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Domaine public & urbanisme

  • Tout élément du projet empiétant sur le domaine public relève-t-il de l'article R.431-13 du Code de l'urbanisme ?

    CE. 25 septembre 2019, Association "Autant en emporte le vent", req. n°417.870 :

    "Aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : " Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. " Aux termes de l'article R. 421-4 du même code : " Sont (...) dispensés de toute formalité au titre du présent code, en raison de leur nature, les canalisations, lignes ou câbles, lorsqu'ils sont souterrains. " Il résulte de ces dernières dispositions que les câbles souterrains destinés à raccorder les éoliennes entre elles ou au poste de livraison qui permet d'acheminer l'électricité produite vers le réseau public de distribution ne sont pas une construction au sens des dispositions de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme. Il résulte de ce qui précède que la cour administrative d'appel de Lyon, qui a porté sur les faits de l'espèce une appréciation souveraine exempte de dénaturation, n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que la circonstance que des travaux sur le domaine public routier seraient nécessaires pour enfouir les câbles destinés à assurer le raccordement des éoliennes objets du permis attaqué au réseau public de distribution n'imposait pas de faire figurer au dossier de demande du permis de construire les éoliennes en cause une pièce exprimant l'accord du gestionnaire de la voirie pour engager une procédure d'autorisation d'occupation du domaine public"

  • L'engagement de la Ville d'acquérir une bande du terrain à construire au droit de la voie en assurant la desserte décale-t-il l'alignement au sens de l'article 6 du règlement de PLU ?

    Même lorsque l'article 6 du règlement de POS applicable vise l'alignement futur de la voie bordant le terrain à construire, l'engagement y compris ferme de la Ville d'acquérir une bande de ce terrain ne décale pas la limite à prendre en compte en l'absence d'une décision d'alignement relevant de l'article L.112-1 du Code de la voirie routière.  

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  • La légalité de l’acte de création d’une ZAC n’est pas subordonnée au respect du POS/PLU alors en vigueur. Mais qu'en est-il du dossier de réalisation de la zone ?

    Si les équipements et aménagements d'une ZAC doivent être réalisés dans le respect des dispositions du règlement du PLU ou du POS applicables au moment de leur réalisation, ces mêmes règles ne s'imposent pas en revanche à l'acte de création de la zone.

    CE. 26 juillet 2011, Sté SAVI , req. n°320.457


    Voici un arrêt qui permet de répondre définitivement à une question déjà posée ici : l’acte de création d'une ZAC doit-il respecter les dispositions du POS/PLU en vigueur à la date d’approbation de cet acte.

    La réponse apportée à cette question par le Conseil d’Etat est toutefois sans surprise mais il faut dire que celle-ci procédait au premier chef du prononcé à la même époque de deux arrêts en totale contradiction sur ce point puisque le 30 juillet 2008 la Cour administrative d’appel de Bordeaux avait jugé que :

    « Considérant, toutefois, que si - ainsi qu'il a été dit ci-dessus - la loi du 18 décembre 2000 a supprimé le deuxième alinéa de l'article L. 311-1 du code de l'urbanisme antérieurement applicable, limitant la création des ZAC à l'intérieur des zones urbaines et des zones d'urbanisation futures des plans d'occupation des sols, il résulte de l'article précité, éclairé par les travaux préparatoires de la loi, que celle-ci n'a pas entendu affranchir la création des zones d'aménagement concerté du respect des règles d'urbanisme en vigueur, ainsi qu'en dispose, d'ailleurs, l'article R. 311-6 du code de l'urbanisme pour la réalisation de ces zones, mais assouplir les conditions de leur délimitation ; qu'il ressort des pièces du dossier que la quasi-totalité des terrains inclus dans le périmètre de la ZAC du « Parc de la vallée de l'Eyre », faisant plus de deux cents hectares, étaient classés en zone NCf du plan d'occupation des sols approuvé constitué, selon ce document d'urbanisme, « d'espaces d'activités exclusivement forestières non constructibles » ; qu'ainsi, la création d'une telle ZAC a méconnu le plan d'occupation des sols approuvé, le 10 avril 1995, de la COMMMUNE DE MIOS, qui ne saurait faire valoir utilement qu'à la date de la décision attaquée, la révision partielle de ce document avait été prescrite » (CAA. Bordeaux, 30 octobre 2008, Cne de Mios, req. n°07BX00045)

    Alors que le 8 octobre 2008 la Cour administrative d’appel de Paris, censurant ainsi l’analyse du Tribunal administratif de Melun, devait pour sa part considérer que :

    « Considérant que l'acte de création d'une ZAC prévu par l'article L. 311-1 précité a pour seul objet de définir le périmètre et le programme de l'opération ; que la délibération qui approuve lesdits périmètre et programme n'a pour effet ni d'autoriser une quelconque construction ni de définir des règles d'urbanisme ; que, depuis les modifications apportées aux dispositions du code de l'urbanisme applicables aux ZAC par l'article 7 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, rien n'interdit que la réalisation des équipements prévus dans une telle zone ne soit pas compatible avec le plan d'urbanisme en vigueur lors de la création de cette zone, cette réalisation ne pouvant alors intervenir qu'après la modification de ce plan ; que dans ces conditions, le Tribunal administratif de Melun a commis une erreur de droit en jugeant qu'une délibération créant une ZAC était illégale du seul fait que son rapport de présentation faisait état d'un programme de construction incompatible avec les dispositions du règlement annexé au plan d'occupation des sols en vigueur » (CAA. Paris, 8 juillet 2008, Cne de Boissise-le-Roi, req. n°07PA03281).

    Précisément, c’est à l’encontre de ce second arrêt que portait le pourvoi examiné par le Conseil d'Etat et objet du commentaire de ce jour.

    Ainsi, annulant l’arrêt d’appel en raison de sa méconnaissance du champ d’application de la procédure d’étude d’impact, le Conseil d’Etat en a néanmoins repris l’économie générale pour ce qui concerne la réponse apportée à la question ici posée pour à son tour censurer le jugement du Tribunal administratif de Melun au motif suivant :

    « Considérant qu'il résulte de l'article L. 311-1 du code de l'urbanisme applicable en l'espèce qui, à la différence de ce qui résultait de l'état du droit antérieur à l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ne limite plus la possibilité de créer des zones d'aménagement concerté, sur les territoires couverts par un plan d'occupation des sols ou un plan local d'urbanisme, aux seules zones urbaines ou d'urbanisation future, que : Les zones d'aménagement concerté sont les zones à l'intérieur desquelles une collectivité publique ou un établissement public y ayant vocation décide d'intervenir pour réaliser ou faire réaliser l'aménagement et l'équipement des terrains (...) / Le périmètre et le programme de la zone d'aménagement concerté sont approuvés par délibération du conseil municipal ou de l'organe délibérant de l'établissement public de coopération intercommunale (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 311-5 du même code, dans sa rédaction issue du décret du 27 mars 2001 : L'acte qui crée la zone d'aménagement concerté en délimite le ou les périmètres. Il indique le programme global prévisionnel des constructions à édifier à l'intérieur de la zone (...) ; qu'aux termes du premier alinéa de l'article R. 311-6 de ce code issu du même décret : L'aménagement et l'équipement de la zone sont réalisés dans le respect des règles d'urbanisme applicables. Lorsque la commune est couverte par un plan local d'urbanisme, la réalisation de la zone d'aménagement concerté est subordonnée au respect de l'article L. 123-3 ; qu'il résulte de l'ensemble de ces dispositions que, si les équipements et aménagements d'une zone d'aménagement concerté doivent être réalisés dans le respect des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme ou du plan d'occupation des sols applicables au moment de leur réalisation, ces mêmes règles ne s'imposent pas, en revanche, à l'acte de création de la zone ;
    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que c'est à tort que le tribunal administratif s'est fondé sur la violation des prescriptions de l'article 1NA5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Boissise-le-Roi pour annuler la délibération du 26 février 2003 du conseil municipal de cette commune mentionnée précédemment
    ».


    Dans sa rédaction antérieure à la loi du 13 décembre 2000, l’article L.311-1 du Code de l’urbanisme disposait en effet que « lorsqu'un plan d'occupation des sols a été rendu public ou approuvé dans des communes, parties de communes ou ensemble de communes, des zones d'aménagement concerté ne peuvent y être créées qu'à l'intérieur des zones urbaines ou des zones d'urbanisation future délimitées par ce plan » : Il s’ensuivait qu’à cet égard, l’acte de création d’une ZAC devait nécessairement être conforme au POS pour ce qui concerne sa localisation au regard du zonage opéré par ce dernier.

    Il reste que non seulement cet alinéa a donc été supprimé par la loi « SRU » mais qu’en outre, son décret d’application du 27 mars 2001 a inséré un article R.311-6 disposant que « l'aménagement et l'équipement de la zone sont réalisés dans le respect des règles d'urbanisme applicables. Lorsque la commune est couverte par un plan local d'urbanisme, la réalisation de la zone d'aménagement concerté est subordonnée au respect de l'article L. 123-3 » et induisant donc clairement que c’est la réalisation qui se doit d’être conforme au règlement local d’urbanisme ; ce que tend d’ailleurs a confirmé implicitement l’article L.123-3.

    Or, non seulement l’article R.311-6 du Code de l’urbanisme ne vise que la réalisation de la ZAC mais cet article est le premier de la section du code consacrée à la « réalisation de la zone d’aménagement concerté » et de relève donc pas de sa précédente section pour sa part relative à la « création de la zone d’aménagement concerté » ; étant rappelé qu’à la lecture des conclusions du Commissaire du gouvernement dans cette affaire, c’est la place de l’article R.311-6 qui explique la solution retenue par le Conseil d’Etat en jugeant qu’une convention d’aménagement ne pouvait être signé avant l’adoption du dossier de création puisque les modes de réalisation de la ZAC sont définis par cet article qui ne relève pas de la section consacrée à la création de la zone (CE. 8 décembre 2004, Sté EIFFEL-DISTRIBUTION, req. n° 270.432) .

    De ce fait, nous voyons donc mal comment la Cour administrative d’appel de Bordeaux a pu estimé que la loi « SRU » « n'a pas entendu affranchir la création des zones d'aménagement concerté du respect des règles d'urbanisme en vigueur, ainsi qu'en dispose, d'ailleurs, l'article R. 311-6 du code de l'urbanisme pour la réalisation de ces zones » et, ainsi, établir l’intention du législateur sur les conditions de légalité de l’acte de création d’une ZAC au regard de dispositions d’un décret intéressant la réalisation de cette zone…

    Mais surtout il résulte notamment de l’article R.311-5 visé par le Conseil d’Etat que l’acte de création d’une ZAC est un document de pure planification opérationnelle définissant le périmètre et le programme de l'opération à réaliser dans le cadre de cette zone mais qui, en revanche, n’a pour objet ni d’édicter des règles d’urbanisme, ni de permettre la réalisation de travaux.

    Or, les POS/PLU constituent, aux côtés de la carte communale, la norme la moins élevée de la hiérarchie du droit de l’urbanisme et en toute hypothèse leurs prescriptions ne s’imposent en principe qu’aux travaux, installations aménagements constitutifs d’occupations et d’utilisations des sols ; l’alinéa 2 de l’ancien article L.311-1 du Code de l’urbanisme ayant constitué à cet égard l’une des rares exceptions à ce principe.

    Dès lors qu’un acte de création de ZAC ne permet pas la réalisation de travaux et d’aménagements et qu’un POS/PLU ne régit que les travaux et les aménagements, on voyait donc mal pourquoi cet acte devrait, malgré la suppression de l’alinéa 2 susvisé, être conforme au règlement local d’urbanisme en vigueur à sa date d’approbation alors que pour leur part les articles L.123-3 et R.311-6 du Code de l’urbanisme ne visent que la réalisation de la ZAC.

    Sur ce point, l’arrêt commenté ce jour a d’ailleurs indirectement et implicitement censuré l’arrêt de la Cour bordelaise en soulignant « qu'il résulte de l'article L. 311-1 du code de l'urbanisme applicable en l'espèce qui, à la différence de ce qui résultait de l'état du droit antérieur à l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, ne limite plus la possibilité de créer des zones d'aménagement concerté, sur les territoires couverts par un plan d'occupation des sols ou un plan local d'urbanisme, aux seules zones urbaines ou d'urbanisation future, que (…) ».

    Pour autant, l’arrêt commenté génère une autre interrogation relative au stade de la procédure de ZAC auquel le POS/PLU devient opposable.

    En effet, si nonobstant l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux, il était majoritairement considéré que le POS/PLU n’était pas opposable à l’acte de création de ZAC, les dispositions combinées des articles L.123-3 et R.311-6 du Code de l’urbanisme étaient le plus souvent interprétées comme signifiant que lorsque le programme des travaux et des aménagements de la ZAC n’est pas conforme à ce document « il est nécessaire de réviser ce document avant d’élaborer le dossier de réalisation de la ZAC » (Dict. Perm. Construction, « Les ZAC », fasc. 149, n° 87).

    Il reste que dans l’arrêt commenté, le Conseil d’Etat s’est prononcé sur l’applicabilité du POS/PLU à l’acte de création de la ZAC en l’opposant à la réalisation de cette zone mais ce, en précisant « que, si les équipements et aménagements d'une zone d'aménagement concerté doivent être réalisés dans le respect des dispositions du règlement du plan local d'urbanisme ou du plan d'occupation des sols applicables au moment de leur réalisation, ces mêmes règles ne s'imposent pas, en revanche, à l'acte de création de la zone ».

    Il faut en effet rappeler que l’article R.311-6 du Code de l’urbanisme dispose que « l'aménagement et l'équipement de la zone sont réalisés dans le respect des règles d'urbanisme applicables. Lorsque la commune est couverte par un plan local d'urbanisme, la réalisation de la zone d'aménagement concerté est subordonnée au respect de l'article L. 123-3 » et, par voie de conséquence, ne vise que la réalisation de la zone et non pas précisément le dossier de réalisation.

    Or, pour sa part, l’article L.123-5 du Code de l’urbanisme dispose que « le règlement et ses documents graphiques sont opposables à toute personne publique ou privée pour l'exécution de tous travaux, constructions, plantations, affouillements ou exhaussements des sols, pour la création de lotissements et l'ouverture des installations classées appartenant aux catégories déterminées dans le plan ». Et c’est d’ailleurs au visa l’article précité que la préalablement aux cours bordelaise et parisienne, la Cour administrative d’appel de Nantes avait pour sa part jugé que : « considérant que M. et Mme X ne peuvent utilement invoquer les dispositions du premier alinéa de l'article L. 122-2 du code de l'urbanisme concernant les conditions d'ouverture à l'urbanisation d'une zone à urbaniser, la délibération contestée, approuvant le dossier de création de la “ZAC Ouest Centre Ville”, n'ayant pas pour objet, ni pour effet d'ouvrir à l'urbanisation le secteur en cause inclus en zone Na d'urbanisation future au plan d'occupation des sols communal ; que, de même, ne peuvent être utilement invoquées les dispositions des articles L. 123-5 et R. 311-6 du code de l'urbanisme, lesquelles ne seront opposables à cette opération d'urbanisme qu'au stade de la réalisation de ses aménagements et équipements à la suite de l'approbation, par l'organe délibérant de la personne publique auteur du projet, du dossier de réalisation prévu par l'article R. 311-7 ». (CAA. Nantes, 4 mars 2008, M. X..., req. n°07NT00909).

    En résumé, il est donc clair que le POS/PLU n’est pas opposable à l’acte de création de ZAC mais il n’est pas même si certain que son respect s’impose au dossier de réalisation.

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Tout change rien ne change : quel est l’apport de l’article R.431-13 du Code de l’urbanisme ?

    Dès lors que le projet de construction n’est pas conforme à l’affectation du domaine public sur lequel il empiète, le permis de construire ne peut être légalement délivré sans déclassement préalable du terrain.

    CAA. Bordeaux, 28 octobre 2010, Mme Sylviane X., req. n°10BX00075


    Antérieurement au dispositif entrée en vigueur le 1er octobre 2007, l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme disposait que « la demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain, soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation dudit terrain pour cause d'utilité publique. (…). Lorsque la construction est subordonnée à une autorisation d'occupation du domaine public, l'autorisation est jointe à la demande de permis de construire ».

    Cette autorisation d’occupation domaniale était requise quelles que soient la nature et l’importance de l’empiètement sur le domaine public (CE. 22 novembre 1995, SCI du 6, rue de Linière, BJDU, n°6/1995 ; CE. 20 mai 1994, C.I.L de Champvert, Rec., p.1250).

    En outre, elle devait nécessairement être jointe au dossier de demande de permis de construire. A défaut, le permis de construire était illégal et encourrait l’annulation, y compris lorsque cette autorisation avait effectivement été obtenue avant le permis de construire et avait été délivrée par la même autorité que celle ayant octroyé ce permis (CAA. Bordeaux, 19 mai 2008, SCI Parc de Fondargent, req. n°06BX01188).

    Surtout, ce dispositif amenait le juge administratif à contrôler la validité et le caractère adéquat de l’autorisation domaniale obtenue et, plus généralement, la compatibilité entre le projet de construction autorisé et l’affectation du domaine public sur lequel il portait en tout ou partie (CE. 23 avril 2003, Comité d’intérêt de Quartier Vallon des Auffes Corniche, req. n°249.918).

    Ainsi, lorsque le projet ne correspondait pas l’affectation du domaine public, le permis de construire était voué à l’annulation en cas de contentieux sur ce point. Il s’ensuivait qu’en pareil cas, il était nécessaire que le terrain soit déclassé préalablement à la date de délivrance du permis de construire ou, à tout le moins, que le principe de ce déclassement ait été acté à cette date (CE. 23 avril 2003, Comité d’intérêt de Quartier Vallon des Auffes Corniche, req. n°249.918).

    Mais comme on le sait, la règle générale issue de l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme a été bouleversée par le dispositif entrée en vigueur le 1er octobre 2007 puisque s’il résulte de l’article R.423-1 du Code de l’urbanisme que le permis de construire a encore vocation à sanctionner le « titre habilitant à construire » du pétitionnaire, il résulte également de l’article R.431-5 que ce dernier n’a cependant plus qu’à attester de ce titre et ce, par la seule signature du formulaire « CERFA ».

    Ce principe connait cependant une forme d’exception puisque l’article R.431-13 précise toutefois que « lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ».

    La finalité poursuivie en la matière par les rédacteurs de ces articles est ainsi parfaitement résumée par le commentaire de l’article précité opérée par le Code de l’urbanisme 2010 des éditions Dalloz :

    « Les anciennes dispositions de l’article R.421-1-1 imposaient de joindre l’autorisation d’occupation du domaine public à la demande de permis de construire. Cette autorisation d’occupation du domaine public est en principe délivrée pour une durée déterminée ; mais le silence de cette autorisation sur sa durée ne la rend pas illégale. En effet, il ne fait pas échec à son caractère précaire, lui-même fondé sur le principe d’inaliénabilité, pour un motif d’intérêt général, à cette autorisation. La jurisprudence, particulièrement abondante, sanctionnait fréquemment la méconnaissance de ces dispositions. De manière schématique, elle s’assurait que le pétitionnaire était bien en possession d’une telle autorisation, régulièrement délivrée et pouvant être regardée comme constituant un titre approprié à la nature de l’ouvrage projeté. Le juge se prononçait donc également sur la régularité du titre. Selon l’article L.233-1 du code général de la propriété des personnes publiques, sont portés devant la juridiction administrative les litiges relatifs aux autorisations ou contrats comportant occupation du domaine public, quelle que soit leur forme ou leur dénomination, accordés ou conclus par les personnes publiques ou leurs concessionnaires, etc. De manière plus générale, il est de jurisprudence constante que les litiges nés de l’occupation sans titre du domaine public, que celle-ci résulte de l’absence de tout titre ou de l’expiration, pour quelque cause que ce soit, du titre précédemment détenu, relèvent (sauf dans le cas de voie de fait ou dans celui où s’élève une contestation sérieuse en matière de propriété) de la compétence de la juridiction administrative.
    Ces contentieux de régularité du titre ne devraient toutefois plus être portés dans les litiges portant sur la régularité des autorisations de construire. En effet, les nouvelles dispositions se bornent à exiger la production d’une pièce exprimant l’accord du gestionnaire du domaine pour engager une telle procédure d’autorisation. Le principe d’indépendance des législations, largement consacré et organisé par la réforme, sera ainsi mieux respecté
    ».


    Sauf que non…

    Dans notre affaire, le pétitionnaire avait en effet obtenu un permis de construire portant pour partie sur une parcelle relevant du domaine public routier. C’est sur ce point que cette autorisation devait être attaquée puis annulée et ce au motif suivant :

    « Considérant qu'aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. ; qu'aux termes de l'article R. 423-1 du même code : Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux ; (...) ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de construction de la SCI le Mas des Bonnes Méditerranée empiète sur une portion de la voie communale affectée à la circulation publique, longeant la propriété de cette société ; qu'il est constant que cette voie communale fait partie du domaine public de la commune de Rodelle ; que compte tenu de l'emprise définitive sur le domaine que constitue l'habitation projetée par la SCI le Mas des Bonnes Méditerranée, cette construction ne pouvait faire l'objet de la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public citée par l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, aucune autorisation d'édifier un bâtiment ne pouvait être accordée sans qu'il ait été préalablement procédé au déclassement de cette portion du domaine public communal ; qu'aucune procédure de déclassement ni aucune délibération du conseil municipal de Rodelle donnant son accord à une telle procédure n'est intervenue ; que, par suite, Mme est fondée à soutenir que l'arrêté du 30 septembre 2008 par lequel le maire de Rodelle a délivré à la SCI le Mas des Bonnes Méditerranée un permis de construire est entaché d'illégalité
    ».


    En se fondant sur les dispositions combinées des articles R.423-1 et R.431-13 du Code de l’urbanisme et surtout en soulignant que « cette construction ne pouvait faire l'objet de la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public citée par l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme » la Cour a ainsi adopté une solution strictement identique à celle qu’aurait appelé l’ancien article R.421-1-1 : le projet n’étant pas conforme à l’affectation du domaine public sur lequel il portait partiellement, la procédure à suivre n’était pas la production de la pièce prévue par l’article R.431-13 mais la procédure de déclassement préalable de cette dépendance domaniale ou, à tout le moins, l’engagement d’une telle procédure à la date de délivrance.

    Reste donc l’apport strictement formel de ce dispositif : lorsqu’au regard de la nature du projet le pétitionnaire peut valablement obtenir une autorisation d’occupation du domaine public, il n’a plus à l’obtenir et à la produire au dossier avant la délivrance du permis de construire, il doit seulement justifier à cette date « l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ».

    Mais même sur ce point la portée de cette innovation textuelle doit être relativisée puisque ce dispositif acte et s’inspire pour partie d’une pratique jurisprudentielle constituant l’une des rares entorses au principe selon lequel la légalité d’un permis de construire s’apprécie à sa date de délivrance puisque le juge administratif admettait de valider un permis de construire dont le titulaire ne disposait pas d’un titre à la date d’obtention de cette autorisation dès lors qu’à cette date il justifiait d’un engagement du propriétaire suffisamment ferme pour considérer qu’il serait bien ultérieurement « titré »…

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés