La connaissance par le Maire de la caducité de la promesse de vente du terrain construire consentie par la Ville peut-elle motiver le rejet de la demande de permis ?
Dans la mesure où l'autorité saisie d'une demande de permis de construire doit rejeter la demande quand elle dispose au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose d'une des qualités prévues par l'article R.423-1 du Code de l'urbanisme, le Maire (qui n'est pas de ce seul fait intéressé au sens de l'article L.442-7) peut légalement rejeter la demande au motif tiré de la caducité de la promesse de vente du terrain consentie par la Commune.
CAA. Lyon, 19 novembre 2020, req. n°19LY04777 :
"7. En premier lieu, aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : " Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ". En vertu du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code applicable au litige, la demande de permis de construire comporte " l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ".
8. Il résulte de ces dispositions que les demandes de permis de construire doivent seulement comporter l'attestation du pétitionnaire qu'il remplit les conditions définies à l'article R. 423-1 cité ci-dessus. Les autorisations d'utilisation du sol, qui ont pour seul objet de s'assurer de la conformité des travaux qu'elles autorisent avec la législation et la réglementation d'urbanisme, étant accordées sous réserve du droit des tiers, il n'appartient pas à l'autorité compétente de vérifier, dans le cadre de l'instruction d'une demande de permis, la validité de l'attestation établie par le demandeur. Ainsi, sous réserve de la fraude, le pétitionnaire qui fournit l'attestation prévue à l'article R. 423-1 du code doit être regardé comme ayant qualité pour présenter sa demande. Il résulte de ce qui précède que les tiers ne sauraient utilement invoquer, pour contester une décision accordant une telle autorisation au vu de l'attestation requise, la circonstance que l'administration n'en aurait pas vérifié l'exactitude.
9. Toutefois, lorsque l'autorité saisie d'une telle demande de permis de construire vient à disposer au moment où elle statue, sans avoir à procéder à une mesure d'instruction lui permettant de les recueillir, d'informations de nature à établir son caractère frauduleux ou faisant apparaître, sans que cela puisse donner lieu à une contestation sérieuse, que le pétitionnaire ne dispose, contrairement à ce qu'implique l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme, d'aucun droit à la déposer, il lui revient de refuser la demande de permis pour ce motif.
10. Il est constant que la demande de permis de construire comportait un document justifiant que la SARL IDCOM remplissait les conditions définies à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme. Il ressort toutefois de la promesse d'achat du 4 décembre 2015, dont se prévaut la requérante, concernant la cession des parcelles de terrain en litige, que celle-ci a été conclue entre la commune d'Autun et la SARL IDCOM, sous condition de délai expirant le 4 décembre 2017 à 16 heures, cet acte précisant que " le BENEFICIAIRE (la commune) de la présente promesse d'achat devra faire connaître son acceptation de la présente promesse au plus tard à cette date par lettre adressée au notaire du PROMETTANT ci-après nommé. (...) A défaut d'acceptation écrite dans ce délai, la présente promesse d'achat sera caduque. ". Il ressort des pièces du dossier que la commune d'Autun n'a jamais accepté la promesse d'achat par écrit et qu'elle a expressément dénoncé cet " engagement " en adressant, le 13 février 2018, un courrier au pétitionnaire lui indiquant qu'elle ne l'autorisait pas à présenter une demande de permis de construire sur le terrain en litige. Par un courrier du même jour, complété le 13 mars 2018, elle a également informé le service instructeur de la communauté de communes du Grand Autunois Morvan de son opposition à cette demande du pétitionnaire. La requérante ne peut sérieusement soutenir que la promesse d'achat n'était pas devenue caduque en l'absence de délibération de la commune actant de cette caducité ou en se prévalant du courrier précité du 13 février 2018 du maire de la commune qui rappelle clairement que la promesse d'achat est devenue caduque et qu'elle n'est plus autorisée à présenter une demande de permis de construire sur le terrain en cause. Ainsi, à la date à laquelle il s'est prononcé, le maire de la commune d'Autun avait connaissance, de toute évidence, sans avoir à prendre aucune mesure d'instruction en ce sens, que le pétitionnaire ne remplissait pas les conditions prévues à l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme pour solliciter un permis de construire sur le terrain en litige. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir qu'un tel motif ne pouvait justifier le refus qui lui a été opposé.
11. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 4227 du code de l'urbanisme : " Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé au projet faisant l'objet de la demande de permis ou de la déclaration préalable, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour prendre la décision. "
12. Si la requérante soutient que la commune a revendu les terrains à la société Gamm Vert en vue d'une exploitation commerciale, que le maire a informé le service instructeur de la caducité de la promesse d'achat et qu'il n'a jamais soumis au conseil municipal la levée ou non de l'option de la promesse d'achat, ces circonstances ne suffisent pas à faire regarder le maire de cette commune comme intéressé, soit en son nom personnel, soit en qualité de mandataire, à la délivrance de ce permis, au sens des dispositions précitées."
Patrick E. DURAND