Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Permis de construire - Page 25

  • Quelques précisions sur les modalités d’application des articles L.421-2-5 et R.421-3-2 du Code de l’urbanisme

    L’inapplicabilité de l’article L.421-2-5 du Code de l’urbanisme ne s’oppose pas à ce qu’un maire intéressé à sa délivrance doive déléguer cette fonction au titre de l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales. Par ailleurs, l’absence de production au dossier de demande du récépissé de déclaration d’exploitation d’installation classée pour la protection de l’environnement n’emporte pas l’annulation du permis de construire sur le terrain de l’article R.421-3-2 du Code de l’urbanisme lorsqu’il est établi que les services en charge de l’instruction de cette demande en ont eu communication.

    CAA. Lyon, 28 septembre 2006, Association X., req. n°03LY02072


    Dans cette affaire, le maire de la commune de Saint-Victor-sur-Arlanc avait sollicité et obtenu un permis de construire portant sur deux bâtiments à usage de porcherie dont l’exploitation exigeait, par ailleurs, la formulation d’une déclaration au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l’environnement.

    I.- Mais intéressé à la délivrance de ce permis de construire, le Maire avait ainsi délégué cette fonction à son premier adjoint. Or, dans le cadre du recours en annulation exercé à son encontre, les requérants soutenaient, notamment, que le permis de construire litigieux était entaché d’incompétence puisque son signataire – le premier adjoint – n’avait pas été habilité à cet effet par une délibération du Conseil municipal.

    Mais constatant que la commune de Saint-Victor-sur-Arlanc n’était pas couvert pas un POS ou un PLU à la date de délivrance du permis de construire contesté, le Cour administrative d’appel de Lyon, confirmant le jugement de première instance du Tribunal administratif de Clermont-Ferrand devait rejeté ce moyen au motif suivant :

    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-2-5 du code de l'urbanisme, applicable dans les communes pour lesquelles un plan d'urbanisme a été approuvé : « Si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé à la délivrance du permis de construire, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour délivrer le permis de construire » ; qu'aux termes de l'article L. 2122-17 du code général des collectivités territoriales dans sa version alors applicable : « En cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau» ;
    Considérant, qu'en sa qualité de maire de la commune de Saint-Victor-sur-Arlanc, , bénéficiaire du permis litigieux, était intéressé à sa délivrance ; qu'à la date d'intervention de ce permis, la commune de Saint-Victor-sur-Arlanc n'était pas dotée d'un plan d'occupation des sols approuvé ; qu'il suit de là que les dispositions de l'article L. 421-2-5 ci-dessus étaient en l'espèce inapplicables ; qu'en revanche, étant intéressé, le maire de Saint-Victor-sur-Arlanc était empêché au sens de l'article L. 2122-17 ci-dessus ; que, pour la signature du permis litigieux, il a pu, sur ce même fondement, être provisoirement remplacé par , premier adjoint ; que, contrairement à ce que prétend la requérante, cette disposition n'exigeait aucune délibération du conseil municipal attribuant à cet adjoint une délégation expresse en ce sens ; que l'association requérante n'est donc pas fondée à soutenir que le permis en cause aurait été signé par une autorité incompétente
    ».

    On sait, en effet, que si l’article L.421-2-5 du Code de l’urbanisme se borne à disposer, sans autre précision quant au champ d’application territorial de ses prescriptions, que « si le maire ou le président de l'établissement public de coopération intercommunale est intéressé à la délivrance du permis de construire, soit en son nom personnel, soit comme mandataire, le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour délivrer le permis de construire », le Conseil d’Etat a précisé qu’elles n’étaient applicables que dans les communes couvertes par un POS ou un PLU (CE. 14 juin 1995, Girot, req. n°115.091) ; ce qui semble pourvoir s’expliquer par le fait qu’en pareil cas, les permis de construire sont instruits et délivrés au nom de l’Etat, si bien que lorsqu’il est compétent (par exception, cette compétence peut relever du Préfet de Département), le maire se borne en fait à entériner la décision des services instructeurs de la Préfecture après avoir, néanmoins, été consulté et fait connaître l’avis de la commune sur le projet en cause.

    Il reste que non seulement le Conseil d’Etat a érigé en quasi-principe général du droit la règle d’impartialité des autorités administratives, laquelle doit ainsi s’appliquer même en absence de texte spécial (Ccl. Mitjavile sur CE. ass., 3 décembre 1999, CCM de Bain-Tresboeuf, req. n°197.060) mais qu’en outre, l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales dispose, d’une façon générale, que « en cas d'absence, de suspension, de révocation ou de tout autre empêchement, le maire est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau».

    Précisément, la Cour administrative d’appel de Lyon a donc jugé que le fait d’être intéressé à la délivrance d’un permis de construire constitue pour le Maire un empêchement au sens de l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales, si bien qu’en cas d’inapplicabilité des prescriptions spéciales de l’article L.421-2-5 du Code de l’urbanisme, il lui incombe, au titre de ces dispositions générales, de se « déporter » pour qu’ainsi, le permis de construire soit signé par un adjoint ou, à défaut d’adjoint, par un conseiller municipal. A cet égard, l’arrêt commenté confirme en tous points l’analyse précédemment faite par le Tribunal administratif d’Amiens dans jugement – soulignons-le – mentionné aux Tables du Recueil Lebon (TA. Amiens, Epx Micheli, req. n°93-02147, Rec., T., p.1219).

    Mais par voie de conséquence, la Cour administrative d’appel de Lyon a donc jugé que l’intervention du premier adjoint du Maire de Saint-Victore-sur-Arlanc ne nécessitait pas sa désignation préalable par une délibération du Conseil municipal puisque si l’article L.421-2-5 du Code de l’urbanisme précise que, lorsque ses prescriptions sont applicables, « le conseil municipal de la commune ou l'organe délibérant de l'établissement public désigne un autre de ses membres pour délivrer le permis de construire », l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales dispose qu’en cas d’empêchement du Maire, celui-ci « est provisoirement remplacé, dans la plénitude de ses fonctions, par un adjoint, dans l'ordre des nominations et, à défaut d'adjoint, par un conseiller municipal désigné par le conseil ou, à défaut, pris dans l'ordre du tableau» : une délibération du conseil municipal n’est donc nécessaire que pour désigner l’un de ses membres et ce, uniquement en cas de défaut d’adjoint.

    En résumé, là où dans les communes couvertes par un POS ou un PLU le Maire intéressé à la délivrance d’un permis de construire devra être remplacé par un membre du Conseil municipal désigné, en toute hypothèse, par une délibération de ce dernier en application de l’article L.421-2-5 du Code de l’urbanisme, un adjoint pourra remplacer le Maire au titre de l’article L.2122-17 du Code général des collectivités territoriales sans qu’il soit besoin qu’il ait été désigné à cet effet par le Conseil municipal dans les communes n’étant pas couvertes par un tel document d’urbanisme.

    II.- Plus spécifiquement, l’arrêt commenté démontre également que si le juge administratif est souvent rigoureux s’agissant de l’application des prescriptions d’urbanisme et, notamment, de celles régissant le contenu du dossier de demande de permis de construire, il peut néanmoins faire preuve de pragmatisme.

    Dans cette affaire, la construction projetée le Maire de Saint-Victor-sur-Arlanc constituait, en effet, une installation classée pour la protection de l’environnement assujettie à déclaration d’exploitation au titre de cette législation. Par voie de conséquence, son dossier de demande de permis de construire relevait des prescriptions de l’article R.421-3-2 du Code de l’urbanisme qui dispose que « lorsque les travaux projetés concernent une installation soumise à autorisation ou à déclaration en vertu de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, la demande de permis de construire doit être accompagnée de la justification du dépôt de la demande d'autorisation ou de la déclaration ».

    Mais si le Maire avait effectivement formulé cette déclaration, il reste qu’il n’en avait pas produit le récépissé à son dossier de demande de permis de construire. Or, par principe, la méconnaissance des prescriptions de l’article précité emporte l’annulation du permis de construire délivré sans ces conditions.

    Il reste que l’article R.421-3-2 du Code de l’urbanisme n’impose pas la production du récépissé de déclaration ou de la demande d’autorisation d’exploiter pour le principe ou pour la « beauté du geste » mais pour assurer la l’information des services instructeurs concernés et ainsi la jonction des instructions des demandes formulées au titre de la législation d’urbanisme, d’une part, et de la législation environnementale, d’autre part (CE. 23 mai 2001, Association pour la défense de l’environnement du Pays Arédien et du Limousin, req. n°210.938); lesquelles sont, toutefois, indépendantes, si bien qu'il n'y a aucun lien d'interdépendance entre le permis de construire et l'autorisation d'exploiter.

    Or, il se peut que nonobstant le défaut de production des pièces requises au titre de l’article R.421-3-2 du Code de l’urbanisme par le pétitionnaire, les services en charge de l’instruction de la demande de permis de construire aient néanmoins été mis en possession de la demande d’autorisation d’exploiter ou du récépissé de déclaration d’exploitation d’installation classée pour la protection de l’environnement.

    En pareille circonstance, les prescriptions de l’article précité ont certes été méconnues mais l’objectif poursuivi par ce dernier a néanmoins été réalisé ; tel était le cas en l’espèce. C’est pourquoi la Cour administrative d’appel de Lyon a refusé d’accueillir le moyen tiré de la méconnaissance « formelle » des prescriptions de l’article R.421-3-2 du Code de l’urbanisme en jugeant que :

    « si le récépissé du dépôt de la demande présentée au titre de la loi susvisée du 19 juillet 1976 ne figurait pas au dossier de demande de permis déposé par [le pétitionnaire], il ressort des pièces du dossier, et notamment d'un courrier du préfet de la Haute-Loire du 28 mars 2001, qu'il était en possession de l'administration et qu'il avait été transmis aux services en charge de l'instruction de la demande de permis ; que le moyen tiré de la violation de la disposition ci-dessus manque en fait ».

    Sur ce point, l’arrêt commenté peut être rapproché de la solution adoptée par la Cour administrative d’appel de Marseille à l’égard du justificatif du dépôt de la demande d’autorisation de prise d’eau au titre de l’article 106 du code Rural (art. R.421-3-3 ; C.urb), laquelle a jugé que le défaut de production de ce justificatif au dossier de demande ne pouvait emporter l’annulation du permis de construire délivré par le Préfet puisqu’à sa date de délivrance, celui-ci avait déjà octroyé l’autorisation prévue par l’article 106 du Code rural et devait donc être réputé avoir déjà connaissance tant du dépôt que de la délivrance de cette autorisation (CAA. Marseille, 18 octobre 2001, Association de protection des salmonidés, req. n°98MA00194).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • L’inaccessibilité des places de stationnement affectées à une construction n’emporte pas nécessairement l’annulation du permis de construire s’y rapportant

    Lorsque l’article 12 du règlement d’urbanisme local ne contient aucune prescription relative au stationnement des véhicules, la seule circonstance que deux des places de stationnement à aménager ne soient pas accessibles ne peut suffire à établir que le permis de construire méconnaît les prescriptions de l’article 3 dudit règlement.

    CAA. Nancy, 19 octobre 2006, M. Jean-Claude X., 05NC00269


    Dans cette affaire, le pétitionnaire avait obtenu un permis de construire pour l’aménagement en habitation des combles d’un immeuble existant et la réalisation de trois places de stationnement. Cette autorisation devait, toutefois, faire l’objet d’un recours en annulation dont le seul moyen opérant était tiré de la méconnaissance de l’article 3 du POS communal relatif au accès, lequel se bornait, en l’espèce, à retranscrire l’économie générale de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme en disposant que « tout terrain enclavé est inconstructible, à moins que son propriétaire n'obtienne un passage aménagé sur les fonds de ses voisins dans les conditions fixées par l'article 682 du code civil ».

    L’élément de fait présenté au soutient de ce moyen était, toutefois, spécifique puisque les requérants se bornaient à faire valoir que le permis de construire méconnaissait les prescriptions précitées dans la mesure où deux des trois emplacements de stationnement projetés n’étaient pas accessibles.

    La Cour administrative d’appel de Nancy devait, cependant, confirmer le jugement de première instance et rejeter ce moyen ainsi que l’ensemble de la requête en jugeant que :

    « considérant que M. X fait valoir que le permis de construire litigieux méconnaît les dispositions sus rappelées de l'article U3.1, au motif que les deux emplacements de parking dont il autorise l'aménagement ne seraient pas accessibles depuis la Grand'rue, et que la servitude de passage permettant l'accès à ces deux parkings est insuffisante pour les desservir ; que, toutefois, d'une part, il est constant que la construction projetée est accessible depuis la Grand'Rue, et, d'autre part, le règlement du plan d'occupation des sols ne contient pas de dispositions relatives aux stationnements des véhicules ; que, par suite, la construction litigieuse n'a pas été autorisée en méconnaissance des dispositions susrappelées de l'article U3.1, nonobstant la circonstance que les deux emplacements de parkings créés soient en réalité inaccessibles ».

    La Cour a donc jugé que les deux places de stationnement litigieuses n’étaient certes pas accessibles mais que dans la mesure où l’article 12 du POS communal n’était pas réglementé aucun moyen tiré de cette situation ne pouvait prospérer à l’encontre du permis de construire contesté.

    En substance, la Cour semble donc avoir considérer que dans la mesure où l’article 12 du règlement d’urbanisme local ne contenait aucune prescription relative au stationnement des véhicules et où, par voie de conséquence, aucune place de stationnement n’était requise à ce titre, la légalité du permis de construire en litige devait donc être appréciée indépendamment de toute considération liée aux places de stationnement néanmoins prévues par le pétitionnaire.

    Pour faire preuve d’un louable pragmatisme, la solution retenue par l’arrêt commenté n’en appelle pas moins certaines réserves.

    A suivre la démarche de la Cour, force serait donc de considérer qu’aucun moyen tiré des places de stationnement non requises au titre de l’article 12 du règlement d’urbanisme local ne saurait être utilement invoqué à l’encontre du permis de construire en autorisant l’aménagement. Et a priori, une telle solution devrait valoir aussi bien pour les places aménagées alors que l’article 12 n’en exige aucune que, le cas échéant, pour les places excédentaires, prévues en supplément du nombre exigé par cet article lorsque tel est le cas.

    Il reste que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de juger que dans le cas où les places excédentaires ne présentaient pas les dimensions prescrites par l’article 12 du règlement d’urbanisme local, cette circonstance suffisait à emporter l’annulation du permis de construire les ayant autorisées, quand bien même les places requises au titre de cet article respectaient pour leur part les dimensions prescrites par ce dernier (CE. 31 juillet 1996, Sté Balladins, req. n°127.667).

    D’ailleurs, le juge administratif a déjà eu l’occasion de censurer plusieurs permis de construire en considération de l’inaccessibilité de certaines des places de stationnement projetées indépendamment de toute considération liée à la question de savoir si elles étaient ou non requises par l’article 12 du règlement d’urbanisme local (pour exemple : CAA. Lyon, 4 avril 2000, SARL GENEPI, req. n°99LY01288) .

    A notre sens, la circonstance que les deux places litigieuses n’étaient pas prescrites par le POS communal ne peut donc justifier à elle seule que la Cour administrative d’appel de Nancy ait refusé de censurer le permis de construire contesté en considération de leur inaccessibilité.

    Mais en l’espèce, il faut souligner que l’article 3 du POS communal n’imposait pas la desserte des constructions et des aménagements annexes mais l’accessibilité du terrain à construire depuis la voie publique, ce qui est d’ailleurs le seul objet de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme (CE. 26 octobre 2005, Cne de Sceaux, req. n°265.488) que ledit article 3 se bornait à retranscrire ; étant précisé que l’article 3 d’un règlement d’urbanisme local peut néanmoins imposer expressément que chacune des constructions projetées sur un même terrain dispose d’un accès propre (pour un exemple de permis de construire annulé au motif que chacun des trois bâtiments projetés ne disposait pas d’un accès propre à la voie publique : CAA. Versailles, 18 mai 2006, Sté Francelot, req. n°04VE03254), ce qui n’était donc pas le cas en l’espèce.

    La Cour administrative d’appel de Nancy aurait donc pu se borner à constater que le terrain à construire était desservi par une voie publique pour conséquemment rejeter le moyen tiré de la prétendue méconnaissance de l’article 3 du POS communal.

    Pour autant, la Cour a cru utile de relever non pas que le terrain était accessible depuis la voie publique existante au droit de ce dernier mais que « la construction projetée (était) accessible depuis la Grand'Rue » et, par voie de conséquence, respectait les prescriptions de l’article 3 du POS communal. A priori, il aurait donc été cohérent de tirer les conséquences du fait que les deux places de stationnement en cause était inaccessibles….

    D’ailleurs, cette conséquence n’aurait pas nécessairement été l’annulation de l’entier permis de construire attaqué. Il apparaît, en effet, que les deux places litigieuses étaient manifestement isolées du reste de la construction autorisée et n’étaient donc pas nécessaires à la conformité du projet au regard de l’article 12 du POS communal puisque celui-ci n’était pas réglementé. En d’autres termes, ces deux places de stationnement étaient matériellement et juridiquement dissociables du reste du projet autorisé par le permis de construire litigieux.

    Au pire et pour faire preuve de cohérence, la Cour aurait donc pu n’annuler ce permis de construire qu’en tant qu’il avait autorisé ces places de stationnement.

    Il reste que, selon nous, la solution la plus simple et la plus satisfaisante d’un point de vue juridique aurait été que la Cour se limite à constater que, d’une part, l’article 3 du POS communal se bornait à imposer que le terrain à construire soit desservi par une voie publique pour, d’autre part, relever que tel était bien le cas en l’espèce et ainsi conclure que le moyen tiré de la méconnaissance de cet article était, tel qu’il était soutenu, inopérant puisque se rapportant à une considération de fait que ne saisissait pas l’article invoqué.

    En résumé, si elle est fondamentalement justifier en droit, le raisonnement juridique mis en œuvre à cet effet par la Cour administrative d’appel de Nancy apparaît quelque peu contestable et ne saurait, selon nous, être transposé à toute autre affaire où l’article 12 du règlement d’urbanisme local ne serait pas réglementé.

    Il n’en demeure pas moins que cet arrêt peut être rapproché d’autres décisions dans lesquelles le juge administratif a fait preuve d’une certaine clémence à l’égard des conditions de praticabilité des places de stationnement projetées et, notamment, de l’arrêt par laquelle la Cour administrative d’appel de Paris a jugé que deux places de stationnement pouvait disposer d’un dégagement commun alors que le POS communal prescrivait que « chaque emplacement, dans une aire collective, doit répondre aux caractéristiques minimales suivantes : longueur 5 mètres, largeur 2,30 mètres, dégagement 6 x 2,30 mètres » (CAA. Paris, 29 juin 1999, Allanches, req. n°95PA03081) ou de celui par lequel le Conseil d’Etat a considéré que certaines places de stationnement pouvaient n’être accessibles qu’à partir d’autres emplacements (CE. 26 février 2001, Mme Dorwling-Carter, req. n°211.318) alors que dans les deux cas, les places litigieuses n’étaient pas excédentaires mais indispensables assurer le respect de l’article 12 du règlement d’urbanisme local quant au nombre de places nécessaires.



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat à la Cour
    Cabinet Frêche & Associés

  • Lorsque le projet relevant du permis de construire contesté est divisible, la méconnaissance de l’article R.421-4.al.2 du Code de l’urbanisme n’emporte l’annulation du permis de construire qu’en ce qu’il autorise la composante du projet assujettie à ses p

    Lorsque les maisons individuelles sont dissociables de l’hôtel autorisé par le même permis de construire, l’absence de justification au dossier présenté par le pétitionnaire d’une demande d’autorisation « CDEC » n’emporte l’annulation de ce permis qu’en tant qu’il autorise cet hôtel mais est sans incidence sur la légalité de celui-ci en ce qu’il permet l’édification des maisons.

    CAA. Nantes, 18 avril 2006, Sté Investimmo Régions, req. n°04NT01390.


    S’il est déjà quelque peu ancien (bien qu’il n’ait été publié que le 6 novembre 2006 sur le site Legifrance), l’arrêt commenté offre la possibilité d’appréhender la portée de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme qui dans sa rédaction issue de la loi « ENL » dispose que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation.L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive ».

    Bien que cet article puisse apparaître particulièrement novateur, ce dernier ne constitue cependant pas une réelle nouveauté et se borne, en fait, à consacrer une pratique jurisprudentielle aussi ancienne que fréquente dont l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Nantes constitue un bon exemple (voir ici également).

    Dans cette affaire, le pétitionnaire avait obtenu un permis de construire unique autorisant tout à la fois la construction de 125 maisons individuelles ainsi que l’édification d’un hôtel de 73 chambres. A ce dernier titre, sa demande de permis de construire relevait donc de l’article R.421-4.al.-2 du Code de l’urbanisme en ce qu’il prescrit que « lorsqu'il s'agit de constructions à usage commercial assujetties à l'autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial en vertu de l'article 29 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat, la demande de permis de construire est complétée par la copie de la lettre adressée par le préfet au demandeur de l'autorisation précitée lorsque le dossier joint à la demande d'autorisation a été reconnu complet ».

    Or, précisément, le dossier de demande de permis de construire présenté par le pétitionnaire ne contenait pas le justificatif prescrit par l’article précité : le permis de construire contesté était donc illégal.

    La question était, toutefois, de savoir si cette illégalité procédant de l’absence d’une pièce exigible uniquement en considération de l’établissement hôtelier projeté devait également emportert l’annulation du permis de construire litigieux en ce qu’il autorisait, par ailleurs, 125 maisons individuelles.

    On sait, en effet, que le principe d’indivisibilité du permis de construire, lequel s’oppose à son annulation partielle (CE. 5 novembre 1975, Sté Pativa, Rec., p.544), connaît une exception notable puisque lorsque les composantes du projet relevant de la demande présentée par le pétitionnaire sont dissociables, le permis de construire est alors divisible à leur égard. Il s’ensuit que celui-ci peut légalement faire l’objet d’un refus (CE. 4 janvier 1985, SCI Résidence du Port, req. n°47.248), d’un retrait ou d’une annulation partiels (CE. 18 février 2004, Csrts Constant, req. n°261.171) ainsi que, par ailleurs, d’un transfert partiel (en ce sens : CAA. Marseille, 18 mars 2004, Cne de Beausoleil, req. n°01MA00551) vers un ou plusieurs tiers (sous réserve de la problématique liée, en pareil cas, à l’exigibilité éventuelle d’une autorisation de lotir puisqu’un tel transfert est susceptible d’emporter l’intervention de plusieurs maître d’ouvrage sur un même terrain et, par voie de conséquence, une division foncière de ce dernier avant l’achèvement des travaux).

    En l’espèce, le juge de première instance n’avait toutefois pas eu se pencher sur cette problématique puisqu’il avait estimé que le terrain à construire était sis dans une zone protégée au titre de l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme issu de la loi « Littoral ». Or, quelles que soient ses caractéristiques intrinsèques et sa divisibilité matérielle, un projet de construction est toujours indivisible pour application des dispositions du Code de l’urbanisme issues de la loi « Littoral » (CE. 10 mai 1996, Sté du Port de Toga SA, req. n°140.799).

    Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Nantes devait, toutefois, estimé que l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme n’étaient pas applicables au terrain à construire et, par voie de conséquence, annuler le jugement de première instance qui avait censuré l’ensemble du permis de construire au motif tiré de la méconnaissance des prescriptions de cet article.

    Dès lors, il s’agissait pour la Cour de juger si la méconnaissance de l’article R.421-4.al.-2 du Code de l’urbanisme pouvait emporter l’annulation de l’ensemble du permis de construire contestée, y compris donc pour ce qu’il autorisait 125 maisons individuelles alors que ces dernières n’exigeaient pas la production au dossier du document prescrit par l’article précité. En l’espèce, la Cour a ainsi jugé que :

    « considérant qu'aux termes de l'article R. 421-4 alinéa 2 du code de l'urbanisme : Lorsqu'il s'agit de constructions à usage commercial assujetties à l'autorisation de la commission départementale d'urbanisme commercial en vertu de l'article 29 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 d'orientation du commerce et de l'artisanat, la demande de permis de construire est complétée par la copie de la lettre adressée par le préfet au demandeur de l'autorisation précitée lorsque le dossier joint à la demande d'autorisation a été reconnu complet ;
    considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet de la société Investimmo Régions portait également sur la construction d'un hôtel de 71 chambres qui est assimilable à une construction à usage commercial ; qu'il était, dès lors, soumis, en vertu de l'article 29 de la loi du 27 décembre 1973, désormais codifié à l'article L. 720-5 du code de commerce, à l'autorisation préalable de la commission départementale d'équipement commercial ; qu'il est constant que le dossier de la demande de permis de construire déposée par la société Investimmo Régions n'était pas complété par l'attestation préfectorale exigée par les dispositions précitées de l'article R. 421-4 du code de l'urbanisme ; que, dès lors, l'arrêté litigieux, qui présente un caractère divisible en ce qu'il autorise, à la fois, la construction d'un ensemble de 125 maisons d'habitation et l'édification d'un établissement hôtelier de 71 chambres, lesquels constituent deux projets distincts en raison de leur objet propre et totalement dépourvus de lien de complémentarité entre eux, dont les emprises au sol sont nettement séparées, est illégal en ce que l'autorisation qu'il délivre porte sur cet équipement hôtelier
    » ;

    pour ainsi, après avoir rejeté les autres moyens présentés par les requérants, n’annuler le permis de construire litigieux qu’en tant qu’il avait autorisé l’édification de l’hôtel dès lors que celui-ci était dissociable des 125 maisons individuelles par ailleurs projetées. A cet égard, on peut relever que pour ce faire, la Cour administrative d’appel de Nantes a souligné que :

    - d’une part, les emprises au sol des deux ensembles étaient nettement séparées, ce dont il résulte que la circonstance qu’un projet de constructions ait vocation à être implanté sur une même unité foncière n’en constitue pas nécessairement un ensemble indissociable mais, a contrario, qu’un ensemble projeté sur deux unités foncières distinctes n’en est pas ipso facto divisible (CE. 26 mars 1997, ADLA, req. n°172.183) ;
    - d’autre part, ces deux ensembles était dépourvus de lien de complémentarité entre eux, ce qui doit être compris comme signifiant qu’il n’existait entre les maisons et l’hôtel aucun lien d’interdépendance fonctionnelle et/ou juridique.

    Mais quoi qu’il en soit, cet arrêt illustre donc parfaitement le fait qu’avant même l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme issu de la loi « ENL », une autorisation d’urbanisme pouvait n’être que partiellement annulée, pour autant, donc, qu’elle soit divisible.

    Précisément, la question posée par l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme est de savoir si la faculté ainsi offerte au juge administratif l’est quand bien même l’autorisation et le projet contestés seraient-ils indivisibles. A notre sens, cette question appelle une réponse négative.

    En effet, sans qu’il soit ici possible d’approfondir plus cette notion, on précisera qu’à la lumière de la jurisprudence rendue en la matière, un permis de construire et l’ouvrage ou l’ensemble immobilier qu’il autorise ne sont divisibles que pour autant que chacune des composantes considérée comme dissociable ne soit pas indispensable à la viabilité juridique et fonctionnelle des autres et ce faisant, à la légalité du permis de construire pris dans son ensemble.

    C’est ainsi qu’un ensemble de plusieurs bâtiments distincts mais reliés entre eux par un accès et un parc de stationnement communs formeront un ensemble indivisible (CE. 1er décembre 1995, M. Ménager & Autres, req. n° 137.832 ; CAA. Nancy, 4 mars 1997, Epx Ravachol c/ Ville de Reims, req. n° 94NC01290) puisque cet accès et ce parc de stationnement sont indispensables à la conformité du projet aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme et, le cas échéant, des articles 3 et 12 du règlement d’urbanisme local.

    De même, lorsque les composantes du projet sont techniquement ou fonctionnement indissociables leur ensemble formera un tout indivisible devant faire l’objet d’une seule et même demande de permis de construire (CE. 26 mars 1997, ADLA, req. n°172.183) de sorte à ce que l’administration compétente puisse, comme le lui impose l’article L.421-3 du Code de l’urbanisme, prendre parti sur l’ensemble des aspects du projet tel qu’il est conçu par le pétitionnaire (CE. 7 novembre 1973, Giudicelli, req. n° 85.237).

    Il s’ensuit qu’une annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme indivisible aboutirait à autoriser un projet illégal et/ou un projet ne correspondant pas à celui sur lequel l’administration a pris parti au titre de l’article L.421-3 du Code de l’urbanisme et ce, alors que l’alinéa 2 de l’article L.600-5 n’impose nullement au bénéficiaire de solliciter de l’administration qu’elle lui délivre « un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive ». En d’autres termes, une telle interprétation de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme aboutirait à permettre au juge administratif ce a quoi l’administration ne peut procéder sans entacher sa décision d’illégalité…

    Dans ce contexte, il nous semble donc que l’article précité se borne à consacrer l’ancienne pratique jurisprudentielle admettant l’annulation partielle des autorisations d’urbanisme divisibles et, par voie de conséquence, n’autorise pas le juge administratif à aller au delà que ce qui lui était déjà permis.

    En réalité, la seule véritable innovation de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme tient à son alinéa 2 en ce que, tout d’abord, il officialise la notion de « modificatif » qui jusqu’à présent était strictement jurisprudentielle, ensuite, il permet d’obtenir un « modificatif » sur la base d’un permis de construire annulé ce que la jurisprudence prohibait (voir, toutefois, sur la possibilité d'obtenir un "modificatif" de régularisation sur la base d'un permis de construire suspendu en application de l'article L.521-1 du Code de justice administrative : CE. 24 février 2003, M. Jean-Michel X., req. n°251.928) et, enfin, prévoit le recours à la technique du « modificatif » indépendamment de toute considération liée à l’importance des modifications requises et à leur impact sur l’économie générale du projet initial.

    Mais sur ces deux derniers points, il n’est pas à exclure qu’il s’agisse là de deux des multiples imprécisions dont est entachée la loi « ENL » dont on peut regretter, malgré l’importance des enjeux poursuivis, qu’elle ait été adoptée avec autant de précipitation et si peu de rigueur juridique…


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat à la Cour
    Cabinet Frêche & Associés

  • La méconnaissance des prescriptions de l’article 662 du Code civil justifie l’annulation d’un permis de construire sur le terrain de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme

    Le bénéficiaire d’un permis de construire portant notamment sur un mur mitoyen doit justifier du respect des prescriptions de l’article 662 du Code civil. A défaut, le permis de construire encourt la censure au titre de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme.

    CAA. Versailles, 19 octobre 2006, Cne de Juvisy-sur-Orge, req. n°04VE00238


    Aux termes de l’article L.421-3 du Code de l’urbanisme « le permis de construire ne peut être accordé que si les constructions projetées sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires concernant l’implantation des constructions, leur destination, leur nature, leur architecture, leurs dimensions, leur assainissement et l’aménagement de leurs abords ».

    A ce titre, il est de jurisprudence bien établie que, par principe, le permis de construire ne sanctionne que les prescriptions d’urbanisme relatives aux aspects visés par l’article précité. Il en résulte, notamment, que la méconnaissance de normes de droit privé qu’elles soient d’origine légale ou conventionnelle n’a aucune incidence sur la légalité du permis de construire, lequel est ainsi réputé délivré sous réserve du droit des tiers.

    Ce principe connaît, cependant, un certain nombre ne nuances parmi lesquelles comptent les prescriptions de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme au titre duquel le pétitionnaire, lorsqu’il n’est pas propriétaire du terrain ou de l’immeuble sur lequel les travaux sont projetés, doit justifier d’un titre habilitant à construire ; ce qui permet notamment de garantir le respect du droit de propriété tel qu’il est organisé par les articles 544 et suivants du Code civil.

    Précisément, dans l’affaire objet de l’arrêt commenté (lequel sera mentionné aux Tables du Recueil Lebon), Mme Y. avait été obtenu, le 14 mars 2002, un permis de construire portant, notamment, sur un mur mitoyen, lequel avait vocation a être démoli puis reconstruit avec une épaisseur réduite de quinze centimètres sur les trente-huit initiaux.

    Le 29 avril 2002, le propriétaire du fond voisin, M.X., devait toutefois solliciter du maire le retrait de ce permis de construire en faisant valoir, notamment, l’impact de ce dernier sur le mur mitoyen séparant les deux propriétés puis sollicité du Tribunal administratif de Versailles l’annulation du rejet de cette demande de retrait, ensemble le permis de construire initial ainsi que le permis de construire modificatif ultérieurement obtenu, en l’occurrence le 14 juin 2002 ; demande à laquelle accéda le Tribunal en prononçant l’annulation des permis de construire contestés sur le terrain de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme et ce, en considération de l’article 662 du Code de l’urbanisme en ce qu’il dispose que « l’un des voisins ne peut pratiquer dans le corps d’un mur mitoyen aucun enfoncement, ni y appliquer ou appuyer aucun ouvrage sans le consentement de l’autre, ou sans avoir, à son refus, fait régler par experts les moyens nécessaires pour que le nouvel ouvrage ne soit pas nuisible aux droits de l’autre ».

    Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Versailles devait confirmer l’analyse et le jugement subséquent de première instance. C’est ainsi qu’après le considérant de principe suivant :

    « Considérant qu’il appartient à l’autorité compétente pour délivrer un permis de construire, dès lors qu’elle est informée que le projet faisant l’objet de la demande porte notamment sur un mur mitoyen, de vérifier que le pétitionnaire détient la qualité de propriétaire apparent de ce mur ; que les dispositions de l’article 662 du code civil lui font alors obligation, si les travaux à autoriser sont de la nature de ceux entrant dans le champ d’application de cet article, d’exiger du pétitionnaire la production soit du consentement du voisin copropriétaire du mur mitoyen, soit, en cas de refus de celui-ci, du règlement d’expert mentionné par les dispositions de cet article, et ce sans que cette obligation ne méconnaisse le principe selon lequel le permis de construire est accordé sous réserve des droits des tiers ».

    la Cour jugea que :

    « Considérant toutefois qu’il ressort des pièces du dossier que le dossier de permis de construire présenté par Mme Y indiquait le caractère mitoyen du mur séparant la propriété de M. X de la propriété pour laquelle elle était elle-même titulaire d’une promesse de vente ; que le projet pour lequel le permis de construire était sollicité prévoyait notamment la démolition de ce mur mitoyen, sa reconstruction avec une épaisseur réduite de quinze centimètres sur les trente-huit initiaux, ainsi que l’appui d’un remblai de terre au droit de l’immeuble prévu ; que ces travaux entraient ainsi dans le champ des prévisions de l’article 662 du code civil précité ; qu’il est constant que Mme Y n’avait produit à l’appui de sa demande ni l’accord de M. X ni le règlement d’expert prévu par les dispositions de cet article ; que dès lors la pétitionnaire ne pouvant, compte tenu de la nature des travaux prévus, être regardée comme habilitée au sens des dispositions de l’article R. 421-1-1 du code de l’urbanisme à présenter la demande de permis de construire litigieuse, c’est à bon droit que les premiers juges ont estimé que lesdites dispositions faisaient obstacle à la délivrance du permis et du permis modificatif sollicités, sans que puissent utilement être invoquées ni la circonstance que la contestation de M. X serait tardive au regard de la date d’octroi du permis initial, ni celle que cette contestation ne serait pas sérieuse, ni enfin, eu égard aux termes mêmes de l’article 662 du code civil, celle que les travaux ne porteraient que sur la moitié du mur située du côté du terrain n’appartenant pas à M. X ».

    Tout d’abord, la Cour a donc considéré que la prise en compte des prescriptions de l’article 662 du Code civil ne méconnaissait par le « principe selon lequel le permis de construire est accordé sous réserve des droits des tiers ».

    A notre sens, cette conclusion est, toutefois, inadéquate dans la mesure où, précisément, l’article 662 du Code civil a trait aux droits des tiers du terrain à construire et, plus précisément, aux droits du propriétaire du fond voisin séparé de ce terrain par un mur mitoyen. Force est, en effet, d’admettre qu’en lui-même, l’article précité ne constitue nullement une prescription d’urbanisme.

    Il reste qu’en ce qu’il tend à garantir le respect du droit de propriété, l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme constitue une forme d’exception au principe selon lequel le permis de construire est délivré sous réserve du droit des tiers. En cela, la prise en compte des prescriptions de l’article 662 du Code civil n’est donc pas critiquable.

    Ensuite, la Cour a donc fait application des règles posées dans le considérant de principe précité. A ce titre, elle a donc recherché si le pétitionnaire pouvait être considéré comme le propriétaire apparent du mur mitoyen. On sait en effet que, par principe et sauf fraude, l’administration ne peut exiger du pétitionnaire la production d’un titre habilitant à construire adéquate que pour autant que son dossier de demande révèle qu’il n’est pas propriétaire de l’ensemble du terrain et/ou des ouvrages sur lesquels les travaux sont projetés.

    A défaut, le pétitionnaire doit être considéré comme propriétaire apparent du terrain et/ou des ouvrages, sauf à ce que l’administration ait connaissance en cours d’instruction d’une contestation sérieuse élevée par un tiers revendiquant leur propriété.

    Or, en l’espèce, le dossier de demande précisait expressément que le mur sur lequel devaient être réalisés des travaux relevant de part leur nature de l’article 662 du Code civil, présentait un caractère mitoyen. La Cour a donc considéré que forte de cette information, la commune aurait du vérifier que le pétitionnaire avait obtenu et produit à son dossier de demande, au titre de l’article précité, l’accord du propriétaire du fond voisin ou le règlement d’expert relatif au moyen nécessaires pour que les travaux projetés ne portent pas atteinte aux droits dudit propriétaire sur le mur pour, à défaut, rejeter la demande de permis de construire.

    Constatant que le dossier de demande présenté par Mme Y. ne contenait ni l’accord de M.X., ni le règlement d’expert susvisé, la Cour a donc jugé que les travaux projetés méconnaissaient les prescriptions de l’article 662 du Code civil et, par voie de conséquence, que les permis de construire obtenus dans ces conditions avaient été délivrés en méconnaissance de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme ainsi que dans une affaire quasi-identique l'avait précédemment jugé la Cour administrative d'appel de Bordeaux (CAA. Bordeaux, 23 mai 2002, Féron, juris-data n°2002-194766. Voir également pour une déclaration de travaux portant sur une cloture mitoyenne: CAA. Marseille, 1er avril 1999, M. Hérard, req. n°97MA10082).

    Enfin, on peut relever que le Tribunal administratif de Versailles avait pour sa part considéré que les faits invoqués dans la demande de retrait présentée par M.X, le 29 avril 2002, constituait une contestation sérieuse emportant l’obligation pour l’administration de retirer le permis de construire primitif et d’opposer un refus à la demande de permis de construire modificatif. Et précisément, la commune appelante soutenait que cette contestation ne pouvait être prise en compte s’agissant du permis de construire primitif puisqu’elle était postérieure à la délivrance de ce dernier dont la légalité devait s’apprécier à sa date d’obtention et n’était pas non plus opérante s’agissant du permis de construire modificatif puisque pour avoir été évoquée antérieurement à la date de délivrance de ce dernier celle-ci ne pouvait être considérée comme sérieuse.

    Mais la Cour a donc estimé que ces considérations étaient inopérantes en l’espèce dès lors qu’informée du caractère mitoyen du mur par les indications fournies par le pétitionnaire dans sa demande de permis de construire, l’administration était tenue de vérifier si ce dernier justifier du respect des prescriptions de l’article 662 du Code civil sans, pour ce faire, qu’il soit nécessaire elle ait été préalablement saisie ou informée d’une contestation sérieuse se rapportant au mur mitoyen.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat à la Cour
    Cabinet Frêche & Associés