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JURISURBA - Page 97

  • Les axes commerciaux institués par le plan local d’urbanisme de Paris sont illégaux

    Le Tribunal administratif de Paris a annulé la délibération des 12 et 13 juin 2006 par lequel le Conseil de Paris a adopté son PLU, notamment, en tant que son règlement prévoit l’institution d’axes commerciaux et ce, en raison de « l’atteinte toute particulière au droit de propriété » de ce dispositif que ne peut justifier le retard pris dans l’adoption du décret d’application de l’article 58 de la loi du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises.

    TA. Paris, 2 août 2007, Préfet de Région d’Ile-de-France, Préfet de Paris c/ Ville de Paris, req. n°07-00962

    C’était l’une des principales innovations du plan local d’urbanisme parisien adopté par délibération des 12 et 13 juin 2006 : l’institution de près de 230 kilomètres d’axes commerciaux au sein desquels, en substance, le changement de destination des commerces de proximité en rez-de-chaussée est interdit. Il reste que ce dispositif devait être déféré à la censure du Tribunal administratif de Paris par le Préfet de la Région d’Ile-de-France.

    Quoi que l’on puisse penser des motivations réelles de ce déféré (dont on relèvera, toutefois, qu’il va à l’encontre d’une préconisation formulée, en 2004, par le Ministère de l’équipement à travers une réponse ministérielle) et de l’opportunité du dispositif litigieux (laquelle est difficilement contestable pour qui, comme l’auteur de ces lignes, a longtemps résidé dans un quartier du 11e arrondissement marqué par la mono-activité dite du « textile chinois », laquelle est source d’une grande tranquillité mais devient nettement plus problématique lorsque l’on a oublié d’acheter son pain…), force est néanmoins de considérer que la légalité de ce dernier était effectivement sujette à caution.

    Il est clair que la sauvegarde du commerce de proximité constitue l’un des objectifs assignés aux documents d’urbanisme locaux et, notamment, aux plans locaux d’urbanisme par les articles L.121-1 et L.123-1 du code de l’urbanisme. Il semble toutefois difficilement concevable que la réalisation de cet objectif puisse régulièrement passer par l’institution de tels axes commerciaux.

    Rappelons, en effet, que suivant les dispositions des articles L.123-1 et R.123-9 du Code de l’urbanisme, l’article 1 d’un règlement de zone a vocation et ne peut donc régir que les « occupations ou utilisations des sols interdites ».

    Or, l’institution de tels axes commerciaux interdit, tout d’abord, les changements de destination de ces locaux commerciaux quand bien même leur nouvelle destination serait-elle parfaitement conforme à l’affectation de la zone.

    Ensuite, elle ne procède pas de considérations liées à la destination de la zone et des terrains qui y sont inclus mais de considérations liées à l’affectation actuelle des immeubles existants. A ce sujet l’administration avait, d’ailleurs, pu préciser qu’un règlement d’occupation des sols « ne saurait prévoir une interdiction ou des conditions d’usage d’une construction » :DGUHC, « Guide des POS », 1999, p.100).

    Enfin, un tel dispositif induit que les rez-de-chaussée des constructions nouvelles peuvent avoir une autre destination que le commerce, ce qui n’est pas cohérent au regard de l’objectif poursuivi et, par voie de conséquence, quelque peu « discriminatoire » ; étant d’ailleurs relevé que dans la mesure où l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme dispose que « les règles édictées [par le règlement du PLU] peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt » et, en d’autres termes, se borne à introduire une possibilité de moduler la règle d’urbanisme en cause au regard de la destination de la construction, il n’est pas si certain qu’un tel règlement puisse moduler, même indirectement, ses prescriptions en considération du caractère nouveau ou existant de la construction en cause.

    Par ailleurs, mais c’est un débat qui n’intéresse pas la légalité d’un tel dispositif, on pouvait s’interroger sur son efficacité et les modes de contrôle permettant d’en assurer le respect.

    D’une part, l’institution d’axes commerciaux au sein desquels le changement de destination des locaux en rez-de-chaussée affectés en commerces de proximité est interdit ne s’oppose pas à la « désaffectation » des locaux commerciaux considérés dès lors qu’ils ne reçoivent pas une autre destination ; étant rappelé que, par principe, une construction conserve sa destination au regard du droit de l’urbanisme tant qu’une nouvelle ne lui a pas été conférée par une autorisation d’urbanisme.

    D’autre part et surtout, on relèvera qu’à Paris, les commerces en rez-de-chaussée sont le plus souvent aménagées dans des locaux d’un immeuble à destination d’habitation, voire de bureaux ou de services. Et il est vrai que réaménager ces commerces, à titre d’exemple, en logements constitue, en l’état, un changement de destination assujetti à permis de construire.

    On sait, en effet, qu’aux termes de l’actuel article L.421-1 du Code de l’urbanisme tout travaux, quelles qu’en soient la nature et l’importance, s’accompagnant d’un changement de destination requiert un permis de construire ; ces changements devant être appréciés à l’échelle du local considéré et non pas de la destination dominante de l’immeuble au sein duquel il est aménagé (CE. 19 mars 2001, Cne du Grau-du-Roi, req. n°194.861 ; Cass. crim., 16 mai 2006, pourvoi n°05-85.599).

    Il reste que l’une des principales innovations du décret du 5 janvier 2007 pris pour application de l’ordonnance du 8 décembre 2005 portant réforme des autorisations d’urbanisme n’est pas tant de soumettre les changements de destination, par principe, à déclaration préalable et, par exception, à permis de construire – et ce, même lorsque ce changement procède du simple usage et, en d’autres termes, s’opère sans travaux – que de préciser que « les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal » (art. R.421-14 et R.421-17, nouveaux).

    Or, s’il incombera à la jurisprudence administrative de définir les critères permettant de considérer un local comme accessoire d’un local principal, il ne paraît pas totalement déraisonnable de considérer qu’un commerce en rez-de-chaussée d’un immeuble dont les étages sont à destination de logements en est le local accessoire, d’autant que nouveaux articles R.421-14 et R.421-17 du code de l’urbanisme visent « les changements de destination d'un bâtiment existant entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 », ce qui induit qu’il ne semble pas absolument nécessaire qu’il y est entre les locaux considérés un lien de complémentarité les rendant indissociables pour que l’un soit considéré comme accessoire à l’autre.

    Si tel devait être le cas et à titre d’exemple, l’aménagement en logement d’un commerce en rez-de-chaussée d’un immeuble dont les étages seraient à destination d’habitation ne constitueraient donc pas un changement de destination ou, plus précisément, ne devrait pas s’analyser comme un changement de destination au sens des nouveaux articles R.421-14 et R.421-17 du code de l’urbanisme et n’impliqueraient donc, ni déclaration préalable, ni permis de construire…

    Or, par ailleurs, les instruments offerts par le droit de l’urbanisme pour assurer efficacement et concrètement la sauvegarde du commerce de proximité sont rares , d’autant que l’on attend encore (sur cette question : Rép. min. n°19.260, JO Sénant, 27 octobre 2005, p.2797 ; Rép. min. n°21.674, JO Sénat, 23 mars 2006, p.869) le décret d’application de l’article 58 de la loi n°2005-882 du 2 août 2005 en faveur des petites et moyennes entreprises, aujourd’hui codifié à l’article L.214-1 du Code de l’urbanisme, lequel a institué un droit de préemption spécifique portant sur les cessions de fonds de commerce, de fonds artisanaux et de baux commerciaux.

    Mais précisément, le Tribunal administratif de Paris a jugé que ce retard ne pouvait à lui seul justifier le dispositif litigieux « portant une atteinte toute particulière au droit de propriété » au regard de la décision du Conseil constitutionnel n° 2006-436 DC du 7 décembre 2000 ayant précédemment censuré le point 3°de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme issu de la Loi « SRU » du 13 décembre 2000.

    D’ailleurs, selon nous, il n’est pas si certain qu’en l’absence de son décret d’application le dispositif institué par l’article L.214-1 précité soit nécessairement inapplicable.

    En effet, le seul fait qu’un décret d’application prévu par un dispositif législatif ne soit pas intervenu n’implique pas ipso facto que ce dernier n’est pas d’applicabilité immédiate ; sauf, bien entendu, à ce qu’il ait expressément subordonné son entrée en vigueur à l’intervention de ce décret – ce qui n’est pas le cas de l’article L.214-3 du Code de l’urbanisme – puisqu’en pareil cas, le juge administratif recherche si les dispositions législatives en cause sont suffisamment précises pour être applicables (CE. 18 janvier 2006, FNAUT, req. n°263.468), nonobstant l’absence de décret d’application (CAA. Bordeaux, 16 mai 1991, CNRACL, req. n°89BX01144).

    Mais il vrai que si le dispositif institué par l’article 58 de la loi n°2005-882 du 2 août 2005 n’est pas d’une telle généralité qu’il puisse en être assurément déduit qu’il est inapplicable en l’absence du décret d’application à intervenir, à l’inverse, il n’atteint pas non plus un degré de précision permettant de conclure avec certitude à son applicabilité immédiate…

    Néanmoins, il ne nous semble pas déraisonnable de considérer que celui-ci est suffisamment précis pour être appliqué en l’état puisque l’article L.214-1 du Code de l’urbanisme précise les conditions d’institution du droit de préemption qu’il instaure (une délibération motivée délimitant son périmètre d’application territorial), son champ d’application matériel (toute cession de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux), sont fait générateur (chaque cession devant préalablement faire l’objet une déclaration du cédant devant préciser le prix et les conditions de la cession, à l’instar de la « traditionnelle » déclaration d’intention d’aliéner dont on voit mal pourquoi le contenu le la déclaration prévue par l’article précité s’en éloignerait), ses modalités d’exercice (par renvoi exprès aux dispositions des articles L.213-4 à L.213-7 du Code de l’urbanisme et implicite à certaines des dispositions de son article L.231-2).

    Précisément, l’élément déterminant nous semble être ce renvoi aux modalités d’application des droits de préemption existants, telles qu’elles sont définies par les dispositions législatives précitées du Code de l’urbanisme, lequel implique également un renvoi implicite mais nécessaire à ses articles R.213-4 et suivants.

    Force est, d’ailleurs, d’admettre que l’objectif poursuivi par le législateur aurait pu être réalisé par l’intégration des cessions de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux au droit de préemption urbain renforcé, sous réserve de quelques aménagements particuliers. Et en toute hypothèse, les seules réelles spécificités du droit de préemption institué par l’article 58 de la loi n°2005-882 du 2 août 2005, comparé au droit de préemption urbain, procèdent, d’une part, de la circonstance qu’il peut être instauré dans les communes n’étant pas couverte par un document d’urbanisme local, ce qui ressort implicitement mais néanmoins clairement de l’article L.214-1.al.-1 du Code de l’urbanisme et d’autre part, de l’article L.214-2 du Code de l’urbanisme dont les dispositions sont particulièrement claires et, surtout, précises.

    A notre sens, la seule réelle difficulté procède de la circonstance que l’article L.214-1 du Code de l’urbanisme ne régit pas les conditions d’opposabilité de la délibération pouvant instituer le droit de préemption qu’il prévoit. Il reste que cette « carence » n’est pas source de vide juridique puisqu’en l’état et à défaut donc de disposition spéciale applicable, force est de considérer que l’opposabilité de cette délibération est assujettie au respect des dispositions du Code général des collectivités territoriales relatives à la publication des délibérations du Conseil municipal, auxquelles peuvent être joutées les formalités de publication prévues par les articles R.211-2 et R.211-4 du Code de l’urbanisme s’agissant du droit de préemption urbain de « droit commun » et « renforcé ».

    Tant par son dispositif intrinsèque que par les renvois aux dispositions applicables, notamment, au droit de préemption urbain – auquel s’ajoutent les principaux généraux issus de l’article L.210-1 du Code de l’urbanisme lequel vise « les droits de préemptions institués par le présent titre » dont font partie les articles L.214-1 et suivants – les articles L.214-1 et suivants du Code de l’urbanisme nous semblent donc d’applicabilité immédiate. Et pour conclure, on relèvera que le Tribunal administratif de Lyon a récemment jugé que le droit de préemption urbain de « droit commun » pouvait être mise en œuvre dans le but d’assurer le maintien de commerces de proximité (TA. Lyon, 24 mai 2006, M. & Mme D., req. n °05-07985) : c’est donc bien qu’il existe une réelle connexité entre ces deux droits de préemption.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • L’arrêté fixant la composition de la commission départementale d’équipement commercial doit-il désigner nominativement ses membres ?

    Aucune disposition législative ou règlementaire n'impose au préfet, au stade de l'arrêté fixant la composition de la commission départementale d’équipement commercial, de désigner nominativement ceux des membres de la commission qui sont suffisamment identifiés par la désignation de leur fonction ou de leur mandat. Et si ces personnalités peuvent se faire représenter, il n'appartient pas non plus au préfet de désigner par avance la personne ainsi appelée à siéger selon les usages de la fonction représentée.

    CAA. Lyon, 24 mai 2007, Ebt Pierre Fabre, req. n°04LY00261


    Voici un arrêt qui marque un heureux assouplissement de la jurisprudence ou, à tout le moins, démontre que la question relative à la désignation des membres de la commission départementale d’équipement commercial n’est pas tranchée (depuis, voir ici).

    On sait, en effet, que les Cours administratives d’appel de Bordeaux, Nantes et Versailles se sont récemment illustrées en jugeant que l’arrêté préfectoral fixant la composition de ladite commission ne pouvait se borner à indiquer leur fonction ou leur mandat puisqu’aux fins de permettre la vérification de leur nécessaire impartialité, il serait nécessaire qu’il les désigne nominativement (CAA. Bordeaux, 21 mai 2007, req.n°04BX00374 ; CAA. Nantes, 19 décembre 2006, req. n°05NT01988 ; CAA Versailles, 8 juin 2006, req. n°04VE00164). Pour citer le plus récent, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a ainsi jugé que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 720-8 du code de commerce : « I - La commission départementale d'équipement commercial est présidée par le préfet qui, sans prendre part au vote, informe la commission sur le contenu du programme national prévu à l'article L. 720-1 et sur le schéma de développement commercial mentionné à l'article L. 7203. / II - Dans les départements autres que Paris, elle est composée : / 1º Des trois élus suivants : / a) Le maire de la commune d'implantation ; / b) Le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'aménagement de l'espace et de développement dont est membre la commune d'implantation ou, à défaut, le conseiller général du canton d'implantation ; / c) Le maire de la commune la plus peuplée de l'arrondissement, autre que la commune d'implantation ; ( ) dans le cas où la commune d'implantation appartient à une agglomération multicommunale comportant au moins cinq communes, le maire de la commune la plus peuplée est choisi parmi les maires des communes de ladite agglomération ; / 2º Des trois personnalités suivantes : / a) Le président de la chambre de commerce et d'industrie dont la circonscription territoriale comprend la commune d'implantation, ou son représentant ; / b) Le président de la chambre de métiers dont la circonscription territoriale comprend la commune d'implantation, ou son représentant ; / c) Un représentant des associations de consommateurs du département. ( ) » ; qu'aux termes de l'article 10 du décret n° 93-306 du 9 mars 1993 : « Pour chaque demande d'autorisation, un arrêté préfectoral fixe la composition de la commission » ; qu'aux termes de l'article 11 du même décret : « Les membres de la commission sont tenus de remplir un formulaire destiné à la déclaration des intérêts qu'ils détiennent et des fonctions qu'ils exercent dans une activité économique. Aucun membre ne peut siéger s'il n'a remis au président de la commission ce formulaire dûment rempli » ; qu'enfin, l'article 22 de ce décret dispose que : « Dans le délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement d'une demande d'autorisation, les membres de la commission départementale d'équipement commercial reçoivent, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, communication de cette demande accompagnée : - de l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission ( ) » ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que le préfet du département doit, afin de permettre aux intéressés de s'assurer de l'impartialité de la commission, et sous peine de méconnaître une formalité substantielle, préciser l'identité des représentants éventuels des élus et autorités composant la commission départementale d'équipement commercial appelée à se prononcer sur une demande d'autorisation ;
    Considérant que l'arrêté du préfet de la Gironde du 15 octobre 2002 fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial appelée à se prononcer sur la demande de la société Dis.Li.Al désigne les maires de Libourne et de Saint-Denis de Pile, le président de la Chambre de commerce et d'industrie de Libourne et le président de la Chambre des métiers de la Gironde, en assortissant chacune de ces désignations de la mention « ou son représentant », sans indiquer l'identité de ces éventuels représentants ; que, par suite, la composition de la commission départementale d'équipement commercial doit être regardée, au regard des dispositions législatives et réglementaires précitées, comme irrégulière ; que ce vice de forme entache d'illégalité l'autorisation donnée par cette commission »
    .

    Mais cette position n’a donc pas été suivie par la Cour administrative de Lyon qui pour sa part vient de juger que :

    « Considérant en dernier lieu, qu'aux termes de l'article 10 du décret précité : Pour chaque demande d'autorisation, un arrêté préfectoral fixe la composition de la commission ; que l'article 22 du même décret dispose que : Dans le délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement d'une demande d'autorisation, les membres de la commission départementale d'équipement commercial reçoivent, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, communication de cette demande accompagnée : - de l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission ( ) ; que les dispositions précitées n'imposent pas au préfet, au stade de l'arrêté fixant la composition de la commission, de désigner nominativement ceux des membres de la commission qui sont suffisamment identifiés par la désignation de leur fonction ou de leur mandat ; que si ces personnalités peuvent se faire représenter, il n'appartient pas non plus au préfet de désigner par avance la personne ainsi appelée à siéger selon les usages de la fonction représentée ;
    Considérant que l'arrêté du 24 janvier 2000 du préfet de l'Ardèche fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial a désigné ses membres en indiquant la mention de leurs fonctions ou mandats, pour les maires des trois communes, le président de la chambre de commerce et d'industrie et le président de la chambre de métiers et en précisant le nom du représentant de l'association désigné pour siéger et celui de son éventuel représentant en cas d'absence ; qu'il résulte de ce qui vient d'être dit que le préfet n'a, ce faisant, pas méconnu les dispositions précitées »
    .

    Selon nous, c’est assurément cette seconde solution qui est la plus justifiée dès lors qu’aucune disposition législative et réglementaire – et, notamment, les articles L.751-2 et R.751-2 du Code de commerce relatifs aux modalités de composition de la commission – n’impose la désignation nominative de ses membres.

    Or, si comme l’ont jugé les Cours administratives d’appel de Bordeaux, Nantes et Versailles, la désignation nominative des membres de la commission était une formalité substantielle nécessaire, notamment, au contrôle de l’impartialité de ces derniers, on voit mal pourquoi celle-ci n’est prévue par aucune disposition législative et réglementaire alors que :

    - d’une part et d’une façon générale, le Code de commerce prévoit expressément un certain nombre de cas où la désignation nominative des membres de la commission est obligatoire. A titre d’exemple, la procédure de vote pour laquelle les bulletins doivent être nominatifs en application de l’article R.752-30 du Code de commerce ;
    - d’autre part et de façon plus spécifique, le contrôle de l’impartialité des membres a vocation à être assuré, après l’arrêté de fixation de la composition de la commission, par le Préfet à travers l’examen des formulaires de déclaration d’intérêts prescrits par l’article R.751-7 du Code de commerce.

    Il faut, toutefois, relever qu’à suivre la Cour administrative d’appel de Lyon, si l’arrêté fixant la composition de la commission n’a pas à désigner nominativement les élus et les présidents de la chambre de commerce et de l’industrie et de la chambre des métiers puisqu’ils « sont suffisamment identifiés par la désignation de leur fonction ou de leur mandat », en revanche cette formalité s’imposerait s’agissant du représentant des associations de consommateurs du département.

    Mais il est vrai que si, à titre d’exemple, la seule désignation du maire de la commune d’implantation du projet permet d’en établir l’identité, tel n’est pas le cas de la seule désignation du représentant de ces associations. En cela, l’arrêt commenté va donc dans le sens de la doctrine administrative et, plus précisément, de l’article 127 de la circulaire ministérielle du 16 janvier 1997, portant application des dispositions de la loi d’orientation du commerce et de l’artisanat du 27 décembre 1973, lequel avait précisé que « l’arrêté décrit la composition de la commission, telle qu’elle figure à l’article 30 de la loi du 27 décembre 1973 modifiée. Seuls apparaissent nominativement les représentants, titulaire et suppléant, des associations de consommateurs ».


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur les limites du permis de construire modificatif de régularisation

    Un permis de construire modificatif ne peut régulariser un permis de construire primitif ne précisant ni le nom, ni le prénom de son auteur dès lors que cette méconnaissance de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 constitue une irrégularité entachant l’édiction même du permis primitif.

    CAA. Marseille, 16 mai 2007, M.Y., req. n°04MA01336


    Depuis son apparition, dont elle rappellera qu’elle est d’origine jurisprudentielle, le permis de construire modificatif a toujours eu deux finalités et utilités distinctes : permettre au pétitionnaire qui le souhaite de modifier le projet initialement autorisé sans avoir à obtenir un nouveau permis de construire mais également permettre de régulariser le permis de construire primitif entaché d’illégalité. C’est d’ailleurs dans sa dimension « régularisatrice » que le permis de construire modificatif a vu son existence consacrée par le législateur :

    - dans un premier temps, par l’article L.462-2 du Code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de l’ordonnance du 8 décembre 2005, en ce qu’il dispose qu’en cas de non conformité des travaux réalisés, l’autorité compétente peut « mettre en demeure le maître de l'ouvrage de déposer un dossier modificatif ou de mettre les travaux en conformité » ;
    - dans un second temps, par l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi du 13 juillet 2006 dite « ENL », en ce qu’il dispose qu’en cas d’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme « l'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive »

    Cependant, la Cour administrative d’appel de Paris avait mis un coup d’arrêt à cette seconde pratique en jugeant qu’un « modificatif » ne pouvait régulariser que l’illégalité interne d’un permis de construire primitif – c’est-à-dire celle procédant de la conception même du projet et de sa non conformité aux prescriptions d’urbanisme qui lui sont opposables sur le fond – mais qu’en revanche, il était insusceptible de régulariser les vices affectant ce dernier d’illégalité externe – c’est-à-dire ceux relatifs à la compétence de l’auteur de se permis, à sa forme (signature, motivation et indication du nom et du prénom ainsi que de la qualité de son auteur) ou la procédure préalable à sa délivrance (effectivité et régularité des consultations et avis requis) – dans la mesure où, d’une part, « la légalité d'une décision administrative s'apprécie à la date de son édiction » et où, d’autre part, « l'instruction d'une demande de permis de construire modificatif n'a pas pour finalité la reprise de celle qui a été conduite préalablement à la délivrance du permis de construire initial », si bien que « si des formalités nécessaires à la conformité du permis de construire initial aux dispositions législatives et règlementaires régissant la procédure de délivrance des permis de construire ont été omises au cours de l'instruction d'une demande de permis de construire, leur accomplissement à l'occasion de l'instruction d'une demande de permis de construire modificatif n'a pas pour effet de régulariser la procédure ayant conduit à la délivrance du permis de construire initial » (CAA. Paris, 14 janvier 2001, req. n°99PA00757).

    Pour notre part, cette solution ne nous paraissait pas totalement contestable dans la mesure où si sur le fond un « modificatif » s’intègre au « primitif » – ce dont il résulte que, sauf à se rendre coupable d’un délit de construction en méconnaissance des prescriptions de l’autorisation obtenue, son titulaire ne peut plus exécuter le projet initial sans tenir des modifications autorisées puisqu’à cet égard, ils forment, dans une certaine mesure, une seule est même autorisation (CAA. Marseille, 21 janvier 1999, Sté Terre & Pierre, req. n°96MA02171 ; TA. Versailles, 22 février 1994, SCI Les Ormes, req. n°93-05140) – l’auteur, la forme et la procédure préalable à l’édiction d’un « modificatif » ne sauraient rétrospectivement modifier la circonstance que le « primitif » a été édicté par une autorité incompétente, en une forme et/ou au terme d’une procédure irrégulière et ce, d’autant moins lorsque le projet est effectivement modifié puisqu’alors la procédure est réputée porter sur ces seules modifications ; tel, d’ailleurs, étant l’intérêt du « modificatif » obtenir rapidement une autorisation au terme d’une procédure allégée qui ne sera contestable qu’en raison de ces vices propres.

    Mais quoi qu’il en soit, le Conseil d’Etat devait annuler l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Paris en jugeant, dans un considérant de principe, que « lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises » (CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315).

    En résumé, à l’exception peut-être de l’incompétence de l’auteur, un « modificatif » peut donc régulariser l’ensemble des vices affectant le permis de construire initial, y compris donc ses vices de forme et, a priori, celui résultant de la méconnaissance de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 qui implique qu’outre la signature de son auteur, un acte administratif indique le nom, le prénom et la qualité de son auteur, laquelle est à l’origine de nombreuses annulations d’autorisations d’urbanisme.

    Pour autant – et malgré, par ailleurs, le récent assouplissement du juge administratif dans l’application des prescriptions de l’article 4 précité puisqu’à titre d’exemple, il a été récemment jugé que l’absence de mention du nom et du prénom du maire signataire de la décision prononçant le retrait d’un permis de construire tacite peut être palliée par la présence de ces indications sur la lettre par laquelle ledit maire a, conformément à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, informé sont titulaire de son intention de procéder à ce retrait (CAA. Lyon 5 juillet 2007, SCI LADE, req. n°05LY01966) – la Cour administrative d’appel de Marseille vient donc de juger qu’un « modificatif » ne pouvait pas régulariser un permis de construire primitif et ce, au motif suivant :

    « Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 4, alinéa 2, de la loi du 12 avril 2000 : «Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.» ; qu'en application de ces dispositions, l'omission de la mention des nom et prénom du signataire des permis de construire en cause est une irrégularité formelle entachant l'édiction même desdits actes, qui ne peut être régularisée, postérieurement à ladite édiction, par la circonstance que des permis de construire modificatifs, intervenus le 11 juillet 2002 et le 30 septembre 2002 respectivement pour les permis de construire LC041 délivré à B et LC042 délivré à , comporteraient, eux, les mentions exigées par les dispositions précitées ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que les permis en cause étaient irréguliers au regard des exigences sus-rappelées de la loi du 12 avril 2000 »

    Si au regard de l’arrêt précité du Conseil d’Etat, cette solution paraît entachée d’une erreur de droit (voir, d'ailleurs, ici) et d’une motivation erronée puisque, dans cet arrêt, le litige portait sur l’irrégularité de la consultation de l’ABF, laquelle est « une irrégularité [procédurale] entachant l’édiction même » du permis de construire, cette solution nous paraît néanmoins conforme à l’objectif et l’utilité de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000, lequel institue cette formalité au bénéfice non seulement du destinataire de la décision en cause mais également des tiers.

    En effet, l’article précité a pour finalité ou, à tout le moins, pour utilité de permettre aux administrés de connaître l’auteur du permis de construire en cause pour, le cas échéant, constater son incompétence. A défaut, ces administrés sont donc privés d’une information susceptible de les amener à contester la légalité de cet acte et de leur laisser à penser qu’il n’est pas entaché d’incompétence.

    Il est vrai qu’un permis de construire modificatif mentionnant le nom, le prénom et la qualité de son auteur peut alors leur fournir « rétrospectivement » cette information s’agissant du « primitif » et alors leur permettre d’apprécier la légalité de ce dernier au regard des règles de compétence.

    Il reste que si le permis de construire primitif n’a pas été frappé de recours ou a fait l’objet d’un recours exclusivement fondé sur des moyens d’illégalité interne inopérants ou infondés, cette information ne leur sera d’aucune utilité pour contester la légalité de ce dernier.

    Or, quand bien même obtiendraient-ils l’annulation du « modificatif », cette circonstance n’aurait strictement aucune incidence sur le permis de construire primitif puisque si celui constitue la base légale du « modificatif », si bien que l’annulation du permis initial emporte nécessairement l’annulation par voie de conséquence de son « modificatif » – pour autant bien entendu qu’il ait également été frappé de recours – et que même lorsque ce dernier a survécu à l’annulation du primitif – faute d’avoir été également frappé de recours – il ne peut autoriser à exécuter les travaux (TA. Nice, 22 novembre 2005, Patoulle, req. n°05-05326), l’inverse n’est pas vrai.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Une construction édifiée en méconnaissance d’une prescription illégale du permis de construire l’ayant autorisée ne constitue pas nécessairement une construction irrégulière

    Dès lors qu’aucune disposition du code de l’urbanisme n’autorise l’administration à subordonner l’engagement des travaux autorisés par un permis de construire à la production d’un document complémentaire, l’absence de production de ce document avant l’engagement des travaux ne saurait suffire à faire regarder la construction ainsi réalisée comme édifiée en méconnaissance des prescriptions du permis de construire et, par voie de conséquence, comme une construction irrégulière au sens de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme.

    CAA. Lyon 26 avril 2007, M. Sylvain X., req. n°06LY01049


    Aux termes de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme « la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ».

    En substance et sous réserve de dispositions contraires du règlement local d’urbanisme ou de la carte communale, l’article précité institue donc un droit de reconstruire à l’identique quand bien même la construction en cause ne serait-elle pas conformes aux prescriptions d’urbanisme lui étant alors opposables..

    Mais outre que la construction initiale ait été démolie (CAA. Marseille, 21 mars 2002, Cne de Nîmes, req. n°98MA01738) par un sinistre (CE. 20 février 2002, Plan, req. n°235.725), qu’il s’agisse d’une reconstruction à l’identique (TA. Pau, 23 octobre 2003, M. Seguette, req. n°01-02170) et que cette reconstruction ne soit pas exposée à un risque certain et prévisible (CE. avis du 23 février 2005, Hutin, req. n°271.270), il est nécessaire pour bénéficier de ce droit que le bâtiment à reconstruire ait été « régulièrement édifié ». C’est, d’ailleurs, la jurisprudence récente rendue au titre de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme qui a permis de définir la notion de construction régulière, c’est-à-dire celles dotées d’une existence légale et non pas seulement d’une existence physique et de fait, laquelle intéresse également les conditions d’application de la jurisprudence dite « Thalamy » ou encore l’ensemble des dispositions « dérogatoires » des règlements locaux d’urbanisme relatives aux travaux sur existant.

    On sait, en effet, que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de juger que ne constituaient pas des constructions régulières au sens de l’article précité (CE. 5 mars 2003, Nicolas Lepoutre, req. n°252.422) :

    - tout d’abord, les constructions édifiées sans autorisation, c’est-à-dire sans qu’une autorisation ait été obtenue ou sur le fondement d’une autorisation ayant précédemment été annulée, retirée ou frappée de caducité ;

    - ensuite, les constructions initialement régulières mais devenues illégales du fait de l’annulation ou de retrait ultérieur de l’autorisation en exécution de laquelle elles ont été construites ;

    - enfin, les constructions édifiées en méconnaissance de l’autorisation obtenue à cet effet.

    Précisément, dans l’affaire objet de l’arrêt commenté, était en cause la reconstruction d’un bâtiment prétendument édifié en méconnaissance des prescriptions du permis de construire obtenu à cet effet.

    Dans cette affaire, le requérant avait en effet obtenu en 1988 un permis de construire une maison individuelle, lequel était assorti d’une prescription imposant la production – et ce, avant l’engagement des travaux – un bulletin d’analyse justifiant de la potabilité de l’eau devant alimenter sa construction. Mais en 2003, la maison ainsi édifiée devait être détruite par un incendie. Conséquemment et sur le fondement de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme, le requérant devait présenté une demande de permis de reconstruire à l’identique – puisque l’article précité ne dispense pas de la nécessité d’obtenir une autorisation (CE. 20 février 2002, Plan, req. n°235.725) – laquelle devait toutefois faire l’objet d’un refus au motif que la construction détruite ne pouvait être regardée comme régulièrement édifiée dès lors qu’elle l’avait été en méconnaissance des prescriptions du permis de construire en 1988 puisque ce dernier avait été exécuté sans que son titulaire n’ait préalablement produit le bulletin justifiant de la potabilité de l’eau.

    Mais à cet égard, la Cour administrative d’appel de Lyon devait pour sa part juger que :

    « Considérant en premier lieu, qu'aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la possibilité de délivrer un permis de construire assorti d'une condition subordonnant le commencement des travaux à la production d'un document justificatif ; que par ailleurs l'administration n'établit ni même n'allègue que l'eau de la source devant alimenter le projet n'était alors pas potable ; que par suite, eu égard au but dans lequel ont été édictées les dispositions législatives précitées de l'article L. 111-3, et à la portée utile qui doit leur être donnée, le bâtiment détruit ne peut être regardé comme ayant été irrégulièrement édifié en raison de la seule circonstance que ledit bulletin d'analyse n'a pas été produit ; que le requérant est fondé à soutenir que ce premier motif est entaché d'illégalité ».

    En substance, la Cour semble donc avoir considéré que dès lors que la prescription subordonnant l’engagement des travaux à la production d’un bulletin justifiant de la potabilité des l’eau était illégale puisque « aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit la possibilité de délivrer un permis de construire assorti d'une condition subordonnant le commencement des travaux à la production d'un document justificatif », le fait de l’avoir méconnu ne pouvait avoir pour effet de faire regarder la construction édifiée comme construite en méconnaissance du permis de construire l’ayant autorisée et, par voie de conséquence, comme irrégulièrement édifiée au sens de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme.

    NB : Pour être complet, on précisera cependant que certaines dispositions du Code de l’urbanisme subordonne l’engagement des travaux autorisés par un permis de construire à la production de documents justificatifs. Tel est le cas, à titre d’exemple, de l’article R.421-39-1 du Code de l’urbanisme.

    Certes, on pourrait objecter, en première analyse, que dès lors que cette prescription était illégale le permis de construire l’était également puisque l’on sait qu’à l’exception des prescriptions financières, les prescriptions assortissant un permis de construire en sont, par principe, indivisibles, si bien que leur illégalité éventuelle affecte d’illégalité l’ensemble de l’autorisation les ayant édictées. Il reste que :

    - d’une part, le seul fait qu’une construction ait été édifiée en exécution d’un permis de construire illégal ne lui ôte pas son existence légale si ce permis n’a pas été annulé ou retiré, ce dont il résulte qu’une telle construction constitue néanmoins une construction régulièrement édifiée au sens de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme (CE. 5 mars 2003, Nicolas Lepoutre, req. n°252.422) ;

    - d’autre part, il a pu être jugé qu’une prescription technique se rapportant à l’exécution d’une autorisation d’urbanisme – et non pas aux conditions de sa légalité – en était divisible (CAA. Bordeaux, 20 novembre 2006, M. et Mme X, Construction & Urbanisme, n°2/2007. Voir également: CAA. Marseille, 9 octobre 2003, M.X., req. n°00MA01836).

    Mais sur ce second point, il faut relever que la Cour administrative d’appel de Lyon a souligné que « l'administration n'établit ni même n'allègue que l'eau de la source devant alimenter le projet n'était alors pas potable ».

    On peut donc penser que c’est parce qu’en l’espèce, la méconnaissance de la prescription illégale en cause était caractérisée d’un seul point de vue formel – par l’absence de production du bulletin ainsi prescrit – qu’elle n’a pas eu pour effet de rendre irrégulière la construction litigieuse.

    En effet, si au défaut de communication du bulletin prescrit, s’était ajoutée la circonstance que l’eau alimentant la construction était impropre à la consommation, il n’aurait pas été exclu que la Cour juge alors la construction irrégulière puisqu’il est clair qu’en subordonnant l’engagement des travaux à la production de ce bulletin, l’administration avait également entendu conditionner, sur le fond, la délivrance du permis de construire à la potabilité de l’eau.

    Il reste que même en ce sens, cette prescription était illégale - et affectait la légalité de l'ensemble du permis de construire dont, sur le fond, elle constituait le support indivisible - au regard de l'article L.421-3, al.1 du Code de l'urbanisme, lequel implique que l'administration prenne parti sur l'ensemble des aspects du projet sanctionné par le permis de construire dont l'alimentation en eau potable des constructions, prescrite par l'article R.111-8, fait bien entendu partie.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés