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Permis de construire - Page 12

  • Comment établir l’assujettissement éventuel d’un projet à la procédure du permis de construire valant division ? Peut-on régulariser un permis de construire délivré en méconnaissance des articles R.421-7-1 (anc.) ou R.431-24 (nouv.) par un modificatif ?

    Même en l’absence d’indication précise dans le dossier produit par le pétitionnaire, l’assujettissement de la demande à la procédure de permis de construire valant division peut se déduire de la seule conception du projet. Mais lorsque le dossier initial ne comporte pas les pièces conséquemment requises, ce vice peut être régularisé par un simple « modificatif ».

    CAA. Lyon, 17 août 2010, Louis B., req. n°08LY02140 / CAA. Nancy, 10 juin 2010, Mme Anne A., req. n°09NC00357



    Aujourd’hui, deux arrêts offrant une solution somme toute classique mais nous permettant d’aborder une question jamais traitée ici : la régularisation d’une autorisation initiale au regard de la procédure du permis de construire valant division.

    ensemble pavillonnaire.jpgDans la première affaire (req. n°08LY02140), un promoteur avait obtenu sur deux terrains distincts deux permis de construire portant sur la réalisation d’ensemble d’habitations ; le premier prévoyant quatre maisons individuelles, le second en prévoyant huit.

    Mais chacun de ces deux permis devait être contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme ; les requérants soutenant que le projet impliquait la division du terrain d’assiette du terrain à construire alors que le dossier ne comportait pas les pièces requises en pareil cas par cet article.

    La procédure du permis de construire valant division n’est en effet pas une faculté mais une obligation. Dès lors que le projet relève du champ d’application de l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme, le pétitionnaire doit produire à son dossier les pièces conséquemment exigibles.

    Par voie de conséquence, le seul fait qu’un dossier de permis de construire ne comporte pas les pièces requises ne signifie pas nécessairement que son projet ne relève pas de la procédure de permis de construire valant division.

    Or, s’il est facile d’établir si le projet implique la construction de plusieurs bâtiments sur le même terrain, c’est-à-dire sur la même unité foncière, il est moins évident de déterminer si sa réalisation implique une division foncière du terrain.

    En effet, le seul fait qu’un même projet implique la réalisation de plusieurs bâtiments sur un même terrain ne suffit pas à établir la division foncière de ce dernier. En outre, dans le cadre d’un projet soumis à l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme, la division éventuelle du terrain n’a pas vocation à être réalisée avant l’obtention du permis de construire puisque c’est ce dernier qui autorise cette division. Au surplus, l’exercice d’un recours en annulation se traduisant souvent par le gel de la réalisation du projet et de sa commercialisation, il est pour le moins rare que ces divisions aient été réalisées au moment où le juge est amené à se prononcer sur la requête.

    S’agissant du premier permis de construire attaqué dans cette affaire, cette question fut toutefois facile à trancher :

    « Considérant, d'une part, qu'il est constant que la rubrique n° 363, relative à l' Utilisation principale envisagée , du formulaire de la demande de permis de construire du lot B, lequel prévoit la construction de quatre maisons, indique qu'une vente ou une location-vente est envisagée ; qu'en défense, la ville de Dijon et la SARL La Côte d'Orienne ne contestent pas que l'ensemble immobilier projeté doit être ultérieurement régi par les dispositions de la loi susvisé du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ; qu'un tel régime comporte une division en parties affectées à l'usage de tous et en parties affectées à l'usage exclusif des copropriétaires, chacun d'eux disposant d'un droit de jouissance privative exclusif sur sa maison individuelle et le terrain attenant ; qu'ainsi, la construction par ladite société de plusieurs maisons d'habitation, pour un seul propriétaire, mais destinées dans l'avenir à être vendues à des propriétaires différents, entre dans le champ d'application de l'article R. 421-7-1 précité du code de l'urbanisme ; qu'il est constant que le dossier de la demande de permis ne comporte pas la note de présentation prévue à l'article R. 315-5 a) du code de l'urbanisme, auquel renvoie l'article R. 421-7-1 ; qu'il est également constant que les différentes pièces, relatives à la constitution d'une association syndicale, prévues à l'article R. 315-6 dudit code, auquel renvoie également l'article R. 421-7-1, n'ont pas été produites par le pétitionnaire, alors pourtant que des équipements communs sont prévus ; qu'en conséquence, M. B et Mme B sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué qui autorise le lot B a été délivré en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme ».

    Dès lors que le pétitionnaire avait lui-même indiqué que les maisons à bâtir étaient destinées à la vente et qu’il n’était pas contesté que le projet relevait du régime de la copropriété, il était clair que le projet relevait de la procédure alors prévue par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme (CE. 8 février 1999, Cne de La Clusaz, req. n°171.94 ; CAA. Lyon, 10 juin 1997, Sté MGM, req. n°96LY00389)..

    Sur ce point, on rappellera d’ailleurs que l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme ne modifie pas la donne : le fait que le projet relève dans son ensemble de la copropriété ne l’exclue pas de cette procédure mais a pour seul effet de dispenser le pétitionnaire d’avoir à produire le projet de constitution d’une association syndicale pour gérer les voies et espaces communs éventuellement prévus par le projet.

    En revanche, ni le formulaire « CERFA », ni les pièces du dossier de la demande ayant abouti au second permis de construire ne comportaient d’indication sur le mode d’utilisation et commercialisation des maisons à construire. Pour autant, la Cour a donc également considéré que ce projet relevait de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme :

    « Considérant, d'autre part, que la même rubrique 363 du formulaire de la demande de permis de construire du lot A, qui prévoit la construction de huit maisons, n'a pas été renseignée ; que, dès lors que la nature du projet laissait clairement penser que le statut de la copropriété des immeubles bâtis est susceptible de s'appliquer, le maire de la ville de Dijon ne pouvait délivrer le permis de construire en l'absence de toute précision sur l' Utilisation principale envisagée , alors que le dossier de la demande de permis ne comportait pas les documents requis par l'article R. 421-7-1 précité du code de l'urbanisme dans l'hypothèse d'une division en propriété ou en jouissance, à savoir la note de présentation prévue à l'article R. 315-5 a) et les différentes pièces relatives à la constitution d'une association syndicale prévues à l'article R. 315-6 ; que, dans ces conditions, M. B et Mme B sont également fondés à soutenir que l'arrêté litigieux autorisant le lot A a été délivré irrégulièrement ».

    En l’absence de toute autre indication, la Cour s’est donc exclusivement fondée sur la conception d’ensemble du projet ce qui – à notre connaissance – est une première puisque si la jurisprudence offre de nombreux exemples où cette « conception » a été prise en compte, cet élément d’appréciation a toujours été combiné à d’autres (CE. 27 avril 1994, M. Vuillerme, req. n°139.238).

    D’ailleurs, en l’absence de tout élément avéré, certaines Cour ont préféré adopté une position différente. C’est ainsi qu’à l’égard d’un projet de trois bâtiments regroupant dix logements, la Cour administrative de Nantes a jugé que :

    « Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle servant d'assiette à l'ensemble immobilier de dix logements autorisé devait faire l'objet d'une division ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'absence au dossier de demande de permis de construire des documents exigés par les articles R. 315-5, R. 315-6 et R. 421-7-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur, en cas de division de la parcelle servant d'assiette au projet faisant l'objet du permis de construire contesté est inopérant » (CAA. Nantes, 8 avril 2008, Cne d’Arradon, req. n°07NT02525).

    En revanche, on sait que pour exclure le projet du champ d’application tant de la règlementation sur les lotissements que de la procédure du permis de construire valant division, la Cour administrative d’appel de Versailles puis le Conseil d’Etat se sont fondés sur la circonstance que le pétitionnaire avait expressément précisé dans son dossier que les cinq maisons à construire étaient destinées à la location division (CE. 7 mars 2008, Cne de Mareil-le-Guyon, req. n°296.287).

    Mais le nouvel article R.431-24 génère sur ce point une véritable problématique puisqu'il conviendra dorénavant d'établir non seulement que l'opération implique une division foncière mais en outre que cette division a vocation à intervenir avant l'achèvement du projet...

    A ce stade, il faut ainsi constater que les permis de construire attaqués ont été exclusivement annulés au motif tiré de la méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, les dossiers produits par le pétitionnaire ne comportant pas les pièces alors prévues par les anciens articles R.315-5 (a) et R.315-6 ; étant rappelé que sous l’empire de ce dispositif le plan de division n’était requis que lorsque le pétitionnaire entendait ventiler la SHON constructible du terrain d’origine entre les différents lots à créer (il est aujourd’hui systématiquement requis mais a contrario ne permet pas de s’opposer à l’article 14 d’un règlement de POS/PLU imposant d’appliquer le COS lot par lot).

    Or, il est toujours curieux de voir des permis de construire annuler du seul fait d’un vice se rapportant à la composition du dossier de demande puisque l’on sait qu’en principe, toute irrégularité sur ce point peut aisément être corrigée par un simple « modificatif ».

