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Permis de construire - Page 20

  • Retour sur le champ d’application du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme

    L’absence de « volet paysager » au dossier au vu duquel a été délivré le permis de construire en litige entache l’ensemble d’illégalité de ce dernier. Par voie de conséquence, celui-ci ne peut faire l’objet d’une mesure d’annulation partielle au titre du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme, lequel est toutefois applicable en appel, y compris lorsque le jugement attaqué a été rendu avant l’entrée en vigueur de cet article (implicite).

    CAA. Bordeaux, 30 octobre 2007, SCI Les Terrasses de Marie, req.n° 05BX01764

    En revanche, ce nouveau dispositif ne paraît pas applicable en cas de recours à l’encontre d’un refus de permis de construire.

    CAA. Nancy, 11 octobre 2007, Cne de Wolfisheim, req. n°06NC00685


    L’arrêt de la Cour bordelaise est doublement intéressant en ce qu’il contribue, combiné à la décision de la Cour nancéenne, à préciser le champ d’application temporel et matériel du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 16 juillet 2006 dite « ENL ».

    Dans cette affaire, la SCI appelante avait obtenu, le 13 octobre 2004 un permis de construire, délivré en tant que « modificatif », lequel devait cependant être annulé, le 22 juin 2005, par le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion au motif tiré, pour ce qui concerne sa légalité externe, d’une part, de la méconnaissance de l’(ancien) article R.421-2 du Code de l’urbanisme et, pour ce qui concerne sa légalité interne, d’autre part, de la violation des prescriptions du l’article 10 du règlement de POS communal.

    Pour sa part, la Cour administrative d’appel de Bordeaux devait annuler le jugement attaqué, dès lors qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier que la hauteur de la construction projetée méconnaissait l’article10 susvisé, mais néanmoins prononcer l’annulation d’ensemble du permis de construire contesté et ce au motif suivant :

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire délivré le 13 octobre 2004 à la SCI LES TERRASSES DE MARIE a eu pour objet de modifier la superficie du terrain d'assiette pour la porter de 422 à 451 m2, de modifier l'implantation de l'immeuble en le reculant de la limite de propriété pour le mettre en conformité avec les prescriptions du règlement du plan d'occupation des sols, de diminuer l'emprise au sol de la construction, d'augmenter le nombre de logements de 11 à 15 en permettant notamment la création de logements dans les combles, de diminuer les surfaces autorisées en supprimant un niveau de parking souterrain et, enfin, de modifier l'aspect extérieur et l'aménagement des abords ; que le nombre, l'importance et la nature des modifications envisagées par le pétitionnaire, qui entraînent notamment le changement du volume des toitures et la création de nouvelles ouvertures en façade du projet, la transformation des loggias en balcons et la suppression d'emplacements de stationnement alors que le nombre de logements augmente de manière significative, sont de nature à faire regarder le permis de construire litigieux non comme un permis modificatif mais comme un nouveau permis de construire qui se substitue au permis initial qu'il retire ;
    Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme : Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d'arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l'achèvement des travaux et la situation à long terme ; 7° Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l'environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire n'était accompagnée ni des documents photographiques ni de documents graphiques ni de la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet ; qu'aucune des autres pièces jointes ne permettait d'apprécier l'insertion du projet dans l'environnement ni son impact visuel ; qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, l'absence de ces documents au dossier de demande de permis de construire est de nature à entacher d'illégalité le permis de construire délivré le 13 octobre 2004
    ».


    En résumé, après avoir logiquement – au regard de l’importance des modifications autorisées – requalifier le « modificatif » en cause en nouveau permis de construire, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a donc constaté que ce dernier avait été délivré au vu d’un dossier ne comportant pas les documents photographiques, les documents graphiques et la notice paysagère prescrites par les points 5°, 6° et 7° du Code de l’urbanisme et, en d’autre termes, ne comportant pas ce qu’il était convenu d’appeler le « volet paysager ».

    On précisera, en effet, que, contrairement à une idée répandue, le seul fait qu’un permis de construire délivré en tant que « modificatif » apporte des modifications substantielles au projet initial n’emporte pas ipso facto son annulation mais seulement sa requalification en nouveau permis de construire ; requalification dont il résulte que la légalité du permis de construire contesté doit être appréciée en tant que nouveau permis tant pour ce qui concerne la régularité du dossier produit par le pétitionnaire et la procédure préalable que le respect au fond des prescriptions opposables au projet.

    Il reste que, le plus souvent, les demandes de « modificatif » sont présentées sous la forme d’un dossier et font l’objet d’une instruction allégés, si bien que lorsqu’ils sont requalifiés en nouveau permis de construire ils sont annulés pour vice de forme et de procédure.

    Tel fut le cas donc le cas en l’espèce puisque le « modificatif » contesté avait été délivré au vu d’un dossier ne comportant pas de « volet paysager » ; étant, d’ailleurs, relevé que même s’il n’avait pas été requalifié en nouveau permis de construire, il aurait manifestement eu vocation à être annulé puisqu’il autorisait de nombreuses modifications intéressant l’aspect extérieur du projet initialement autorisé, lesquelles rendaient ainsi exigible ce document.

    Mais ce qui est le plus intéressant est que la Cour administrative d’appel de Bordeaux se soit prononcée au titre de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme en jugeant que : « l'insuffisance des documents joints au dossier de demande entache l'ensemble du permis de construire litigieux d'illégalité ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, de prononcer une annulation partielle de cette autorisation ».

    Rappelons, en effet, que l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme dispose que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive ».

    Force est ainsi d’admettre qu’en visant le cas « une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale », l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme n’a donc vocation à s’appliquer que dans la mesure où le permis est entaché d’illégalité interne, c’est-à-dire méconnait les prescriptions d’urbanisme applicable au projet et non pas les règles de forme et de procédure relatives à sa délivrance.

    C’est donc à juste titre que la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé qu’au regard de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme « l'insuffisance des documents joints au dossier de demande entache l'ensemble du permis de construire litigieux d'illégalité » ; bien qu’il soit permis de s’interroger sur la portée exacte de ce « considérant » qui ne permet pas d’apprécier clairement si la Cour a visé une règle de principe ou s’il s’agit d’une solution propre au cas d’espèce.

    Par ailleurs, il faut rappeler qu’en l’espèce, le permis de construire attaqué datait du 13 octobre 2004 et le jugement contesté avait été rendu le 22 juin 2005, soit à des dates antérieures à l’entrée en vigueur de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme issu, rappelons-le, de la loi dite « ENL » du 16 juillet 2006.

    Dans le prolongement du jugement par lequel le Tribunal administratif d’Amiens a jugé que ce dispositif était d’application immédiate (TA. Amiens, 29 décembre 2006, req. n° 04-01732.pdfy compris dans le cas d’un permis de construire frappé d’un recours introduit avant son entrée en vigueur, l’arrêt commenté induit donc que l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme est applicable en appel, y compris lorsque le jugement attaqué a été rendu avant l’entrée en vigueur de cet article. Il reste qu’il va sans dire qu’en pareil cas, l’annulation globale du permis de construire contesté là où l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme en aurait permis l’annulation partielle ne saurait justifier l’annulation de ce jugement puisqu’il ne saurait être fait grief au juge de première instance de n’avoir pas utiliser un pouvoir dont il ne disposait pas à la date à laquelle il a statué.

    Relevons ainsi que la Cour administrative d’appel de Nancy a récemment jugé, le 11 octobre 2007, que :

    « Considérant que le projet de construction présenté par la société Ab Capim, aux droits de laquelle vient désormais la société Brun Habitat, porte sur l'édification au-delà d'une profondeur de 60 mètres comptés à partir de l'alignement, d'un immeuble collectif de neuf logements ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des plans de coupe joints au dossier de la demande de permis de construire qu'une rampe, recouverte d'une dalle accolée à la construction et terminée par un muret en limite de propriété, permet l'accès au parking situé en sous-sol de l'immeuble ; qu'elle doit ainsi être regardée comme faisant partie intégrante de la construction, laquelle, d'une hauteur de 13 mètres, excède la limite fixée par l'article 7 UA du plan d'occupation des sols de la commune ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en date du 26 août 2004 du maire de la COMMUNE DE WOLFISHEIM refusant à la société Brun Habitat la délivrance du permis de construire, le Tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le maire avait fait une inexacte application desdites dispositions ».

    Au premier chef, force est ainsi de relever qu’il n’a pas ici été fait application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme. Et pour cause puisque dans la mesure où ce dernier se borne à préciser que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive », force est d’admettre qu’il ne vise pas les décisions portant refus d’autorisation.

    Pour les décisions de refus, le principe reste donc qu’une telle décision ne peut faire l’objet d’une annulation partielle qu’à la condition qu’elle soit divisible, c’est-à-dire porte sur deux projets en tous points distincts.

    Néanmoins, l’arrêt précité s’avère également intéressant sur ce point puisqu’il offre une parfaite illustration de ce pour quoi l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme a été voulu.

    On sait, en effet, que les auteurs de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme ont expliqué que celui-ci avait vocation à « contourner » la jurisprudence du Conseil d’Etat, selon laquelle un permis de construire ne peut faire l’objet d’une annulation partielle que pour autant qu’il soit divisible, dans le cas où le permis de construire serait affecté d’illégalité en raison d’une des composantes accessoires (balcon, escalier extérieur, rampe d’accès, etc.) ; telle étant la raison pour laquelle l’alinéa 2 de cet article précise que « l'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive », ce qui, en toute hypothèse, semble exclure le cas où la partie du projet représente une composante substantielle du projet.

    Dans cette affaire, en effet, le refus de permis de construire a été validé dans la mesure où la rampe d’accès au parc de stationnement souterrain de l’immeuble projeté – laquelle faisait « partie intégrante » de la construction en cause – méconnaissait les règles d’implantation des constructions prescrites par l’article 7 du règlement local d’urbanisme ; étant rappelé que, sauf disposition contraire, l’ensemble des composantes indivisibles d’une construction doivent être prises en compte pour apprécier la conformité de cette dernière, notamment, par rapport aux prescriptions d’urbanisme relatives à l’implantation des constructions (CE. 23 août 2006, Assoc. Le FOnvairous, req. n°267.578).

    A suivre les auteurs de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, si la décision en cause avait constitué un permis de construire autorisant ce projet, le juge aurait donc pu (puisqu’en toute hypothèse, la rédaction de cette article induit qu’il ne s’agit que d’une faculté) n’en prononcer que l’annulation partielle et, plus concrètement, n’en prononcer l’annulation qu’en tant qu’il avait autorisé cette rampe d’accès.

    Il reste que ce faisant, cette annulation partielle aurait abouti à la formation d’un permis de construire autorisant un immeuble doté d’un parc de stationnement inaccessible et donc méconnaissant les prescriptions de l’article 12 du règlement local d’urbanisme (pour exemple : CAA. Marseille, 8 février 2007, M. Joseph X., req. n°04MA02390 ; voir ici également), puisque les aires de stationnement inutilisables ne peuvent être prise en compte au titre de ce dernier, et ce, sans qu’il n’y ait aucunement garantie sur la régularisation du projet puisque la mise en œuvre de l’alinéa 2 de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme implique non seulement que la partie du projet soit régularisable mais en outre « une demande du bénéficiaire de l’autorisation » que rien ne l’oblige à formuler ; étant rappelé que le dispositif mis en place par cet article n’a en effet aucun rapport avec l’annulation conditionnelle préconisée par la commission « Pelletier »…

    Telle étant la raison pour laquelle, à notre sens et sauf à ce qu’il amène le juge administratif à assouplir la notion d’ensemble indivisible, l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme n’aura vraisemblablement qu’un impact limité sur le principe selon lequel une autorisation d’urbanisme ne peut être annulée partiellement qu’à la condition qu’elle soit divisible.

    Mais à ce sujet, force est de relever, bien que la généralité de la rédaction du second considérant cité ne permette pas d'en apprécier clairement la portée que, dans un arrêt du 21 juin 2007 (date à laquelle l'article L.600-5 était donc applicable), la Cour administrative de Lyon a, pour annuler sur le fond le permis de construire en litige, précisé que :

    "Considérant que les prescriptions archéologiques concernent ensuite les parcelles correspondant à la nécropole mérovingienne en prévoyant de manière générale sans référence à un plan de délimitation et sans opérer de distinction suivant la valeur des vestiges, que l'ensemble des vestiges repérés devront être préservés d'une part en implantant les pavillons et les voiries en dehors de leur emprise, et d'autre part en les recouvrant d'un remblaiement suffisant ; qu'elles renvoient en outre pour leur mise en oeuvre à une concertation ultérieure en cours de chantier entre le pétitionnaire et la direction régionale des affaires culturelles ; qu'alors qu'un permis de construire ne peut contenir que des dispositions précises et directement applicables, ces prescriptions, générales, imprécises et conditionnelles, qui faisaient en réalité obstacle à la réalisation du projet, rendaient le permis de construire en cause inapplicable ; qu'en outre, dans l'état de leur rédaction, les prescriptions du préfet de région, qui s'imposent à l'autorité d'urbanisme, qui ne peut pas substituer sa propre appréciation sur l'intérêt de tel ou tel vestige, ne pouvaient qu'entraîner un rejet de la demande ; que par suite, en autorisant un projet qui se borne à la suppression de quatre chalets et maintient l'implantation de pavillons sur des parcelles mentionnées comme renfermant des vestiges repérés, le préfet de la Nièvre a entaché, sur ce point, sa décision d'illégalité ; Considérant que les dispositions du permis délivré le 24 mars 2003 par le préfet de la Nièvre à la SCI Domaine du canal pour l'ensemble de la réalisation d'un village de vacances ne sont pas divisibles ; que l'association requérante est fondée à en demander l'annulation" (CAA. Lyon, 21 juin 2007, Ministre de l'équipement, req. n°04LY01501)

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur les limites du permis de construire modificatif de régularisation (suite)

    Un "modificatif" peut régulariser le vice de forme affectant un permis de construire au regard des dispositions de l'article 4 de la loi n°2000-321 de la loi du 12 avril 2000.

    CAA. Nantes, 27 mars 2007, Cne de la Faute-sur-Mer, req. n°06NT01269



    Dans une note du 16 août 2007, nous avions commenté l'arrêt par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille (CAA. Marseille, 16 mai 2007, M.Y., req. n°04MA01336) avait jugé que :

    "Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 4, alinéa 2, de la loi du 12 avril 2000 : «Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.» ; qu'en application de ces dispositions, l'omission de la mention des nom et prénom du signataire des permis de construire en cause est une irrégularité formelle entachant l'édiction même desdits actes, qui ne peut être régularisée, postérieurement à ladite édiction, par la circonstance que des permis de construire modificatifs, intervenus le 11 juillet 2002 et le 30 septembre 2002 respectivement pour les permis de construire LC041 délivré à B et LC042 délivré à , comporteraient, eux, les mentions exigées par les dispositions précitées ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que les permis en cause étaient irréguliers au regard des exigences sus-rappelées de la loi du 12 avril 2000"

    et, en d'autres termes, considéré qu'un permis de construire modificatif ne peut régulariser un permis de construire primitif ne précisant ni le nom, ni le prénom de son auteur dès lors que cette méconnaissance de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 constitue une irrégularité entachant l’édiction même du permis primitif.

    Tout en admettant le bien fondé d'une telle décision au regard de l'objectif et de l'utilité contentieuse de l'article 4, nous émétions néanmoins les plus vives réserves sur la régularité d'une telle appréciation au regard de la jurisprudence rendue par le Conseil d'Etat sur les vertues régularisatrices du permis de construire modificatif et, notamment, sa capacité à régulariser les vices de formes affectant un permis de construire primiti(CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315) .

    Précisément, la Cour administrative d'appel Nantes a d'adopté une solution plus orthodoxe en jugeant (dans un arrêt diffusé sur Légifrance le 5 novembre dernier...) que :

    "Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : ( ) Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ; que si le permis de construire contesté du 28 avril 2005, signé pour le maire, l'adjoint délégué, ne comporte pas le nom et le prénom de son signataire, dont les mentions sont exigées par les dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 30 août 2005, le maire de la Faute-sur-Mer a procédé à la régularisation, sur ce point, dudit permis du 28 avril 2005 en délivrant à l'intéressée un permis de construire modificatif comportant, sous la mention pour le maire, l'adjoint délégué assortie du tampon de la mairie, le nom et prénom de son signataire ; que la légalité du permis délivré à Mme X doit être appréciée en tenant compte des modifications apportées à l'arrêté du 28 avril 2005 par l'arrêté du 30 août 2005 ; qu'ainsi, c'est à tort que le Tribunal administratif de Nantes a estimé que la délivrance du permis de construire contesté était intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000";

    et donc qu'un "modificatif" pouvait régulariser le vice de forme affectant un permis de construire initial au regard de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés.

  • Vers un assouplissement des conditions d’application de l’article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 ?

    L’avis rendu par la commission de sécurité dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire n’est pas une décision au sens de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000.

    CAA. Versailles, 10 juillet 2007, Association de Sauvegarde du Parc de Cochet, req. n°07VE00201

    Une décision anonyme de retrait de permis de construire n’est pas illégale au regard de cet article dès lors que le titulaire de ce permis peut en identifier l’auteur par recoupement avec la lettre qui lui a été adressée en application de l’article 24 de la même loi.

    CAA. Lyon, 5 juillet 2007, SCI Lade, req. n°05LY01966.


    Aux fins d’améliorer les relations entre les citoyens et les administrations, la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 a, par l’alinéa 2 de son article 4, posé le principe selon lequel « toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci » ; l’article 1er visant « les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif ».

    Cette obligation ayant eu un certain mal à pénétrer les services administratifs, l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 fut et reste la cause d’annulation de très nombreuses décisions administratives et, notamment, de ce qu’il est convenu d’appeler les permis de construire anonymes.

    Mais si cette disposition n’a jamais été appliquée totalement à la lettre – l’essentiel étant que l’auteur du permis de construire soit facilement identifiable et sans ambiguïté à l’examen de cette décision, sans qu’il soit nécessaire qu’il soit scrupuleusement identifié par celle-ci – il nous semble percevoir dans certaines jurisprudences récentes un réel assouplissement des conditions d’application de l’article 4 précité.

    Deux arrêts de Cours administratives d’appel différentes nous semble l’illustrer ; l’un pour ce qui concerne son champ d’application, l’autre pour ce qui a trait à l’appréciation en fait de l’incidence de la méconnaissance de cette obligation.

    Dans la première affaire, le permis de construire en cause portait sur un collège, c’est-à-dire sur un « ERP », conçu pour accueillir 1500 élèves : à ce titre, sa délivrance avait donc obligatoirement à être précédée de l’avis de la commission de sécurité compétente et, en l’occurrence, de la commission d’arrondissement d’Etampes.

    Précisément, ce permis de construire devait être contesté au motif tiré, notamment, de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 non pas parce que lui-même ne respectait pas les prescriptions de cet article mais parce que l’avis de la commission d’arrondissement au vu duquel il avait été délivré ne comportait ni le nom, ni le prénom de son signataire, en l’occurrence le Président de cette commission ; étant précisé que si les avis émis dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire sont considérés comme des actes préparatoires, insusceptibles de recours donc (CE. 6 mars 1964, Cie l’Union, Rec., p.162), leur irrégularité éventuelle peut être excipée dans le cadre d’un recours à l’encontre de la décision statuant sur cette demande (CE. 26 octobre 2001, Eisenchteter, Rec., p.495).

    Ce moyen devait, toutefois, être rejeté par le Tribunal administratif puis par la Cour administrative d’appel de Versailles et ce, au motif suivant :

    « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 susvisée : « Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. » ; que l'avis émis par la commission d'arrondissement d'Etampes pour la sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public ne constituant pas une décision, le moyen tiré de ce que cet avis méconnaîtrait les dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 est inopérant ; que, dès lors, en se bornant à constater cette inopérance, le Tribunal administratif, qui n'était pas tenu de répondre à ce moyen, n'a pas entaché son jugement d'insuffisance de motivation ».

    En substance, la Cour a donc jugé que le moyen était inopérant – et non pas qu’il manquait en fait dès lors que l’avis mentionné la qualité de son signataire et, partant, permettait d’identifier ce dernier – dès lors que l’avis en cause ne constituait pas une décision et, par voie de conséquence, que l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 n’était pas applicable à un tel avis puisque cet article vise les seules « décisions ».

    Une telle analyse nous paraît quelque peu critiquable.

    Il convient, en effet, de rappeler que l’avis de la commission de sécurité et d’accessibilité compétente à l’égard des « ERP » est ce qu’il est convenu d’appeler un « avis conforme » dont le sens s’impose, d’ailleurs, à l’autorité administrative compétente pour délivrer le permis. Mais s’il constitue un « avis conforme », c’est parce qu’il vaut autorisation au titre de la réglementation sur la sécurité et l’accessibilité dans les « ERP » et ce, en application de l’article L.111-8 du Code de la construction et de l’urbanisme, lequel dispose :

    « Les travaux qui conduisent à la création, l'aménagement ou la modification d'un établissement recevant du public ne peuvent être exécutés qu'après autorisation délivrée par l'autorité administrative qui vérifie leur conformité aux règles prévues aux articles L. 111-7, L. 123-1 et L. 123-2.
    Lorsque ces travaux sont soumis à permis de construire, celui-ci tient lieu de cette autorisation dès lors que sa délivrance a fait l'objet d'un accord de l'autorité administrative compétente mentionnée à l'alinéa précédent
    »

    ce qui ressort également des anciens articles L.421-1 et L.421-3 du Code de l’urbanisme et ressort encore clairement du nouvel article L.425-15 en ce qu’il dispose que :

    « Lorsque le projet porte sur un établissement recevant du public, le permis de construire tient lieu de l'autorisation prévue par l'article L. 111-8 du code de la construction et de l'habitation dès lors que la décision a fait l'objet d'un accord de l'autorité administrative compétente qui peut imposer des prescriptions relatives à l'exploitation des bâtiments en application de l'article L. 123-2 du code de la construction et de l'habitation. Le permis de construire mentionne ces prescriptions ».

    De ce fait, la solution retenue par la Cour administrative d’appel de Versailles nous semble poser un double problème.

    D’une part, elle est de nature à introduire une distinction, qui ne nous semble pas avoir lieu d’être, selon que les travaux soient ou non soumis à permis de construire puisque lorsque tel n’est pas le cas, il nous semble qu’il serait difficile de considérer que l’autorisation prévue par l’article L.111-8 du Code de la construction et de l’habitation ne constitue pas une décision, alors que, selon la Cour, lorsque les travaux sont assujettis à permis de construire, il ne s’agirait que d’un avis qui, en tant que tel, n’est donc pas susceptible d’être assujetti à l’obligation posée par l’article 4 de la loi du 12 avril 2000.

    D’ailleurs, on relèvera qu’à proprement parler, il résulte, notamment, de l’article L.111-8 du Code de l’urbanisme que lorsque les travaux projetés relèvent de la procédure de permis de construire, ce qu’il est convenu d’appeler « avis » est en fait prévu comme un accord ou, le cas échéant, comme un refus d’accord : difficile donc de ne pas y voir une décision.

    D’autre part, il convient de préciser que la régularité d’un avis rendu dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire peut être contestée, notamment, en raison de l’incompétence de la personne qu’il l’a rendu (CE. 18 mai 1979, Kees, req. n°01680).

    Or, si ces avis n’ont pas à comporter le nom, le prénom et la qualité de son signataire, force est d’admettre qu’il sera, pour le moins, difficile de contrôler et de contester la compétence de ce dernier.

    Mais pour conclure sur ce point, on précisera que, selon nous, la véritable question posée en l’espèce avait trait à la nature de la commission d’arrondissement de sécurité et, plus précisément, au fait de savoir si elle constitue une autorité administrative au sens de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 et donc compte, aux termes de son article 1er, parmi « les administrations de l'Etat, les collectivités territoriales, les établissements publics à caractère administratif, les organismes de sécurité sociale et les autres organismes chargés de la gestion d'un service public administratif » ; ce qui nous semble, toutefois, être le cas dès lors que :

    - d’une part, les commissions d’arrondissement sont des démembrements des commissions départementales de sécurité, qui elle-même sont des émanations de la commission centrale instituée auprès du Ministère de l’intérieur (art.. R.123-29 ; CCH), et qui sont créées par le Préfet (art. R.123-38 ; CCH), lequel en fixe les attributions (art. R.123-29 ; CCH) et en fait assurer la présidence par le sous-préfet de l’arrondissement en cause (art. R.123-40 ; CCH) ;
    - d’autre part, elle nous semble pourvoir s’analyser, à l’échelon de l’arrondissement, comme un organisme en charge de la gestion sur service public administratif, en l’occurrence du service public de la protection civile.

    Dans la seconde affaire, c’est une décision de retrait d’un permis de construire qui était contestée pour ne pas indiquer le nom et le prénom du maire l’ayant signé (sur ce vice de forme et sa régularisation, voir ici et là). Mais ce moyen devait être rejeté par la Cour administrative d’appel de Lyon au motif suivant :

    « Considérant que si la décision susmentionnée du maire de Lugrin comporte une signature accompagnée seulement de la mention « le maire » sans indication de son prénom et de son nom, il ressort toutefois des pièces du dossier que le maire avait seulement 12 jours auparavant, au titre de la procédure contradictoire préalable à l'intervention du retrait, signé une lettre adressée à la société comportant l'initiale de son prénom suivie de son nom ; que les signatures apposées sur ladite lettre et la décision litigieuse sont identiques ; que la société était ainsi à même dans les circonstances de l'espèce, d'identifier sans ambiguïté, l'auteur de la décision ; que le moyen doit être écarté »

    La Cour a donc considéré que la circonstance que la décision de retrait contestée ne mentionnait pas le nom et le prénom de son signataire était sans incidence dès lors que le requérant, le titulaire du permis de construire ainsi retiré, était en mesure, par recoupement avec la lettre par laquelle le maire l’avait préalablement informé de son intention de procéder à ce retrait, d’identifier l’auteur de cette décision.

    Il reste que l’obligation prescrite par l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 vaut non seulement à l’égard du destinataire de la décision mais également à l’égard des tiers, lesquels peuvent, parfois, avoir intérêt à agir à l’encontre d’une décision de retrait.

    Mais en toute hypothèse, quelle que soit la nature de la décision en cause, la solution retenue par la Cour administrative de Lyon nous paraît donc de nature à moduler la portée de l’article précité selon la qualité de la personne qui l’invoque cependant que, pour sa part, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a récemment jugé, s’agissant d’un permis de construire anonyme jugé ainsi comme « entaché d’une irrégularité substantielle » que « la circonstance que ce moyen était invoqué par un tiers et non par le pétitionnaire du permis de construire est à cet égard inopérante » (CAA. Bordeaux, 23 février 2007, Cne de Sarlat-la-Caneda, req. n°04BX00670)…


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur la condition tenant au caractère précis et limité d’une prescription assortissant un permis de construire

    Une prescription imposant la plantation de deux d’arbres de haute tige supplémentaires présente un caractère précis et limité et permet ainsi d’assurer la conformité du projet et la légalité du permis de construire.

    CAA. Lyon, 30 juin 2007, M. Didier X, req. n°05LY00758

    Voici un arrêt plus intéressant qu’il n’y paraît - et, en toute hypothèse, on s’en contentera en cette période marquée par l’absence de toute jurisprudence plus significative - en ce qu’il permet d’aborder la question liée à la légalité des prescriptions assortissant un permis de construire ; étant précisé d’emblée que la réforme des autorisations d’urbanisme entrée en vigueur le 1er octobre 2007 ne nous semble pas, en elle-même, de nature à modifier la jurisprudence rendue en la matière.

    A titre liminaire, on rappellera ainsi qu’outre sa nécessaire et suffisante motivation, une prescription doit, pour être légale et opérante, respecter cinq principales conditions.

    En premier lieu, une prescription doit nécessairement être fixée par l’autorisation d’urbanisme la générant et cette dernière doit nécessairement en fixer précisément le contenu. Il s’ensuit qu’une prescription ne saurait légalement consister à renvoyer à une autorisation, à un avis et/ou à une concertation ultérieurs avec les services intéressés aux fins d’en arrêter le contenu ; ce qui procède du principe issu, pour le permis de construire, de l’ancien article L.421-3 du Code de l’urbanisme – lequel a été généralisé, pour les « principales » autorisations d’urbanisme, par le nouvel article L.421-6 du Code de l’urbanisme – et selon lequel l’administration compétente doit, à travers l’autorisation considérée, prendre parti sur l’ensemble des aspects du projet.

    A titre d’exemple, il a ainsi été jugé qu’était illégal un permis de construire assorti d’une prescription précisant que le pétitionnaire devait procéder à un aménagement routier à définir dans le cadre d’un arrêté de voirie ultérieur (CAA. Marseille, 18 février 1999, M. Tremellat, req. n°96MA02391) puisque ce faisant le permis de construire ne prenait pas parti sur cet aspect du projet et n’assurait pas par lui même la conformité de ce dernier au regard de l’ancien article R.111-4 du Code de l’urbanisme.

    En deuxième lieu, les prescriptions édictées par une autorisations d’urbanisme doivent porter sur des points précis et limités du projet et, a contrario, ne saurait emporter une modification trop importante du projet initial, laquelle rendrait nécessaire la présentation d’un nouveau projet (CE. 27 juillet 1979, M. Starck, req. n°04274).

    En troisième lieu, il est nécessaire que la prescription soit réalisable puisqu’à titre d’exemple, il a été jugé qu’était illégal un permis de construire prescrivant la réalisation de 80 places de stationnement qui, pour être justifiées au regard de la destination du projet, n’étaient pas matériellement réalisables sur le terrain à construire. (CE. 14 décembre 1992, Epx Léger, req. n°106.685).

    En quatrième lieu, la prescription édictée doit avoir un fondement légal et répondre à une préoccupation d’urbanisme. En effet, dès lors prescription assortissant un permis de construire ou tout autre autorisation d’urbanisme a pour unique objet d’assurer la conformité d’un projet aux prescriptions d’urbanisme qui lui sont opposables à travers cette autorisation ; telle étant la raison pour laquelle un refus d’autorisation est illégal lorsque la conformité du projet pouvait être assurée par la simple édiction de prescriptions.

    En cinquième et dernier lieu, il est plus spécifiquement nécessaire qu’il s’agisse d’une véritable prescription technique précisant la nature des travaux ainsi imposés et non pas d’un simple renvoi aux normes opposables au projet.

    Précisons ainsi que dans l’affaire objet de l’arrêt commenté ce jour était en cause un permis de construire portant sur une structure pluri-accueil pour la petite enfance et la réalisation de neuf aires de stationnement. Ce permis de construire devait, toutefois, être contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’article 13 du POS communal, lequel prescrivait l’aménagement d’un arbre pour deux places de stationnement alors que le pétitionnaire n’en avait prévu que trois.

    Néanmoins, ce moyen devait donc être rejeté par la Cour administrative d’appel de Lyon au motif suivant :

    « Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'aux termes du 4° de l'article UB 13 du règlement du plan d'occupation des sols : « Les aires de stationnement à l'air libre doivent être plantées à raison d'un arbre pour deux emplacements, » ; que si le plan de masse joint à la demande de permis de construire ne fait apparaître que 3 arbres pour 9 emplacements de stationnement, le permis de construire litigieux a toutefois été accordé à la communauté de communes de Pierre de Bresse sous réserve que le pétitionnaire se conforme aux stipulations de l'article UB 13 ci-dessus ; qu'en l'espèce, cette prescription, qui exigeait la plantation de deux arbres supplémentaires, entraînait seulement une modification portant sur un point précis et limité du projet, ne soulevant aucune difficulté technique et n'entraînant aucune modification du reste du projet ; que, dans ces conditions, le maire de Pierre de Bresse a pu légalement délivrer le permis de construire en cause assorti de la condition susénoncée sans exiger la production d'un plan rectifié ; que, par suite, les dispositions précitées du plan d'occupation des sols n'ont pas été méconnues ».

    S’il est incontestable que la prescription en cause présentait un caractère limité et n’impliquait donc pas la présentation d’un nouveau projet, le considérant précité appelle deux observations.

    D’une part, le mode de calcul retenu par la Cour pour conclure à ce que la prescription en cause impliquait la plantation de deux nouveaux arbres nous paraît sujette à caution.

    En effet, lorsque le règlement d’urbanisme local prescrit la réalisation d’aménagements accessoires en considération des caractéristiques du projet qu’il saisit par tranche, cette prescription s’applique, sauf précision contraire, par tranche consommée et non par tranche entamée. C’est ainsi qu’en matière d’aire de stationnement, le Conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article UC 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune des Allues : " Le stationnement des véhicules correspondant aux besoins des constructions et installations doit être assuré en dehors des voies publiques. (.) Il sera exigé (.) : 1. pour les constructions d'habitation : 1 place de stationnement par tranche de 60 m de surface de plancher hors œuvre nette avec un minimum de 1 place par logement ; 2. pour les commerces : 1 place pour 25 m de surface de vente (.)" ; qu'il ressort des pièces du dossier que la construction litigieuse comporte environ 590 m de surface habitable et 63 m de surface commerciale, ce qui nécessite, en application des dispositions susmentionnées, la construction de respectivement 9 et 2 places de stationnement ; que le permis de construire litigieux, qui prévoit l'aménagement de 12 places de stationnement n'a, par suite, pas méconnu les dispositions de l'article UC 12 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune des Allues » (CE. 8 mars 2002, SCI Télémark, req. n°226.631).

    Or, l’on voit mal pourquoi le mode de calcul s’appliquant en matière d’aires de stationnement ne vaudrait pas s’agissant de la détermination du nombre d’arbres à planter sur ces aires.

    Dès lors que le projet impliquait neuf places de stationnement, l’article 13 du POS communal imposait donc, selon nous, la plantation de quatre arbres et, par voie de conséquence, dès lors que le pétitionnaire n’en avait prévu que trois la prescription en cause n’induisait, à notre sens, la plantation que d’un arbre supplémentaire.

    Mais d’autre part et surtout, il convient de préciser que la prescription en cause n’imposait pas expressément la plantation de ces arbres mais se bornait à préciser que le projet était autorisé sous réserve du respect de l’article 13 du POS communal. Or, ainsi qu’il a été pré-exposé, la légalité d’une prescription et son caractère opérant sur la conformité du projet implique qu’il s’agisse d’une véritable prescription précisant la façon dont doit être respectée la norme en cause et non pas seulement d’un renvoi à la réglementation opposable au projet (pour exemple: CAA. Nantes, 7 mai 1996, SCI Bruay-Provinces, req. n°93NT00644).

    A notre sens, cette prescription était donc illégale ou, à tout le moins, inopérante à l’égard de la non-conformité initiale du projet en cause et, partant, le permis de construire contesté illégal.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés