement du droit de propriété alors qu’aucune disposition législative, et notamment pas l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme, ne confère cette compétence aux auteurs des POS et des PLU.

    Force est d’admettre que cette conclusion n’était pas si évidente.

    D’une part, et d’une façon générale, on peut relever que l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme disposait, dans sa version en vigueur à la date de la décision en litige, que « les plans locaux d'urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions. A ce titre, ils peuvent : 1° Préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être fait ou la nature des activités qui peuvent y être exercées ».

    Il s’ensuit donc que :

    • malgré l’usage du « notamment », l’interdiction des lotissements ou la limitation du droit de diviser ne peut pas être considérée comme une règle tendant à la réalisation ne serait que de l’un des objectifs de l’article L.121-1 du Code de l’urbanisme ;
    • bien que par définition indissociable d’un projet d’implantation de constructions au sens de l’article L.123-1 précité, une division foncière constitutive lotissement n’en est pas pour autant un usage du sol au sens de ce même article.

    De même, si l’ancien comme l’actuel article L.123-5 du Code de l’urbanisme prévoient que le règlement de POS ou du PLU est opposable non pas seulement pour « l’exécution de tous travaux » mais également « pour la création de lotissement » ainsi distinctement visée, ce n’est donc pas pour autant que les auteurs de ces règlements sont habilités à prévoir des règles ayant spécifiquement pour objet d’encadrer le droit de lotir en tant que tel.

    D’autre part, et plus spécifiquement cet arrêt va a priori dans le sens contraire d’une récente jurisprudence du Conseil d’Etat, du moins pour ce qu’il précise que les POS et les PLU ne peuvent pas même « limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder (…) à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments ».

    Dans cette précédente affaire, le Conseil d’Etat avait en effet jugé que :

    « Considérant qu'en vertu du 12° de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la délibération attaquée, les plans locaux d'urbanisme peuvent " fixer une superficie minimale des terrains constructibles lorsque cette règle est justifiée par des contraintes techniques relatives à la réalisation d'un dispositif d'assainissement non collectif ou lorsque cette règle est justifiée pour préserver l'urbanisation traditionnelle ou l'intérêt paysager de la zone considérée " ; que sur la base de ces dispositions, le conseil municipal de Saint-Germain-en-Laye a adopté, par délibération du 18 octobre 2005, un article UE 5-2 du règlement du plan local d'urbanisme, fixant la superficie minimale des terrains constructibles à 600 m2 dans les zones UE a) et UE a1) ; que pour annuler, dans cette mesure, cette délibération, la cour administrative d'appel de Versailles s'est fondée sur la circonstance que cette règle n'était susceptible de concerner qu'un seul terrain, celui appartenant à M. A, qui se trouvait en outre être le seul terrain non bâti de la zone UE a1) ; qu'en conférant ainsi à l'article UE 5-2 cette seule portée, alors que cette disposition a également pour vocation de faire obstacle, pour l'ensemble des terrains des deux zones, à d'éventuels projets de détachement de parcelles aux fins d'édification de nouveaux bâtiments sur des terrains d'une superficie inférieure à 600 m2, la cour a commis une erreur de droit ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'arrêt attaqué doit être annulé ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune, qui n'est pas la partie perdante, la somme demandée à ce titre par M. A ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. A le versement à la COMMUNE DE SAINT-GERMAIN-EN-LAYE de la somme de 3 000 euros au titre des mêmes dispositions » (CE. 18 novembre 2011, Cne de Saint-Germain-en-Laye, req. n°333.937) ;

    et ce, en suivant les conclusions de son Rapporteur Public qui avait estimé qu’en « permettant au 12° de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme aux documents locaux d’urbanisme de prévoir une règle de superficie minimale des parcelles constructibles, le législateur avait précisément pour intention de faciliter, dans des situations le justifiant, la préservation d’un habitat peu dense, aux parcelles régulières et paysagères, en faisant obstacle non seulement à la densification de l’habitat mais aussi au morcellement excessif des parcelles » (BJDU, n°2/2012, p.121).

    Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat avait donc reconnu à l’article 5 des règlements locaux d’urbanisme une finalité aboutissant à limiter, certes dans des cas particuliers, le droit de diviser en vue de l’implantation de bâtiments et ce, en considération d’une volonté du législateur qui ne ressortait cependant par clairement de l’article L.123-1 12° du Code de l’urbanisme.

    Précisément, ce précédent arrêt amène à s’interroger non pas tant sur la survivance de la solution ainsi retenue que sur l’arrêt objet de la présente note en ce qu’il vise non pas l’interdiction de lotir mais le fait « d’interdire par principe les lotissements ».

    En première analyse, on pourrait en effet être tenté de considérer que les POS et les PLU pourraient, dans une certaine mesure « par exception », interdire les lotissements dans des secteurs spécifiques et/ou certains lotissements d’une nature ou d’une importance particulière. Cette analyse semble cependant difficile à suivre dès lors que :

    • une telle interdiction n’est certes pas de principe mais aboutit néanmoins à « limiter la faculté reconnue aux propriétaires de procéder (…) à la division d'une ou de plusieurs propriétés foncières en vue de l'implantation de bâtiments » ;
    • à s’en tenir aux fondements de l’analyse du Conseil d’Etat, les auteurs des POS et des PLU ne sont tout simplement pas compétents pour limiter l’exercice du droit de lotir, fut-ce par exception et dans ces cas particuliers.

    En revanche, il nous semble que le fondement de l’analyse du Conseil d’Etat et la rédaction de cet arrêt pourraient permettre de conclure, notamment, au maintien de la jurisprudence « Cne de Saint-Germain » précitée et, donc, à la possibilité d’encadrer la constitution des lotissements non pas par des règles se rapportant directement de par leur objet propre au droit de diviser mais par des règles d’effet équivalent uniquement relatives à l’implantation des constructions, tel les dispositions d’un article 5 d’un règlement local d’urbanisme se combinant à une exception à l’article R.123-10-1 ; du moins si l’on admet qu’une telle exception ne limite pas elle-même le droit de lotir…

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat associé au barreau de Paris

    Cabinet Frêche & Associés