Sur les effets du permis de construire modificatif
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A l’instar de celles édictées par ses articles 7 et 8, les prescriptions de l’article 6 d’un règlement local d’urbanisme ne s’appliquent pas aux constructions en sous-sols.
CE. 27 octobre 2008, Société Régionale de l’Habitat, req. n°290.188
Voici un arrêt intéressant en ce qu’il permet de faire le point sur l’application aux constructions en sous-sols des règles d’implantation prescrites par le règlement local d’urbanisme.
On sait, en effet, que l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme se borne à disposer que « le règlement peut comprendre tout ou partie des règles suivantes (6°) L'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques ; (7°) L'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives ; (8°) L'implantation des constructions les unes par rapport aux autres sur une même propriété » et, par voie de conséquence, n’opère aucune distinction s’agissant des constructions en sous-sols.
Toutefois, au regard de la finalité propre de chacune de ces règles, il n’était pas si évident qu’elles s’appliquent indifféremment à toute construction, y compris donc à celles en sous-sol. Mais a contrario, il n’était pas si certain non plus qu’un même principe puisse être dégagé s’agissant de l’application des règles relatives à l’implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques (art. 6), d’une part, et de celles relatives à l’implantation des constructions par rapport aux limites séparatives (art.7) et à l’implantation des constructions les unes par rapports aux autres sur une même propriété (art.8).
La première réponse de principe apportée par le Conseil d’Etat s’agissant de l’implantation des constructions en sous-sol le fût à l’égard des règles relatives à leur implantation par rapport aux limites séparatives et ce, dans une affaire où il jugea que :
« Considérant qu'aux termes de l'article 2NA 7 du plan d'occupation des sols d'Epron : La distance entre toute construction et la limite séparative de propriété ne pourra être inférieure à cinq mètres ; qu'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment autorisé devait être implanté à plus de cinq mètres de la limite séparative ; qu'en l'absence de disposition particulière du plan d'occupation des sols relative aux constructions entièrement enterrées, les dispositions précitées de l'article 2NA 7 dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage, ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel ; que, par suite, la circonstance qu'une partie de l'emprise en sous-sol des immeubles, non visible de l'extérieur, est située à moins de cinq mètres de la limite séparative est sans incidence sur la légalité du permis de construire » (CE. 11 février 2002, Urset, req. n°221.350) ;
et s’attacha donc à la finalité propre de la règle posée par l’article 7 d’un règlement local d’urbanisme sur ce point (Concl. F. SENERS sur CE. 11 février 2002, Urset, req. n°221.350, publiées in BJDU, n°1/2002, p.16) – laquelle procède de « préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage » – pour juger que, faute de précision contraire, elle ne s’appliquait pas aux constructions enterrées.
Partant, on peut sans grands risques parier que la solution est identique s’agissant des règles d’implantation relatives aux constructions sur une même propriété dès lors que leur finalité est identiques à celles de l’article 7 (CAA. Bordeaux, 5 février 2008, Sté Osmose, req. n°06BX00977) puisqu’elles ne se distinguent que par leur fait générateur respectif.
Mais la solution était en revanche moins évidente s’agissant de l’application des règles posées par l’article 6 du règlement local d’urbanisme puisque l’on pouvait penser que celles-ci poursuivaient également un objectif de protection et d’extension éventuelle du domaine public ; l’article L.112-5 du Code de la voirie routière disposant d’ailleurs que « aucune construction nouvelle ne peut, à quelque hauteur que ce soit, empiéter sur l'alignement, sous réserve des règles particulières relatives aux saillies » et induisant ainsi qu’il s’applique également aux constructions en sous-sol.
C’est d’ailleurs ce qui ressortait de la jurisprudence rendue en la matière. A titre d’exemple, on peut relever que si la Cour administrative d’appel de Lyon n’a pas attendu l’arrêt « Urset » pour juger que :
« Considérant qu'aux termes de l'article UJ.7 du réglement annexé au plan d'occupation des sols de la ville de Cannes approuvé le 14 novembre 1986, relatif à l'implantation par rapport aux limites séparatives, "1) Implantation par rapport aux limites aboutissant aux voies : Tout bâtiment doit s'implanter sur les limites séparatives aboutissant aux voies, ou à une distance de ces limites, balcons ou oriels (bow-windows) compris, au moins égale à la moitié de la hauteur du bâtiment. Cette distance ne pourra être inférieure à cinq mètres (5m). Cette distance peut être ramenée à cinq mètres (5m) quelle que soit la hauteur du bâtiment, si les façades latérales ne donnent jour qu'à des pièces de service ... D'autres part, les ouvrages nécessaires à la construction d'un portail ou d'une clôture sont autorisés à l'intérieur des limites de reculement. 2) Implantation par rapport aux limites de fond de propriété : Tout bâtiment, balcons ou oriels (bow-windows) compris, doit être à une distance des limites séparatives de l'unité foncière qui ne touchant pas une voie au moins égale à la moitié de sa hauteur et jamais inférieure à cinq mètres (5m)." ; qu'il résulte des dispositions précitées, qu'en édictant les normes susrappelées les auteurs du P.O.S. de Cannes ont entendu, pour des considérations d'hygiène ou d'aspect urbain, réglementer le volume des constructions à élever dans l'espace à partir du sol des terrains d'implantation ; que dès lors, en l'absence de dispositions expresses, les règles d'implantation des bâtiments par rapport aux limites séparatives de propriété fixées par l'article précité ne s'appliquent pas aux parties entièrement enterrées des constructions lesquelles sont sans incidence sur les objectifs ainsi poursuivis ; que, par suite, c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur le fait que le parc de stationnement souterrain de l'opération de construction prévue par M. D... se prolongeait en partie sous la marge de reculement minimale de 5 mètres, respectée par le bâtiment à édifier en superstructure, pour annuler le permis de construire délivré le 23 octobre 1987 au motif que le projet de construction autorisé méconnaissait ainsi l'article UJ.7 précité » (CAA. Lyon, 31 décembre 1996, Jourden, BJDU, n°3/1997, 224)
elle a en revanche ultérieurement jugé que :
« Considérant qu'il résulte du dossier de permis de construire que deux niveaux souterrains de l'hôtel destinés au stationnement de véhicules sont implantés, sur le côté donnant sur la rue Dolfuss et sur une largeur de 20 mètres, 2,10 mètres en avant du reste de la construction ; qu'une telle construction méconnaît en conséquence les dispositions de l'article UA6 du plan d'occupation des sols, lesquelles s'appliquent à tous les niveaux d'un bâtiment, y compris à ses niveaux souterrains » (CAA. Lyon, 23 mars 1999, Ville de Cannes, req. n° 95LY00890)
L’arrêt objet de la présente note vient ainsi régler cette question puisque le Conseil d’Etat y juge que :
«Considérant qu'aux termes de l'article UC 6 du règlement de la zone d'aménagement concerté du Revestin : « Les constructions doivent être implantées au-delà des marges de reculement indiquées au document graphique et au minimum à 20 m de l'axe de l'avenue Guillaume Dulac. A défaut d'indication, les constructions doivent être implantées à une distance minimale de 5 m par rapport à l'alignement des voies publiques. » ; qu'il résulte de ces dispositions qu'aucune marge particulière de reculement n'étant imposée pour le chemin des Séveriers qui dessert le terrain d'assiette du projet, la construction projetée devait respecter une distance minimale de cinq mètres par rapport à l'alignement de cette voie ;
Considérant que les dispositions précitées de l'article UC6, dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage, ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Marseille, en jugeant que le permis de construire délivré le 6 juillet 1998 était illégal au motif que la rampe d'accès au garage situé en sous-sol du bâtiment était implantée à moins de cinq mètres de la voie publique, sans rechercher si elle dépassait le niveau du sol naturel, a commis une erreur de droit ; que la SOCIETE REGIONALE DE L'HABITAT et la COMMUNE DE LA CIOTAT sont, dès lors, fondées à demander l'annulation de l'arrêt attaqué en tant qu'il a annulé l'arrêté du 6 juillet 1998 ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la rampe d'accès au garage situé en sous-sol du bâtiment litigieux est presque entièrement enterrée puisqu'elle ne dépasse le niveau du sol que d'une dizaine de centimètres ; que ce dépassement, qui correspond à la hauteur du mur de soutènement, ne peut, eu égard à ses proportions, porter atteinte aux règles de protection du voisinage fixées par l'article UC 6 du règlement d'urbanisme applicable ; que, pour les motifs indiqués ci-dessus, la seule circonstance que cette rampe d'accès soit située à moins de cinq mètres de la limite séparative du chemin des Séveriers est, contrairement à ce que soutiennent M. et Mme A, sans incidence sur la légalité du permis de construire délivré le 6 juillet 1998 ».
Tout d’abord, force est donc de relever que, pour exclure les constructions en sous-sol de son champ d’application matériel, le Conseil d’Etat a reconnu aux prescriptions de l’article 6 du règlement local d’urbanisme une finalité strictement identique à celles de ses article 7 et 8. Et selon nous, nous voyons effectivement mal pourquoi il aurait dû en aller autrement dès lors que :
- tout d’abord, l’article L.112-5 du Code de la voirie routière procède d’une législation indépendante de celle de l’urbanisme que n’a pas, par principe, vocation à sanctionner les autorisations d’urbanisme ;
- ensuite, le droit de l’urbanisme offre des instruments spécifiquement prévus pour assurer l’extension du domaine public, tels les « emplacements réservés » ;
- enfin, considérer qu’un article 6 répond à une préoccupation intéressant le domaine public nous paraît incompatible avec le principe selon lequel ses prescriptions peuvent s’appliquer aux voies privées et, le cas échéant, aux voies internes du terrain à construire.
Mais bien qu’il ne l’a pas expressément précisé, il nous semble toutefois qu’en visant « les dispositions précitées de l'article UC6, dont l'objet est lié à des préoccupations d'hygiène, d'urbanisme et de protection du voisinage …», le Conseil d’Etat n’a pas exclu la possibilité que l’article 6 d’un règlement local d’urbanisme édicte des règles spécifiques s’agissant des constructions en sous-sol.
Ensuite, il faut relever que le garage en cause n’était pas totalement enterré puisqu’un mur de soutènement – indissociable du garage – émergeait du sol mais ce, d’une dizaine de centimètres seulement.
Toutefois, le Conseil d’Etat a considéré qu’au regard de sa faible « proportion », ce mur ne portait pas atteinte aux préoccupations visées par l’article 6 en cause et, en d’autres termes, qu’il ne s’agissait donc pas d’une construction au sens de cet article. Ce critère semble essentiel puisque précédemment la Haute Cour avait jugé que :
« Considérant, en second lieu, que les dispositions, plus sévères, du règlement du lotissement sont applicables dès lors que celui-ci n'avait pas fait l'objet d'une mise en concordance avec le plan d'occupation des sols ; qu'aux termes de l'article III du titre II du règlement du lotissement : "La distance mesurée horizontalement de tout point d'une construction au point de la limite parcellaire latérale qui en est le plus rapproché devra être au moins égale à la différence d'altitude entre ces deux points diminuée de quatre mètres, sans pouvoir être inférieure à quatre mètres ou à la dimension cotée au plan" ; qu'il ressort des pièces du dossier que le garage souterrain, avec sa rampe d'accès, prévu aux plans annexés à la demande de permis de construire est implanté en limite séparative ; qu'au dessus du garage, le sol est aménagé en terrasse avec un mur, surplombant la porte d'entrée, d'une hauteur d'un mètre ; que cet ensemble, qui constitue une construction au sens du règlement du lotissement, ne pouvait être construit à moins de quatre mètres de la limite séparative » (CE. 26 octobre 1992, Giovanolla, Rec., p.1394. Voir également : CAA. Nancy, 11 octobre 2007, Cne de Wolfisheim, req. n°06NC00685, jurisurba.com : 21/11/2007).
La jurisprudence offre d’ailleurs d’autres exemples où le juge a qualifié l’ouvrage litigieux au regard de la finalité poursuivie par la règle lui étant opposée (CAA. Bordeaux, 5 février 2008, Sté Osmose, req. n°06BX00977)
Mais enfin, il nous formuler une réserve ou, plus précisément, relever une difficulté puisque dans cet arrêt comme dans l’arrêt « Urset », le Conseil d’Etat a précisé que les prescriptions en cause « ne s'appliquent pas à la partie souterraine d'un bâtiment qui ne dépasse pas le niveau du sol naturel » cependant qu’au regard de la finalité de ces règles dont procède la solution retenue, il nous semble qu’il aurait été plus logique de ne s’attacher qu’au niveau du terrain après travaux puisque l’élément de référence retenu induit qu’une construction effectivement enterrée mais néanmoins édifiée au dessus du niveau du terrain tel qu’il était avant l’exécution des travaux (sur ce point, voir ici) pourrait se voir appliquer les prescriptions des articles 6,7 et 8 du règlement d’urbanisme local alors qu’on voit mal en quoi elle pourrait porter atteinte aux objectifs d’hygiène, d’urbanisme et de protection de voisinage que ces articles poursuivent…
Patrick E. DURAND
Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés
Le pétitionnaire ne peut se prévaloir de places déjà aménagées sur le terrain d’assiette de projet dès lors qu’elles sont affectées à l’usage d’un immeuble existant et n’apparaissent pas excédentaires au regard de l’article 12 du règlement local d’urbanisme opposable à sa demande de permis de permis de construire.
CE. 8 octobre 2008, SARL Régionale de Construction, req. n°295.972
Voici un arrêt intéressant dans la mesure où tout en illustrant une règle déjà connue, mais n’ayant donné lieu qu’à peu de jurisprudence, il semble apporter à son égard une précision d’importance.
Dans cette affaire la société requérante avait obtenu un permis de construire un ensemble immobilier de quinze logements pour lequel l’article 12 du règlement de POS applicable imposait la réalisation de trente places de stationnement. Or, précisément, la légalité de ce permis de construire devait être contestée dans la mesure où, notamment, s’il prévoyait bien l’affectation de trente places de stationnement à l’immeuble à construire, huit de ces places étaient déjà aménagées et affectées à l’usage d’un immeuble existant sur le terrain à construire et n’apparaissaient pas excédentaires au regard des besoins de celui-ci. Et ce moyen devait être retenu par la Cour administrative d’appel dont l’analyse fut ainsi confirmé par le Conseil d’Etat.
« Considérant, en second lieu, que l'article INA 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Davezieux impose la réalisation de deux places de stationnement par logement construit ; qu'en l'état des éléments qui lui étaient soumis par les parties, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les faits de l'espèce en relevant que huit des trente places de stationnement prévues par le permis de construire litigieux, si elles se situent sur le terrain d'assiette du projet autorisé, ont été créées lors de la construction d'immeubles ayant fait l'objet d'un permis de construire antérieur et en estimant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que ces places déjà aménagées pour ces immeubles soient en nombre excédentaire au regard des obligations imposées par l'article INA 12 » ;
étant rappelé qu’une même place de stationnement ne peut être légalement prise en compte pour deux projets de constructions distincts (pour exemple : CE. 8 décembre 1976, Epx Guihur, req. n°99.280).
Au premier chef, cette décision est bien sur à rapprocher de l’arrêt par lequel la Haute Cour avait déjà jugé que :
« Considérant que M. Pouchoulon a présenté en 1983 une demande de permis de construire en vue de l'édification d'un bâtiment à usage d'entrepôt sur une parcelle issue de la division d'un terrain où était implanté un immeuble à usage d'habitation construit par la société civile immobilière Brandis-Berceau, en vertu d'un permis de construire accordé le 6 novembre 1961 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la délivrance dudit permis était subordonnée à la création sur la parcelle en cause d'emplacements de stationnement, en nombre égal au nombre des logements prévus ; que l'affectation ainsi imposée à ladite parcelle faisait obstacle, alors que, contrairement aux allégations de la requête, il ne résulte pas de l'instruction que ces places de stationnement aient été créées, à ce que le permis de construire sollicité par M. Pouchoulon lui fût accordé ; que, dès lors, M. Pouchoulon n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation de la décision du 9 novembre 1983 lui refusant ce permis » (CE. 1er décembre 1989, Pouchoulon, req. n° 75.466. Dans le même sens, au sujet d’aires de stationnement effectivement aménagées : TA. Strasbourg, 16 avril 2002).
Cependant l’arrêt commenté ce-jour apporte une précision d’importance dès lors que toute la question est de savoir si l’obligation de maintenir les aires affectées au stationnement des véhicules par une précédent permis de construire consiste en une obligation de maintenir la conformité du projet tel qu’il avait autorisé par ce permis et/ou d’assurer la conformité de l’immeuble existant au regard des prescriptions d’urbanisme en vigueur au moment des travaux ultérieurement projetés.
Or, dans sa décision de 1989, le Conseil d’Etat en se bornant à viser « que l'affectation ainsi imposée à ladite parcelle faisait obstacle, alors que, contrairement aux allégations de la requête, il ne résulte pas de l'instruction que ces places de stationnement aient été créées » avait induit qu’il était donc nécessaire que soit maintenue une stricte concordance entre l’état physique d’une construction et son état légal, lequel résulte de l’autorisation en ayant permis la construction, tant que cette existence légale n’a pas été modifiée par une nouvelle autorisation ou, le cas échéant, par l’exécution de travaux dispensés de toute formalité mais autorisés par les prescriptions d’urbanisme alors en vigueur.
Et plus récemment, sur la problématique des espaces verts, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé que :
« Considérant que la société SHLMR a demandé en juillet 2002 l'autorisation de construire deux bâtiments, comprenant dix logements chacun, sur deux parcelles où sont implantés des immeubles à usage d'habitation en vertu d'un permis de construire qui lui avait été accordé le 21 octobre 1996 ; qu'il ressort des pièces du dossier que la délivrance dudit permis, qui autorisait la construction de dix-sept bâtiments comportant 212 logements, était subordonnée à l'aménagement d'espaces verts collectifs que constituaient les terrains d'assiette des nouveaux projets ; que cette prescription doit être regardée comme ayant eu notamment pour objet d'assurer le respect des dispositions de l'article NAU 1 du règlement de la zone NAU dont relevaient alors ces terrains et qui imposaient la création d'une aire de jeux de 100 mètres carrés par tranche de 10 logements réalisés en habitat collectif ; que l'affectation ainsi donnée à ces terrains faisait obstacle à ce qu'ils fussent totalement consacrés à la construction de nouveaux bâtiments et à la réalisation d'aires de jeux ou de loisirs réservées aux seuls habitants desdits bâtiments ; que le moyen tiré par la société requérante de ce que les terrains en cause étaient classés, à la date des refus contestés, dans la zone UA, doit être en tout état de cause écarté, dès lors que le règlement applicable à cette zone maintient une « obligation d'aménager des espaces verts collectifs » pour les logements groupés et n'autorise pas à priver les immeubles existants de la totalité des aires de loisirs à l'aménagement desquelles leur construction était subordonnée ; qu'il suit de là que l'autorité administrative était tenue de refuser les permis de construire demandés en juillet 2002 par la SHLMR » ;
et donc clairement rejeté la requête dirigée à l’encontre des refus de permis de construire opposés à la société d’HLM requérante :
- à titre principal, parce que l’édification des bâtiments projetés sur les espaces verts affectés à la construction existante aurait pour effet de rendre cette dernière non conforme au permis de construire l’ayant précédemment autorisé et, par voie de conséquence, non conforme aux normes d’urbanisme en considération desquelles ce dernier avait été délivré ;
- et à titre subsidiaire seulement, parce que l’utilisation de ces espaces verts en tant que terrain à construire aurait eu pour effet de rendre la construction existante irrégulière au regard des nouvelles prescriptions d’urbanisme opposables à la date des refus contestés.
Or, dans l’arrêt objet de la présente note, le Conseil d’Etat ne s’est nullement attaché à rechercher si les huit places de stationnement en cause avaient été réalisées en exécution du permis de construire l’immeuble existant auquel elles étaient affectées et/ou l’exigibilité de ces places au titre du règlement en vigueur à la date de délivrance de ce permis de construire mais s’est borné à constater « qu'il ne ressort(ait) pas des pièces du dossier que ces places déjà aménagées pour ces immeubles soient en nombre excédentaire au regard des obligations imposées par l'article INA 12 » du règlement opposable à l’autorisation portant sur l’immeuble à construire.
En l’état, force est donc de considérer que si la conformité d’un immeuble doit être maintenue, il s’agit de sa conformité au regard des règles d’urbanisme applicables aux travaux susceptibles de la compromettre.
Cette solution tend donc à confirmer la validité, d’une part, du jugement par lequel le Tribunal administratif de Versailles avait considéré illégal un permis de construire prévoyant un nombre de places de stationnement répondant aux prescriptions de l’article 12 du règlement local d’urbanisme mais dont une partie devait être réalisée en lieu et place d’aires de stationnement attachées à un bâtiment précédemment édifié en exécution d’un premier permis de construire puisqu’en cumulant le nombre des places projetées et le nombre des places maintenues, leur nombre total était inférieur à celui exigible en considération des deux bâtiments mais ce, au regard des normes alors en vigueur (TA. 27 mai 2003, M. Leotoing, req. n°013.208) et, d’autre part et plus spécifiquement, de l’arrêt par lequel la Cour administrative d’appel de Versailles, sur une problématique bien distincte, avait estimé que :
« Considérant qu'il résulte de l'article UE5 précité que chaque terrain issu d'une division foncière doit avoir une surface constructible de 1200 m2 et 15 m de façade ; que, par suite, la COMMUNE D'ORGERUS est fondée à soutenir que, pour l'application de ces dispositions, seule pouvait être prise en compte la partie du lot n°2 qui était située dans la zone UE, à l'exclusion de la partie de cette même parcelle qui était comprise dans la zone NC ; qu'il est constant, en l'espèce, que le lot n°2, issu de la division du terrain dont le lot n°1 fait l'objet du certificat d'urbanisme litigieux, ne comporte qu'une superficie de 350 m2 située en zone UE, le surplus de la surface étant classé en zone NC, et qu'elle comporte déjà une construction préexistante ; qu'il s'ensuit que cette division, qui n'a pas laissé au terrain sur lequel cette construction a été édifiée une surface constructible suffisante, n'a pas respecté les dispositions de l'article UE5 ; que, par suite, le lot n°1 issu de la division est inconstructible, alors même qu'il n'est pas contesté qu'il comporte une superficie supérieure à 1 200 m2 et plus de 15 m de façade ; que le maire était, dès lors, tenu de délivrer un certificat d'urbanisme négatif ; que la COMMUNE D'ORGERUS est, dans ces conditions, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré à la SCI du Moutier » (CAA. Versailles, 28 décembre 2006, Cne d’Orgerus, req. n°05VE01622) ;
et donc considéré que dans la mesure où l’opération de division ayant abouti à constituer le lot sur lequel portait la demande de certificat d’urbanisme avait eu pour effet subséquent de créer un second lot, déjà bâti, ne présentant pas les caractéristiques requises pour être constructible par l’article UE.5 du règlement de POS communal alors en vigueur, cette circonstance avait pour effet de rendre inconstructible le lot objet de la demande alors même qu’isolément, il présentait les caractéristiques requises à ce titre.
Mais pour conclure, il faut relever que le Conseil d’Etat a donc sanctionné la démarche du pétitionnaire au motif que les huit places en cause n’étaient pas excédentaires au regard des besoins de l’immeuble existant et non pas en raison du fait qu’elle ne correspondait à aucune des possibilités prévues par l’article L.421-3 du Code de l’urbanisme à savoir :
- réaliser les places de stationnement requises sur le terrain à construire ou à proximité immédiate de celui-ci ;
- ou, en cas d’impossibilité technique de les réaliser, en prendre à concession dans un parc de stationnement public ou en acquérir dans un parc de stationnement privée ;
- ou, à défaut de pouvoir louer ou acquérir les places manquantes, verser une participation financière à la collectivité lorsqu’elle a prévu cette possibilité.
Patrick E. DURAND
Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés