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JURISURBA - Page 101

  • Sur l’interprétation d’un règlement local d’urbanisme limitant le nombre de logements par unité foncière

    Un règlement local d’urbanisme autorisant, d’une part, les constructions nouvelles à la condition qu’elle ne comporte qu’un seul logement ainsi que, d’autre part, l’extension des constructions existantes à usage d’habitation ne s’oppose pas à l’extension de l’une des deux constructions à usage d’habitation sises sur la même unité foncière.

    CAA. Marseille, 11 janvier 2007, Cne d’Aubais, req. n°04MA00058

    Dans cette affaire, le pétitionnaire était propriétaire de deux parcelles contiguës – formant donc une et même unité foncière – la première accueillant une maison d’habitation, la seconde un maset également à usage d’habitation – et avait présenté une demande de permis de construire portant sur l’extension de ce maset, laquelle devait cependant être rejetée par le Maire d’Aubais au motif que l’article UN.1 n’autorisait qu’un logement par unité foncière. Mais pour sa part, la Cour administrative d’appel de Marseille devait considérer que :

    « Considérant, en premier lieu, que selon les dispositions de l'article UN1 du règlement du POS de la commune, dans sa rédaction en vigueur au 20 avril 1994 : « Sont admis dans l'ensemble de la zone : Les constructions à usage : -d'habitation individuelle (et leurs annexes) comprenant un seul logement .. l'extension des constructions à usage d'habitation, existantes à la date d'approbation de la présente révision, qui ne respectent pas les conditions de surface énoncées à l'article UN5 » ; qu'il résulte de ces dispositions que sont autorisées par ces dispositions, d'une part, les constructions à usage d'habitation comprenant un seul logement et, d'autre part, les extensions de constructions à usage d'habitation, existantes à la date d'approbation de la révision du POS ».

    et conséquemment jugé :

    " Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de permis de construire, que M. YX, possédait deux parcelles contiguës, la parcelle n° 1718, sur laquelle existait déjà une maison d'habitation comme l'ont relevé les premiers juges et une deuxième parcelle, cadastrée n° 1721, sur laquelle existait un maset existant, à usage d'habitation, qui était seul concerné par le projet d'extension ; qu'à cet égard, si la COMMUNE D'AUBAIS fait valoir, en appel, que le maset existant, avant son acquisition par M. YX, était destiné au stockage d'outils agricoles, cette allégation n'est corroborée par aucune pièce versée au dossier ; qu'il n'est pas établi ni même allégué par la commune que le maset n'était pas existant à la date d'approbation de la révision du POS ; qu'ainsi, le maset situé sur la parcelle n° 1721 constituait « une construction à usage d'habitation existante à la date de la révision du POS » au sens des dispositions précitées de l'article UN1 ; que, contrairement à ce que soutient l'appelante, il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de masse, que le bâtiment projeté était accolé au maset existant et ne comporte aucune séparation physique avec la construction existante ; qu'ainsi ledit projet avait pour objet l'extension d'une construction à usage d'habitation existante et ce, nonobstant le fait que, comme le soutient l'appelante, ce projet était distinct de l'autre maison d'habitation située sur l'autre parcelle ; qu'il suit de là que le projet de construction en litige présentait le caractère d'une extension d'une construction à usage d'habitation, existante à la date d'approbation de la présente révision, qui constitue l'une des deux catégories de constructions autorisées par les dispositions surappelées de l'article UN1 du règlement du POS ; que, dans ces conditions, le motif fondé sur ce que le projet contesté serait de nature à créer plus d'un logement, limitation prévue pour les seules constructions et non pour les extensions de constructions existantes, ne pouvait légalement fonder le refus de permis de construire en litige ; qu'en tout état de cause, en l'absence de séparation physique avec la construction existante, l'extension envisagée n'emportait pas création d'un nouveau logement ; que, dès lors, c'est à bon droit, que les premiers juges ont estimé que le premier motif fondant le refus contesté ne pouvait légalement le justifier »

    En substance, la Cour a donc considéré que l’article UN.1 du règlement de POS communal n’autorisait pas d’une façon générale un seul logement par unité foncière mais de façon distincte, d'une part, les constructions nouvelles à usage d'habitation individuelle comprenant un seul logement et, d'autre part, les extensions de constructions à usage d'habitation existantes à la date d'approbation de la révision du POS et, par voie de conséquence, a jugé que pour apprécier la conformité de l’extension projetée du maset, il n’y avait pas lieu de prendre en compte l’existence de la maison individuelle sise sur la même unité foncière.

    Partant de l’interprétation retenue de l’article UN.1 du règlement de POS communal, la décision de la Cour administrative d’appel de Marseille est parfaitement cohérente, bien qu’elle appelle quelques précisions.

    Tout d’abord, bien que fondamentalement un mazet soit une construction à destination agricole ou constitue une dépendance de bâtiment d’habitation, l’article précité visait non pas les constructions à destination d’habitation mais les constructions à usage d’habitation ; ce dont il résulte qu’il n’y avait pas lieu d’examiner les caractéristiques constructives de ce mazet mais uniquement d’apprécier son usage.

    Ensuite, la commune n’apportait aucune preuve de ses allégations selon lesquelles ce mazet avait été anciennement à usage agricole et ne contestait même pas son existence juridique alors que si tel avait été le cas, il aurait alors incombé au pétitionnaire de prouver cette dernière (sur l’exemple d’attestations de riverains précisant avoir toujours vu un cabanon habitable sur le terrain jugées insuffisantes pour établir la régularité de l’ouvrage : TA. Nice, 1er juillet 1999, Epx Soton, req. n°97-00948).

    Enfin, si par principe l’existence d’une construction s’apprécie à la date à laquelle l’administration statue sur la demande d’autorisation de travaux s’y rapportant (CE. 17 avril 1992, Flaig, req. n°94.390), il est admis que les documents d’urbanisme locaux adoptent comme référence leur date d’entrée en vigueur (CAA. Nancy, Cne de Disheim, req. n° 93NC00805 ; depuis voir ici), ce qui était le cas en l’espèce (pour un exemple d’appréciation de l’existence de la construction à étendre à la date d’approbation du POS, nonobstant le silence de celui-ci sur ce point : TA. Rennes, 1er juin 2006, Sté KERN’ER CAR, req. n°03-0633. Cf : note du cinq septembre 2006).

    Par suite, il est donc logique que la Cour ait considéré le maset à étendre constituait « une construction à usage d'habitation existante à la date de la révision du POS » au sens des dispositions précitées de l'article UN1 pour ainsi juger que, dès lors que le bâtiment projeté était accolé au maset existant et ne comportait aucune séparation physique avec la construction existante, le projet avait pour objet l'extension d'une construction à usage d'habitation existante qui, au surplus et en toute état de cause, en l’absence de séparation physique, ne crée pas de logements nouveaux. A contrario, l’arrêt commenté peut ainsi être rapproché de celui par lequel la Cour administrative d’appel de Marseille a récemment jugé que :

    « Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article NC 1 du règlement du POS de la commune de Blauvac, approuvé le 24 novembre 1988, relatif aux occupations et utilisations du sol admises : «Peuvent être autorisées : 1. L'extension des constructions existantes, à usage d'habitation, lorsque cela n'entraîne pas la création de logement (…) 3. L'aménagement et la transformation des constructions à usage agricole en construction à usage d'habitation, dans les volumes existants, lorsque cela n'entraîne pas la création de nouveau logement et s'ils sont compatibles avec la vocation de la zone. (…) ;
    Considérant, d'une part, que, par l'arrêté contesté en date du 16 juillet 2001, le maire de la commune de Blauvac a fait droit à la demande de permis de construire déposée par Mme X, associée de la SCEA X, exploitant des terres plantées de vignes et de cerisiers, en vue de la construction d'un bâtiment, attenant à un cabanon existant, destiné au logement de travailleurs agricoles, sur un terrain cadastré Section AK n° 173 et 174, situé en zone NC du plan d'occupation des sols (POS) de la commune ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de permis de construire, que le bâtiment dont la construction était projetée devait comporter une chambre, une cuisine et des sanitaires ; qu'ainsi, l'extension en litige entraînait la création d'un logement et ne pouvait de ce fait être autorisée sur le fondement du 1 et du 3 de l'article NC 1 du règlement du POS (…)
    » (CAA. Marseille, 20 octobre 2005, Préfet du Vaucluse, req. n°02MA01501).

    Néanmoins, force est d’admettre que l’arrêt commenté paraît quelque peu critiquable quant à son interprétation de l’article UN.1 en cause, bien qu’il puisse également être rapproché d’un arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris selon lequel les prescriptions visant les constructions nouvelles ne sont pas applicables aux travaux portant sur l’extension de constructions existantes (CAA. Paris, 22 janvier 1998, Chalard req. n°97BX02302).

    Il est vrai que la rédaction de l’article UN.1 du POS communal n’était pas des plus précises puisqu’en se bornant à autoriser – sans plus de précision et sans réelle limite – « l'extension des constructions à usage d'habitation existantes », celui-ci introduisait une exception pour le moins étendue au principe applicable aux constructions nouvelles qui, pour leur part, n’étaient autorisées qu’à la condition de constituer une habitation individuelle et d’être composée d’un seul logement (une construction unique pouvant être formée de plusieurs habitations individuelles constitutives d’autant de logement : CAA. Bordeaux, 31 mai 2001, Epx Pezin, rq. N°97BX02195 ; sur la notion de construction unique, voir ici et là).

    Il reste que le Conseil d’Etat a précisé que le règlement local d’urbanisme ouvrant largement une exception à une règle doit être interprétée et appliquée en cohérence avec celle-ci au regard de sa finalité (CE. 11 décembre 1998, Sté Bonnabelle, req. n°161.592 ; voir surtout : concl. Honorat in BJDU n°1/1999, p.42).

    Or, en l’espèce, nonobstant la rédaction de l’article UN.1 en cause, il était assez clair que la finalité de cet article était de limiter le nombre de logement dans la zone considérée. Or, à s’en tenir à l’interprétation littérale de ses dispositions autorisant « l'extension des constructions à usage d'habitation existantes », toute construction à usage d’habitation existante, y compris collective, pourrait faire l’objet d’une extension, même si cette dernière a pour effet de créer plusieurs logements.

    Par ailleurs, la finalité des dispositions précitées étaient manifestement de moduler le principe issu de la jurisprudence dite « Sekler » mais ce, pour les seules constructions existantes ne respectant « les conditions de surface énoncées à l'article UN5 » également opposables aux constructions nouvelles.

    Or, si l’ensemble immobilier du pétitionnaire, ne respectait pas les prescriptions du POS communal opposables aux constructions nouvelles, c’était précisément celles n’autorisant que les constructions à usage d’habitation individuelle ne comportant qu’un logement. On aurait donc tout aussi bien compris que la Cour administrative d’appel de Marseille fasse application de la jurisprudence « Selker » et, par voie de conséquence, valide le refus de permis de construire opposé au pétitionnaire dès lors que les travaux projetés n’étaient pas étrangers à la règle méconnue et d’amélioraient pas la conformité de l’ensemble immobilier existant au regard de celle-ci.

    Pour autant, si on le rapproche des modulations récentes de la jurisprudence dite « Thalamy », l’arrêt commenté nous paraît justifié sur ce point.

    On sait, en effet, qu’il résulte de cette jurisprudence que par principe un ouvrage illégal ne peut pas faire l’objet de travaux nouveaux sans avoir été régularisé. Mais l’on sait également que le Conseil d’Etat a ultérieurement précisé que ce principe ne s’appliquait pas lorsque l’ensemble immobilier illégal comporte plusieurs constructions distinctes et que les travaux projetés portent sur une construction qui pour faire parti d’un ensemble illégal a, pour ce qui la concerne, été régulièrement édifiée (CE. 25 avril 2001, Alborn, req. n°207.095) : ce qui signifie que la jurisprudence dite « Thalamy » (qui, elle-même, n’a d’ailleurs jamais visé que les « travaux prenant appui » sur une construction illégale) doit être appliquée construction par construction, même lorsqu’il s’agit d’un même ensemble.

    Or, en l’espèce, si l’ensemble immobilier existant n’était pas conforme aux prescriptions applicables aux constructions nouvelles, il n’en demeure pas moins que la maison d’habitation et le mazet constituaient selon toute vraisemblance deux constructions distinctes.

    Dès lors et à transposer le principe dégagé par l’arrêt « Alborn », s’agissant de la jurisprudence « Thalamy », à la jurisprudence « Sekler », il n’y avait donc pas lieu d’apprécier globalement la conformité de l’ensemble immobilier du pétitionnaire aux prescriptions locales d’urbanisme mais seulement d’examiner isolément celle de la construction sur laquelle portaient les travaux projetés, laquelle était conforme aux prescriptions applicables aux constructions nouvelles puisqu’elle ne comportait qu’un logement ; régularité que les travaux projetés n’avaient pas vocation à modifier puisqu’ils n’emportait pas la construction d’un nouveau logement.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Une prescription technique irréalisable n’affecte pas d’illégalité le permis de construire lorsqu’elle n’apparaît pas nécessaire pour assurer la conformité du projet aux prescriptions d’urbanisme

    Lorsque le terrain n’apparaît pas exposé à un risque d’inondation, la prescription technique imposée par le permis de construire en considération de ce risque n’est pas nécessaire pour assurer la conformité du projet au regard de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme. Par voie de conséquence, la circonstance que cette prescription ne serait pas réalisable n’est pas de nature à affecter le permis de construire d’illégalité.

    CAA. Marseille, 9 novembre 2006, Cne de Tarascon, req. n°04MA00895

    Dans cette affaire, le Maire de la Commune de Tarascon avait délivré un permis de construire un immeuble à destination d’habitation sur un terrain faisant l’objet d’un classement administratif en zone submersible mais ce, en l’assortissant de la prescription suivante « l'attention du pétitionnaire est attirée sur le fait que la construction projetée est située en zone submersible réglementée du Rhône et qu'une crue de ce fleuve peut endommager ses biens. Le niveau des plus hautes eaux de la dernière crue s'est élevé à cet endroit à la cote de 11,90 m NGF. La construction devra disposer d'un niveau refuge accessible situé au-dessus de l'altitude précitée ».

    Le Préfet des Bouches-du-Rhône devait toutefois déférer ce permis de construire à la censure du juge administratif au motif tiré de la méconnaissance de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme et ce, en soutenant, notamment, que la prescription précitée ne pouvait assurer la conformité du projet au regard de cet article dès lors qu’elle était irréalisable.

    On sait, en effet, qu’aux fins d’assurer la conformité du projet aux normes d’urbanisme qui lui sont opposables, un permis de construire peut être assorti de prescriptions techniques imposant la réalisation de travaux ou d’aménagements que n’auraient pas prévus par le pétitionnaire.

    Mais pour être opérante, il est nécessaire que cette prescription soit légale ce qui implique non seulement qu’elle soit adéquate et qu’elle ait un impact limité au regard de l’économie générale du projet mais également qu’elle n’apparaisse pas irréalisable (CE. 14 décembre 1992, Epx Léger, req. n°106.685 ; CE. 1er mars 1996, Becaud, req. n°116.820).

    Or, contrairement aux prescriptions financières, une prescription technique constitue le soutien indivisible de l’autorisation d’urbanisme qui l’édicte, si bien que son illégalité intrinsèque affecte d’illégalité l’ensemble de l’autorisation et emporte donc l’annulation de cette dernière dans sa globalité ; telle étant la raison pour laquelle un recours en annulation exclusivement dirigé vers une telle prescription, et concluant donc à l’annulation partielle de l’autorisation, est irrecevable qu’il émane d’un tiers ou du pétitionnaire (CE 12 octobre 1979, Poidevin, req. n°12957).

    Mais dans l’affaire objet de l’arrêt commenté le moyen tiré du caractère irréalisable de la prescription en cause a été écarté, au premier chef, du simple fait qu’elle n’était pas nécessaire puisque la Cour administrative d’appel de Marseille avait précédemment constaté que nonobstant le classement administratif dont il faisait l’objet, le terrain à construire n’était pas, en fait, exposé à un risque particulier d’inondations :

    « Considérant, en second lieu, que, pour contester la légalité du permis en litige, le préfet fait également valoir que la prescription, fixée par l'article 3 de l'arrêté contesté, assortissant le permis de construire en litige, serait irréalisable ; que, toutefois, il résulte de ce qui vient d'être dit que la parcelle d'assiette du projet contesté n'est pas soumise à un risque d'inondation du fait de l'existence des ouvrages de protection existants ; qu'ainsi, et en toute hypothèse, la circonstance que la prescription en cause serait irréalisable est sans effet sur la légalité du permis de construire contesté ; qu'en tout état de cause, le préfet n'établit pas le caractère irréalisable de ladite prescription alors qu'il ressort des pièces du dossier que, des aménagements mineurs permettraient la réalisation d'un accès au toit à partir du bâtiment ».

    En substance, la Cour a donc considéré que le caractère prétendument irréalisable de la prescription en cause « est sans effet sur la légalité du permis de construire contesté » dès lors que celle-ci n’était pas nécessaire, en l’espèce, pour assurer la conformité du projet à l’article R.111-2 du code de l’urbanisme. Sur ce point, cet arrêt peut être rapproché de celui par lequel la Cour administrative d’appel de Bordeaux avait jugé qu’il ne pouvait être fait grief à un permis de construire délivré sur un terrain en zone inondable de ne pas être assorti de prescriptions spéciales dès lors qu’eu égard à la nature de la construction projetée – en l’occurrence, un abri de jardin ouvert – de telles prescriptions n’apparaissaient pas nécessaires (CAA. Bordeaux 3 mai 2001, Savariau, req. n°97BX02145).

    On sait, en effet, que le Conseil d’Etat a précisé que s’agissant de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme et, notamment, du risque d’inondation d’absence de prescriptions spéciales n’est illégale que si de telles prescriptions sont nécessaires (CE. 23 décembre 1994, Peissik, req. n°108.969). Mais a contrario, force est donc de considérer qu’une prescription qui n’est pas nécessaire est nécessairement illégale puisqu’elle impose au titulaire de l’autorisation qui l’édicte une contrainte injustifiée.

    Partant et suivant le principe selon lequel une prescription technique est indivisible de l’autorisation qu’elle assortit, une prescription technique qui n’est pas nécessaire, et donc illégale, affecte d’illégalité l’ensemble de l’autorisation obtenue. Il faut, toutefois, préciser que si, par principe, une prescription technique est indivisible de l’autorisation qui l’impose c’est dans la mesure où celle-ci est censée permettre d’assurer la conformité du projet aux normes d’urbanisme qui lui sont opposables ; telle étant la raison pour laquelle, d’une part, l’administration ne peut refuser un permis de construire lorsqu’il apparaît que l’édiction de prescriptions spéciales aurait permis d’assurer la conformité du projet aux règles d’urbanisme (CE. 12 mai 1989, SCI Azr Parc, req. n°96.665) et, d’autre part, la légalité d’un permis de construire assorti de prescriptions doit être appréciée non pas seulement en considération du projet présenté par le pétitionnaire mais également au regard de ces prescriptions (CE. 26 février 2001, Dorwling-Carter, req. n°211.318).

    A notre sens, une prescription qui n’est pas nécessaire est certes illégale mais dans la mesure où, précisément, elle n’est pas nécessaire pour assurer la conformité du projet aux règles d’urbanisme qui lui sont opposables, celle-ci n’a pas à être considérée comme le soutien indivisible du permis de construire qui l’édicte. Mais force est de constater que telle ne semble pas être la position du juge administratif et, notamment, de la Cour administrative d’appel de Marseille à s’en tenir à sa jurisprudence antérieure :

    « Considérant, d'autre part, que le juge administratif, lorsqu'il est saisi de conclusions tendant à l'annulation partielle d'un acte dont les dispositions forment un tout indivisible, est tenu de rejeter ces conclusions comme irrecevables quels que soient les moyens invoqués contre la décison attaquée ; Considérant que, par une décision en date du 22 juillet 1993, le maire de BANDOL ne s'est pas opposé à l'ouverture d'une fenêtre sur une maison à usage d'habitation projetée par Mme GILBERT ; que, toutefois, le maire de BANDOL a précisé, dans le corps de sa décision, que cette ouverture devrait comporter un verre opaque ; que cette prescription spéciale édictée par application des dispositions précitées constitue un tout indivisible avec l'autorisation accordée alors même qu'elle ne constitue pas une prescription relative à la sécurité ou à l'aspect architectural de la construction ; que, par suite, Mme GILLET n'était pas recevable à demander l'annulation de la décision précitée en tant seulement qu'elle prescrit l'utilisation d'un verre opaque » (CAA. Marseille, 31 mai 2001, Mme Gillet, req. n°98MA00512).

    Dans cette affaire, la Cour a donc considéré que pour ne pas être nécessaire à la sécurité et à l’aspect architectural de la construction, la prescription en cause n’en était pas moins indivisible de l’autorisation en cause et ne pouvait donc pas faire l’objet d’une annulation partielle ; ce dont il résulte que son illégalité aurait pu emporter l’annulation de l’ensemble de l’autorisation…

    Mais il est vrai que dans l’affaire objet de l’arrêt commenté, la légalité de la prescription en cause était contestée en considération de son caractère prétendument irréalisable et non pas au motif qu’elle n’était pas nécessaire ; ce qui aurait été pour le moins contradictoire au soutient d’un recours principalement fondé sur l’article R.111-2 du code de l’urbanisme et la soi-disant inondabilité du terrain à construire.

     

    Patrick E. DURAND Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris Cabinet Frêche & Associés

  • Un permis de construire peut être régulièrement délivré sur la partie libre d’un emplacement réservé devenue inutile du fait de la réalisation de l’équipement d’intérêt général en vue duquel il a été institué

    Lorsqu’au terme des travaux de réalisation d’une voie publique en vue de laquelle un emplacement réservé a été créé, il apparaît qu’une partie du terrain réservé demeure libre et ne sera donc pas utilisée, un permis de construire peut être régulièrement délivré sur cette partie de terrain quand bien même le reliquat de cet emplacement réservé n’a pas été expressément supprimé par une décision ad hoc.

    CAA. Bordeaux, 12 février 2007, M. Jacques Y, req. n°04BX00214


    Dans cette affaire un permis de construire 28 logements sociaux avait été délivré sur un terrain relevant du domaine privé communal. Il reste que ce terrain était grevé d’un emplacement réservé destiné à permettre la réalisation d’une voie publique devant assuré la desserte d’un équipement public, en l’occurrence, une médiathèque.

    Or, des voisins du terrain à construire devaient attaquer ce permis de construire en soutenant, notamment, que la destination de l’immeuble ainsi autorisé était incompatible avec l’affectation de l’emplacement réservé grevant ledit terrain.

    On sait, en effet, qu’aux fins de permettre la réalisation de voies, d’espaces verts ou d’équipements d’intérêt général, les communes ont la possibilité d’instaurer des emplacements réservés à cet effet, lesquels ont pour effet de grever les terrains concernés d’une quasi-inconstructibilité puisqu’en dehors du projet en vue duquel l’emplacement a été créé, seuls des ouvrages précaires peuvent y être autorisés dans le cadre d’un permis de construire délivré au titre de l’actuel article L.423-1 du code de l’urbanisme (par l’entrée en vigueur du décret n°2007-18 du 5 janvier 2007, ce régime sera substantiellement modifié puisqu’il ne sera plus besoin que l’ouvrage soit précaire par destination dans la mesure où c’est dorénavant le permis de construire s’y rapportant qui sera délivré à titre précaire).

    En dehors de ce cas particulier, le terrain grevé d’un emplacement réservé ne peut faire l’objet d’aucun permis de construire portant sur un projet autre que celui en vue duquel il a été institué ; ce qui vaut tant à l’égard des tiers qu’à l’égard de la collectivité publique l’ayant institué ou de la collectivité publique réservataire et ce, quand bien même le terrain à construire appartiendrait-il à l’une des ces dernières et y compris s’il s’agit d’un autre projet d’intérêt général dont la réalisation ne s’opposerait pas, par elle-même, à celle du projet pour lequel l’emplacement a été réservé :

    « Considérant que le plan d'occupation des sols approuvé de la commune de Courbevoie comportait, à la date du 15 octobre 1986 à laquelle a été délivré le permis litigieux, un emplacement réservé, sous le numéro 123, d'une superficie de 15 450 m2 destiné à permettre l'édification de locaux scolaires sous la forme, notamment, d'une école maternelle et de l'extension du groupe scolaire existant ; qu'ainsi le maire, postérieurement à l'acquisition des parcelles nécessaires, d'ailleurs autorisé par le conseil municipal à fin de réalisation d'équipements scolaires, ne pouvait légalement délivrer un permis de construire ayant pour objet la réalisation d'un parc de stationnement en sous-sol, de 9 420 m2 de surface hors oeuvre brute, alors même que cette construction n'aurait pas fait obstacle à l'édification ultérieure de bâtiments scolaires ; que, par suite, le permis de construire accordé le 15 octobre 1986 à la commune de Courbevoie, qui méconnaît les prescriptions alors en vigueur du plan d'occupation des sols, est entaché d'illégalité » (CE. 14 octobre 1991, Association du cadre de vie des résidents de Courbevoie-Bécon, req. n°92.532).

    Par principe, en effet, le respect de la destination d’un emplacement réservé s’impose tant que celui-ci n’a pas été abrogé ; et pour le juge administratif il ne peut y avoir de renoncement implicite au bénéfice d’un tel emplacement (sur la position du juge judiciaire : Cass. civ. 24 novembre 1987, Bull. civ., III, n°192 ; Cass. civ., 17 juillet 1997, Bull.civ., 1997, III, n°171).

    En l’état, le permis de construire contesté dans l’affaire objet de l’arrêt commenté apparaissait donc illégal. Il reste que si l’emplacement réservé en cause n’avait pas été expressément abrogé, la voie en vue de laquelle cet emplacement réservé avait été institué avait déjà été entièrement réalisée.

    Par voie de conséquence, la partie du terrain objet du permis de construire contesté restée grevée d’un emplacement réservé qui n’avait plus vocation à être utilisée et, en d’autres termes, était ainsi devenu inutile. Tel est la raison pour laquelle la Cour administrative d’appel de Bordeaux a rejeté ce moyen :

    « Considérant, en troisième lieu, qu'il ressort des pièces du dossier qu'à la date à laquelle le permis litigieux a été délivré, la voie nouvelle de liaison entre la rue de Ciron et la rue de la Berchère, destinée notamment à desservir la médiathèque, et qui faisait l'objet d'un emplacement réservé, était entièrement réalisée sur une partie du terrain faisant l'objet de cet emplacement réservé ; que le maire de la commune, laquelle est propriétaire de l'ensemble du terrain, lui-même situé en zone UB du plan d'occupation des sols, a pu, sans entacher sa décision d'illégalité, délivrer un permis de construire pour une construction qui empiète sur la partie de l'emplacement réservé devenue inutile compte-tenu de l'entier achèvement des travaux de construction de la voie nouvelle ».

    En cela, l’arrêt commenté est bien évidemment à rapprocher des jurisprudences dites « Secher » et « Kergall » mais reconnaît une nouvelle modalité d’extinction d’un emplacement réservé devenu inutile.

    On sait, en effet, que le Conseil d’Etat a pu juger illégaux le maintient d’un emplacement réservé n’ayant pas reçu l’affectation à laquelle il était destiné au bout de plusieurs décennies (CE. 17mai 2002, Kergall, req. n°221.186) ainsi que le refus d’abroger un emplacement réservé alors que la personne publique avait pris un autre parti d’aménagement à l’égard du terrain grevé par celui-ci (CE. 6 octobre 1995, Secher, in BJDU, n°6/1995).

    A cela, l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Bordeaux ajoute donc un nouveau cas, somme toute fort logique : l’extinction de la partie de l’emplacement réservé devenue inutile par la réalisation du projet en vue duquel il a été créé.

    Mais il faut également relever, d’une part, que dans cette affaire et contrairement aux deux arrêts précités de la Haute Cour, la décision attaquée était le permis de construire délivré sur l’emplacement réservé en cause et souligner, d’autre part, que la Cour administrative d’appel de Bordeaux a donc considéré qu’un emplacement réservé devenu inutile perd son opposabilité alors même qu’il n’a pas fait l’objet d’une suppression expresse. A contrario, force est donc de considérer qu’un emplacement réservé devenu inutile ne saurait régulièrement motivé un refus de permis de construire délivré sur celui-ci.

    Pour conclure sur l’arrêt commenté et faire le lien avec notre précédente note sur la prise compte d’équipements publics futurs nécessaires à la desserte des constructions projetées, on précisera que la voie objet de l’emplacement réservé en cause a été prise en compte au titre de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme dans la mesure où elle « avait été entièrement réalisée à la date à laquelle le permis de construire a été délivré » ; ce qui induit qu’à défaut, la seule circonstance que sa réalisation ait fait l’objet d’un emplacement réservé n’aurait pas suffit. Et pareillement, la Cour a établi la légalité du permis de construire contesté au regard de l’article 4 du règlement de POS communal ainsi que celle de prescription imposant, à ce titre, le raccordement à un bassin de rétention en considération du fait que « ce bassin de rétention était achevée à la date à laquelle le permis contesté a été délivré » ; ce dont on peut déduire qu’à défaut, le permis de construire aurait été jugé illégal puisque sa conformité était conditionnée à une prescription irréalisable à la date de délivrance du permis de construire (pour un exemple, en la matière, d’une prescription irréalisable et, partant, illégale : CE. 12 mai 1993, Epx Ainciburru, req. n°124.936).



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • A quelles conditions des équipements publics futurs peuvent-ils être pris en compte pour apprécier la constructibilité d’un terrain et la conformité d’un projet au regard des prescriptions d’urbanisme ?

    La seule programmation d’un équipement public ne permet pas d’établir la constructibilité terrain au regard des prescriptions d’urbanisme relatives à l’accessibilité de ce dernier et à l’assainissement des constructions projetées. Il en va de même lorsque les travaux de réalisation de ces équipements sont en cours dès lors que leur achèvement est prévu à une date éloignée.

    CAA. Bordeaux, 8 février 2007, Sté du Val de Bellassise, req. n°P4BX00294 / CAA. Nancy, 1er mars 2007, Sté CERCA, req. n°05NC00767


    Les deux arrêts aujourd’hui commentés ont en commun de traiter de la question relative à la possibilité de prendre en compte des la réalisation future d’équipements publics pour apprécier la constructibilité d’un terrain et la conformité d’un projet, en l’occurrence au regard des règles relatives à sa desserte par les voies publiques et le réseau public d’assainissement.

    On sait, en effet, que la légalité d’un permis de construire s’apprécie à sa date de délivrance en considération du projet présenté par le pétitionnaire, tel qu’il apparaît à l’examen du dossier déposé à cet effet. Par voie de conséquence et par principe, seuls les aménagements dont la réalisation est autorisée par le permis de construire et ceux existants à la date de délivrance de ce dernier peuvent être prise en compte pour apprécier sa légalité.

    Or, aux termes des dispositions du Code de l’urbanisme, ce principe ne connaît qu’une exception, en l’occurrence celle résultant de l’article L.421-5 du Code de l’urbanisme en ce qu’il dispose : « lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés » ; dont on rappellera qu’il n’est applicable qu’en matière de permis de construire.

    En dehors du cas où l’article précité est applicable, il semble, toutefois, ressortir des quelques affaires où le juge administratif ait eu à se prononcer sur la question de savoir si des travaux d’équipement public ne relevant pas de la demande peuvent être pris en compte qu’il peut en être ainsi pour autant qu’à la date de délivrance du permis de construire, deux principales conditions soient réunies (pour un exemple illustrant ces deux conditions : CE. 28 juillet 2000, Cne de Decines-Charpieu, req. n°199.325).

    Au premier chef, la réalisation des travaux d’aménagement routier considérés doit avoir été effectivement planifiée, ce qui implique qu’elle ait à tout le moins fait l’objet d’une décision de principe de la collectivité compétente (CAA. Bordeaux, 4 décembre 2003, Cne de Toulouse, req. n°99BX00686).

    Il reste qu’il semble également nécessaire que la réalisation des travaux puisse être établie avec un certain degré de certitude. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé que le seul projet d’aménagement d’une voie ne pouvait être pris en compte dès lors que sa date de réalisation était incertaine (CE. 7 mai 1986, Mme Kindersmans, req. n°59.847) et que le Tribunal administratif de Nice a considéré qu’il en allait de même à l’égard d’un projet d’élargissement d’une voie planifié par le POS dès lors que l’échéance et les modalités de réalisation de ce projet n’étaient pas arrêtées à la date de délivrance du permis de construire en cause (TA. Nice, 5 mars 1998, M. Macherez, req. n°94-03028). Et pour être complet, on précisera que la circonstance que les travaux d’aménagement routier considérés donnent lieu à une participation imposée au constructeur – telle une cession de terrain prescrite sur le fondement de l’article R.332-15 du Code de l’urbanisme en vue de la réalisation d’une voie publique – ne permet pas à elle-seule d’échapper aux deux conditions pré-exposées pour qu’ils soient pris en compte (CAA. Marseille, 4 mai 2006, EURL C2C, req. n°281.253).

    A contrario, il semble donc raisonnable de considérer que, lorsqu’à la date de délivrance du permis de construire considéré, les travaux d’équipement en cause sont non seulement planifiés mais qu’en outre, leur mode et leur planning de réalisation sont établies ceux-ci peuvent être pris en compte pour apprécier la constructibilité du terrain et la conformité du projet puisqu’en substance, pour être futurs ils peuvent alors être, néanmoins, être considérés comme présentant un caractère suffisamment certain.

    Il faut, cependant, souligner que dans la seule affaire où, à notre connaissance, le juge administratif a tenu compte de travaux d’aménagement routier futurs, ces derniers avait non seulement fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique mais étaient, en outre, substantiellement avancés puisqu’en voie d’achèvement à la date de délivrance du permis de construire contesté (TA. Nice. 31 janvier 1984, Gianotti, req. n°83-0011; voir également ici). Précisément, les deux arrêts aujourd’hui commentés vont dans ce sens.

    Dans la première affaire, la société du Val de Bellassise avait présenté une demande d’autorisation de lotir qui devait être refusée au titre de l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme dans la mesure où les modalités d’assainissement des constructions projetées étaient de nature à porter atteinte à la salubrité publique. Et la Cour administrative d’appel de Bordeaux devait valider ce refus au motif suivant :

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et, en particulier, de l'avis émis par les services de la direction départementale des affaires sanitaires et sociales le 5 février 2002, que la station d'épuration communautaire d'Ambarès, destinée à traiter les eaux usées des futures constructions du lotissement envisagé, était hydrauliquement et organiquement surchargée ; que si la construction d'une nouvelle station d'épuration était programmée depuis 1998, les travaux étaient en cours en mars 2002 à la date de la décision attaquée et ne devaient pas être achevés avant 2005 ; que le maire de la commune de Saint-Eulalie pouvait, dès lors, légalement refuser de délivrer l'autorisation sollicitée au motif que le projet de lotissement envisagé était, s'agissant de l'évacuation des eaux usées des futures constructions, de nature à porter atteinte à la salubrité et la sécurité publiques ; que la circonstance que d'autres autorisations de lotir aient été néanmoins accordées depuis 2001 est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ».

    Dans la seconde affaire, la société SERCA avait sollicité de la commune d’Eschau un certificat d’urbanisme en vue de la réalisation d’un lotissement dans une zone dont l’urbanisation était conditionnée, par le POS, par la réalisation de voie d’accès faisant l’objet d’emplacements réservés au bénéfice de la Communauté urbaine de Strasbourg. Néanmoins, le Maire d’Eschau devait opposer un certificat d’urbanisme négatif que la Cour administrative d’appel de Nancy devait, pour sa part, valider au motif suivant :

    « Considérant en premier lieu que, par la décision attaquée en date du 16 septembre 2003, le maire d'Eschau a répondu négativement à la demande de certificat d'urbanisme déposée par la Société SERCA en vue de la création d'un lotissement au motif qu'alors que le terrain était situé en zone I NA 1 du plan d'occupation des sols et que l'urbanisation de cette zone était conditionnée par la réalisation des voies d'accès faisant l'objet d'emplacements réservés au bénéfice de la Communauté urbaine de Strasbourg, ces opérations n'étaient ni réalisées, ni programmées à court terme par celle-ci ; qu'il s'ensuit qu'eu égard aux éléments de fait ci-dessus mentionnés, le maire d'Eschau a pu à bon droit délivrer un certificat d'urbanisme négatif concernant le lotissement projeté (et) prendre en considération les seules intentions de la Communauté urbaine de Strasbourg » (voir, toutefois, de la même juridiction).

    Force est de donc de considérer que pour que des équipements publics futurs puissent être pris en compte pour apprécier la constructibilité d’un terrain et la conformité d’un projet, il est non seulement nécessaire qu’ils soient programmés et que leur modalité d’exécution soient connues mais en outre, il doit apparaître, à la date de délivrance du permis de construire, qu’ils sont susceptibles d’être réalisés à courte échéance ; la question de savoir s’ils doivent être en voie d’achèvement à cette date ou s’il est seulement nécessaire qu’il soit établi qu’ils seront achevés, au plus tard, concomitamment des travaux objets de la demande d’autorisation d’urbanisme restant, à notre connaissance, à trancher.

    Mais pour être complet, on précisera, à titre de conclusion, que ce principe est également opposable à l’administration puisqu’à titre d’exemple, il a été jugé qu’elle ne pouvait légalement opposer un refus de permis de construire au titre de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme en considération d’un carrefour giratoire à aménager mais en vue de la réalisation duquel la collectivité compétente n’avait pris aucune décision de principe (CAA. Lyon, 2 novembre 2004, M. Jaunay, req. n°98LY00089).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
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