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Sur les effets du permis de construire modificatif

Le permis de construire initialement délivré pour l'édification d'une construction et le permis modificatif ultérieurement accordé pour autoriser des modifications à cette même construction constituent un ensemble dont la légalité doit s'apprécier comme si n'était en cause qu'une seule décision.

CAA. Paris, 30 octobre 2008, M. Gilbert Y., req. n°05PA04511



S’il appelle peu de commentaires, voici néanmoins un arrêt intéressant à trois égards : tout d’abord, il est a classé parmi les décisions actant la propension d’un « modificatif » à régulariser une permis de construire primitif entaché d’une méconnaissance de l‘article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 et ce, ensuite, en appliquant d’une règle formulée de telle sorte qu’elle explique à elle-seule cette capacité régularisatrice du modificatif, laquelle permet enfin d’aborder un aspect peu connu d’une telle autorisation.

Dans cette affaire, le permis de construire primitif était contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’article 4 susvisé en ce qu’il impose qu’une décision administrative comporte, outre la signature de son auteur, le nom, le prénom et la qualité de ce dernier.

Il reste que cette autorisation avait ultérieurement donné lieu à un « modificatif » répondant strictement aux objectifs poursuivis par cette disposition. C’est de ce fait que la Cour administrative d’appel de Paris devait donc rejeter ce moyen en jugeant :

« Considérant que le permis de construire initialement délivré pour l'édification d'une construction et le permis modificatif ultérieurement accordé pour autoriser des modifications à cette même construction constituent un ensemble dont la légalité doit s'apprécier comme si n'était en cause qu'une seule décision ; que par suite, dès lors qu'il est constant que les noms et qualités du signataire apparaissent sur le permis modificatif du 22 janvier 2003, le moyen tiré de ce que tel n'était pas le cas sur le permis initial ne peut être utilement invoqué ».

Ce faisant, la Cour a donc appliqué à la lettre (voir ici et là) la règle dégagée par le Conseil d’Etat en jugeant que « lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises » (CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315) pour ainsi censurer la décision de la même Cour et selon laquelle « si des formalités nécessaires à la conformité du permis de construire initial aux dispositions législatives et règlementaires régissant la procédure de délivrance des permis de construire ont été omises au cours de l'instruction d'une demande de permis de construire, leur accomplissement à l'occasion de l'instruction d'une demande de permis de construire modificatif n'a pas pour effet de régulariser la procédure ayant conduit à la délivrance du permis de construire initial » (CAA. Paris, 14 janvier 2001, req. n°99PA00757).

Mais ce qui est nettement plus intéressant c’est qu’alors qu’elle avait motivé sa jurisprudence précitée sur le fait que « l'instruction d'une demande de permis de construire modificatif n'a pas pour finalité la reprise de celle qui a été conduite préalablement à la délivrance du permis de construire initial », elle a fondé la solution retenue sur dans l’arrêt objet de la présente note sur une formule rappelant la spécificité du « modificatif » et son articulation avec le « primitif » : « le permis de construire initialement délivré pour l'édification d'une construction et le permis modificatif ultérieurement accordé pour autoriser des modifications à cette même construction constituent un ensemble dont la légalité doit s'apprécier comme si n'était en cause qu'une seule décision » puisqu’en effet, si le « modificatif » ne se substitue pas au « primitif » - dans le sens où il n’e emporte pas le retrait – c’est parce qu’il se borne à s’y intégrer ; ce dont découle sa capacité régularisatrice.

Mais cette caractéristique a également une conséquence en matière d’exécution des travaux puisqu’il en résulte qu’à l’égard de leur titulaire également « un permis de construire initial et un permis modificatif constituent une autorisation de construire unique », si bien que « le titulaire d'un permis de construire initial, puis d'un permis de construire modificatif, n'est autorisé à édifier que les bâtiments prévus par l'autorisation dont il dispose incluant les adjonctions ou corrections édictées par le permis modificatif, lequel a pour effet de se substituer au permis initial dans tous les éléments qu'il modifie » (TA. Versailles, 22 février 1994.pdf, SCI Les Ormes, req. n°93-05140)

En d’autres termes, le bénéficiaire d’un permis de construire modificatif ne peut légalement bâtir que les constructions autorisées par ce dernier et, en d’autres termes, ne peut plus les réaliser telles qu’elles étaient autorisées par le permis de construire initial (Dans le même sens : CAA. Marseille, 21 janvier 1999, Sté Terre & Pierre, req. n°96MA02171) ; la Chambre criminelle de la Cour de Cassation ayant elle-même jugé que :

« Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'André Y... a obtenu un permis de construire une maison d'habitation avec un toit en zinc, en méconnaissance du plan d'occupation des sols de la commune qui imposait l'emploi de tuiles vieillies ; qu'après un recours en annulation de ce permis formé par des tiers, il a obtenu la délivrance d'un permis modificatif prévoyant le remplacement du zinc par des tuiles ; que ce remplacement n'a pas été réalisé et que la juridiction administrative, statuant après la délivrance du permis modificatif, a rejeté le recours en annulation, au motif que le vice affectant la première autorisation avait été purgé ;
Attendu que, statuant sur le seul appel par les parties civiles du jugement ayant relaxé le prévenu du délit d'exécution de travaux non conformes au permis de construire, l'arrêt énonce que "la construction a été faite sous le couvert d'un permis de construire initial qui n'a pas été annulé par la juridiction administrative" ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'il résulte de ses propres constatations que les travaux exécutés par le prévenu ne sont pas conformes aux prescriptions du permis modificatif qui se sont substituées à celles du permis initial, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision
;
D'où il suit que la cassation est encourue
» (Cass. crim., 29 juin 2004, Association pour la sauvegarde de la commune de Favières-la-Route, Bull. crim., n°176).


Pour le cas où le constructeur souhaiterait au final revenir au projet initialement autorisé, il lui faudrait donc préalablement obtenir un second « modificatif » (CE. 28 juillet 1999, SA d’HLM « Le Nouveau Logis Centre Limousin », req. n° 182.167).


Patrick E. DURAND
Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés

Commentaires

  • pouvez vous me répondre sur un permis d'aménager sur un permus en cours que me refuse la mairie

  • pouvez vous me conseiller
    la mairie me refuse un permis d'aménager sur un permis de construction en cours de validité
    je suis en zone ud et je désire modifier la désignation des garages en hotel
    ce qui entre parfaitement dans le cadre d'un permis d'aménager mon architecte est formel
    la mairie me le refise et me demande de demander un nouveau permis ce que je ne veux pas faire nos travaux forme hauteur sont terminé pour le gros ouevre il ne reste que l'aménagement intérieur
    que dois je faire

  • si je peux me permettre, en toute indépendance, ce que vous pouvez faire, c'est demander à l'auteur de ce blog, par ailleurs avocat, d'étudier avec vous ce dossier dans le cadre d'une prestation rémunérée ;o))))

    j'ajoute - à titre bénévole ;o)- qu'un changement d'affectation de batiments ne ressort pas du permis d'aménager mais, éventuellement, de la déclaration préalable.

    enfin, vous pouvez consulter le champ d'application des différentes autorisations d'urbanisme sur ce site :
    http://www.nouveaupermisdeconstruire.gouv.fr/index.php3

  • Merci Emmanuel pour ce rappel sur la finalité de ce blog...

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