    C’est précisément ce qu’a fait le pétitionnaire dans la seconde affaire (req. n°09NC00357) où le permis de construire attaqué avait été contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, le dossier initial ne comportant pas la notice prévue par l’ancien article R.315-5 (a).

    En effet, le pétitionnaire obtint ultérieurement un « modificatif » délivré au vu d’un dossier comportant cette notice, ce qui régularisa le permis initial et rendit sans objet le moyen présenté sur ce point à son encontre :

    « Considérant, en troisième lieu, que lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ; qu'aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme: Lorsque la demande de permis de construire porte sur la construction, sur un même terrain, par une seule personne physique ou morale, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par les documents énumérés à l'article R. 315-5 (A) (...) et qu'aux termes de l'article R. 315-5 dudit code : Le dossier joint à la demande est constitué des pièces ci-après : a) Une note exposant l'opération, précisant ses objectifs et indiquant les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans le site, le respect de l'environnement et la qualité de l'architecture et pour répondre aux besoins en équipements publics ou privés découlant de l'opération projetée (...) ; que, si le dossier de la demande du permis de construire délivré le 17 octobre 2005 à la société immobilière de la Wantzenau ne comportait pas la note requise par les dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier que ce document figurait dans le dossier de la demande du permis de construire modificatif accordé à ladite société le 16 février 2006 ; qu'ainsi, la requérante ne peut plus invoquer utilement la méconnaissance des dispositions précitées ».

    Mais bien que ce moyen n’ait apparemment pas été soulevé par les requérants et bien que cet arrêt soit quelque peu « imprécis » sur ce point puisque :

    - d’une part, on ne sait si le dossier initial comportait certaines des autres pièces visées par l’ancien article R.421-7-1 ;
    - d’autre part, on peut même se demande si le projet relevait de la procédure du permis de construire valant division dès lors que sur le moyen tiré de la méconnaissance de la règlementation sur les lotissements la Cour a jugé que : « la construction par la société immobilière de la Wantzenau, seule maître d'ouvrage, sur une même unité foncière, constituée des parcelles cadastrées BX n° 52/12 et BX n° 12, de deux maisons et de trois logements collectifs ne constitue pas un lotissement au sens des dispositions précitées, dès lors que cette opération n'implique aucune division foncière » ;

    cette décision soulève en toute hypothèse une question : est-il si évident de régulariser un permis initialement délivré en méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 ou de l’actuel article R.431-24.

    La réponse n’est pas si simple puisqu’il faut déterminer la nature de l’autorisation résultant d’un dossier ne comportant aucune des pièces par les articles précités. Cette question est en effet essentielle puisqu’elle est déterminante de l’objet et des effets de l’autorisation de régularisation ultérieure. En substance, on peut la résumer comme suit : l’autorisation initiale constitue-t-elle néanmoins un permis de construire valant division, ce dont il résulterait que la régularisation à opérer serait d’ordre strictement formelle ou s’agit-il d’un permis simple dont la régularisation implique en fait de le transformer en un permis de construire valant division.

    A notre sens, l’autorisation obtenue dans ces conditions est un permis simple et, par voie de conséquence, sa régularisation emporte sa transformation en un permis de construire valant division.

    En effet, le permis de construire se borne à autoriser le projet présenté par le pétitionnaire dans son dossier de demande. C’est donc la demande et les pièces du dossier qui déterminent la nature de l’autorisation sollicitée et les règles d’instruction applicables au projet.

    On rappellera d’ailleurs que dans l’affaire « François Poncet » (CE. 22 novembre 2002, François Poncet, req. n°204.244), un permis de construire avait initialement été obtenu pour la réalisation d’un hôtel et de quarante maisons individuelles projetées sur treize parcelles distinctes.

    Pour autant, cette autorisation avait été délivrée sur la base d’un dossier ne comportant pas les pièces prévues par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme. Alors qu’elle était devenue définitive, l’autorisation initiale devait ultérieurement faire l’objet d’une autorisation de transfert partiel et d’un permis modificatif. Sans changer le nombre de constructions projetées, ces deux autorisations eurent toutefois pour effet de porter le nombre de parcelles à créer de treize à quarante. C’est en conséquence, que ces deux autorisations délivrées par l’administration en tant que simples « modificatifs » furent requalifiées en nouveaux permis de construire ; le Conseil d’Etat précisant que :

    « Considérant (…) qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire initial délivré le 18 mai 1982 à la société Le Grand Carénage prévoyait l'édification d'un hôtel et de quarante maisons individuelles sur treize parcelles référencées au cadastre AW 11 à AW 23, alors que les arrêtés contestés ont été pris sur la base d'une nouvelle division parcellaire des terrains d'assiette intervenue postérieurement au permis initial, le permis délivré le 15 novembre 1990 à la société Le Grand Carénage portant sur un hôtel et vingt-deux maisons situées sur vingt-deux parcelles cadastrales, et le permis transféré à la même date à la société Immobart autorisant, quant à lui, la construction de dix-huit maisons individuelles situées sur autant de parcelles ; que cette nouvelle division parcellaire, alors que le permis initial n'a pas été instruit en application des dispositions de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme qui permettent une division ultérieure en propriété ou en jouissance des terrains d'assiette, constitue une modification d'une nature et d'une importance telles que les arrêts contestés doivent être regardés non comme des décisions modificatives d'un permis de construire antérieur, mais comme délivrant deux nouveaux permis de construire dont la légalité doit être examinée en elle-même ».

    Faute d’être instruite en application de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, on voit donc mal comment la demande peut aboutir à la formation d’un permis de construire valant division.

    D’ailleurs, il faut relever que dans ses conclusions sur cette affaire, le Commissaire du gouvernement a souligné que : « il nous semble que des permis modificatifs délivrés sur la base d’une nouvelle division parcellaire modifient nécessairement l’économie d’ensemble du projet initial. Cette nouvelle division a en effet une incidence sur l’application des règles de desserte des terrains d’assiette, de raccordement aux réseaux publics et surtout de distance par rapport aux limites séparatives (…) La solution serait sans doute différente si le permis initial avait été instruit selon les règles du Code de l’urbanisme qui permettent une division ultérieure en propriété ou en jouissance des terrains d’assiette mais tel n’est pas le cas » (Concl. F. Séners, BJDU, n°6/2002, p.443).

    La solution retenue dans cette affaire procédait donc au premier chef du fait qu’un permis de construire simple n’était alors pas instruit dans les mêmes conditions qu’un permis de construire valant division.

    Dans le cas d’un permis de construire simple les règles d’urbanisme opposables au projet sont en effet appliquées à l’échelle de l’ensemble du terrain constituant l’assiette foncière de l’autorisation. En revanche, dans le cas d’un permis de construire valant division, il fallait alors tenir compte des divisions foncières à réaliser pour ainsi appliquer les règles d’urbanisme à l’échelon de chacun des terrains devant résulter de ces divisions.

    De ce fait, cette jurisprudence nous semble aujourd’hui obsolète.

    Aux fins de répondre aux interrogations et aux difficultés générées par la jurisprudence rendue au sujet des modalités d’application des règles d’urbanisme aux opérations impliquant la réalisation de divisions foncières, le dispositif entrée en vigueur le 1er octobre 2007 a comme on le sait introduit au sein du Code de l’urbanisme le nouvel l’article R.123-10-1 : « dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur un même terrain, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, les règles édictées par le plan local d'urbanisme sont appréciées au regard de l'ensemble du projet, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ».

    Si les dispositions de l’article précité ne sont pas d’une extrême clarté, il ressort en revanche clairement des travaux préparatoires à la réforme des autorisations d’urbanisme dont il est issu que sa finalité tend à ce qu’il soit fait « abstraction » des divisions foncières induites par l’opération considérée et, en d’autres termes, que la conformité de cette dernière aux prescriptions d’urbanisme communal lui étant opposables soit appréciée à l’échelle de l’ensemble du terrain d’assiette de l’opération et non pas à l’échelon de chacun des « lots » susceptibles de résulter desdites divisions.

    Il s’ensuit notamment qu’une demande de permis de construire valant division a par principe vocation à être instruite dans les mêmes conditions qu’une demande de permis de construire simple.

    Par voie de conséquence, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, n’a en principe aucune incidence sur les modalités d’instruction de la demande initiale. Au regard de la jurisprudence précitée (CE. 22 novembre 2002, François Poncet, req. n°204.244), l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme est donc de nature à permettre que cette transformation s’opère par le jeu d’un simple « modificatif ».

    Il reste que l’article précité précise que la règle de principe qu’il pose vaut « sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ». En d’autres termes, les règlements de PLU peuvent donc prévoir que dans le cadre d’une demande de permis de construire valant division notamment les prescriptions fixées par ce règlement ont vocation à s’appliquer non pas à l’échelle de l’ensemble de l’assiette foncière du projet mais à l’échelon de chacun des terrains issus des divisions prévues par le projet. En pareil cas, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, peut modifier les conditions dans lesquelles la demande initiale a été instruite.

    Toutefois, lorsque les auteurs des PLU décident d’utiliser l’exception prévue par l’article R.123-10-1, ils n’ont pas nécessairement l’obligation de prévoir une règle générale valant pour l’application de l’ensemble des prescriptions du règlement. La mise en œuvre de cette exception peut se limiter à seulement certaines de ces règles, voire comme c’est souvent le cas être circonscrite à seulement l’une d’entre elles, telle notamment l’article 5 du règlement relatif à la superficie minimale des terrains constructibles.

    Dans ce cas, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, aura certes un impact sur les modalités d’instruction de la demande initiale mais cette modification n’aura qu’une ampleur limitée. Or, contrairement à une idée rependue, rien ne s’oppose à ce que l’assiette foncière d’un permis de construire soit modifiée par le jeu d’un simple « modificatif » (TA. Poitiers, 25 octobre 2007, Mme Servouse, req. n°06-01532) ; la légalité d’une telle modification s’appréciant, comme pour tout autre aspect du projet, en considération de l’importance de la modification ainsi apportée au projet initial (TA. Rouen, 2 mars 1994, Mentionné au Tables du Recueil).

    Par voie de conséquence, de deux choses l’une à notre sens :

    - soit, le règlement de PLU applicable s’oppose à la règle de principe posée par l’article R.123-10 du Code de l’urbanisme pour une part significative des prescriptions édictées par ce règlement et la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, aura un impact significatif sur les modalités d’instruction de la demande initiale : cette transformation impliquera l’obtention d’un nouveau permis de construire ;
    - soit, le règlement de PLU applicable ne s’oppose à la règle de principe posée par l’article R.123-10 que pour un nombre limité des prescriptions édictées par ce règlement et la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, n’aura qu’un impact réduit sur les modalités d’instruction de la demande initiale : cette transformation pourra s’opérer par le jeu d’un simple « modificatif ».

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Veille administrative : 2 réponses ministérielles commentées (assiette des divisions primaires & attestation de la qualité habitant à construire)

    Sur les modalités d’application des règles d’urbanisme aux permis liés à une division primaire :


    Texte de la question (publiée au JO le : 01/12/2009 page : 11342) : "M. Gilles d'Ettore attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé du logement et de l'urbanisme sur les modalités d'instruction d'une demande de permis de construire en vue d'une division primaire. Les divisions dites primaires visées à l'article R. 442-1 d) du code de l'urbanisme ne constituent pas des lotissements. Il s'agit, selon cet article, des « divisions par ventes ou locations effectuées par un propriétaire au profit de personnes qu'il a habilitées à réaliser une opération immobilière sur une partie de sa propriété, et qui ont elles-mêmes déjà obtenu un permis d'aménager ou un permis de construire portant sur la création d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison d'habitation individuelle ». Le fait que, dans le cadre de la division primaire, un plan de division ne soit pas exigé dans le dossier de demande de permis de construire semble plaider pour une instruction du dossier de permis de construire sur la totalité du terrain d'assiette avant la division. Pourtant, la lecture stricte de l'article R. 442-1 d) ne semble pas permettre une telle interprétation. Les divisions dites primaires de l'article R. 442-1 d) du code de l'urbanisme échappent à la réglementation des lotissements et ne nécessitent ni déclaration préalable ni permis d'aménager. Il résulte de cette situation des incertitudes liées à la réforme du code de l'urbanisme issue principalement de l'ordonnance n° 2005-1527 du 8 décembre 2005. Aussi, il lui demande de bien vouloir lui préciser sur quelle assiette de la propriété la demande de permis de construire ou de permis d'aménager doit être déposée, de la totalité de l'assiette du propriétaire ou de la seule partie sur laquelle il a habilité la personne à réaliser une opération immobilière"

    Texte de la réponse (publiée au JO 06/07/2010 page : 7645): "L'article R. 442-1 (d) du code de l'urbanisme dispose que sont exclues du champ d'application du lotissement, les divisions de terrains effectuées au profit d'une personne qui, habilitée par le propriétaire à réaliser une opération immobilière sur une partie de sa propriété, a déjà obtenu pour ce faire un permis d'aménager ou un permis de construire portant sur la création d'un groupe de bâtiments ou d'un immeuble autre qu'une maison d'habitation individuelle. L'assiette de la demande de permis de construire ou de permis d'aménager que le constructeur ou l'aménageur a été habilité à déposer varie selon le type de permis. Dans le cas d'un permis de construire, l'assiette de la demande est obligatoirement constituée par l'unité foncière, c'est-à-dire l'ensemble des parcelles cadastrales d'un seul tenant appartenant à ce propriétaire. À la date de la demande, cette unité foncière correspond à la propriété initiale, puisque la division n'a pas encore été effectuée. Dans le cas d'un permis d'aménager, la demande peut porter soit sur la totalité de l'unité foncière, soit sur une partie seulement, conformément à l'article R. 441-1 du code de l'urbanisme. En effet, il convient d'éviter que le reliquat de la propriété d'origine soit considéré comme un lot de lotissement sur lequel des colotis auraient un droit de regard en application des articles L. 442-10 et L. 442-11 du code de l'urbanisme. Dans l'hypothèse où l'assiette du projet n'est pas constituée par la totalité de l'unité foncière, le dossier de demande de permis d'aménager devra néanmoins comprendre, comme prévu à l'article R. 441-4, un plan du terrain à aménager et de ses abords faisant apparaître, notamment, la partie de l'unité foncière qui n'est pas incluse dans le projet d'aménagement"


    Voici une réponse à une question qui, comme à d’autres, nous a beaucoup donné à réfléchir…

    On sait, en effet, qu’aux fins de remédier aux difficultés et aux hésitations de la jurisprudence sur ce point, l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme est venu préciser les modalités d’application des prescriptions du PLU aux opérations impliquant la réalisation de divisions foncière en disposant que : « dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur un même terrain, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, les règles édictées par le plan local d'urbanisme sont appréciées au regard de l'ensemble du projet, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ».

    Ce texte ne vise donc que trois types d’opérations : les lotissements et les permis de construire délivrés au sein de ceux-ci, les permis de construire valant division et les permis portant sur une opérations groupées mais dont la division du terrain d’assiette doit être postérieure à l’achèvement du projet.

    Celui-ci ne traite donc pas des opérations induisant une division foncière emportant la création de terrains à bâtir mais qui sont exclues du champ d’application de la procédure de lotissement par le jeu de l’article R.442-1 et parmi lesquelles comptent au premier chef les « divisions primaires » (d) ; dispositif introduit aux fins d’éviter l’alourdissement des procédures et la superposition inutile d’autorisations qui le plus souvent s’applique dans le cas d’une promesse de vente conclue sous la condition suspensive de l’obtention d’un permis ou d’un bail à construire dont la prise d’effet est conditionnée par la délivrance d’un tel permis.

    Dès lors, la question à la quelle sont confrontés les praticiens est la suivante : la demande de permis liée à une « division primaire » doit elle être instruire à l’échelle de l’unité foncière sur laquelle elle porte ou à l’échelon du terrain devant être ultérieurement détaché.

    La réponse du Ministère sur ce point est claire : l’instruction s’opère à l’échelle de l’unité foncière.

    Si un récent « revirement de pensée » nous amène à partager cette conclusion – dès lors qu’en substance nous voyons mal quel impératif pourrait justifier qu’une « division primaire » ne bénéficie pas d’un dispositif applicable aux lotissements – il n’en demeure pas moins qu’elle génère quelques interrogations, lesquelles témoignent à notre sens de l’imperfection de l’article R.123-10-1.

    En premier lieu, comme le souligne le ministère, une « division primaire » intervient nécessairement après l’obtention du permis de construire dont la légalité s’établit par principe à l’échelle de l’unité foncière telle qu’elle est constituée à la date à laquelle l’administration statue sur la demande. D’ailleurs, la rubrique de l’imprimé « CERFA » impose de renseigner sur l’unité foncière et non pas spécifiquement sur les seules parcelles d’assiette du projet.

    Toutefois trois observations doivent être formulées sur ce point.

    Tout d’abord, le fait que la division s’opère postérieurement au permis de construire n’apparait pas déterminant dans la mesure où :

    - l’article R.123-10-1 tient précisément à la jurisprudence « Commune de Sceaux » selon laquelle les règles d’urbanisme doivent être appliquées en tenant compte des divisions impliquées par une « opération groupée » ;
    - on voit mal alors pourquoi l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme saisit le cas des permis groupés si le seul fait que les divisions qu’ils induisent s’opèrent postérieurement à leur délivrance suffit à en faire abstraction.

    Ensuite, pourquoi en irait-il ainsi dès lors que tel n’est pas nécessairement le cas pour une autorisation de lotissement, un permis de construire délivré sur un lot à construire, un permis de construire valant division ou un permis « groupé » puisque l’article R.123-10-1 ne dit pas que les règles du PLU s‘applique à l’échelle de l’unité foncière d’origine mais « au regard de l'ensemble du projet » dont l’assiette ne couvre cependant pas toute l’unité foncière et peut, dans certains cas, couvrir plusieurs unités foncières.

    Enfin, et surtout, il faut rappeler qu’il résulte de l’article R.123-10 du Code de l’urbanisme qu’en l’état de la jurisprudence du moins, la densité du projet et le respect du « COS » s’apprécie au regard de la superficie du terrain objet de la demande et, notamment, au regard de la seule superficie de la partie de l’unité foncière sur laquelle le pétitionnaire dispose de « droits à construire » :

    « Considérant que l'article UG 14 du plan d'occupation des sols d' Epinay-sur-Seine fixe le coefficient d'occupation du sol pour la zone dans laquelle le permis a été demandé à 0,50 ; que si la demande de permis de construire déposée par l'association "Centre culturel et groupe des jeunes d' Epinay" fait état d'une surface de terrain de 28 928 m2 et s'il est effectivement établi que la commune est propriétaire d'un terrain ayant cette surperficie, il ressort des pièces du dossier que la surface du seul terrain qui faisait l'objet de la demande de permis était limité à 2 607 m2 ; que l'association pétitionnaire ne justifiait d'aucun autre droit à construire que celui qu'elle tenait du bail emphytéotique que lui avait concédé la commune et qui ne portait que sur ce terrain de 2 607 m2 ; qu'il est constant que le rapport de la surface hors oeuvre nette autorisée par le permis attaqué à la surface du terrain ainsi entendue dépasse le coefficient d'occupation du sol autorisé ; que la COMMUNE D'EPINAY-SUR-SEINE n'est donc pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté en date du 23 mai 1990 par lequel son maire a délivré à l'association "Centre culturel et groupe de jeunes d' Epinay" un permis de construire un centre culturel » (CE. 15 février 1993, Cne d’Epinay-sur-Seine, req. n°131.087).

    En second lieu, la raison pour laquelle la « division primaire » échappe à la règlementation sur le lotissement tient à la finalité première de cette règlementation : garantir à l’acquéreur du terrain issu d’une division préalable qu’il pourra y obtenir un permis de construire au regard des caractéristiques du terrain ainsi créé.

    Précisément, dans le cadre d’une « division primaire » (hors du cas où le projet porte sur une maison individuelle), il n’y a pas lieu d’apporter en amont cette garantie puisque le permis de construire a nécessairement été obtenu avant la division, c'est-à-dire avant l’acquisition du terrain emportant cette division.

    D’ailleurs, certains PLU ne font exception à l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme que pour ce qui concerne les lotissements. Tel est le cas du PLU de Paris qui ne s’oppose pas à cet article s’agissant des permis groupés impliquant des divisions postérieures à l’obtention de l’autorisation, voire à l’achèvement du projet. L’exception ainsi introduite par le PLU de Paris apparait donc résulter de cette nécessité de protection de l’acquéreur et non pas d’une considération liée à la conformité des constructions après la division de leur terrain d’assiette.

    Il n’en demeure pas moins qu’il incombera à la jurisprudence de préciser si dans le cas où les PLU font exception à l’article R.123-10-1, cette exception vaut par assimilation pour les divisions relevant de l’article R.442-1 ou si, à tout le moins, c’est document peuvent prévoir qu’il en soit ainsi.

    En dernier lieu, et plus concrètement, on voit mal comment l’administration pourrait instruire une demande de permis de construire se rapportant à une division primaire dès lors que le pétitionnaire n’a pas à produire un plan de division et n’a pas même à produire un « titre habilitant à construire » permettant à l’administration de comprendre qu’il y aura division ; rien n’imposant par ailleurs au pétitionnaire de produire un plan de division, ni même de figurer la division projetée sur le plan masse ;

    Telle semble d’ailleurs être la position du Ministère, lequel a précisé qu’une « division primaire » était possible au stade du transfert du permis de construire (Rép. min. : JOAN du 06/04/2010 ; p.4048) : c’est donc bien qu’a priori une telle division n’a pas vocation à remettre en cause les modalités d’instruction de la demande initiale s’étant opérée à l’échelle de l’unité foncière.

    Mais on peut dès lors se demande pourquoi le formulaire « CERFA » demande si « le terrain doit être divisé en propriété ou en jouissance avant l’achèvement de la (ou des) construction(s) » ; ce qui ne vaut pas que pour application de l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme.



    Sur la portée de l’attestation sur la qualité habilitant à construire :


    Texte de la question (publiée au JO le : 02/06/2009 page : 5240) : "M. Xavier Breton appelle l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur la réforme du permis de construire. Selon les dispositions de l'article R. 431-7 du code de l'urbanisme relatif à la procédure d'instruction de permis de construire, de nombreux éléments de la demande deviennent déclaratifs, et le service instructeur n'a pas à assurer de vérification préalable. Aussi, lorsque les travaux concernés par un permis de construire impliquent les parties communes d'un immeuble en copropriété, l'accord préalable du syndic, réuni en assemblée générale, n'est plus obligatoire. C'est l'administration qui doit notifier le permis de construire au syndic de la copropriété pour faire courir le délai de recours dont ce syndic dispose à l'encontre de la dite autorisation. Le délai est de deux mois à compter de l'affichage régulier du permis. Ce délai s'applique au recours gracieux et au recours contentieux. Aussi, il lui demande s'il envisage de mettre en oeuvre une disposition intermédiaire avant le recours, de manière à permettre aux copropriétaires de se prononcer sur le permis de construire".

    Texte de la réponse Réponse publiée au JO le : 06/07/2010 page : 7645 : "La réforme du code de l'urbanisme a été conduite dans le sens de la simplification et de la clarification des procédures administratives. Elle a conduit à diminuer de façon importante les pièces exigées au titre de l'urbanisme en privilégiant le système déclaratif et en arrêtant une liste exhaustive des pièces nécessaires à l'instruction des demandes d'autorisation. Toutefois, le système déclaratif ne remet pas en cause les responsabilités qui incombent à chacun. Aussi, lorsqu'un copropriétaire demande un permis de construire, il lui appartient d'obtenir l'accord des copropriétaires au préalable. Lorsque cet accord n'a pas été recueilli, le permis obtenu grâce à une fausse déclaration est illégal. Cette pratique constitue une fraude et la jurisprudence (CE, 17 juin 1955, Silberstein) autorise, dans le cas où la preuve de la fraude est apportée, le retrait du permis par l'autorité compétente sans conditions de délais sur demande de la copropriété. Cette décision s'effectue sous réserve d'une procédure contradictoire dans laquelle le bénéficiaire du permis présente ses observations écrites. Par ailleurs, lorsque le permis est obtenu avec l'accord de la copropriété, un copropriétaire peut engager un recours dans le délai de deux mois prévus par l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme. Il n'est donc pas dans l'intérêt du demandeur de passer outre l'avis des copropriétaires. Il n'y a, en conséquence, aucune modification à apporter à la réglementation en vigueur"


    Voici une réponse qui a une double importance.

    D’une part, elle confirme que l’article R.423-1 du Code de l’urbanisme vise également les travaux se rapportant à un immeuble en copropriété, lesquels impliquent donc l’autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires nécessaire à cet effet.

    En effet, si ce cas n’est pas spécifiquement visé par le nouvel article R.423-1 du Code de l’urbanisme, il nous semble néanmoins couvert par ce dernier en ce qu’il vise « le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux » ; étant rappelé que l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme n’était pas plus précis, loin s’en faut, à ce sujet

    D’autre part, et surtout, elle confirme que malgré l’attestation prévue par l’article R.431-5, le permis de construire sanctionne toujours la qualité habilitant à construire du pétitionnaire mais ce, en engageant la seule responsabilité de ce dernier.

    Il résulte en effet de l’article R.431-5 du Code de l’urbanisme que, depuis le 1er octobre 2007, le pétitionnaire doit seulement attester de sa qualité ou de son titre habilitant à construire, au regard de ceux visés par le nouvel article R.423-1, et n’a donc plus à en produire le justificatif au dossier ; cette attestation étant en fait "intégrée" au sein du formulaire "CERFA" de demande.

    De ce fait, d’aucuns estiment que dès lors que l’attestation prévue est remplie par le pétitionnaire, le permis de construire délivré au vu de celle-ci est incontestable s’agissant de la qualité et du titre habilitant à construire et, a contrario, que le permis de construire n’est illégal, et n’emporte la responsabilité de l’administration, que lorsque cette attestation n’a pas été établie.

    Il reste que dans son économie générale le nouvel article R.423-1 du Code de l’urbanisme n’est en effet pas si différent de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme puisque l’un comme l’autre se bornent à énoncer les qualités et titres habilitant une personne à déposer une demande de permis de construire. Or, au titre de l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme, le juge administratif a toujours estimé que le permis de construire avait vocation à sanctionner la qualité et le titre habilitant à construire du pétitionnaire.

    On voit donc mal pourquoi il en irait différemment sous l’empire du nouvel article R.423-5 du Code de l’urbanisme dès lors que le nouvel article R.423-1 du Code de l'urbanisme définit clairement les personnes présentant la qualité requise pour demander une autorisation d'urbanisme.

    Néanmoins, le nouvel article R.431-5 du Code de l’urbanisme et la production de l’attestation qu’il prescrit sont de nature à atténuer l’étendue de cette sanction et, par voie de conséquence, la responsabilité de l’administration.

    On sait, en effet, que hors du cas où le pétitionnaire se déclarait propriétaire du terrain à construire, l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme impliquait non seulement que le pétitionnaire produise au dossier la preuve de son titre habilitant à construire mais également que l’administration en contrôle le caractère approprié et la validité.

    La substitution à cette obligation d’une simple attestation est donc de nature à réduire l’étendue du contrôle incombant à l’administration, laquelle n’a donc plus qu’à vérifier que l’attestation prévue est remplie.

    Mais de ce fait, le nouvel article R.431-5 du Code de l’urbanisme place de façon systématique l’administration dans une situation identique à celle qui était la sienne, en vertu de la théorie dite du « propriétaire apparent », lorsqu’à titre d’exemple, le pétitionnaire se déclarait propriétaire du terrain à construire ou s’abstenait de remplir la rubrique du formulaire « CERFA » dédiée à l’identification du propriétaire du terrain.

    En pareil cas, en effet, l’administration était tenue de regarder le pétitionnaire comme le propriétaire apparent du terrain à construire et, par voie de conséquence, ne pouvait refuser de délivrer le permis de construire sollicité au motif tiré de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme mais ce, sauf en cas de « contestation sérieuse » sur la réalité de cette qualité.

    Dès lors que, comparé à l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme, le nouvel article R.423-1 du Code de l’urbanisme ne nous semble pas, en lui-même, de nature à remettre en cause la règle selon laquelle le permis de construire a vocation à sanctionner la qualité et le titre du pétitionnaire, il nous semble donc que dans le cas où l’administration aurait connaissance, en cours d’instruction de la demande, d’une « contestation sérieuse » sur la réalité de la qualité ou du titre annoncés par le pétitionnaire, celle-ci serait tenue de rejeter la demande et, a contrario, que le permis de construire délivré dans ces conditions serait illégal.

    Mais en toute hypothèse, si l’attestation prévue par le nouvel article R.431-5 du Code de l’urbanisme ne nous apparaît pas nécessairement de nature à garantir la légalité du permis de construire dès lors qu’elle a été remplie par le pétitionnaire, elle tend, en revanche, à limiter substantiellement la responsabilité de l’administration. En effet :

    - soit, cette attestation n’est pas remplie et de ce fait l’administration, après avoir invité le pétitionnaire à régulariser sa demande, pourra de ce seul chef refuser légalement le permis de construire sollicité, quand bien même le pétitionnaire disposerait-il néanmoins de l’une des qualités ou de l’un des titres prévus par le nouvel article R.423-1 du Code de l’urbanisme ;
    - soit, cette attestation est expressément remplie mais les informations fournies sont erronées et de ce fait, il nous semble que, du moins dans la plupart des cas, le permis de construire délivré dans ces conditions sera illégal car frauduleux , ce qui est de nature à affranchir l’administration de toute responsabilité lorsqu’elle n’a pas eu connaissance du caractère erroné de cette attestation et à atténuer substantiellement sa responsabilité lorsqu’une « contestation sérieuse » sur ce point a été élevée auprès d’elle au cours de l’instruction de la demande.

    Dès lors, on soulignera que si le nouvel article R.423-1 du Code de l’urbanisme ne prévoit que la production d’une simple attestation, il n’interdit pas au pétitionnaire de produire le titre qu’il estime l’habiliter à construire . Or, en pareil cas, si le titre produit est inadéquat, le permis de construire sera illégal mais la production de ce titre s’opposera à considérer que le pétitionnaire s’est prêté à une manœuvre dolosive : le permis pourra donc néanmoins acquérir un caractère définitif.

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Réduction du projet d'origine : permis modificatif et/ou retrait partiel du permis initial ?

    Dès lors que le projet initial est divisible, une demande de permis de construire modificatif tendant à la suppression d’une des composantes dissociables de ce projet s’analyse comme une demande expresse de retrait partiel de l’autorisation primitive. Par voie de conséquence, une fois le modificatif sollicité obtenu et de devenu définitif, il n’y a plus lieu de statuer sur la requête pour ce qu’elle concerne cette composante du projet.

    CAA. Nantes, 7 avril 2010, SNC Parc Eolien Guern, req. n°09NT00829

     

    Voici un arrêt en lui-même intéressant et qui, en outre, nous permet de revenir sur la jurisprudence « SCI La Tilleulière » du même jour que nous n’avions pas eu l’occasion, et pour tout dire pas eu le temps, de traiter à son époque.

    éolienne.jpgDans cette affaire, une société avait obtenu un permis de construire portant principalement sur quatre éoliennes, lequel devait ultérieurement être transféré à une autre société. Peu de temps avant que le Tribunal administratif de Rennes ne statue sur la requête, la société bénéficiaire du transfert et donc du permis de construire attaqué s’était prévalue de l’obtention d’un « modificatif » ayant eu pour objet et pour effet de rapporter à trois le nombre d’éoliennes prévus. Pour autant, le Tribunal administratif de Rennes annula l’ensemble du permis (primitif) attaqué et ce, sans avoir au préalable rouvert l’instruction de cette affaire. C’est la raison pour laquelle ce jugement fut annulé par la Cour administrative d’appel de Nantes, laquelle considéra par ailleurs que compte tenu de l’intervention de ce « modificatif », il n’y avait donc plus lieu de statuer sur la requête à l’encontre du permis de construire initial en ce qu’elle concernait l’éolienne supprimée par ce « modificatif » :

    « Considérant que par une note en délibéré enregistrée le 30 janvier 2009 au greffe du Tribunal administratif de Rennes, le préfet du Morbihan a porté à la connaissance du tribunal que, par un arrêté de la même date, il avait accordé à la SNC PARC EOLIEN GUERN un permis de construire modificatif du permis délivré le 8 avril 2005 ; que ce permis de construire modificatif du 30 janvier 2009, qui limite à trois le nombre d'éoliennes dont la construction est autorisée et vise à régulariser le permis de construire du 8 avril 2005, constitue une circonstance de droit nouvelle ; que, par suite, le Tribunal administratif de Rennes était tenu de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les éléments contenus dans cette note en délibéré ; qu'à défaut d'avoir satisfait à cette obligation de réouverture de l'instruction, les premiers juges ont entaché leur jugement d'irrégularité ; que, dès lors, le jugement attaqué doit être annulé ;
    Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par l'association contre le projet éolien de Guern devant le Tribunal administratif de Rennes ;
    Sur le permis de construire du 8 avril 2005 en tant qu'il porte sur la construction de l'éolienne E3 :
    Considérant que par arrêté du 8 avril 2005, le préfet du Morbihan a délivré à la société Zjn Grundstucks-Verwaltungs Gmbh, un permis de construire quatre éoliennes et un poste de livraison sur un terrain sis au lieudit Niziau, sur le territoire de la commune de Guern, ce permis de construire ayant été transféré, par arrêté préfectoral du 3 décembre 2007, à la SNC PARC EOLIEN GUERN ; qu'à la suite de la demande de permis de construire modificatif présentée, le 22 janvier 2009, par cette société tendant, notamment, à la suppression de l'éolienne E3, dont il est constant qu'elle n'avait pas été édifiée, le préfet du Morbihan a délivré, par arrêté du 30 janvier 2009, à ladite société un permis de construire modificatif autorisant la construction des trois éoliennes E1, E2 et E4 ; que le permis de construire du 8 avril 2005, dont le délai de validité a été suspendu en vertu des dispositions de l'article R. 424-19 du code de l'urbanisme, n'était pas périmé à la date à laquelle le permis modificatif a été délivré ; que, par suite, le permis de construire modificatif du 30 janvier 2009, devenu définitif, doit être regardé comme ayant procédé, à la demande expresse de la SNC PARC EOLIEN GUERN, au retrait du permis de construire du 8 avril 2005 en tant qu'il porte sur la construction de l'éolienne E3 laquelle est divisible des autorisations de construire portant sur les éoliennes E1, E2 et E 4 ; que, dès lors, les conclusions de la demande de l'association contre le projet éolien de Guern dirigées contre l'arrêté du 8 avril 2005 sont, dans cette mesure, devenues sans objet
    ».


    Pour conclure au non-lieu à statuer partiel sur la requête, la Cour a donc considéré que la demande de « modificatif » valait demande expresse de retrait partiel du permis primitif en tant qu’il portait sur l’éolienne supprimée par l’intervention de cette autorisation modificative obtenue le 30 janvier 2009, soit après l’entrée en vigueur du l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme.

    Pour autant, il ne semble pas falloir y voir une volonté du juge administratif de contrecarrer l’objectif poursuivi par cet article et, en d’autres termes, de maintenir la règle dégagée par l’arrêt « Vicqueneau » (CE. 31 mars 1999, Vicqueneau, BJDU, 2/1999, p.156) dont il résultait, pour mémoire que :

    • tout d’abord, l’intervention d’un nouveau permis de construire emportait le retrait du précédent dès lors qu’ils avaient été obtenu par la même personne, pour un même projet sur un même terrain ;
    • ensuite, ce retrait était en toute hypothèse définitif, si bien que dans l’hypothèse où le second permis était annulé, cette circonstance n’avait pas pour effet de faire revivre le premier (sauf à ce que le second ait été spécifiquement contesté en tant qu’il valait retrait du premier) ;
    • enfin et par voie de conséquence, il n’y avait plus lieu de statuer sur le recours exercé à l’encontre du premier permis de construire, la requête à son encontre devenant ainsi sans objet.

    Il faut en en effet souligner que la jurisprudence « Vicqueneau » n’a jamais concerné que l’intervention d’un nouveau permis de construire ou, le cas échéant, d’un « modificatif » requalifié en nouveau permis de construire.

    Or, un véritable « modificatif » ne se substitue pas intégralement au permis initial mais vient s’y intégrer pour former avec lui une autorisation unique (CAA. Paris, 30 octobre 2008, M. Gilbert Y., req. n°05PA04511) ; ce dont résulte non seulement sa propension à régulariser l’autorisation initiale, y compris à l’égard des vices de forme ou de procédure affectant ce dernier, mais également l’obligation pour le pétitionnaire d’exécuter le projet tel qu’il résulte de la combinaison du permis initial et de son « modificatif ».

    Il s’ensuit que par définition et pour ce qui concerne les modifications projetées, le « modificatif » emporte bien le retrait de l’autorisation primitive s’agissant des aspects du projet initial ainsi modifiés. Par voie de conséquence, lorsque la modification en cause consiste en la suppression pure et simple d’une des composantes du projet initial, ce « modificatif » a bien pour effet de procéder au retrait partiel de l’autorisation primitive.

    Partant, une demande se rapportant à un tel « modificatif » peut effectivement s’analyser comme une demande expresse de retrait partiel du permis initial puisqu’en elle-même une telle autorisation modificative a bien cet effet. L’analyse opérée par la Cour sur ce point est donc nettement moins difficile à suivre que celle de la jurisprudence « Vicqueneau », selon laquelle en demandant un nouveau permis de construire, le pétitionnaire sollicite implicitement le retrait définitif et inconditionné du précédent…

    En toute hypothèse, la jurisprudence « Vicqueneau » nous semble bien condamnée. On sait d’ailleurs que le 7 avril 2010 également, le Conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant que si la délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, a implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial, ce retrait est indivisible de la délivrance du nouveau permis ; que, par suite, les conclusions aux fins d'annulation du permis initial ne deviennent sans objet du fait de la délivrance d'un nouveau permis qu'à la condition que le retrait qu'il a opéré ait acquis, à la date à laquelle le juge qui en est saisi se prononce, un caractère définitif ; que tel n'est pas le cas lorsque le nouveau permis de construire a fait l'objet d'un recours en annulation, quand bien même aucune conclusion expresse n'aurait été dirigée contre le retrait qu'il opère ; que, par suite, en jugeant que le retrait du permis de construire délivré à la SCI LA TILLEULIERE le 16 juillet 2003, opéré par le second permis de construire délivré le 23 mai 2005 à la même société sur le même terrain, était devenu définitif faute d'avoir été expressément contesté, alors que ce second permis avait fait l'objet d'un recours contentieux et avait d'ailleurs été suspendu par une ordonnance du juge des référés, la cour administrative d'appel de Lyon a entaché son arrêt d'erreur de droit ; que cet arrêt doit, dès lors, être annulé » (CE. 7 avril 2010, SCL La Tilleuliere, req. n°311.694).

    Tout d’abord, cet arrêt met donc un terme à la spécificité de la jurisprudence « Vicqueneau », selon laquelle en toute hypothèse la délivrance du second valait retrait définitif du premier, y compris en cas d’annulation du second. Il ressort en effet de l’arrêt précité que le retrait du premier permis ne sera acquis que lorsque le second sera devenu définitif.

    Ensuite, il faut souligner en l’espèce que cet arrêt a été rendu dans une affaire où le second permis de construire datait du 23 mai 2005.

    Certes cet arrêt a donc été rendu le 7 avril 2010 mais il s’est prononcé sur une affaire où le second permis de construire avait été délivré le 23 mai 2005, c’est-à-dire antérieurement à l’entrée en vigueur de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme : il n’y avait donc pas lieu d’apprécier les effets du second permis sur le premier au regard des règles de retrait résultant de l’article précité.

    Par principe, en effet, la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération des normes applicables à sa date d’édiction et il en va évidemment ainsi des décisions prononçant le retrait d’une autorisation d’urbanisme dont, par voie de conséquence, la légalité s’apprécie au regard des règles en vigueur à la date du retrait (pour exemple au sujet de l’article 23 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 : CAA. Douai, 28 avril 2005, Cne de Saint-Andre-les-Lille, req. n°03DA01136 ; CAA. Paris, 2 octobre 2006, Sté Les Remblayes Paysagers, req. n°05PA03683 ; CAA. Marseille, 16 mars 2006, Ministre de l’équipement, req. n°03MA00934).

    L’arrêt « SCI La Tilleulière » ne remet donc aucunement en cause la portée de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme à l’égard des permis de construire délivrés après son entrée en vigueur.

    Enfin et surtout, l’arrêt « SCI La Tilleulière » part encore du postulat selon lequel, pour les permis délivrés avant l’entrée en vigueur de l’article précité, « la délivrance d'un nouveau permis de construire au bénéficiaire d'un précédent permis, sur le même terrain, a implicitement mais nécessairement pour effet de rapporter le permis initial ».

    En effet et ainsi qu’il a été pré-exposé, la solution dégagée par l’arrêt « Vicqueneau » procèdait de l’analyse selon laquelle la demande se rapportant au second permis vaut implicitement demande de retrait du premier ; telle étant la raison pour laquelle cette solution ne trouve pas à s’appliquer lorsque le premier et le second permis ont été délivrés à des personnes différentes (CE. 16 janvier 2002, Portelli, req. n°221.745).

    Or, comme on le sait, c’est précisément la raison pour laquelle l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme dispose que : « le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire ».

    Depuis l’entrée en vigueur de l’article précité, un nouveau permis de construire ne peut donc plus emporter le retrait d’un précédent permis puisqu’une demande tendant à la délivrance d’une autorisation ne saurait s’analyser comme tendant expressément au retrait d’une précédente.

    En résumé, non seulement l’arrêt « SCI La Tilleulière » a substantiellement limité la portée de la jurisprudence « Vicqueneau » à l’égard des seconds permis intervenus avant l’entrée en vigueur de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme mais, bien plus, pour ceux délivrés après cette échéance, il nous semble marquer la volonté du Conseil d’Etat de ne pas contrecarrer l’objectif poursuivi par le législateur à travers cet article puisque pour ce faire, il aurait donc fallu que la Haute Cour juge qu’une nouvelle demande d’autorisation valait demande expresse de retrait du précédent ; ce qui n’a donc pas été le cas.

    Mais revenons-en maintenant à la spécificité de l’arrêt commenté ce jour : la requalification d’un « modificatif » en retrait partiel du permis primitif et l’analyse de la demande de « modificatif » en demande expresse de retrait partiel ; cette requalification ayant été rendue possible pas le fait que l’éolienne ainsi supprimée était divisible des trois autres.

    Sur ce point, la solution n’est pas nouvelle puisque le juge administratif avait déjà eu l’occasion de reconnaitre à l’administration la possibilité de prononcer le retrait partiel d’une autorisation d’urbanisme lorsque celle-ci est divisible (CE, 28 févr. 1996, Grote de Chanterac, req. n°124.016).

    Toute la question tenait sur ce point au fait que cette possibilité avait été consacrée sans que cela n’amène le juge à rechercher les effets de ce retrait partiel sur la procédure d’octroi du permis (partiellement) maintenu alors même que l’autorisation initiale avait été délivrée sur la base d’une demande unique portant sur l’ensemble du projet initial.

    Il est vrai que le retrait a un effet équivalent à l’annulation d’un permis de construire et que s’agissant d’une annulation partielle d’un permis le Conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant, en premier lieu, que les juges du fond n'ont pas dénaturé les pièces du dossier en estimant que les autorisations dont ils ont prononcé l'annulation étaient divisibles des autres autorisations accordées par les permis contestés ; que les moyens tirés par les requérants de ce que l'atteinte portée à l'ensemble du projet par l'annulation partielle prononcée par la cour serait de nature à remettre en cause la régularité de la procédure d'octroi des permis, notamment en dénaturant l'avis favorable donné par les communes intéressées qui était fondé sur le bilan positif de l'ensemble de l'opération, sont inopérants dès lors qu'ils tendent à contester la régularité d'une autorisation administrative à raison de l'effet sur celle-ci de la décision prise par le juge quant à sa légalité » (CE. 6 novembre 2006, req. n°281.672).

    Il reste que dans ces deux affaires, le retrait et l’annulation résulteraient de l’illégalité de l’autorisation initiale et, en d’autres termes, ne répondait pas à une demande du pétitionnaire.

    Or, dans l’affaire objet de l’arrêt commenté ce jour, tel était bien le cas puisque la demande de « modificatif » a en elle-même était requalifiée en demande expresse de retrait partiel ; ce retrait partiel ayant été acté indépendamment de la légalité du permis de construire attaqué s’agissant de l’éolienne en cause puisque ce retrait résultait donc d’une demande du bénéficiaire de l’autorisation ayant par ailleurs conduit la Cour a prononcé un non-lieu à statuer partiel sur ce point.

    Néanmoins, la Cour s’est donc bornée à vérifier que :

    • tout d’abord, l’éolienne en cause n’avait pas été édifiée puisque si tel avait été le cas il y’aurait encore eu lieu de statuer sur la requête ;
    • ensuite, le permis de construire initial était encore en cours de validité puisqu’à défaut le « modificatif » aurait alors constitué un nouveau permis de construire (aurait-il alors emporté le retrait partiel du permis initial mais cette fois-ci en tant que celui-ci autorisait le trois autres éoliennes ?) ;
    • enfin, le « modificatif » était définitif (on peut toutefois regretter que la Cour n’est pas précisé de quoi résultait ce caractère définitif à l’égard des requérants).

    La Cour n’a donc pas vérifié l’impact de ce « modificatif/retrait » sur l’économie générale du projet initial et la procédure de délivrance de l’autorisation primitive ; étant rappelé que le fait qu’un « modificatif » opère une réduction du programme d’origine n’a aucune incidence puisqu’une réduction substantielle du projet peut impliquer un nouveau permis de construire (CE, 6 avr. 1979, SCI Europe Verte, req. n° 8628 ; CE, 7 juin 1985, SA d'HLM "L'Habitat communautaire locatif" : Gaz. Pal. 1986, 2, pan. dr. adm. p. 291).

    Il reste que le projet initial était divisible et que ce « modificatif/retrait » portait sur une composante dissociable de celui-ci.

    Or, à l’examen de la jurisprudence rendue en la matière, la divisibilité d’un projet d’urbanisme produit ses effets à tous les stades : la nature et le nombre d’autorisations susceptibles d’être obtenues ; le pouvoir de l’administration statuant sur la demande ; le pouvoir de l’administration pour retirer l’autorisation délivrée ; le délai de validité de l’autorisation pour engager les travaux ; l’appréciation de la conformité des travaux ; le sort contentieux de l’autorisation. Et pour cause puisqu’en fait, lorsqu’un arrêté portant permis de construire est divisible, c’est qu’il intègre déjà « plusieurs décisions », si bien qu’il faut apprécier distinctement l’objet et les effets de « chacune des autorisations » (Concl. J. Burguburu sur : CE. 17 juillet 2009, Ville de Grenoble », BJDU n°4/2009, p.274).

    D’ailleurs, au stade de l’instruction de la demande, l’administration n’apparait pas devoir nécessairement saisir la demande de façon globale et indivisible puisqu’il a été jugé qu’elle pouvait y opposer un refus partiel ou a contrario n’accorder que partiellement l’autorisation sollicitée lorsque l’objet de la demande est dissociable (CE, 4 janv. 1985, SCI Résidence du Port, req. n°47.248).

    Il ne semble donc pas déraisonnable de considérer que l’arrêt commenté induit que dans le cas d’un projet divisible l’impact d’un « modificatif » doit être apprécié non pas à l’échelle de l’ensemble du projet ainsi autorisé mais à l’échelon de la composante du projet sur laquelle porte les modifications projetées ; ce qui semble d’ailleurs ressortir d’autres décisions (CE. 16 février 1979, SCI « CAP NAIO », req. N° 03.646).

    Mais en toute hypothèse, lorsqu’il s’agira de supprimer purement et simplement une des composantes dissociables du projet initial, le bénéficiaire de l’autorisation primitive pourra donc se borner à solliciter le retrait partiel de cette dernière.

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Sur la satisfaction des besoins en stationnement d’une construction nouvelle par la prise en compte d’un parc de stationnement futur

    Compte tenu du mode de fréquentation qu’il génère, un musée n’a pas besoin qu’une infrastructure de stationnement spécifique lui soit attachée dès lors que des possibilités de stationnement proportionnées au flux prévisible de visiteurs, notamment dans un parc public à proximité, sont disponibles. Partant, le musée n’a pas à s’accompagner d’un parc de stationnement relevant d’une autorisation indivisible et la satisfaction des besoins en stationnement de la construction projetée peut être opérée par un parc de stationnement futur.

    CAA. Marseille, 18 mars 2010, Fédération des comités d’intérêt de quartier du 2e arrondissement de Marseille, req. n°10MA00627 (ord. réf.)


    MUCUM.jpgDans cette affaire, le Préfet du Département des Bouches du Rhône avait délivré à l’Etat un permis de construire pour la réalisation du Musée des Civilisations de l'Europe et de la Méditerranée (MUCEM) à Marseille. Ce permis de construire devait toutefois être contesté au motif tiré notamment de ce qu’il n’intégrait pas la réalisation des places de stationnement rendues nécessaires par son fonctionnement. Mais ce moyen devait être rejeté au motif suivant :

    « Considérant, en deuxième lieu, que les requérants soutiennent que l'arrêté du 27 juin 2008 serait illégal, dès lors qu'aucune place de stationnement n'est prévue dans le dossier de permis de construire ; qu'ils font valoir, en outre, que le préfet des Bouches-du-Rhône ne pouvait, à la date de délivrance du permis, s'assurer que les places de stationnement pour handicapés avaient été prévues et étaient suffisantes ;
    Considérant que les requérants semblent soutenir que la construction du musée et du parc de stationnement destiné à recevoir les agents de l'établissement et les visiteurs devaient faire l'objet d'une autorisation indivisible ; que toutefois un musée, à la différence d'un stade ou d'une salle de spectacle, compte tenu du mode de fréquentation qu'il génère, n'a pas besoin qu'une infrastructure de stationnement spécifique lui soit attachée ; qu'il suffit que des possibilités de stationnement proportionnées au flux prévisible de visiteurs, notamment dans un parc public à proximité, soient disponibles ; que, par suite, la circonstance que le permis de construire critiqué ne prévoit pas de parking n'est pas de nature à le rendre illégal
    ».


    Sur ce point, la Cour a donc estimé qu’il ne pouvait être utilement fait grief au permis de construire le musée en cause de ne pas intégrer la réalisation des places de stationnement nécessaires à cet équipement.

    Même si nous ne partageons pas totalement « l’opportunité » de l’ensemble des fondements nous semblant expliquer une telle décision, il n’en demeure pas moins que celle-ci nous semble difficilement contestable en l’état du droit et, plus précisément, en l’état de la jurisprudence rendue en la matière.

    Comme nous avions eu à plusieurs reprises l’occasion de l’écrire ici ou ailleurs, il ressortait de la jurisprudence rendue sous l’empire de l’ancien article L.421-3 du Code de l’urbanisme dont l’économie générale a été reprise par l’article L.421-6 que la notion d’ouvrage indivisible et celle subséquente d’indivisibilité du permis de construire impliquait qu’une telle autorisation porte sur un projet intégrant l’ensemble des composantes nécessaires à sa conformité au regard des prescriptions d’urbanisme lui étant opposables.

    Il reste, comme on le sait, que par l’arrêt « Ville de Grenoble » le Conseil d’Etat a substantiellement modifié la nature et la portée de ce principe, en introduisant une exception permettant, certes dans des cas limités, de faire relever un même projet de plusieurs autorisations distinctes.

    Or, d’une part, il nous semble que la Haute Cour en utilisant dans cet arrêt la notion d’ensemble immobilier unique a précisément abandonné la notion d’ensemble immobilier indivisible; et pour cause puisque si la réalisation d’un tel ensemble peut relever de plusieurs permis de construire c’est qu’un projet n’est pas par nature indivisible.

    D’autre part, et surtout pour ce qui concerne l’arrêt commenté, un ensemble immobilier unique se caractérise par les liens physiques et/ou fonctionnels unissant ses composantes. En d’autres termes, la notion d’ensemble immobilier unique est indépendante de toute considération liée à l’interdépendance juridique de ses composantes et, plus concrètement, à circonstance que l’une soit nécessaire à la conformité de l’autre : le seul fait qu’un parc de stationnement soit nécessaire à la conformité d’une construction au regard de l’article 12 d’un règlement local d’urbanisme et/ou de l’article R.111-6 du Code de l’urbanisme ne suffit donc pas pour considérer qu’ils forment un ensemble immobilier unique.

    Il reste qu’indépendamment de toute considération lié à la conformité du projet au regard des articles précités, force est d’admettre qu’un parc de stationnement est nécessaire au fonctionnement d’un ensemble immobilier ; pour autant, toutefois, que la construction projetée soit de nature à générer un trafic automobile propre.

    Précisément, dans cette affaire, la Cour administrative d’appel de Marseille devait donc considérer sur ce point qu’un musée « compte tenu du mode de fréquentation qu'il génère, n'a pas besoin qu'une infrastructure de stationnement spécifique lui soit attachée » ; ce qui, dans une certaine mesure, nous semble signifier que le fonctionnement d’un musée n’implique pas un parc de stationnement dédié et, par voie de conséquence, que l’ensemble constitué d’un musée et d’un parc de stationnement ne constitue pas un ensemble immobilier unique dont la réalisation doit, en principe, relever d’un seul et même permis de construire.

    On peut toutefois relever que la Cour a précisé qu’à cet égard un musée se différenciait « d’un stade » alors que dans l’arrêt « Ville de Grenoble » le Conseil d’Etat a considéré que le parc de stationnement en cause pouvait relever d’un permis de construire distinct du stade dans la mesure où, précisément, ce parc avait une fonction propre et autonome du stade…

    Il reste qu’en second lieu, la Cour administrative d’appel de Marseille devait préciser que « la légalité de ce permis pourrait être mise en cause si les possibilités de stationnement pour le desservir étaient insuffisantes » et, en d’autres termes, que la circonstance que d’un point de vue procédurale une construction puisse faire l’objet d’un permis de construire distinct du parc de stationnement susceptible de la desservir ne signifie pas que, sur le fond, la légalité de l’autorisation portant sur cette construction soit affranchie des prescriptions d’urbanisme relatives au stationnement.

    Mais sur ce point, la Cour devait donc valider le permis de construire contesté et ce, au motif suivant :

    « Considérant toutefois que la légalité de ce permis pourrait être mise en cause si les possibilités de stationnement pour le desservir étaient insuffisantes ; qu'à cet égard, par un arrêté en date du 30 décembre 2005, modifiée le 21 mai 2008, le préfet des Bouches-du-Rhône a arrêté la création de la zone d'aménagement concerté de la Cité de la Méditerranée ; que dans cette zone est prévue la réalisation du MUCEM et du Centre Régional de la Méditerranée sur l'esplanade du môle du port de Marseille J4 ainsi que d'un parc de stationnement public de 700 places édifié sous l'esplanade ; que, par délibération du 29 juin 2007, la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a décidé le principe d'une délégation de service public pour la réalisation et le fonctionnement de ce parking ; que le contrat de concession passé avec le délégataire a été signé le 29 octobre 2009 ;
    Considérant que la demande de permis déposée par le ministre de la Culture précise que les besoins en matière de stationnement seront satisfaits par la réalisation d'un parking sous le môle du J4 ; que la fiche de lot concernant le musée, établie par l'établissement public Euroméditerranée, aménageur de la ZAC, fait explicitement apparaître ce parc de stationnement ; que les plans montrent, en outre, l'accès direct du parking vers le MUCEM ainsi que les facilités prévues pour l'accès des handicapés ; qu'enfin, les requérants ne démontrent pas, ni même n'allèguent que le parc de stationnement ne sera pas en fonction au moment de l'ouverture au public du musée ;
    Considérant ainsi que, eu égard aux aménagements et équipements prévus dans le cadre de la ZAC, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu, en connaissance de cause, délivrer le permis de construire querellé ; que le moyen tiré de ce que les places de stationnement affectées au MUCEM ne sont pas mentionnées dans la demande de permis n'est pas de nature à créer un doute sérieux sur la légalité de l'arrêté du 27 juin 2008
    ».


    Pour établir la légalité du permis de construire contesté sur ce point, la Cour a donc pris en compte un parc de stationnement à réaliser dans le cadre de la ZAC prévoyant également le MUCEM objet de cette autorisation.

    Or, à cet égard, la solution retenue par la Cour nous parait plus contestable ou, du moins, insuffisamment motivée pour en apprécier le bien fondé, et pour tout dire quelque peu inaboutie.

    En premier lieu, et comme on le sait, le principe selon lequel la légalité d’un permis de construire s’apprécie à sa date de délivrance a pour corolaire que la conformité d’un projet s’apprécie au regard de ses composantes et/ou en considération des équipements existants à cette date.

    Toutefois, comme nous avons eu plusieurs fois l’occasion de l’exposer, ce principe connait une exception puisqu’il est possible de prendre en compte un équipement futur pour autant que sa réalisation soit planifiée et que ses modalités et délais de réalisation soient arrêtés à la date de délivrance du permis de construire en cause.

    En l’espèce, le parc de stationnement pris en compte par la Cour était donc inscrit au programme d’une ZAC précédemment arrêté et dont, précédemment également, l’autorité compétente avait décidé qu’il donnerait lieu à une délégation de service publique.

    Il reste qu’à note sens, il s’agissait là d’éléments se rapportant à la planification du parc de stationnement et non pas à proprement d’éléments permettant de considérer sa réalisation et ses délais de réalisation comme quasi-certains. Or, si la Cour a fait état de la signature de la délégation de service publique se rapportant à sa construction et à son exploitation, il n’en demeure pas moins que cette signature était postérieure à la date de délivrance du permis de construire attaqué.

    En outre, l’essentiel de la jurisprudence se rapportant à la prise en compte d’équipements futurs avait trait aux réseaux viaires et/ou de flux alors qu’en l’espèce, il s’agissait d’un parc de stationnement dont la réalisation nécessitait elle-même un permis de construire qui, a fortiori, n’avait pas été obtenu à la date de délivrance de l’autorisation attaquée.

    Or, il ressortait de la jurisprudence antérieure que la conformité d’un projet ne pouvait pas être établie en considération d’une construction à réaliser dans le cadre d’un permis n’ayant pas été délivré à la date d’édiction de l’autorisation se rapportant à ce projet. Et plus récemment, dans l’arrêt « Ville de Grenoble », le Conseil d’Etat avait souligné, pour censurer l’appréciation opérée par la Cour administrative d’appel de Lyon, que les deux permis de construire se rapportant à l’ensemble immobilier en cause avait été délivrés à la même date.

    Toutefois, il résulte de l’arrêt précité du Conseil d’Etat qu’il n’est selon nous plus nécessaire que l’équipement dont dépend la conformité du projet en cause ait précédemment fait l’objet d’un permis de construire ou, à tout le moins, donne lieu à une autorisation délivrée à la même date que celle se rapportant à ce projet.

    En effet, telle qu’il avait initialement dégagé, le principe selon lequel des constructions indivisibles devaient nécessairement donner lieu à un permis de construire unique semblait s’expliquer non seulement par les exigences résultant de l’ancien article L.421-3 du Code de l’urbanisme mais également par le fait qu’en vertu du principe d’indépendance des procédures, l’administration devait être mise en mesure de ce prononcer sur l’ensemble du projet et en avoir ainsi une connaissance complète à l’examen du seul dossier de demande produit par le pétitionnaire. Or, en admettant dans l’arrêt « Ville de Grenoble » que l’administration pouvait apprécier globalement la conformité d’un même projet à travers l’examen de demandes de permis de construire distinctes, le Conseil d’Etat a substantiellement assoupli le principe d’indépendance des procédures. Il ne semble donc pas exclu que même lorsque les permis de construire se rapportant au projet n’auront pas été délivrés à la même date, leur légalité pourra être établie pour autant que l’administration puisse démontrer que dès la délivrance du premier permis elle avait une connaissance complète du projet lui permettant de le contrôler dans sa globalité.

    Il reste qu’en l’espèce, nous voyons mal comment la Cour a pu considérer qu’eu « égard aux aménagements et équipements prévus dans le cadre de la ZAC, le préfet des Bouches-du-Rhône a pu, en connaissance de cause, délivrer le permis de construire querellé » dès lors qu’à la date de délivrance de cette autorisation, le parc de stationnement en cause n’avait pas même fait l’objet d’une demande de permis de construire.

    En revanche, la Cour s’est montré plus « orthodoxe » en relevant « les requérants ne démontrent pas, ni même n'allèguent que le parc de stationnement ne sera pas en fonction au moment de l'ouverture au public du musée » ; ce qui tend à confirmer qu’un équipement futur ne peut être pris en compte pour apprécier la légalité d’un permis de construire que pour autant, notamment, que sa réalisation soit prévue à brève échéance.

    Cette précision nous semble toutefois avoir été apportée également pour justifier que la Cour se dispense d’établir si les délais de réalisation du parc de stationnement pouvaient être considérés comme quasi-certains à la date de délivrance du permis de construire contesté…

    Mais pour être complet, on précisera qu’en revanche, la circonstance que le parc de stationnement en cause n’ait vocation à être réalisé par le titulaire du permis de construire attaqué n’avait en elle-même aucune incidence dans la mesure où :

    • d’une part, et d’une façon générale, le permis de construire revêt un caractère réel et non pas personnel et est donc par principe indépendant de toute considération liée à la personne devant réaliser le projet ainsi autorisé ;
    • d’autre part, et plus spécifiquement, l’exception introduite par l’arrêt « Ville de Grenoble » vaut « notamment en cas d'intervention de plusieurs maîtres d'ouvrage » ; ce qui ne signifie cependant pas qu’il s’agisse d’une condition nécessaire ou suffisante.

    Quoi qu’il en soit on relèvera que la Cour a souligné que la demande de permis de construire le MUCEM avait été établie en prenant précisément en compte le parc de stationnement en cause ; ce dont il résulte que sur ce point cet arrêt nous semble pouvoir être rapproché de celui par lequel la Cour administrative d’appel de Nancy avait accepté de prendre en compte la réalisation d’un aménagement futur dès lors qu’il était inscrit au POS communal et que le pétitionnaire l’avait intégré à son plan masse.

    Il reste que dans cette affaire, l’aménagement en cause consistait en un élargissement d’un chemin rural existant…

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés