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JURISURBA - Page 49

  • Sur le champ d’application dans le temps de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme

    Le délai de trois mois prescrit par l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme est opposable à toutes les décisions de retrait d’un permis de construire, y compris dont lorsqu’elles concernent des permis de construire délivrés avant le 1er octobre 2007

    CAA. Lyon, 8 novembre 2011, Cne de Limonest, req. n°10LY01135


    Bien qu’il concerne une situation appelée à se raréfier, voici un arrêt qui conserve son intérêt en cette période de modification future des règles d’urbanisme.

    Dans cette affaire le pétitionnaire avait déposé le 14 novembre 2006 une demande de permis de construire pour l'édification d'une résidence étudiante de 84 logements, laquelle devait donné lieu à la formation d’un permis tacite, né le 25 mars 2007. Toutefois :

    - le 11 juin 2007 la demande devait faire l’objet d’un refus exprès s’analysant selon une jurisprudence constante en un retrait du permis tacite précédemment acquis ;
    - le 24 aout 2007, le maire devait retiré cette décision du 11 juin 2007 avant d’y « substituer » le 15 octobre 2007 une nouvelle décision de refus de permis de construire valant comme la précédente retrait du permis tacite acquis le 25 mars 2007.

    C’est cette décision du 15 octobre 2007 que le pétitionnaire devait attaquer et dont il devait obtenir l’annulation au motif de la tardiveté de ce retrait au regard de l’article L.424-5 (al.2) du Code de l’urbanisme entré en vigueur le 1er octobre 2007 et dont on rappellera qu’il dispose que « le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire ».

    La commune devait toutefois interjeter appel du jugement de premier instance en reprenant notamment à son compte la position de l’administration centrale au sujet du champ d’application de l’article L.424-5 précité et de sa prétendue inopposabilité aux décisions de retrait intervenant sur des permis intervenus avant le 1er octobre 2007.

    Toutefois, à l’instar du Tribunal administratif de Lyon en première, la Cour administrative d’appel lyonnaise devait rejeter cet argument pour conséquemment annuler la décision de retrait du 15 octobre 2007 au regard de sa tardiveté :

    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 : Le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire ;
    Considérant qu'aux termes de l'article 26 du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 : Les demandes de permis de construire et d'autorisations prévues par le code de l'urbanisme déposées avant le 1er octobre 2007 demeurent soumises aux règles de compétence, de forme et de procédure en vigueur à la date de leur dépôt ;
    Considérant que la commune soutient que le retrait du permis tacite du 25 mars 2007 était soumis aux dispositions du 3°) de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000 susvisée aux termes duquel : Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative : 1° Pendant le délai de recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ; 2° Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ; 3° Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé ; qu'elle fait en conséquence valoir que le retrait intervenu était possible à la date du 15 octobre 2007, dès lors qu'un recours contentieux avait été formé à son encontre le 27 juillet 2007 par l'Association syndicale libre du hameau de Mathias ;
    Considérant que les règles de procédure visées par le décret du 5 janvier 2007 précité ne visent que l'instruction des demandes de permis de construire jusqu'à l'intervention d'une décision sur celles-ci ; qu'en revanche, elles ne sauraient régir une décision de retrait intervenue postérieurement au 1er octobre 2007 qui est soumise aux dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme précité ; qu'en l'espèce, la décision du 15 octobre 2007 valant retrait du permis de construire tacite dont la SCI Résidence du Mathias était titulaire depuis le 25 mars 2007 est intervenue tardivement, dès lors qu'il a été effectué le 15 octobre 2007 au-delà du délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme applicable en l'espèce et alors que l'autorité administrative ne disposait plus du pouvoir pour ce faire ; qu'ainsi la COMMUNE DE LIMONEST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a accueilli le moyen présenté par la SCI Résidence du Mathias tiré de la tardiveté de l'arrêté du 15 octobre 2007
    ».


    Une telle analyse est difficilement contestable. Il est vrai, en effet, que l’article 26 du décret du 5 janvier 2007 et l’article 4 du décret n°2007-817 du 11 mai 2007 disposent que « les demandes de permis de construire et d'autorisations prévues par le code de l'urbanisme déposées avant le 1er octobre 2007 demeurent soumises aux règles de compétence, de forme et de procédure en vigueur à la date de leur dépôt ».

    Il reste que ces dispositions ne régissent que ne régit que le « traitement » des demandes et n’a donc pas vocation à organiser le sort des décisions subséquentes et, notamment, leur retrait ; alors que pour l’application de l’ancien article L.421-2-8 du Code de l’urbanisme qui précisait que « les demandes de permis de construire sur lesquelles il n'a pas été statué à la date du transfert de compétences continuent d'être instruites et font l'objet de décisions dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur au moment de leur dépôt », il avait néanmoins été jugé qu’en conséquence de l’intervention d’un transfert de compétences pour la délivrance des autorisations d’urbanisme intervenu entre ces deux décisions, un maire était compétent pour retirer au nom de la commune un permis de construire précédemment délivré par le préfet au nom de l’Etat (CE. 7 octobre 1994, Joly, req. n°90344).

    Surtout, l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme conditionne non pas la légalité des autorisations d’urbanisme qu’il vise mais régit uniquement la légalité des décisions de retrait de ces dernières. Or, par principe, la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération des normes applicables à sa date d’édiction et il en va évidemment ainsi des décisions prononçant le retrait d’une autorisation d’urbanisme dont, par voie de conséquence, la légalité s’apprécie au regard des règles en vigueur à la date du retrait et non pas au regard de celles applicables à la date de délivrance de l’autorisation retirée. A titre d’exemple, il a ainsi été jugé que :

    « Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 23 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Une décision implicite d'acceptation peut être retirée pour illégalité par l'autorité administrative : A. Pendant le délai du recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ; 2. - Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision lorsque aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ; 3. - Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé ;
    Considérant qu'à la date à laquelle est intervenue la décision de retrait attaquée, la décision implicite d'acceptation du 30 avril 2002 faisait l'objet d'un recours pendant devant le Tribunal administratif de Melun introduit par l'association seine-et-marnaise de sauvegarde de la nature (A.S.M.S.N.) ; que, contrairement aux allégations de la SOCIETE LES REMBLAIS PAYSAGERS, ce recours n'était pas tardif dès lors que la requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les formalités d'affichage de la décision susmentionnée auraient été effectuées ; que, par suite, le maire de Carnetin pouvait, conformément aux dispositions précitées de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000, procéder au retrait de l'acte attaqué
    » (CAA. Paris, 2 octobre 2006, Sté Les Remblayes Paysagers, req. n°05PA03683).


    Ce principe est constant puisque, dans le même sens, il a pu être jugé que la procédure administrative contradictoire instituée par l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 s’appliquait à toute décision défavorable prise à compter de son entrée en vigueur, y compris à celle retirant une décision créatrice de droit formée avant cette échéance (pour exemple : CE. 3 décembre 2001, Mme Errify, req. n°230.847) ou, bien plus, qu’en conséquence de l’intervention d’un transfert de compétences pour la délivrance des autorisations d’urbanisme intervenu entre ces deux décisions, un maire était compétent pour retirer au nom de la commune un permis de construire précédemment délivré par le préfet au nom de l’Etat (CE. 7 octobre 1994, Joly, req. n°90344).

    Il faut d’ailleurs rappeler que les délais de retrait des décisions implicites d’acceptation antérieurement issues de la jurisprudence dite « Dame Cachet » (CE. 3 novembre 1922, Dme Cachet, req. n°74010) ont été substantiellement modifiées par l’article 23 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 dont on précisera qu’elle est entrée en vigueur le 1er novembre de la même année. Or, pour application de ce nouveau dispositif, il a pu être jugé :

    « Considérant que, pour annuler la décision en litige, les premiers juges se sont fondés sur le caractère tardif du retrait ainsi opéré en estimant que le maire n'avait pu légalement y procéder, de sa propre initiative, après l'expiration d'un délai de deux mois suivant la naissance de la décision tacite de non opposition ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision de retrait, intervenue avant l'entrée en vigueur de l'article 23 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 susvisée, et alors même qu'elle a été prise de la propre initiative de l'autorité administrative, pouvait légalement intervenir dans le délai de recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision tacite ; (CAA. Marseille, 16 mars 2006, Ministre de l’équipement, req. n°03MA00934) ;

    et :

    « Considérant qu'il est constant que la lettre de notification du délai d'instruction en date du 27 mars 2000 n'avait fait l'objet d'aucun affichage ; qu'à la date de la décision de retrait du permis tacite, les dispositions de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000 n'étaient pas, en tout état de cause, entrées en vigueur ; que, dans ces conditions, le maire de la COMMUNE DE SAINT-ANDRE-LEZ-LILLE n'a pas porté atteinte à des droits définitivement acquis au bénéfice de la SA X Matériaux en prononçant, le 28 septembre 2000, le retrait du permis de construire délivré implicitement le 17 juin 2000 » (CAA. Douai, 28 avril 2005, Cne de Saint-Andre-les-Lille, req. n°03DA01136).

    Dans ces deux affaires, le juge administratif a donc apprécié la légalité de la décision de retrait en recherchant les règles applicables à leur date d’édiction et ce, indépendamment de toute considération liée à la date de délivrance de l’autorisation retirée.

    Suivant ce principe, il nous semble donc clair que le dispositif issu de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme a vocation à conditionner la légalité des décisions de retrait prononcée à compter du 1er octobre 2007, y compris donc pour ce qui concerne celles portant sur des autorisations délivrées avant cette date ; étant précisé qu’une telle interprétation n’a nullement vocation à conférer à ce dispositif une portée rétroactive puisque ce dernier régit la légalité des seules décisions de retrait et qu’elle n’aboutit pas à l’appliquer aux décisions de retrait prononcées avant le 1er octobre 2007.

    Au surplus, la seule réserve à cette conclusion tenait à ce que l’article précité vise des autorisations, tel le permis d’aménager, n’ayant vocation à intégrer l’ordonnancement juridique qu’en conséquence de demandes présentées à compter du 1er octobre 2007. Il reste que si c’est cette considération qui devait conduire l’application dans le temps de l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme, force serait alors d’admettre que son dispositif aurait vocation à s’appliquer non pas seulement aux autorisations d’urbanisme délivrées après le 1er octobre 2007 mais, plus généralement, aux seules autorisations délivrées en conséquence d’une demande présentée après cette échéance.

    En résumé, dès lors que le nouvel article L.424-5 du Code de l’urbanisme a exclusivement trait à la légalité des décisions de retrait, il n’y a pas lieu de s’attacher à la question de savoir si l’autorisation d’urbanisme en cause a été délivrée avant ou après l’entrée en vigueur de ce dispositif mais uniquement de considérer la date d’édiction de la décision de retrait. Et ce, de la même façon que pour l’application du décret du 31 juillet 2006 ayant modifié l’ancien article R.421-32 du Code de l’urbanisme, lequel concerne uniquement le délai de validité du permis de construire mais n’a pas vocation à avoir une quelconque incidence sur les recours en annulation, il n’y a pas lieu de rechercher si le permis de construire considéré a été frappé de recours avant ou après la date d’entrée en vigueur de ce nouveau dispositif mais seulement d’établir si le permis de construire en cause était encore valide à cette date (CAA. Bordeaux, 5 juillet 2007, Mme Sophie X., req. n°05BX00191).

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés


  • Veille jurisprudentielle n°40 : 17 décisions signalées

    INTERPRETATION & APPLICATION DES NORMES :

    CAA. Marseille, 10 novembre 2011, M. & Mme A…, req. n°09MA03131 : « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de M. et Mme A consiste, selon les termes de l'imprimé de leur déclaration de permis de construire, en une pergola abri-voiture avec chauffage solaire, sur une dalle sous laquelle sera aménagée une salle de jeu ; que ce projet d'environ 7 mètres sur 7 d'emprise au sol, selon le plan de masse joint à la demande de permis de construire, est implanté en limite parcellaire sans faire corps avec le bâtiment principal d'habitation dont il est distant d'environ 5 mètres ; qu'eu égard à l'affectation et aux dimensions limitées de cette construction, à usage principal d'abri voiture dont l'entresol sera affecté à une salle de jeux pour enfants, et compte tenu de l'absence de tout lien fonctionnel avec la maison d'habitation dont elle ne constitue que l'accessoire, c'est à juste titre que le tribunal administratif de Nice l'a qualifiée d'annexe ».

    CAA. Marseille, 10 novembre 2011, Sylvain D…, req. n°09MA03829 : « Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article UJ8 du règlement du plan d'occupation des sols : Entre tout point de chaque construction non contiguë, doit toujours être respectée une distance au moins égale à la hauteur de la plus haute des constructions sans être inférieure à 8 m ; qu'il ressort toutefois du plans de masse et des plans de coupe, que la maison d'habitation et la piscine qui en est le prolongement et dont elle n'est pas séparée, doivent être regardées comme formant une seule construction ; que dès lors, en l'absence de l'existence de deux constructions distinctes sur le terrain d'assiette, les dispositions de l'article UJ8 du règlement du plan d'occupation des sols ne sont pas applicables à ce projet ».

    CAA. Lyon, 8 novembre 2011, Syndicat des Copropriétaires de l’immeuble l’Ancolie, req. n°09LY02144 : « Considérant que la superficie du terrain d'assiette du projet est de 2 868 m2 de sorte que l'emprise au sol maximale ne peut dépasser 1 434 m2 ; que le projet comporte l'aménagement d'une piscine intérieure en sous-sol, dont la dalle de couverture constitue une terrasse formant une superstructure élevée au dessus du sol naturel ; qu'ainsi, dès lors que les dispositions du plan d'occupation des sols ne prévoient aucune exception en faveur de cette catégorie d'ouvrages, cette terrasse constituant un élément indissociable de la construction doit être prise en compte pour le calcul du coefficient d'emprise au sol ; que l'emprise au sol du projet atteint ainsi 1 865 m2 dépassant le coefficient de 0,5 fixé par l'article UC 9 précité pour les établissements hôteliers, même en s'abstenant de tenir compte des auvents, hôtels, balcons et débords de toiture, ainsi que la rampe d'accès au parc de stationnement souterrain ; que les requérants sont ainsi fondés à soutenir que le projet méconnaît les dispositions de l'article UC 9 du plan d'occupation des sols ».

    CAA. Lyon, 11 octobre 2011, Cne de Fontaines, req. n°10LY01953 : « Considérant, en premier lieu, que, si l'article UI 1 du règlement du plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE FONTAINES, relatif aux occupations et utilisations du sol interdites, n'interdit pas expressément les piscines couvertes, l'article UI 2 de ce même règlement, relatif aux occupations et utilisations du sol admises sous conditions, dispose que les piscines non couvertes et les locaux liés à cet équipement sont admis s'ils respectent l'ensemble des conditions d'implantation et d'emprise suivantes (...) ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que seules les piscines non couvertes peuvent être autorisées en zone UI et que les piscines couvertes, ou les couvertures de piscines, sont interdites dans cette zone ».

    CAA. Marseille, 6 octobre 2011, Cne de Camps la Source, req. n° 09MA03338 : « Considérant qu'aux termes de l'article 6 du règlement de la zone 1AU du plan local d'urbanisme de la commune relatif aux implantations par rapport aux voies et aux emprises publiques, 1) Les constructions doivent s'implanter à une distance supérieure ou égale à 5 mètres par rapport à l'alignement des voies existantes, à modifier par emplacement réservé ou plan d'alignement, ou à créer. Toutefois des implantations différentes peuvent être admises ou imposées si l'aménagement proposé ne compromet pas l'ordonnancement des voies (...) ; que pour annuler l'arrêté du 5 novembre 2007, le tribunal administratif de Toulon a considéré que ces dispositions n'étaient pas opposables aux voies de circulation internes au terrain d'assiette du projet dont la vocation était de desservir le bâtiment d'habitation ou les garages ;
    Considérant que si les dispositions de l'article 6 du règlement peuvent trouver matière à s'appliquer à des projets impliquant la création d'une voirie interne privée destinée à desservir plusieurs habitations, c'est à la condition que cette voirie ait une fonction de desserte générale, ou qu'elle soit ouverte à la circulation publique ; que ne sauraient en revanche être qualifiés de voies au sens de ces dispositions, les accès goudronnés qui, comme en l'espèce, donnent directement depuis l'entrée du terrain sur des garages et un bâtiment collectif d'habitation ; que le maire de Camps la source ne pouvait, dès lors, comme l'a jugé le tribunal, légalement se fonder sur ces dispositions pour refuser, au regard des caractéristiques de cette desserte, la demande de permis de construire de l'E.U.R.L. Sud Immo Promotion ».

    CAA. Nantes, 30 septembre 2011, M. et Mme Y…, req. n° 10NT00675 : « Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article UA 12 du plan d'occupation des sols de la ville de Caen : 1- Pour toutes les affectations, les normes se réfèrent à la surface hors oeuvre nette, à l'exception des hôtels (...) pour lesquels les normes se réfèrent au nombre de chambres (...). Chaque tranche entamée de plus de 25 % donne lieu à l'application de la norme. (... ) Lorsqu'une opération comporte plusieurs destinations, les normes afférentes à chacune d'elles sont appliquées au prorata des critères pris en compte (SHON, chambre, lit ou logement créé). / 2 - Sans préjudice de l'application des dispositions d'ordre public de l'article R. 111-4 du Code de l'Urbanisme, afin d'assurer le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations en dehors des voies publiques, il est exigé de réaliser sur la propriété : a) Pour les constructions à usage d'habitation collective, une place de stationnement par tranche de 70 m² de SHON, avec au minimum une place par logement (...) ; qu'aux termes des dispositions du même article UA 12, en son paragraphe 12.4 relatif aux opérations de réhabilitation : Dans le cadre d'opérations de réhabilitation, les places de stationnement préexistantes sur le terrain doivent être maintenues. / a) Pour les opérations de réhabilitation portant sur des constructions à usage d'habitation : - lorsqu'il n'y a pas de création de logement nouveau, il n'est pas exigé de places de stationnement supplémentaires - lorsqu'il y a création de logement nouveau, il est exigé une place de stationnement par logement créé. / b) Pour les opérations de réhabilitation portant sur un changement de destination : - lorsqu'il n'y a pas création de SHON nouvelle, il n'est pas exigé de places de stationnement supplémentaires ; - lorsqu'il y a création de plus de 15 m² de SHON, il est exigé un nombre de places de stationnement supplémentaires conformément aux dispositions définies au paragraphe 12.2 ci-dessus ; que le nombre de places de stationnement supplémentaires, exigées en application de ces dernières dispositions, est déterminé en fonction de la seule surface hors oeuvre nette (SHON) créée pour une opération donnée ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'opération autorisée par le permis de construire contesté nécessitait, en application des dispositions précitées, la création de 14 places de stationnement pour les 13 logements créés dans le bâtiment à édifier au 52, rue Damozanne, qui entraînent la création de 974 m² de surface hors oeuvre nette (SHON) ; qu'en revanche, contrairement à ce que soutiennent les requérants, en l'absence de création de SHON, aucune place de stationnement nouvelle n'était requise pour les 5 logements créés au rez-de-chaussée et au sous-sol de l'immeuble réhabilité rue de Bayeux, correspondant à une surface hors oeuvre nette de 385 m² se substituant à la surface hors oeuvre nette de 460 m² antérieurement utilisée en bureaux ; qu'ainsi, en admettant que des places de stationnement nouvelles soient exigibles pour chacun des 9 logements aménagés dans les étages de cet immeuble, où préexistait un nombre indéterminé de logements, le projet autorisé ne nécessitait, en vertu des dispositions précitées de l'article UA 12 du plan d'occupation des sols de la ville de Caen, que la construction de 25 places de stationnement, compte tenu des deux places à reconstruire du fait de la démolition autorisée ; que, par suite, en prévoyant la réalisation de 26 places de stationnement, le projet n'a pas méconnu ces dispositions ».

    CE. 30 septembre 2011, Cne de Saint-Maur-les-Fossés, req. n°339.619 : « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable aux plans d'occupations des sols approuvés avant l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbain : Les plans d'occupation des sols fixent (...) les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols. (...) Les règles et servitudes définies par un plan d'occupation des sols ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ; qu'aux termes de l'article R. 123-21 du même code, dans sa rédaction alors applicable, le règlement du plan d'occupation des sols doit : b) Edicter, en fonction des situations locales, les prescriptions relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies, aux limites séparatives et autres constructions ; qu'eu égard à l'objet de ces dispositions, le règlement du plan d'occupation des sols doit fixer des règles précises d'implantation par rapport aux voies et emprises publiques et aux limites séparatives ; que, lorsque le règlement contient des dispositions permettant de faire exception aux règles générales d'implantation qu'il fixe, ces règles d'exception doivent être suffisamment encadrées, eu égard à leur portée, sans préjudice de la possibilité d'autoriser des adaptations mineures en vertu de l'article L. 123-1 ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge du fond que l'article UE 6 du règlement du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES, après avoir fixé en son premier alinéa les règles d'implantation des constructions par rapport aux voies publiques en imposant le respect de distances minimales de retrait, dispose en son deuxième alinéa que : Des dispositions différentes pourront être autorisées ou imposées pour des raisons d'harmonie, notamment pour tenir compte de l'implantation des constructions existantes ou projetées dans le parcellaire voisin, et pour permettre l'amélioration des constructions existantes ; qu'une exception identique est prévue au II de l'article UE 7 de ce même règlement, pour ce qui concerne les règles générales d'implantation par rapport aux limites séparatives, fixées par le I du même article ; qu'ainsi qu'il a été dit, par l'arrêt attaqué, la cour administrative d'appel de Paris a jugé que ces exceptions étaient illégales faute d'être suffisamment encadrées et que le permis de construire délivré à M. et Mme B, dont la délivrance n'était possible que sur leur fondement, devait, en conséquence, être annulé ;
    Considérant cependant que, compte tenu de l'objet limitativement énoncé de ces exceptions, tenant à l'harmonie urbaine avec les constructions voisines et à l'amélioration des constructions existantes, objectif conforté par les termes de l'annexe à ce règlement qui définit les travaux d'amélioration de l'habitabilité , ces règles d'exception figurant aux articles UE 6 et UE 7 du règlement du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE SAINT-MAUR-DES-FOSSES doivent être regardées comme suffisamment encadrées, eu égard à leur portée ; qu'en écartant leur application, la cour administrative d'appel a, dès lors, commis une erreur de qualification juridique ».

    CE. 30 septembre 2011, Christian B…, req. n°336.249 : « Considérant qu'aux termes de l'article UB 7 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Gignac-la-Nerthe, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : 1. Implantation par rapport aux limites séparatives aboutissant aux voies. / En bordure des voies, les constructions doivent être édifiées en ordre continu d'une limite séparative à l'autre. / (...). 2. Implantation par rapport aux limites de fonds de propriété. Sauf création de la servitude prévue à l'article L. 451-1 du code de l'urbanisme, la distance comptée horizontalement de tout point d'une construction au point le plus proche d'une limite séparative n'aboutissant pas aux voies doit être au moins égale à la moitié de la différence d'altitude entre ces deux points, sans être inférieure à trois mètres (3 m). ; que, pour l'application de ces dispositions, les limites séparatives s'entendent comme les limites entre la propriété constituant le terrain d'assiette de la construction et la ou les propriétés qui la jouxtent ; que la limite entre deux propriétés situées en bordure d'une même voie doit être regardée comme une limite séparative aboutissant à cette voie ; que la circonstance qu'une telle limite séparative soit constituée de plusieurs segments de droite faisant angle entre eux est sans influence sur sa qualification de limite séparative aboutissant aux voies ».

     

    EMPLACEMENT RESERVE :

    CAA. Marseille, 10 novembre 2011, Cne de Rocbaron, req. n°09MA04718
    : « Considérant qu'il soutient que la parcelle 170 est grevée depuis 1987 d'un emplacement réservé, sans que la commune ait jamais pris la moindre initiative pour réaliser des équipements ayant motivé l'institution d'une réserve ; qu'il ressort des pièces du dossier que la parcelle 170 a été grevé de 1987 à 2008 par un emplacement réservé n° 26 de 2 200 m² pour la réalisation d'un réservoir d'eau ; que le plan local d'urbanisme en litige prévoit un emplacement réservé n° 40 de 1640 m² destiné à accueillir des équipements publics scolaires ; qu'en effet, après avoir abandonné l'idée de construire un réservoir d'eau, la COMMUNE DE ROCBARON a désormais l'intention d'étendre le groupe scolaire situé à proximité ; que la circonstance qu'un permis de construire ait été délivré le 27 novembre 1989 sur une parcelle comprise dans l'emplacement réservé n° 26 et qu'une parcelle ait été vendue en 2007 par la commune sur cet emplacement réservé ne signifie pas que la réservation de cet emplacement pour un nouveau projet ne serait pas justifiée ; qu'à cet égard, les orientations générales du rapport de présentation du plan local d'urbanisme témoignent du souci des autorités locales d'attirer sur le territoire de la commune une population active jeune, ce qui devrait avoir pour effet d'induire un accroissement des effectifs scolaires ; que, dans ces conditions, le choix de réserver un emplacement situé à proximité du groupe scolaire pour procéder à son extension, fondé sur la situation particulière de la parcelle et sur des motifs d'urbanisme, répond à un intérêt général et n'est pas entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ».


    CAA. Bordeaux, 8 novembre 2011, SCCV Troisset, req. n°10BX01118 : « Considérant qu'en vertu du plan local d'urbanisme de la commune des Trois Ilets, la parcelle servant de terrain d'assiette au projet de la SCCV TROISSET était classée en emplacement réservé au profit du département aux fins de construction d'une déviation de la route départementale 7 ; qu'un tel classement emportant interdiction de construire, sauf à titre précaire, c'est à bon droit que le maire a refusé à la société requérante la délivrance d'un permis de construire sur cet emplacement ; que la circonstance que le département aurait renoncé à son projet, si elle peut être utilement opposée au refus de modifier le plan local d'urbanisme et de déclasser ladite parcelle, est sans influence sur la légalité de la décision refusant la délivrance d'un permis de construire ».

     

    CONCESSION D’AMENAGEMENT :

    CE. 18 novembre 2011, SNC EIFFAGE AMENAGEMENT, req. n°342.147 : « Considérant, en deuxième lieu, que les dispositions de l'article L. 300-4 du code de l'urbanisme, en vigueur à la date de la décision attaquée, excluaient les conventions d'aménagement, contrats par lesquels une personne publique délègue la réalisation d'une opération d'aménagement comportant la maîtrise d'ouvrage des travaux et équipements, des règles de publicité et de mise en concurrence prévues pour la passation des délégations de services publics ; que ces conventions devant néanmoins être soumises à des règles de publicité et de mise en concurrence, tant en vertu des exigences découlant des principes généraux du droit communautaire de non-discrimination et d'égalité de traitement que des règles applicables à la conclusions des concessions de travaux au sens du droit de l'Union européenne, la loi du 20 juillet 2005 relative aux concessions d'aménagement a modifié cet article L. 300-4 afin de le mettre en conformité avec le droit de l'Union européenne, en soumettant l'attribution des conventions d'aménagement à une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes ; que l'article 11 de cette loi du 20 juillet 2005 a cependant prévu, sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, la validation de l'ensemble des conventions d'aménagement signées avant la publicité de la loi, en tant que leur légalité serait contestée au motif que la désignation de l'aménageur n'a pas été précédée d'une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes :
    Mais considérant que les dispositions de l'article 11 de la loi du 20 juillet 2005 tendent à soustraire les conventions d'aménagement à l'exigence d'une publicité préalable à la conclusion de ces contrats, découlant, ainsi qu'il a été dit, tant du respect des principes généraux du droit de l'Union européenne de non-discrimination et d'égalité de traitement que des règles applicables à la conclusion des concessions de travaux au sens de ce droit ; que le principe de sécurité juridique, s'il est susceptible de permettre aux cocontractants de poursuivre leurs relations contractuelles durant une période transitoire, afin de les dénouer dans des conditions acceptables, ne saurait autoriser la validation pure et simple de ces conventions ; que, par suite, la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant illégale la décision de signer la convention litigieuse au motif tiré de ce que, en l'absence au cas d'espèce d'un motif impérieux d'intérêt général, l'article 11 de la loi du 20 juillet 2005 ne pouvait faire obstacle à l'application du droit de l'Union européenne ».

     

    DROIT DE PREEMPTION :

    CE. 2 décembre 2011, Pascal A…, req. n°343.104 : « Considérant qu'il résulte des termes mêmes de ces dernières dispositions que le motif de préemption qu'elles instituent au profit des communes détentrices d'un droit de préemption peut s'appliquer à tout immeuble à usage d'habitation, et non pas seulement aux immeubles de plus de dix logements visés par l'article 10-1 de la loi du 31 décembre 1975 ; que, par suite, la cour administrative d'appel de Paris n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant, par l'arrêt attaqué, que la commune d'Alfortville avait légalement pu fonder la décision de préemption en litige sur le fait qu'elle entendait assurer, conformément à l'article L. 210-2 du code de l'urbanisme, le maintien des locataires dans les lieux, alors même que l'immeuble préempté ne comportait que huit logements et ne relevait ainsi pas du champ d'application de l'article 10-1 de la loi du 31 décembre 1975 ; Considérant que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, l'applicabilité à l'ensemble des immeubles à usages d'habitation du motif de préemption prévu par l'article L. 210-1 du code de l'urbanisme résulte des termes mêmes de cet article ; que la cour n'était, dès lors, pas tenue de motiver davantage sa décision au regard des développements, même très circonstanciés, consacrés sur ce point par le requérant aux travaux préparatoires de la loi du 13 juin 2006 ; qu'elle n'a pas, ce faisant, dénaturé les termes de la requête qui lui était soumise ni entaché son arrêt d'insuffisance de motivation ».

     

    LOTISSEMENT & DIVISIONS FONCIERES :

    CAA. Marseille, 20 octobre 2011, Jean-Claude A…, req. n°09MA03777 : « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 315-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur : Constitue un lotissement au sens du présent chapitre toute division d'une propriété foncière en vue de l'implantation de bâtiments qui a pour objet ou qui, sur une période de moins de dix ans, a eu pour effet de porter à plus de deux le nombre de terrains issus de ladite propriété. (...) Ne sont pas pris en compte pour l'appréciation du nombre de terrains issus de la division d'une propriété foncière : a) Les terrains supportant des bâtiments qui, achevés depuis plus de dix ans, ne sont pas destinés à être démolis dans un délai de moins de dix ans ou des bâtiments dont l'affectation n'est pas destinée à être modifiée dans le même délai (...) ; qu'aux termes de l'article R. 315-3 du même code alors en vigueur : La création d'un lotissement est subordonnée à une autorisation délivrée dans les conditions définies au présent chapitre ;
    Considérant qu'en application de ces dispositions, les parcelles bâties B 4444 et B 4445, qui supportent des bâtiments achevés depuis moins de dix ans, doivent être prises en compte pour l'appréciation du nombre de terrains issus de la division de la parcelle initiale B 4411, nonobstant le caractère postérieur au permis de construire de cette division ; qu'il s'ensuit que celle-ci a eu pour effet de porter à plus de deux lots le nombre de terrains constructibles issus de la propriété foncière appartenant à la S.A.R.L. Azurea ; que, dès lors, M. A est fondé à soutenir qu'en l'absence d'autorisation de lotir, le permis de construire délivré le 12 janvier 2007 à ladite société est entaché d'illégalité ».

     

    AUTORISATIONS D’URBANISME :

    CAA. Bordeaux, 18 octobre 2011, France Nature Environnement, req. n°10BX03015 : « Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme dans sa rédaction issue du décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007 applicable au permis de construire en litige : Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code: La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ; que l'association requérante se prévaut de la méconnaissance de l'article R. 423-1 mais ne conteste pas pour autant la présence de l'attestation que cet article et l'article R. 431-5 requièrent dans le dossier de la demande de permis de construire déposé par la société Groupe Victoria ; que la circonstance que certaines des parcelles composant le terrain d'assiette du projet auraient encore été à la date de cette demande et même à la date de la délivrance du permis la propriété de tiers, faute que les projets de vente les concernant aient été formalisés , ne suffit pas à faire regarder la société pétitionnaire comme dépourvue de qualité, au regard de l'article R. 423-1, pour déposer cette demande ;
    Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme créé par le décret précité du 5 janvier 2007 : Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le projet autorisé par le permis en litige, y compris pour ce qui est des aires de stationnement attachées audit projet, porterait, à la date à laquelle il a été délivré, sur une dépendance du domaine public ; que, si l'association requérante entend contester, par la voie de l'exception d'illégalité, la procédure au terme de laquelle ont été décidés la désaffectation et le déclassement de parcelles appartenant au domaine public communal, le permis de construire en litige ne constitue pas une application de ces décisions ; que, par suite, une telle exception d'illégalité ne peut être accueillie à l'appui du recours dirigé contre ce permis ; qu'il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 431-13 doit être écarté ».

    CE. 14 octobre 2011, Dominique A…, req. n°331.886 : « Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-1 du code l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : Quiconque désire entreprendre ou implanter une construction à usage d'habitation ou non, même ne comportant pas de fondations, doit, au préalable, obtenir un permis de construire sous réserve des dispositions des articles L. 422-1 à L. 422-5. (...) Sous réserve des dispositions des articles L. 422-1 à L. 422-5, le même permis est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ou de créer des niveaux supplémentaires.(...) ; qu'aux termes de l'article L. 422-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : Sont exemptés du permis de construire (...) les constructions ou travaux dont la faible importance ne justifie pas l'exigence d'un permis de construire. Un décret en Conseil d'Etat précise la nature et l'importance des constructions, travaux et installations concernés. (...) ; qu'aux termes de l'article R. 422-2 du même code, dans sa rédaction applicable à la date de la décision litigieuse : Sont exemptés du permis de construire sur l'ensemble du territoire : m) Les constructions ou travaux non prévus aux a à l ci-dessus, n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et : qui n'ont pas effet de créer une surface de plancher nouvelle ; ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors œuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés. ; qu'il résulte de ces dispositions combinées que sont exemptés de permis de construire les travaux n'ayant pas pour effet de changer la destination d'une construction existante et qui n'ont pas pour effet de créer une surface de plancher nouvelle ou qui ont pour effet de créer, sur un terrain supportant déjà un bâtiment, une surface de plancher hors œuvre brute inférieure ou égale à 20 mètres carrés ;
    Considérant que la transformation du toit terrasse d'une maison d'habitation en terrasse accessible n'a pas pour effet de changer la destination de la construction au sens de ces dispositions ; qu'ainsi, en jugeant que de tels travaux changeaient la destination de la construction et ne pouvaient être réalisés sans l'obtention préalable d'un permis de construire, le tribunal administratif de Montpellier a inexactement qualifié les faits de l'espèce et, par suite, commis une erreur de droit ».

     

    CONTENTIEUX DE LA LEGALITE :

    CAA. Lyon, 8 novembre 2011, Cne de Limonest, req. n°10LY01135 : « Considérant que la commune soutient que le retrait du permis tacite du 25 mars 2007 était soumis aux dispositions du 3°) de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000 susvisée aux termes duquel : Une décision implicite d'acceptation peut être retirée, pour illégalité, par l'autorité administrative : 1° Pendant le délai de recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ; 2° Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision, lorsqu'aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ; 3° Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé ; qu'elle fait en conséquence valoir que le retrait intervenu était possible à la date du 15 octobre 2007, dès lors qu'un recours contentieux avait été formé à son encontre le 27 juillet 2007 par l'Association syndicale libre du hameau de Mathias ;
    Considérant que les règles de procédure visées par le décret du 5 janvier 2007 précité ne visent que l'instruction des demandes de permis de construire jusqu'à l'intervention d'une décision sur celles-ci ; qu'en revanche, elles ne sauraient régir une décision de retrait intervenue postérieurement au 1er octobre 2007 qui est soumise aux dispositions de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme précité ; qu'en l'espèce, la décision du 15 octobre 2007 valant retrait du permis de construire tacite dont la SCI Résidence du Mathias était titulaire depuis le 25 mars 2007 est intervenue tardivement, dès lors qu'il a été effectué le 15 octobre 2007 au-delà du délai de trois mois prévu par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme applicable en l'espèce et alors que l'autorité administrative ne disposait plus du pouvoir pour ce faire ; qu'ainsi la COMMUNE DE LIMONEST n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal a accueilli le moyen présenté par la SCI Résidence du Mathias tiré de la tardiveté de l'arrêté du 15 octobre 2007 ».

     

    DIVERS :

    CAA. Paris, 4 novembre 2011, Sté CONFINFO, req. n°10PA04025 : « Considérant que le conseil d'administration de la S.I.E.M.P., par délibération en date du 9 mars 2006 se référant à la convention publique d'aménagement en date du 30 mai 2002, modifiée par plusieurs avenants, en vertu de laquelle la ville de Paris avait confié à cette société d'économie mixte une mission d'éradication de l'habitat insalubre en lui déléguant ses pouvoirs en matière d'expropriation pour l'exercice de cette mission, a demandé au préfet de Paris l'ouverture d'une procédure de déclaration d'utilité publique aux fins d'expropriation de l'immeuble sis au 3 et 5 rue Godefroy Cavaignac se trouvant dans un état de délabrement général , en vue d'y réaliser une vingtaine de logements sociaux et trois locaux d'activité en rez-de-chaussée ; qu'une telle délibération, prise par l'organe compétent d'une personne morale de droit privé chargée de l'exécution d'une mission de service public et investie à cette fin de prérogatives de puissance publique, dont elle a fait usage à cette occasion, constitue une décision administrative, premier élément de l'opération complexe à l'issue de laquelle sont intervenus les arrêtés préfectoraux litigieux portant déclaration d'utilité publique et déclaration de cessibilité ; que, par suite, sa légalité peut être utilement contestée, devant la juridiction administrative, à l'appui d'une demande dirigée contre ces arrêtés préfectoraux ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, d'une part, que suite à des travaux réalisés d'office aux frais et risques du propriétaire en 2003, l'immeuble n'était plus, à la date de la délibération du 9 mars 2006, exposé à des risques d'intoxication au plomb ; que d'autre part, si la notice explicative du dossier d'enquête publique rédigée par la S.I.E.M.P. et le rapport du commissaire enquêteur font valoir que l'immeuble était dans un état particulièrement dégradé, il résulte de l'ensemble des pièces du dossier, et notamment d'un rapport d'huissier du 13 mars 2007, d'un rapport d'audit d'un cabinet d'architectes, des termes de la notice jointe à la demande de permis de construire déposée par la S.I.E.M.P. pour la réhabilitation de l'immeuble après sa prise de possession, et des termes mêmes du jugement du juge des expropriations du Tribunal de grande instance de Paris en date du 25 juin 2007, rendu après visite approfondie de l'immeuble effectuée le 28 mars 2007, que si cet immeuble nécessitait d'importants travaux d'entretien, dont l'absence durant plusieurs années était d'ailleurs largement imputable aux décisions par lesquelles le préfet de police avait refusé, à plusieurs reprises, d'accorder le concours de la force publique pour l'expulsion judiciairement ordonnée dès le 22 mars 2000 d'occupants sans titre, il ne pouvait, sans erreur d'appréciation, être regardé comme insalubre ni en état de délabrement général ni même comme particulièrement dégradé ; que, dès lors, la délibération précitée qui se fonde sur un état d'insalubrité ou de dégradation avancée qui ne correspond pas à la réalité, et qui avait d'ailleurs pour but d'engager une procédure d'expropriation au profit d'un organisme qui, aux termes de la convention précitée, ne pouvait ainsi mettre en œuvre les pouvoirs qui lui avaient été délégués en matière d'expropriation en-dehors du cadre fixé par sa mission d'éradication de l'habitat insalubre, a été prise pour un motif erroné ;
    Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en raison de l'illégalité de la délibération précitée du 9 mars 2006, l'arrêté en date du 28 décembre 2006 portant déclaration d'utilité publique de l'immeuble sis 3 et 5 rue de Godefroy Cavaignac est entaché d'illégalité, de même, par voie de conséquence, que l'arrêté en date du 11 juillet 2007 portant déclaration de cessibilité de cet immeuble ».


     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

     

  • Modificatif de régularisation des permis groupés et annulation partielle des permis de construire valant division

    Un permis de construire groupé délivré en méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme ne peut pas être ultérieurement régularisé par un « modificatif » délivré sous l’empire de l’ancien article R.431-24 du Code de l’urbanisme. Partant, le vice affectant cette autorisation dans sa totalité est de nature à en emporter l’annulation globale.

    CAA. Paris 4 novembre 2011, Société Murat Vazire, req. n°10PA02696


    Dans cette affaire, la société appelante avait obtenu un permis de construire en vue de l’édification d’un ensemble immobilier comportant plusieurs bâtiments sur un terrain de 10.230 mètres carrés. Cette autorisation devait toutefois être contestée puis annulée par le Tribunal administratif de Paris au motif tiré de la méconnaissance de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme.


    La société pétitionnaire devait toutefois interjeter appel de ce jugement en contestant l’assujettissement même de son projet à la procédure de permis de construire valant division ; assujettissement que confirma cependant la Cour administrative d’appel de Paris au terme d’une appréciation des caractéristiques du projet principalement fondée sur des critères rarement mis autant en exergue en la matière :

    « considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet prévoit, sur un terrain d'assiette de 10 230 m², la construction par un seul maître d'ouvrage d'un ensemble immobilier comportant plusieurs bâtiments de R+5 à R+10 étages sur 3 et 4 niveaux de sous-sol, à usage d'habitation (211 logements dont 64 logements sociaux), d'une aumônerie, d'un hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD) comprenant 80 chambres ; que les immeubles comprenant 147 logements destinés à la vente, sont situés le long de la rue de Varize et du boulevard Murat et les immeubles comprenant 64 logements sociaux, et l'EHPAD sont situés au sud de la parcelle le long du boulevard Murat et de la rue du général Delestraint ; que ces deux groupes de bâtiments sont séparés par une allée traversant du nord au sud l'intégralité du terrain d'assiette et délimitant deux zones distinctes ; que, par ailleurs, le plan de repérage des clôtures prévoit des clôtures intérieures délimitant la partie du terrain affectée aux immeubles destinés à la vente comprenant des clôtures privatives pour les logements situés au rez-de-chaussée, la partie du terrain affectée à l'établissement destiné aux personnes âgées et la partie du terrain affectée aux immeubles destinés aux logements sociaux ; que l'organisation spatiale du projet s'organise ainsi autour d'unités fonctionnelles distinctes destinées à la vente, aux logements sociaux et à un établissement privé pour l'hébergement de personnes âgées ; qu'à la date des décisions contestées, le projet prévoyait ainsi, à tout le moins, de réaliser une division en propriété ou en jouissance de son terrain pour la partie affectée à l'établissement pour personnes âgées ; que, dès lors, le projet entrait dans le champ d'application des dispositions précitées de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme ».

    Mais plus spécifiquement, la Cour devait implicitement rejeter la demande de la société appelante tendant à l’application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme pour ce faisant prononcer l’annulation globale du permis de construire contesté.

    En première analyse, une telle solution est on ne peut plus logique puisque l’on sait que l’autorisation de construire et l’autorisation de diviser portée sur un permis groupé délivré au titre de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme ou par l’actuel article R.431-24 sont indivisibles ; telle étant la raison pour laquelle la Cour administrative d’appel de Bordeaux a déjà eu l’occasion de préciser que l’article L.600-5 ne trouvait pas selon elle à s’appliquer en la matière (CAA. Bordeaux, 17 mars 2009, Sté Bouygues Immobilier, req. n°07BX02438).

    Il reste que dans l’affaire objet de cet arrêt de la Cour bordelaise le permis avait été délivré conformément à l’article R.421-7-1 précité – et avait été annulé au motif que la superficie de certains des terrains à créer méconnaissait les prescriptions de l’article 5 du POS communal – alors qu’en l’espèce le permis de construire contesté avait été délivré au vu d’un dossier ne comportant pas les pièces requises par l’article précité et en conséquence d’une demande manifestement formulée en dehors de la procédure du permis de construire valant division.

    Or, s’il est vrai que ces vices sont de nature à affecter la totalité du projet en cause, il n’en demeure pas moins que la solution retenue sur ce point est plus surprenante en ce qu’elle émane de la Cour administrative d’appel de Paris dont on sait qu’elle a été la première à appliquer l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme :

    • d’une part, en s’affranchissant du critère d’invisibilité juridique traditionnellement mis en œuvre par la jurisprudence pour apprécier la propension de l’autorisation contestée a donné lieu à une simple annulation partielle ;
    • d’autre part, en allant au-delà de la lettre de l’article précité en prononçant l’annulation partielle d’un permis de construire alors que le vie dont il était entaché l’affectait dans sa totalité.

    Dans cette précédente affaire (CAA. Paris, 4 décembre 2008, SNC Hôtel La Bretonnerie, req. n°07PA03606), la Cour administrative d’appel de Paris avait en effet induit que la circonstance que l’autorisation contestée soit affectée d’illégalité dans sa totalité ne s’opposait pas au prononcé d’une annulation partielle au titre de l’article précité dès lors que le vice affectant cette autorisation pouvait être aisément régularisée par un « modificatif ».

    On pourrait ainsi considérer qu’en prononçant l’annulation totale de l’autorisation en cause dans l’affaire objet de la note de ce jour, la Cour administrative d’appel de Paris a ainsi estimé qu’une autorisation obtenue en tant que permis de construire simple ne peut être régularisée par un « modificatif » délivré au vu d’un dossier comportant les pièces requises dans le cas d’une demande portant sur une opération groupée.

    Tel n’est cependant pas le cas, du moins d’une façon générale. Et il faut dire qu’une telle solution aurait été pour le moins contestable.

    D’un point de vue procédural, en effet, il faut rappeler que l’autorisation dite « permis de construire valant division » n’existe pas en tant que telle dans le Code de l’urbanisme puisque cette autorisation n’est rien d’autre qu’un permis de construire de droit commun présentant pour seule particularité d’être délivré au vu d’un dossier comportant les pièces aujourd’hui requises par l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme.

    Or, tout vice affectant un permis de construire, y compris les vices de forme ou de procédure, est susceptible d’être purgé par un « modificatif » (CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315) puisqu’un « modificatif » forme avec le permis primitif une autorisation unique dans la légalité doit s’apprécier comme si n’était en cause qu’une seule décision.

    De ce fait, la solution retenue en l’espèce par la Cour administrative d’appel de Paris ne remet aucunement en cause le bien-fondé (selon nous) des arrêts ayant déjà reconnu la possibilité de régulariser un permis de construire délivré en méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme par un « modificatif » délivré au vu d’un dossier comportant les pièces prescrites par cet article (CAA. Nancy, 10 juin 2010, Mme Anne A., req. n°09NC00357).

    Quant au fond, et même à admettre qu’un tel « modificatif » n’ait pas pour seul objet de régulariser les vices affectant l’autorisation initiale mais vise en fait à modifier la nature de cette dernière en la transformant en un permis de construire valant division, il reste que selon nous une telle conclusion n’exclue pas en elle-même le recours à un tel modificatif dès lors qu’en principe, cette transformation n’a aucun impact sur les modalités d’application des règles d’urbanisme opposables au projet compte tenu de l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme (voir ici) ; étant précisé que le PLU applicable en l’espèce (celui de la Ville de Paris) ne s’oppose au principe posé par cet article que s’agissant des lotissements.

    Il n’en demeure pas moins que la Cour administrative d’appel de Paris a bien rejeté l’argument de la société appelante, selon lequel le « modificatif » qu’elle avait ultérieurement obtenu avait régularisé l’autorisation contesté, mais ce au motif spécifique suivant :

    « considérant que les requérantes soutiennent que le permis modificatif délivré le 30 septembre 2008 n'était soumis qu'à l'application des nouvelles dispositions de l'article R. 431-24 du code de l'urbanisme et, qu'ainsi, la délivrance de ce permis a eu pour effet de régulariser le permis de construire initial ; qu'à supposer même que ces dispositions soient moins exigeantes, seules les dispositions de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme, demeuraient applicables au regard du projet contenu dans la demande initiale ; que, par suite, le permis modificatif du 30 septembre 2008 n'a pu régulariser sur ce point le permis initial ».

    La Cour semble donc avoir estimé que le « modificatif » allégué par la société appelante ne pouvait régulariser le permis primitif attaqué dans la mesure où celui-ci avait été délivré sous l’empire de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, contrairement au « modificatif » allégué relevant pour sa part de l’article R.431-24.

    Deux observations liminaires toutefois.

    D’une part, et d’une façon générale, il semble que la société appelante se soit bornée à évoquer l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme pour contester le principe même de l’assujettissement de cette opération à la procédure du permis de construire valant division.

    D’autre part, et plus spécifiquement, le « modificatif » allégué par la société appelante n’avait a priori pas pour objet de régulariser l’autorisation primitive mais tendait uniquement à modifier « le permis initial pour l'alignement des 4 niveaux de sous-sol sur la façade des bâtiments côté rue de Varize et la façade de l'établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendante (EHPAD) côté rue du général Delestraint ».

    Pour autant, la solution retenue n’en est pas moins quelque peu surprenante ; d’autant que la motivation de l’arrêt sur ce point est pour le moins sur cursive.

    En effet, si la Cour administrative d’appel de Paris a pu avoir quelques difficultés avec la propension régularisatrice du « modificatif » (CAA. Paris, 14 janvier 2001, SCI La Fontaine de Villiers, req. n°99PA00757)., il reste qu’elle l’a dorénavant parfaitement intégrée ; au point d’ailleurs de la théoriser dans un considérant de principe et de la mettre en œuvre pour les vices affectant la forme et les mentions mêmes de l’arrêté de permis de construire initial (CAA. Paris, 30 octobre 2008, M. Gilbert Y., req. n°05PA04511). De même, c’est cette Cour qui avait pu juger que l’irrégularité des divisions foncières précédemment pratiquées en méconnaissance de la règlementation sur les lotissements pouvait être régularisée par le seul assouplissement de cette réglementation (voir ici).

    D’ailleurs, s’il est vrai que les conséquences d’une modification des règles de fond ne sont pas en tous points comparables à celles liées à l’évolution des règles de procédure, il n’en demeure pas moins que pour sa part la Cour administrative d’appel de Nantes a pu juger qu’une autorisation de lotir délivrée avant le 1er octobre 2007 pouvait être régularisée par un permis d’aménager modificatif (CAA. Nantes, 4 mai 2010, Cne de Belz, req. n°09NT01343).

    Mais il est vrai que pour sa part la Cour administrative d’appel de Nantes n’a jamais hésité à reconnaitre aux autorisations modificatives des vertus régularisatrices allant peut-être au-delà de celles qu’elles revêtent effectivement (CAA. Nantes, 22 avril 2008, Ministre de l’écologie, req. n°07NT02508)...

     


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

     

  • L’engagement d’une partie des travaux dans le délai prévu par l’article R.424-17 du Code de l’urbanisme interrompt en toute hypothèse ce délai pour l’ensemble de l’autorisation obtenue

    Dès lors que l’ensemble des constructions projetées ont été autorisées par un seul et même permis de construire, l’engagement d’une partie des travaux interrompt le délai de validité de cette autorisation dans son ensemble et ce, quelle que soit la divisibilité des constructions projetées.

    TA. Versailles, 30 juin 2011, SARL Batival, req. n°08-07765 (jugement n°16 cité par la lettre n°11.pdf du TA de Versailles)


    Nous avons ici déjà souvent traité des questions se rapportant à la notion d’ouvrages et d’ensembles immobiliers indivisibles. L’un des aspects des conséquences de la divisibilité du projet et de celle subséquente du permis de construire s’y rapportant est cependant moins connu : le délai de validité de cette autorisation et sa propension à être frappée de caducité partielle.

    Concrètement la question ainsi posée est de savoir si l’exécution d’une partie divisible d’un projet relevant d’un permis de construire unique interrompt ou non le délai de validité de cette autorisation pour son tout ou seulement pour sa partie mise en œuvre dans le délai fixé par l’article R.424-17 du code de l’urbanisme dont on rappellera qu’il dispose « le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».

    A cet égard, il faut tout d’abord relever qu’à cet égard l’article précité n’est pas substantiellement différent de l’ancien article R.421-32 qui pour sa part disposait que « le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année ».

    A ce titre, et dans un arrêt il est vrai ancien, le Conseil d’Etat a jugé, mais sans réelle précision sur ce point, que le délai de caducité du permis de construire autorisant l’édification de plusieurs bâtiments pouvait être interrompu par l’engagement des travaux sur n’importe quel d’entre eux, sans qu’il soit donc nécessairement besoin que les travaux portent sur la totalité du projet (CE. 10 décembre 1965, Synd. des copropriétaires de l’immeuble « Pharao-pasteur », Rec., p. 684). Dans le même sens, mais plus récemment, et à propos d’un permis de construire portant sur deux bâtiments distincts, la Cour administrative d’appel de Douai a déterminé le délai d’un an avant lequel les travaux d’édification du second bâtiment devaient être engagés par la seule référence à la date d’achèvement du premier (laquelle était postérieure à l’échéance du délai initial) et ce, sans autre considération (CAA. Douai, 14 juin 2001, SCI Séverine, req. n°97DA01664).

    Toutefois, au terme d’une analyse plus précise des projets en cause, la Cour administrative d’appel de Marseille a pour sa part jugé que :

    - l’engagement des travaux ne portant que sur le premier bâtiment à construire n’avait pas interrompu le délai de validité du permis à l’égard du second bâtiment dans la mesure où l’un et l’autre « étaient indépendants et ne comportaient aucune partie commune » (CAA. Marseille, 22 avril 1999, Bracco, req. n° 97MA00647) ;

    - a contrario, l’engagement des travaux portant sur trois bâtiments suffisait à interrompre le délai de validité du permis à l’égard du quatrième dès lors que cet ensemble formait un projet « indivisible » (CAA Marseille, 6 octobre 2005, SCI Les Hautes Roches, req. n° 01MA01827).

    Sur ce point, il faut ainsi souligner que dans la première affaire, la Cour a retenu la caducité partielle du permis de construire alors même que l’exécution d’une des deux maisons projetées constituait au regard de l’économie générale du projet un commencement significatif d’exécution du projet. En revanche, dans la second affaire, la Cour a conclu à la validité d’ensemble du permis de construire non pas en considération de l’importance des travaux entrepris mais au premier chef en considération de l’indivisibilité du permis de construire les ayant autorisés.

    A s’en tenir à ces arrêts, le principal critère en la matière est/serait donc celui de la divisibilité du projet et du permis de construire s’y rapportant.

    Mais tel n’est donc pas la solution retenue par le Tribunal administratif de Versailles dans son jugement objet de la note de ce jour.

    Dans cette affaire, le permis de construire en cause portait sur la construction sur un même terrain, d’une part, de deux bâtiments et, d’autre part, de six maisons individuelles ; ces deux composantes du projet apparaissant indivisible puisque le Tribunal a relevé qu’elles auraient pu être réalisées indépendamment.

    Mais au terme du délai de validité prévu par l’article R.424-17 précité, seuls les travaux se rapportant à l’édification de ces six maisons individuelles avaient été réalisées. Ainsi, alors même que les travaux n’avaient pas encore été interrompus depuis plus d’un an, le Maire devait opposer au constructeur la caducité de son permis de construire pour ce qu’il concernait les deux bâtiments restant à construire et ainsi adopter une décision apparaissant parfaitement conforme à l’arrêt « Bracco » précité de la Cour administrative d’appel de Marseille.

    Il reste que pour sa part le Tribunal devait donc estimer que dans la mesure où l’opération avait donné lieu à un permis de construire unique et ce, sans que l’autorité compétente n’exige que ses deux composantes relèvent d‘autorisation séparées, l’exécution des travaux se rapportant aux villas avait interrompu le délai de validité de ce permis de construire dans son ensemble, y compris donc pour ce qui concerne les deux autres bâtiments restant à construire dès lors que les travaux n’avaient pas été interrompus pendant plus d’un an.

    Outre que l’on voit mal comment l’autorité compétente aurait pu exiger deux demandes de permis de construire distinctes puisque si un projet unique doit en principe faire l’objet d’une seule et même demande rien n’interdit que deux opérations distinctes projetées sur un même terrain d’assiette relève d’une seule et même autorisation, une telle solution n’apparait pas exempte de toute critique.

    Comme on le sait, en effet, il ressort de l’examen de la jurisprudence rendue en la matière que la divisibilité d’un projet d’urbanisme produit ses effets à tous les stades : 

    - la nature et le nombre d’autorisations susceptibles d’être obtenues (CE. 17 juillet 2009, Ville de Grenoble & Communauté d’Agglomération Grenoble Alpes Métropole, req. n°301.615 ; CAA. Bordeaux, 1er avril 2010, Nadia X., req. n°09BX00275 ; TA. Nice, 24 mai 2006, Mme Baracco, req. n°02-05432) ;

    - le pouvoir de l’administration statuant sur la demande, laquelle peut donner lieu à un refus partiel ou, a contrario, n’être que partiellement accordée (CE. 4 janvier 1985, SCI Résidence du Port, req. n° 47.248) ;

    - le pouvoir de l’administration pour retirer l’autorisation délivrée, le cas échéant partiellement (CE. 6 novembre 2006, req. n°281.672 ; CAA. Nantes, 7 avril 2010, SNC Parc Eolien Guern, req. n°09NT00829) ;

    - la propension du permis de construire obtenu a faire l'objet d'un transfert partiel (CE. 24 juillet 1987, req. n°61.164 ; CAA. Marseille, 18 mars 2004, Cne de Beausoleil, req. n°01MA00551. Voir ici et );

    - l’appréciation de la conformité des travaux en cours d’exécution et la détermination du champ d’application matérielle de l’ordre interruptif des travaux (CE. 25 septembre 1995, M. Michel Marchand, req. n° 118.863 ; CAA. Bordeaux, 8 février 2010, David Henri X…, req. n°09BX00808);

    - le sort contentieux de l’autorisation, laquelle pouvait déjà n’être que partiellement annulée et ce, bien avant l’entrée en vigueur de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme (CE. 2 février 1979, Cts Sénécal, req. n° 05.808) ainsi que, plus spécifiquement, sur l'appréciation par le juge des référés de l'urgence à suspendre le permis de construire attaqué (TA. Grenoble, 8 décembre 2011, M. Cipri, req. n°10-04965). 

    Et pour cause puisqu’en fait, lorsqu’un arrêté portant permis de construire est divisible, c’est qu’il intègre déjà « plusieurs décisions », si bien qu’il faut apprécier distinctement l’objet et les effets de « chacune des autorisations » (Concl. J. Burguburu sur : CE. 17 juillet 2009, Ville de Grenoble », BJDU n°4/2009, p.274).

    D’une façon générale, on voit donc mal pourquoi il en irait différemment pour ce qui concerne le délai de validité d’une autorisation divisible portant sur des projets distincts ; sans compter, plus spécifiquement, que la solution retenue par le Tribunal administratif de Versailles dans cette affaire incite à recourir au permis de construire unique pour en faire, à travers le régime de son délai de validité et des « droits acquis » qu’il confère, une forme de « super certificat d’urbanisme » protégeant des évolutions défavorables des règles d’urbanisme opposables au(x) projet(s) et ce, sans avoir même besoin d’en obtenir la prolongation.

    D’ailleurs, si à notre connaissance le Conseil d’Etat ne s’est jamais prononcé explicitement sur cette question en matière d’autorisation d’urbanisme, en hors du cas particulier des autorisations de lotir, il a en revanche clairement reconnu la propension d’une autorisation d’exploiter « ICPE » à être frappée de caducité partielle lorsque celle-ci est divisible, c’est-à-dire « dans l'hypothèse où, par le même acte, a été autorisée l'exploitation de plusieurs installations classées distinctes » (CE. 27 septembre 2006, Communauté d’agglomération de Montpellier, req. n° 269.553) ; les critères d’appréciation de la divisibilité d’une telle autorisation n’étant au surplus pas si éloignée de ceux mis en œuvre à l’égard d’une autorisation d’urbanisme (CAA. Marseille, 8 novembre 2001, Sté « Mines d’Or de Salsignes », req. n°97MA11230).

    Surtout, la solution retenue par le Tribunal administratif de Versailles dans cette affaire tend donc à faire du nombre d’autorisations obtenues le seul critère de détermination du délai dans lesquels les travaux peuvent être exécutés. Pour autant, tel n’est pas le cas dans la mesure où le délai de validité d’une autorisation d’urbanisme peut être impacté par la mise en œuvre d’une autre dès lors qu’elles se rapportent à des travaux indissociables puisqu’à titre d’exemple, le Conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-32 du code de l'urbanisme : "Le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ( ...). Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année" ;
    Considérant qu'il résulte des dispositions ci-dessus rappelées que l'interruption des travaux pendant une durée de plus d'un an rend caduc le permis de construire, alors même que le délai de deux ans précité n'est pas expiré ;
    Considérant qu'en se fondant, pour faire application des dispositions susrappelées relatives au délai d'interruption des travaux d'un an à ces travaux de démolition, sur la circonstance qu'en l'espèce les travaux de démolition du bâtiment préexistant n'étaient pas dissociables des travaux de construction de sorte que le délai d'interruption des travaux devait être décompté à partir de l'arasement du bâtiment démoli, la cour administrative d'appel n'a pas dénaturé les faits de la cause ni entaché son arrêt d'erreur de droit
    » (CE. 8 novembre 2000, EURL « Les Maisons Traditionnelles, req. n°197.505).


    Mais dans cette mesure et en toute hypothèse, ce jugement renvoie également à l’inconnu du régime des permis de construire obtenus à la faveur de l’exception introduite par l’arrêt « Ville de Grenoble » et, notamment, à leurs délais de validité respectifs lorsque l’un des permis de construire ne peut être mis en œuvre qu’une fois que l’autre a été exécuté…

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
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