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Veille administrative & réglementaire - Page 9

  • VEILLE ADMINISTRATIVE : QUATRE REPONSES MINISTERIELLES EN RAPPORT AVEC LA REFORME DES AUTORISATIONS D’URBANISME (DONT DEUX COMMENTEES)

    Question n°12446

    Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7580

    Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le cas où les murs et le gros oeuvre d'un bâtiment sont réalisés puis laissés à l'abandon plusieurs années. Elle souhaite savoir si l'édifice correspondant est considéré comme une construction existante du point de vue de l'urbanisme, et susceptible à ce titre d'être l'objet d'aménagements et de travaux permettant de le rendre habitable

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1647

    Comme le prévoit l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, le permis de construire est périmé lorsque les travaux autorisés par ledit permis ne sont pas engagés dans un délai de deux ans à compter de la notification du permis. Il est également périmé si, passé ce délai, les travaux commencés sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. Des travaux d'aménagement peuvent être effectués sur une construction inachevée en vue de la rendre habitable, sous réserve de l'obtention d'une nouvelle autorisation portant sur la partie restante.

    Obs : Voici, une réponse qui marque un changement de position de l’administration, laquelle, il est vrai, a récemment été contredite sur ce point par le juge administratif.

    Au sujet des constructions inachevées, le Ministère de l’équipement avait en effet précédemment estimé que lorsque les travaux autorisés n’ont pas été entièrement exécutés dans le délai de validité du permis de construire, l’ouvrage ainsi réalisé devait être considéré comme non conforme au permis délivré et devait donc donner lieu à l’établissement d’un procès-verbal d’infraction en application de l’article L.480-1 du Code de l’urbanisme ; l’administration devant également inviter le pétitionnaire à régulariser les travaux accomplis par le dépôt d’un nouveau permis de construire destiné à entériner la réduction de son projet (Rép. min. JOAN Q, 5 juin 2000, p.3465). A suivre, cette analyse les travaux projetés sur une construction inachevée relevaient donc du principe issu de la jurisprudence dite « Thalamy ». Mais cette position appelait, toutefois, une triple réserve.

    Tout d’abord, une autorisation d’urbanisme n’a pas d’autre finalité que de contrôler la régularité des ouvrages projetés au regard des prescriptions d’urbanisme qui leur sont opposables et, par voie de conséquence, n’emporte pas l’obligation de construire (Rép. min. n°7028 : JOAN, 2 mars 1974, p.967). Quant aux opérations de contrôle générées par l’achèvement des travaux et pouvant le cas échéant aboutir à la délivrance d’un certificat de conformité, celles-ci visent seulement à vérifier que ceux effectués l’ont été conformément au permis de construire obtenu et ce, sur les seuls aspects visés par l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme.

    Or, un ouvrage pour être inachevé peut néanmoins ne contrevenir en l’état à aucune prescription d’urbanisme et, par ailleurs, les travaux effectivement accomplis peuvent avoir été réalisés conformément à l’autorisation d’urbanisme délivrée. En d’autres termes, l’inachèvement des travaux autorisés au regard des aspects visés par l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme peut certes amener l’administration à contester la conformité des travaux mais ne préjuge pas nécessairement de l’irrégularité des travaux et de l’ouvrage effectivement accomplis au regard du droit de l’urbanisme.

    Ensuite et aux termes de l’article L.480-4 du Code de l’urbanisme, l’inachèvement d’une construction n’est constitutif d’une infraction que s’il consiste en « l’inexécution, dans les délais prescrits, de tous travaux accessoires d’aménagement ou de démolition imposés » par les autorisations prévues par le Code de l’urbanisme, ce que le juge pénal apprécie strictement.

    C’est ainsi que la chambre criminelle de Cour de cassation a pu casser un arrêt d’appel ayant condamné le prévenu aux peines prévues par l’article L.480-4 du chef de ne pas avoir aménagé le garage et la cave annoncés dans la demande de permis de construire et ce, au motif que cet inachèvement du projet n’était constitutif d’aucun délit dès lors que la réalisation des ouvrages en cause n’avait pas été prescrite par l’autorisation obtenue à cet effet (Cass. crim. 18 janvier 1983, Garcia Malode Molinas, RDI, 1983). Au regard du droit pénal de l’urbanisme, l’inachèvement d’une construction n’est donc délictueux que s’il emporte la méconnaissance des prescriptions expresses du permis de construire (Cass. crim. 4 février 1992, Juvet, pourvoi n°90-87590) dont on rappellera qu’elles ont vocation à assurer la conformité d’un projet de construction aux règles d’urbanisme qui lui sont applicables.

    Enfin, si à défaut d’exécution de tout travaux, la péremption du permis de construire rend le recours en annulation exercé à son encontre sans objet ou irrecevable, selon qu’il a été introduit avant ou après l’expiration du délai de validité de l’autorisation attaquée (CE. 25 novembre 1987, Raimond, req. n°48.710), le Conseil d’Etat a précisé qu’en revanche, la caducité du permis de construire ne prive pas d’objet le recours en annulation exercé à son encontre lorsque celui-ci a fait l’objet d’un commencement d’exécution (CE. 25 mai 1975, Fauchille, req. n°82.613). En pareil cas, la caducité du permis de construire n’emporte donc pas sa disparition de l’ordonnancement juridique et dans la mesure où, en toute hypothèse, elle n’a aucune incidence sur sa légalité (CE. 23 février 1990, M. et Mme Charrier, req. n°66.983), un ouvrage inachevé à la date d’expiration du délai de validité dudit permis n’en conserve donc pas moins une existence légale.

    Force était donc de considérer qu’un ouvrage inachevé n’est irrégulier – en tant que tel – que pour autant que les travaux non-accomplis rendent celui-ci non conforme à la réglementation d’urbanisme en vertu de laquelle l’autorisation de construire a été délivrée et/ou que les travaux effectivement réalisés ne correspondent pas de ce fait à ceux qui avaient été prescrits et, a contrario, que la seule caducité du permis de construire n’a pas pour effet de rendre illégal l’ouvrage ainsi réalisé.

    Le juge administratif a récemment précisé qu’un ouvrage inachevé à la date d’expiration du délai de validité du permis de construire peut néanmoins constituer une construction juridiquement existante au regard du droit de l’urbanisme et, par voie de conséquence, que certains des travaux projetés sur celui-ci peuvent donc relever du champ d’application de la déclaration de travaux, tel qu’il est défini par l’article R.422-2 du Code de l’urbanisme (dans le même sens : CE. 29 mars 2006, Cne d’Antibes, req. n° 280.194 ; CAA. Marseille, 8 décembre 2005, Cne d’Eguilles, req. n° 02MA01240 ; TA. Nice, 23 février 2006, M. Cozza, req. n°01-05873).

    Il reste qu’il est également nécessaire que les travaux précédemment engagés aient été suffisamment avancés pour conférer à l’ouvrage en résultant le statut d’une véritable construction (sur ce point et l’ensemble de cette problématique : P.E.DURAND « Le statut des ouvrages inachevés en droit de l’urbanisme », RDI, n°5/2006 & La réunion de murs et d’une toiture forme une construction existante au regard du droit de l’urbanisme » (CAA. Marseille, 8 décembre 2005), AJDA, n°20/2006).



    Question n°9731

    Question publiée au JO le : 13/11/2007 page : 6946

    M. Christian Jacob interroge M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur l'application des articles L. 442-1 et R. 421-19 du code de l'urbanisme. S'agissant d'opérations de division en cours à la date du 1er octobre 2007 et ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré avant le 1er octobre 2007, la signature de l'acte authentique, est subordonnée, compte tenu des pratiques actuelles des notaires, à la souscription d'une déclaration préalable en vertu des dispositions du a) de l'article R. 421-19 du code, ce qui peut retarder le caractère effectif de la transaction. Il lui demande, dans ces conditions, s'il est possible de considérer que l'obtention du permis avant le 1er octobre 2007 entérine la division foncière.

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1640

    Depuis le 1er octobre 2007, les divisions de terrain en vue de construire sont soumises soit à déclaration préalable pour les plus simples, soit à permis d'aménager lorsque le projet prévoit la création de voies ou espaces communs. Toutefois, lorsqu'un projet de division a fait l'objet, avant le 1er octobre 2007, d'une autorisation de lotir ou d'une déclaration au titre de l'ancien article R. 314-54 du code de l'urbanisme, il peut être procédé, même après le 1er octobre 2007, à la division du terrain sans que le propriétaire ait à présenter une nouvelle déclaration ou une nouvelle demande de permis d'aménager. En effet, dès lors que l'autorisation de lotir est toujours en cours de validité, les divisions autorisées ne sont pas remises en cause par les nouvelles dispositions du code de l'urbanisme. Il en est de même pour les projets de divisions ayant fait l'objet d'une déclaration au titre de l'ancien article R. 315-54 du code de l'urbanisme, cette déclaration n'ayant quant à elle aucune limite de validité dans le temps. Les nouvelles dispositions relatives aux formalités à accomplir préalablement aux divisions de terrains ne s'appliquent donc pas aux divisions ayant déjà fait l'objet, avant le l'octobre 2007, d'une déclaration ou d'une demande d'autorisation de lotir selon les procédures alors en vigueur et ce indépendamment du fait qu'une demande de permis de construire ait été déposée sur le terrain

    Obs : Dans son régime issu de la loi du 13 décembre 2000 « SRU » la procédure déclarative prévue par l’ancien article R.315-54 est strictement informative, n’appelle aucune décision de l’administration et, par voie de conséquence, ne génère aucune autorisation susceptible de créer des droits acquis ; sans compter, d’ailleurs, que cette déclaration n’a aucune durée de validité.

    Selon nous, il n’est donc pas si certain qu’une division foncière réalisée après le 1er octobre 2007 en vue de l’implantation d’un bâtiment et ayant donc pour effet de créer un « lot à construire » au sens de l’article L.442-1 du Code de l’urbanisme échappe au régime du lotissement dès lors que l’opérateur en aura informé la mairie, avant le 1er octobre 2007, selon la procédure prévue par l’ancien article R.315-54.



    Question n°12258

    Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7602

    Mme Michèle Tabarot attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la mise en oeuvre de la réforme des autorisations d'urbanisme. Un maire de sa circonscription lui a fait part de son inquiétude face à une évolution qui obligerait certaines communes, qui ne sont pas dotées d'un service adapté, à procéder à l'instruction de demandes d'urbanisme jusqu'alors instruites par les services de l'État. Aussi, il lui serait utile de savoir dans quelle mesure un dispositif d'accompagnement des communes pourrait être mis en place pour aider les municipalités concernées par cette évolution

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1646

    Le principe de la mise à disposition gratuite des services de l'État n'est pas remis en cause par la réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme. Le nouvel article L. 422-8 du code de l'urbanisme dispose que les services de l'État sont gratuitement mis à la disposition des communes de moins de 10 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale de moins de 20 000 habitants si les maires ou les présidents le leur demandent. Les conventions passées entre les services de l'État et les collectivités locales ont pour objet d'organiser cette mise à disposition mais ne peuvent en aucune façon remettre en cause les obligations de l'État définies dans cet article



    Question n°11639

    Question publiée au JO le : 27/11/2007 page : 7390

    M. Dominique Dord attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur la mise en oeuvre de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative à la réforme du code de l'urbanisme, complétée par le décret d'application du 5 janvier 2007. Si cette ordonnance unifie l'instruction des permis de construire et garantit des délais d'instruction rapides, elle multiplie cependant les tâches administratives et les frais postaux, ce qui n'est pas sans conséquence pour les communes rurales. Par ailleurs, certaines communes rurales s'inquiètent d'avoir à établir les certificats de conformité. Les DDE peuvent aider les communes de moins de 10 000 habitants en leur portant plus particulièrement une assistance technique, d'instruction ou de contentieux. Elles souhaiteraient cependant être assurées que l'État continuera de les assister, notamment dans le contrôle de la conformité des travaux. Bien que cette procédure de récolement constitue une opération ponctuelle, celle-ci engage, de fait, la responsabilité juridique des communes. Il le remercie donc de lui préciser quelles mesures il envisage de prendre afin d'équilibrer ce qui peut être assimilé à un transfert de charge de l'État sur les communes rurales

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1645

    La réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme doit être l'occasion de mettre à jour les conventions de mise à disposition gratuite des services de l'État à travers une vraie concertation entre les élus et les directions départementales de l'équipement. Elle ne doit en aucun cas être un prétexte pour imposer un quelconque désengagement des services du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, notamment en ce qui concerne le contrôle de la conformité des travaux. L'article L. 422-8 du code de l'urbanisme, issu de l'ordonnance du 8 décembre 2005 dispose que les services de l'État sont gratuitement mis à la disposition des communes de moins de 10 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de moins de 20 000 habitants si les maires ou les présidents le leur demandent. Les conventions passées entre les services de l'État et les collectivités locales ont pour objet d'organiser cette mise à disposition. Elles ne peuvent en aucune façon remettre en cause les obligations de l'État définies dans cet article qui incluent notamment le contrôle de la conformité des travaux. Conscient des problèmes posés par la prise en charge des frais postaux correspondant aux envois de courriers par lettre recommandée avec accusé de réception, le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables a donné son accord à un amendement dans la proposition de loi qui vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la simplification du droit. L'article 16 du chapitre III relatif aux dispositions simplifiant le fonctionnement des collectivités territoriales, réintroduit dans le code de l'urbanisme la possibilité, pour le maire ou le président de l'EPCI, de déléguer sa signature au service chargé de l'instruction pour les actes d'instruction. Lorsque le maire ou le président de l'EPCI décidera d'utiliser cette faculté, le coût des envois correspondants sera bien évidemment pris en charge par les services de l'État. Une telle délégation de signature permettrait également de résoudre les problèmes de délai auxquels les élus locaux risquent d'être confrontés. La réforme du permis de construire bouleverse les habitudes et il est bien naturel, malgré le travail de préparation et d'explication qui a été mené avant sa mise en oeuvre, qu'elle provoque des interrogations et des inquiétudes. Un comité de suivi de la réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme composé à parité d'élus, de représentants des professions et de représentants de l'administration sera chargé de veiller à la bonne mise en oeuvre des nouvelles dispositions du code de l'urbanisme et de proposer les adaptations éventuelles pour corriger les difficultés qui pourraient apparaître.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Veille administrative (Réponse ministérielle) : Le Ministère maîtrise-t-il la réforme des autorisations d’urbanisme dont il est l’auteur ?

    C’est la question que l’on est en droit de se poser à la lecture de la réponse ministérielle citée ci-dessous, où l’on apprend s’agissant du « changement de destination d'un immeuble à usage d'habitation en immeuble à usage de bureaux » que « si cette transformation n'est pas accompagnée de travaux, (il) n'est astreint à aucune formalité au titre du permis de construire »… alors qu’il s’agit d’un des aspects les plus significatifs de la récente réforme des autorisations d’urbanisme.

    TEXTE DE LA QUESTION (publiée au JO le 28/08/2007 ; p.5351)

    « Reprenant les termes de la question écrite qu'elle avait posée le 1er mai 2007 sous la précédente législature, demeurée sans réponse, Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le cas d'une personne qui obtient un permis de construire pour un immeuble à usage d'habitation et qui, finalement, tout en ayant scrupuleusement respecté le permis de construire, utilise cet immeuble pour des bureaux à destination de professions libérales. Elle souhaiterait connaître quels sont, dans cette hypothèse, les moyens de recours de la commune ou, éventuellement, des riverains »

    TEXTE DE LA REPONSE (publiée au JO le 29/01/2008 ; p.793)

    « Le changement de destination d'un immeuble à usage d'habitation en immeuble à usage de bureaux, si cette transformation n'est pas accompagnée de travaux, n'est astreint à aucune formalité au titre du permis de construire. Le changement opéré ne peut, éventuellement, être soumis qu'à l'autorisation préalable de changement d'usage prévue à l'article L. 631-7 du code de la construction et de l'habitation. Toute infraction aux dispositions de cet article est sanctionnée par les peines et mesures de restitution prévues à, l'article L. 651-2 du même code. En revanche, dès lors que l'utilisation faite des locaux de l'immeuble méconnaît les dispositions du plan d'occupation des sols ou du plan local d'urbanisme, l'infraction prévue à l'article L. 160-1 alinéa 1er du code de l'urbanisme est constituée, et il appartient au maire au premier chef et à toute personne concernée de faire engager des poursuites pénales en application de l'article L. 480-1 et suivants du même code ».

     

    Sous l’empire de l’ancien article L421-1 du Code de l’urbanisme, tous les travaux emportant un changement de destination relevaient du permis de construire, quelle que soit la nature et l’importance des travaux projetés, y compris s’il s’agissait de simples travaux d’aménagement intérieur n’ayant aucun impact sur le volume, le nombre de niveaux et l’aspect extérieur de la construction existante considérée (Cass. crim., 11 février 1992, Cne de cassis, pourvoi n°90.80702).

    Il reste qu’il était nécessaire que des travaux soient effectués puisque le droit des autorisations d’urbanisme ne saisissait pas le cas des changements de destination résultant d’un simple usage et, en d’autres termes, ne s’accompagnant d’aucun travaux concomitants.

    Or, les nouveaux articles R.421-13, R.421-14 et R.421-17 du Code de l’urbanisme ont totalement bouleversé le principe et les règles issus de l’ancien article L.421-1.

    En premier lieu, les articles précités saisissent et régissent les changements de destination des constructions existantes en tant que tels et, par principe, indépendamment donc de toute considération liée au fait de savoir s’ils accompagnent ou non de travaux.

    En second lieu, les changements de destination relèvent, par principe, du régime déclaratif, sauf, par exception, à relever des cas pour lesquels un permis de construire est requis au titre du nouvel article R.421-14.

    Il reste que cet article ne saisit expressément qu’à une occasion le cas des changements de destination et ce, pour assujettir à permis de construire « les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s’accompagnent d’un changement de destination » ; ce dont il résulte, d’une part, qu’à défaut de s’accompagner d’un changement de destination, ces travaux seront dispensés de toute formalité et, d’autre part, qu’aucun changement de destination n’est assujetti en tant que tel à permis de construire. Par voie de conséquence, des travaux emportant un changement de destination ne pourront être assujettis à permis de construire qu’à la condition qu’à un autre titre, ils relèvent de l’un ou plusieurs des cas prévus par des nouveaux articles R.421-14, R.421-15 et R.421-16 du code de l’urbanisme.

    Pour être complet sur ce point, on soulignera également que le nouvel article R.421-14 du code de l’urbanisme apporte deux précisions – ultérieurement reprises par le nouvel article R.421-17 relatif aux travaux et changements de destination soumis à déclaration – s’agissant du mode d’appréciation de ces changements.

    D’une part, il précise que les changements de destination à prendre en compte sont les changements entre les différentes destinations définies à l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme relatif au contenu des prescriptions du règlement du plan local d’urbanisme (sur le mode d'appréciation dans le temps, voir ici). En effet, une des principales difficultés rencontrées pour l’application du régime du permis de construire aux travaux emportant un changement de destination d’une construction existante tenait, au premier chef, à ce que le code de l’urbanisme ne précisait jamais les différentes destinations possibles d’une construction ; les différentes catégories énoncées par le formulaire « CERFA » de demande de permis de construire ne trouvant leur fondement dans aucune disposition législative ou réglementaire du code.

    C’est ainsi à la jurisprudence qu’a incombé le rôle de déterminer si un changement d’usage ou d’affectation constituait ou non un changement de destination au sens, principalement, des anciens articles L.421-1 et R.422-2 (m) du code de l’urbanisme, ce dont il a résulté un nombre considérable de destinations possibles, aux limites et aux nuances parfois subtiles et difficiles à circonscrire.

    Or, si l’article R.123-9 du code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 13 décembre 2000 dite « SRU » est venu préciser cette notion, ce n’est qu’à l’égard des possibilités de moduler les prescriptions d’un règlement de plan local d’urbanisme en considération de la destination des constructions considérées.

    Précisément, le nouvel article R.421-14 du code de l’urbanisme fait de l’article R.123-9 une référence plus générale valant également pour ce qui concerne le contrôle des changements de destination. Au sens du nouvel article R.421-14 constitue ainsi un changement de destination celui intervenant entre les différentes catégories prévues par l’article R.123-9, à savoir les constructions destinées à l’habitation, à l’hébergement hôtelier, aux bureaux, aux commerces, à l’artisanat, à l’industrie, les exploitations agricoles ou forestières.

    Il reste qu’il faut souligner l’absence de précision du rédacteur du décret lequel s’est bordé à viser l’article R.123-9 du code de l’urbanisme alors que cet article dispose, d’une façon générale, que « les règles édictées dans le présent article peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt » mais ce, tout en précisant, plus particulièrement, que « en outre, des règles particulières peuvent être applicables aux constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif », lesquels constituent, dans les plans locaux d’urbanisme, une des destinations possibles d’une construction.

    Or, il s’agit d’une destination spécifique qui, en substance, se substitue à la destination primaire de l’ouvrage considéré. C’est ainsi qu’à titre d’exemple, une résidence médicalisée privée pour personnes âgées constitue intrinsèquement et en toute hypothèse une construction à destination de commerce, laquelle peut toutefois accéder au statut d’équipement collectif et être soumise aux prescriptions spécifiquement prévues par le plan local d’urbanisme pour ce type d’équipement, si d’une façon plus particulière la résidence considérée répond à un besoin de la population. On peut dès lors se demander si la catégorie des « constructions et installations nécessaires aux services publics ou d’intérêt collectif » constituera une destination à part entière pour application du principe posé par les nouveaux articles R.421-14 et R.421-17. Mais a priori, la réponse devrait être négative puisque si tel était le cas, le simple fait pour une construction de perdre les caractéristiques pour lesquelles elle pouvait être considérée comme un équipement d’intérêt collectif, pour ainsi s’en retrouver réduite à sa destination primaire, constituerait un changement de destination.

    D’autre part, le nouvel article R.421-14 du code de l’urbanisme précise expressément que pour l’application de ses dispositions visant le cas d’un changement de destination, « les locaux accessoires d’un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ».

    Il faut rappeler, en effet, qu’au regard de la jurisprudence rendue en la matière, notamment, au titre des anciens articles L.421-1 et R.422-2 (m) du code de l’urbanisme, non seulement le nombre de destinations possibles d’une construction était élevé mais, en outre, une même construction pouvait présenter plusieurs destinations puisque la destination d’un ouvrage n’était pas déterminée en considération de sa vocation générale ou de sa destination dominante mais appréciée local par local (CE.5 avril 1996, Caisse générale de retraite des cadres par répartition, req. n°133813)

    C’est ainsi qu’à titre d’exemple, des travaux tendant à rendre habitable un garage annexe d’une habitation emportaient un changement de destination de ce local exigeant un permis de construire et non pas une simple déclaration de travaux, y compris si sa surface de plancher était inférieure à 20 mètres carrés (CAA. Nantes, 2 décembre 1998, M. Luccioni, req. n°96NT02119).

    Précisément, il résulte de la règle posée par le nouvel article R.421-14 du code de l’urbanisme qu’un tel changement ne constituera plus un changement de destination susceptible d’être soumis à autorisation puisque ce garage, en tant que local accessoire, sera réputé avoir la même destination que le local principal, en l’occurrence l’habitation. II reste qu’ici encore, il incombera à la jurisprudence de définir ces notions de locaux accessoires et de locaux principaux.

    Il n’en demeure pas moins qu’il résulte de ce que qui précède que le changement de destination évoqué dans la réponse ministérielle ici commentée est assujetti à la formation préalable d’une décision de non-opposition à une déclaration formulée au titre de l’article R.421-17 (b) du Code de l’urbanisme…



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • Veille règlementaire : Réponse ministérielle (commentée) sur l’article L.111-12 du Code de l’urbanisme

    QUESTION n°°3439 (publiée au JO le 21/08/2007, p. 5310 / Réponse publiée au JO le 15/01/2008, p. 357)

    Texte de la question :

    « Reprenant les termes de la question écrite qu'elle avait posée le 6 février 2007 sous la précédente législature, demeurée sans réponse, Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de Mme la ministre de l'économie, des finances et de l'emploi sur la situation d'une personne qui a construit une maison de manière illégale, c'est-à-dire soit sans permis de construire, soit en ne respectant pas le permis de construire. En matière pénale, la prescription est de trois ans. Par contre, du point de vue administratif, le bâtiment reste illégal. Elle souhaiterait savoir, dans ces conditions, si le propriétaire de la maison en cause peut au bout d'une certaine période demander un permis de construire pour réaliser des travaux complémentaires sur son bâtiment. »

    Texte de la réponse :

    « S'agissant de la situation en matière pénale d'une personne qui a construit une maison d'une manière illégale, c'est-à-dire soit sans permis de construire, soit en ne respectant pas celui-ci, la prescription est de trois ans. En revanche, du point de vue administratif, le bâtiment reste illégal. S'agissant de la demande d'un permis de construire, au bout d'une certaine période, pour réaliser des travaux complémentaires sur le bâtiment en cause, l'article 9 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (ENL) a introduit dans le code de l'urbanisme l'article L. 111-12 qui prévoit que, lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux (devenue déclaration préalable depuis le 1er octobre 2007) ne peut pas être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme. Cependant, cet article précise que ces dispositions ne sont pas applicables : a) Lorsque la construction est de nature, par sa situation, à exposer ses usagers ou des tiers à un risque de mort ou de blessure de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ; b) Lorsqu'une action en démolition a été engagée dans les conditions prévues par l'article L. 480-13 ; c) Lorsque la construction est située dans un site classé, en application des articles L. 341-2 et suivants du code de l'environnement, ou dans un parc naturel créé en application des articles L. 331-1 et suivants du même code ; d) Lorsque la construction est sur le domaine public ; e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ; f) Dans les zones visées au 1° du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement. L'exécution de travaux complémentaires sur une maison édifiée d'une manière illégale nécessite donc que le bénéficiaire des travaux, dès lors que sa construction n'entre pas dans les exceptions susvisées, obtienne un permis de construire tendant à régulariser administrativement l'irrégularité commise. Par la suite, selon la nature ou l'ampleur des travaux complémentaires projetés, deux hypothèses peuvent se présenter : soit les travaux complémentaires ne nécessitent aucune autorisation d'urbanisme et sont compatibles avec les règles de fond applicables au terrain d'assiette du projet et, dans ce cas, ils peuvent être exécutés sans autre formalité ; soit ces travaux nécessitent une autorisation d'urbanisme et, dans ce cas, leur réalisation reste soumise à l'accord préalable de l'autorité compétente en la matière. Il serait prématuré de se prononcer sur les conséquences réelles de ces nouvelles dispositions, qui ne manqueront pas d'être soumises à l'appréciation du juge administratif. Enfin, dans l'hypothèse où la période décennale précitée n'est pas encore écoulée, un permis de construire portant sur des éléments indissociables de l'immeuble édifié d'une manière illégale ne peut être légalement accordé que s'il a aussi pour objet de permettre la régularisation de la partie édifiée en infraction, si les règles d'urbanisme applicables au terrain d'assiette de l'ensemble de la construction le permettent ».

    * * *

    Voici une réponse intéressante non pas pour l’appréciation qu’elle livre mais pour ce sur quoi elle omet –sciemment ( ?) – de se prononcer (« il serait prématuré de se prononcer sur les conséquences réelles de ces nouvelles dispositions, qui ne manqueront pas d'être soumises à l'appréciation du juge administratif »…) ; ce qui, d’ailleurs, ne manque pas de surprendre dès lors que le Ministère attributaire de la question et, donc, l’auteur de cette réponse est le Ministère de l’écologie, du développement et de l’aménagement durables dont on rappellera qu’il est dirigé par l’auteur de la loi du 13 juillet 2006 dont résulte, notamment, l’article L.111-12 du Code de l’urbanisme.

    On sait, en effet, que si le juge judiciaire considère qu’une construction illégalement édifiée se trouve régularisée par la seule prescription de l’action publique et accède ainsi au statut de construction juridiquement existante (Cass. crim. 9 mars 1993, François Derrien, pourvoi n°92-82372), telle n’est pas la position du juge administratif, lequel considérait qu’en toute hypothèse, une construction illégale – c’est-à-dire, en substance, celle édifiée sans que l’autorisation d’urbanisme requise n’ait été obtenue, en méconnaissance des prescriptions de cette dernière ou en exécution d’une autorisation annulée ou retirée – le demeure indéfiniment ou, plus précisément, tant qu’elle n’a pas été régularisée par l’obtention d’une autorisation adéquate (CE. 9 juillet 1986, Mme Thalamy, req. n° 51.172 ; sur les contours de ce principe, voir ici et et ici encore).

    Selon le principe posée par cette jurisprudence, lorsque de nouveaux travaux était projetés sur une construction illégale au regard du droit de l’urbanisme, le constructeur devait obtenir une autorisation ayant pour objet, d’une part, de régulariser cette dernière et, d’autre part, d’autoriser ces nouveaux travaux ; ce qui peut, notamment, avoir pour conséquence d’impliquer l’obtention d’un permis de construire alors que les travaux projetés n’exigent, en eux-mêmes, qu’une déclaration de travaux (CE. 30 mars 1994, Gigoult, req. n°137.881).

    Mais surtout la jurisprudence dite « Thalamy » avait pour conséquence d’exclure toute possibilité de travaux sur une construction illégale lorsque sa régularisation n’est pas possible au regard des normes d’urbanisme alors en vigueur, quand bien même cette construction aurait-elle pu être régulièrement autorisée au regard des normes applicables à l’époque où les travaux ont été accomplis.

    C’est pourquoi, par ce nouvel article L.111-12 au code de l’urbanisme, la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006 dite « ENL » est venue limiter la portée de la jurisprudence « Thalamy » par l’introduction d’une prescription administrative décennale, laquelle connaît cependant un certain nombre d’exceptions.

    Il résulte de cette prescription décennale que lorsque la construction pour être illégale est achevée depuis plus de dix ans, de nouveaux travaux peuvent être entrepris sur celle-ci sans qu’il soit besoin d’en opérer préalablement ou concomitamment la régularisation.

    Par voie de conséquence, ces nouveaux travaux sont assujettis à l’obtention d’une autorisation dont la nature dépend exclusivement de celle de ces travaux et, bien plus, peuvent être régulièrement réalisés sans autorisation lorsqu’au regard des dispositions issus du décret n°2007-18 du 5 janvier 2007, ils sont exemptés de toute formalité.

    Le nouvel article L.111-12 du code de l’urbanisme vise six cas où le principe posé par son alinéa 1er n’est pas applicable et où, en d’autres termes, la construction illégale ne peut bénéficier d’aucune prescription, quelle que soit l’ancienneté de son achèvement. Cet article précise, en effet, que

    « Les dispositions du premier alinéa ne sont pas applicables :
    a) Lorsque la construction est de nature, par sa situation, à exposer ses usagers ou des tiers à un risque de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente ;
    b) Lorsqu'une action en démolition a été engagée dans les conditions prévues par l'article L. 480-13 ;
    c) Lorsque la construction est située dans un site classé en application des articles L. 341-2 et suivants du code de l'environnement ou un parc naturel créé en application des articles L. 331-1 et suivants du même code ;
    d) Lorsque la construction est sur le domaine public ;
    e) Lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ;
    f) Dans les zones visées au 1º du II de l'article L. 562-1 du code de l'environnement
    ».


    Or, s’il est clair que dans le cas visé par la question objet de la réponse commenté ce jour, la construction en cause ne saurait bénéficier de la prescription décennale introduite par l’article précité puisqu’édifiée sans qu’aucun permis de construire n’ait jamais été obtenu à cet effet, on aurait apprécier que l’auteur de cette réponse donne son interprétation de l’exception prévue au point e) de cet article tant sa rédaction est imprécise quant à son champ d’application.

    En effet, s’il est clair que cette prescription bénéficie aux constructions réalisées en méconnaissance des prescriptions du permis de construire et s’il ne fait pas de doute qu’en sont donc, en toute hypothèse, exclues les constructions édifiées sans qu’aucun permis de construire n’ait jamais été obtenu, la réponse est moins évidente s’agissant des constructions réalisées en exécution d’un permis de construire ultérieurement annulé ou retiré.

    Au regard du droit de l’urbanisme et de la jurisprudence dite « Thalamy » ces constructions sont, en effet, assimilées à celles réalisées sans qu’aucun permis de construire n’ait été obtenu dont relèvent, d’ailleurs, celles entreprises en exécution d’une autorisation précédemment annulée ou précédemment frappée de caducité. En outre, compte tenu de l’effet rétroactif attaché à l’annulation ou au retrait d’un permis de construire, la construction édifiée en exécution de ce dernier doit, au regard du droit de l’urbanisme « opérationnel », être réputée réalisée sans permis de construire.

    Dès lors, il faudrait donc en conclure que la prescription décennale introduite par le nouvel article L.111-12 du code de l’urbanisme ne bénéficie pas non plus aux constructions réalisées en exécution d’un permis de construire ayant ultérieurement disparu de l’ordonnancement juridique. Mas ce n’est pas si sûr.

    Tout d’abord, force est de considérer que le trouble à l’ordre public résultant d’une construction rendue illégale par voie de conséquence de l’annulation ultérieure de son permis de construire est bien moindre que celui généré par une construction réalisée sans qu’aucune autorisation n’est jamais été obtenue ; sans compter que l’annulation du permis de construire peut résulter d’un simple vice de forme ou de procédure.

    D’ailleurs, nonobstant l’effet rétroactif attaché à l’annulation d’un permis de construire, celui qui l’a mis en œuvre ne se rend pas coupable d’un délit de construction sans autorisation au regard de l’article L.480-4 du Code de l’urbanisme ; sauf à ce qu’il l’ait obtenue par fraude (Cass. crim, 30 juin 1981, Bull. crim, n° 226 ; Cass. crim, 15 février 1995, Assoc. des amies de Saint-Palais sur Mer, n° 94-80.739).

    Ensuite, dans la mesure où le nouvel article L.111-12 régit les travaux en considération de l’irrégularité de la construction « initiale » et fait courir la prescription qu’il prévoit à compter de son achèvement, il semble que ce soit à cette époque qu’il faille se placer pour apprécier la situation de la construction au regard du droit de l’urbanisme : le fait que le permis de construire ait ultérieurement été annulé ne devrait donc pas avoir d’incidence.

    Il reste qu’a contrario, qu’une telle interprétation de la rédaction de l’alinéa 1er du nouvel article L.111-12 pourrait également amener à conclure qu’une construction initialement régulière mais devenue illégale du fait de l’annulation ultérieure de son permis de construire ne fait donc pas partie des cas prévus par cet alinéa et, à ce seul titre, ne peut pas bénéficier de la prescription décennale qu’il prévoit alors que l’auteur des travaux n’a commis aucun délit. La réserve introduite par le point f) ne viserait donc assurément que le cas où un permis de construire n’a jamais été obtenu : il prévoirait donc le cas où un délit a été commis comme une exception à une règle de principe dont le champ d’application ne recouvre pas les cas non-délictuels : ce qui ferait du nouvel article L.111-12 une bien curieuse règle de droit.

    Enfin, le point b) du nouvel article L.111-12 du code de l’urbanisme réserve également le cas où « une action en démolition a été engagée dans les conditions prévues par l'article L. 480-13 ».

    Or, aux termes de ce dernier, la condition première pour qu’une telle action prospère est que, préalablement, le permis de construire ait été annulé du fait d’une méconnaissance d’une règle d’urbanisme ou d’une servitude d’utilité publique.

    On voit donc mal quelle serait l’utilité de cette réserve expresse, si une construction réalisée en exécution d’un permis de construire ultérieurement annulé est, en toute hypothèse, exclue du bénéfice de la prescription décennale introduite par le nouvel article L.111-12. Précisément, celle-ci ne semble utile que pour s’opposer – le cas échéant, à titre conservatoire – à la régularisation par le temps de ces constructions menacées de démolition.

    D’ailleurs, il ressort des travaux préparatoires de la loi du 13 juillet 2006 dite « ENL » que la réserve prévue par le point e) du nouvel article L.111-12 a été introduite par l’Assemblée Nationale – contre le souhait du Sénat – pour éviter une « prime » au délit de construction sans autorisation.

    Pour l’ensemble de ces raisons, il semble donc raisonnable de considérer que la prescription décennale introduite par le nouvel article L.111-12 du code de l’urbanisme a vocation à bénéficier aux constructions réalisées en exécution d’un permis de construire ayant ultérieurement disparu de l’ordonnancement juridique ; sauf, peut-être, à ce qu’il ait été obtenu par fraude.

    Il n’en demeure pas moins que l’on aurait pu attendre de l’auteur de cette disposition qu’il se prononce sur sa portée.

    Et pour être complet, on relèvera également que le point e) du nouvel article L.111-12 n’exclut du bénéfice de la prescription qu’il prévoit que les constructions réalisées « sans permis de construire » ; ce dont il semble falloir déduire qu’une construction réalisée sans qu’ait été formulée la déclaration préalable requise ou malgré la décision d’opposition qu’elle a appelée pourra, néanmoins, bénéficier de cette prescription décennale.

    Une réserve s’impose, cependant, dès lors que, d’une part, le délit de travaux sans déclaration est réprimé au même titre que le délit de travaux sans permis de construire et que, d’autre part, à l’époque de la loi du 13 juillet 2006 dite « ENL », la déclaration de travaux était uniquement conçue comme une dérogation au champ d’application du permis de construire.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • VEILLES ADMINISTRATIVE N°5 : Deux réponses ministérielles en date du 1er janvier 2008

    QUESTION N°3050 : Question publiée au JO le 14/08/2007, p. 5202 / Réponse publiée au JO le 01/01/2008, p. 63

    TEXTE DE LA QUESTION :

    « Reprenant les termes de la question écrite qu'elle avait posée le 23 janvier 2007 sous la précédente législature, demeurée sans réponse, Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le fait que les lotissements de maisons individuelles sont souvent l'objet d'un cahier des charges imposant des règles d'urbanisme applicables à tous les acquéreurs de parcelles. Elle souhaiterait qu'il lui indique si un plan d'occupation des sols peut décider la suppression de certaines règles d'un cahier des charges sans l'accord de la majorité des copropriétaires du lotissement »


    TEXTE DE LA REPONSE :

    « Dans sa rédaction antérieure à l'ordonnance n° 2005-127 du 8 décembre 2005, l'article L. 315-1-2 du code de l'urbanisme prévoyait que « lorsqu'un plan local d'urbanisme ou un document en tenant lieu a été approuvé, les règles d'urbanisme contenues dans les documents approuvés d'un lotissement cessent de s'appliquer au terme de dix années à compter de la délivrance de l'autorisation de lotir. Toutefois, lorsqu'une majorité de colotis, a demandé le maintien de ces règles, elles ne cessent de s'appliquer qu'à compter de la décision expresse de l'autorité compétente prise après enquête publique ». Les colotis étaient informés par l'autorité administrative compétente et par voie d'affichage de la date à laquelle les règles d'urbanisme spécifiques au lotissement cessaient de s'appliquer automatiquement, et de la possibilité d'en demander le maintien. Lorsqu'une majorité de colotis avait fait connaître son souhait de maintien des règles, l'autorité compétente ne pouvait y mettre fin que sur décision expresse et après enquête publique. En organisant la substitution des règles des documents d'urbanisme aux règles d'urbanisme des cahiers des charges, le législateur a voulu mettre fin à l'application des dispositions relatives notamment à l'aménagement des sols et à l'aspect des constructions contenues dans les cahiers des charges de lotissements anciens, non compatibles avec les objectifs d'aménagement actuels fixés par les plans locaux d'urbanisme. La disparition des règles d'urbanisme contenues dans le cahier des charges ne remet toutefois pas en cause les droits et obligations régissant les rapports de colotis entre eux, ni le mode de gestion des parties communes en vigueur. Par ailleurs, l'article L. 315-4 ancien prévoyait que lorsque l'approbation d'un plan local d'urbanisme a été prononcée postérieurement à une autorisation de lotissement, l'autorité compétente pouvait prononcer la modification de tout ou partie des documents et notamment le cahier des charges du lotissement, pour les mettre en concordance avec le plan local d'urbanisme. La décision de l'autorité compétente était prise après enquête publique et délibération du conseil municipal. La notification de l'ouverture de l'enquête publique était adressée par lettre recommandée à chacun des propriétaires des lots, sauf si le lotissement avait été créé depuis plus de vingt ans et comportait au moins cinquante lots. Dans ce dernier cas, l'enquête publique faisait l'objet d'une décision de l'autorité compétente affichée en mairie, à l'intérieur du lotissement et publiée dans au moins deux journaux locaux. La mise en oeuvre de cette procédure ne nécessitait pas l'accord de la majorité des colotis. Ceux-ci pouvaient toutefois faire part de leurs observations au commissaire enquêteur au moment de l'enquête publique. Enfin, les colotis avaient de leur côté la possibilité de demander à l'autorité compétente la modification de tout ou partie du cahier des charges concernant le lotissement lorsque cette modification était compatible avec la réglementation d'urbanisme applicable dans la zone. Pour qu'elle soit recevable, cette demande devait émaner des deux tiers des propriétaires détenant ensemble les trois quarts au moins de la superficie du lotissement ou des trois quarts des propriétaires détenant au moins les deux tiers de la superficie. Les dispositions des articles L. 315-2-1, L. 315-3 et L. 315-4 ont été reprises dans les articles L. 442-9, L. 442-10 et L. 442-11 nouveaux, introduits dans le code de l'urbanisme par l'ordonnance du 8 décembre 2005, et ont fait l'objet de mesures d'application contenues dans le décret n° 2007-18 du 5 janvier 2007, en vigueur depuis le 1er octobre 2007 ».

                                                                                   _ _ _ _ _ _ _ _

    QUESTION N° 830 : Question publiée au JO le 17/07/2007, p. 4868 / Réponse publiée au JO le 01/01/2008, p. 61

    TEXTE DE LA QUESTION :

    « Mme Marie-Jo Zimmermann demande à M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, s'il est possible de délivrer deux permis de construire sur une même emprise et si la délivrance du deuxième permis de construire vaut retrait du premier »


    TEXTE DE LA REPONSE :

    « L'administration peut légalement délivrer, simultanément ou successivement, deux permis de construire sur un même terrain, à condition que les deux projets soient compatibles, et que le premier n'ait pas consommé tous les droits à construire autorisés sur le terrain. Dans le cas où un constructeur, après avoir obtenu un premier permis, en demande un second qui serait incompatible avec le maintien du premier, l'administration devrait refuser cette seconde demande, sauf si le bénéficiaire du premier permis en a demandé expressément le retrait. Jusqu'à l'intervention de la loi du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement, le Conseil d'État estimait que la délivrance d'un second permis ou d'un permis modificatif valait implicitement mais nécessairement retrait du premier permis, même si le pétitionnaire n'avait pas demandé ce retrait (CE, 29 octobre 1993, rec. n° 104 037 ; C.E., 31 mars 1999, rec. Lebon, p. 958). Il en résultait une situation qui pouvait être catastrophique pour le bénéficiaire lorsque celui-ci demandait un nouveau permis ou un permis modificatif sans être conscient que cette demande valait demande de retrait du premier permis devenu définitif. Le nouveau permis relançait évidemment le délai du recours contentieux et, en cas d'annulation, le demandeur perdait à la fois le bénéfice du premier et celui du second permis. C'est la raison pour laquelle la loi a été modifiée, dans le cadre de la réforme du permis de construire, pour préciser qu'au-delà d'un délai de trois mois à compter de l'intervention d'un permis de construire, celui-ci ne peut plus être retiré qu'à la suite d'une demande expresse de retrait du bénéficiaire. Dorénavant, une demande de nouveau permis ou de permis modificatif ne pourra valoir demande de retrait du précédent que si le bénéficiaire l'a expressément précisé ».


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés