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  • Comment établir l’assujettissement éventuel d’un projet à la procédure du permis de construire valant division ? Peut-on régulariser un permis de construire délivré en méconnaissance des articles R.421-7-1 (anc.) ou R.431-24 (nouv.) par un modificatif ?

    Même en l’absence d’indication précise dans le dossier produit par le pétitionnaire, l’assujettissement de la demande à la procédure de permis de construire valant division peut se déduire de la seule conception du projet. Mais lorsque le dossier initial ne comporte pas les pièces conséquemment requises, ce vice peut être régularisé par un simple « modificatif ».

    CAA. Lyon, 17 août 2010, Louis B., req. n°08LY02140 / CAA. Nancy, 10 juin 2010, Mme Anne A., req. n°09NC00357



    Aujourd’hui, deux arrêts offrant une solution somme toute classique mais nous permettant d’aborder une question jamais traitée ici : la régularisation d’une autorisation initiale au regard de la procédure du permis de construire valant division.

    ensemble pavillonnaire.jpgDans la première affaire (req. n°08LY02140), un promoteur avait obtenu sur deux terrains distincts deux permis de construire portant sur la réalisation d’ensemble d’habitations ; le premier prévoyant quatre maisons individuelles, le second en prévoyant huit.

    Mais chacun de ces deux permis devait être contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme ; les requérants soutenant que le projet impliquait la division du terrain d’assiette du terrain à construire alors que le dossier ne comportait pas les pièces requises en pareil cas par cet article.

    La procédure du permis de construire valant division n’est en effet pas une faculté mais une obligation. Dès lors que le projet relève du champ d’application de l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme, le pétitionnaire doit produire à son dossier les pièces conséquemment exigibles.

    Par voie de conséquence, le seul fait qu’un dossier de permis de construire ne comporte pas les pièces requises ne signifie pas nécessairement que son projet ne relève pas de la procédure de permis de construire valant division.

    Or, s’il est facile d’établir si le projet implique la construction de plusieurs bâtiments sur le même terrain, c’est-à-dire sur la même unité foncière, il est moins évident de déterminer si sa réalisation implique une division foncière du terrain.

    En effet, le seul fait qu’un même projet implique la réalisation de plusieurs bâtiments sur un même terrain ne suffit pas à établir la division foncière de ce dernier. En outre, dans le cadre d’un projet soumis à l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme, la division éventuelle du terrain n’a pas vocation à être réalisée avant l’obtention du permis de construire puisque c’est ce dernier qui autorise cette division. Au surplus, l’exercice d’un recours en annulation se traduisant souvent par le gel de la réalisation du projet et de sa commercialisation, il est pour le moins rare que ces divisions aient été réalisées au moment où le juge est amené à se prononcer sur la requête.

    S’agissant du premier permis de construire attaqué dans cette affaire, cette question fut toutefois facile à trancher :

    « Considérant, d'une part, qu'il est constant que la rubrique n° 363, relative à l' Utilisation principale envisagée , du formulaire de la demande de permis de construire du lot B, lequel prévoit la construction de quatre maisons, indique qu'une vente ou une location-vente est envisagée ; qu'en défense, la ville de Dijon et la SARL La Côte d'Orienne ne contestent pas que l'ensemble immobilier projeté doit être ultérieurement régi par les dispositions de la loi susvisé du 10 juillet 1965 fixant le statut de la copropriété des immeubles bâtis ; qu'un tel régime comporte une division en parties affectées à l'usage de tous et en parties affectées à l'usage exclusif des copropriétaires, chacun d'eux disposant d'un droit de jouissance privative exclusif sur sa maison individuelle et le terrain attenant ; qu'ainsi, la construction par ladite société de plusieurs maisons d'habitation, pour un seul propriétaire, mais destinées dans l'avenir à être vendues à des propriétaires différents, entre dans le champ d'application de l'article R. 421-7-1 précité du code de l'urbanisme ; qu'il est constant que le dossier de la demande de permis ne comporte pas la note de présentation prévue à l'article R. 315-5 a) du code de l'urbanisme, auquel renvoie l'article R. 421-7-1 ; qu'il est également constant que les différentes pièces, relatives à la constitution d'une association syndicale, prévues à l'article R. 315-6 dudit code, auquel renvoie également l'article R. 421-7-1, n'ont pas été produites par le pétitionnaire, alors pourtant que des équipements communs sont prévus ; qu'en conséquence, M. B et Mme B sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué qui autorise le lot B a été délivré en méconnaissance des dispositions précitées de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme ».

    Dès lors que le pétitionnaire avait lui-même indiqué que les maisons à bâtir étaient destinées à la vente et qu’il n’était pas contesté que le projet relevait du régime de la copropriété, il était clair que le projet relevait de la procédure alors prévue par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme (CE. 8 février 1999, Cne de La Clusaz, req. n°171.94 ; CAA. Lyon, 10 juin 1997, Sté MGM, req. n°96LY00389)..

    Sur ce point, on rappellera d’ailleurs que l’actuel article R.431-24 du Code de l’urbanisme ne modifie pas la donne : le fait que le projet relève dans son ensemble de la copropriété ne l’exclue pas de cette procédure mais a pour seul effet de dispenser le pétitionnaire d’avoir à produire le projet de constitution d’une association syndicale pour gérer les voies et espaces communs éventuellement prévus par le projet.

    En revanche, ni le formulaire « CERFA », ni les pièces du dossier de la demande ayant abouti au second permis de construire ne comportaient d’indication sur le mode d’utilisation et commercialisation des maisons à construire. Pour autant, la Cour a donc également considéré que ce projet relevait de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme :

    « Considérant, d'autre part, que la même rubrique 363 du formulaire de la demande de permis de construire du lot A, qui prévoit la construction de huit maisons, n'a pas été renseignée ; que, dès lors que la nature du projet laissait clairement penser que le statut de la copropriété des immeubles bâtis est susceptible de s'appliquer, le maire de la ville de Dijon ne pouvait délivrer le permis de construire en l'absence de toute précision sur l' Utilisation principale envisagée , alors que le dossier de la demande de permis ne comportait pas les documents requis par l'article R. 421-7-1 précité du code de l'urbanisme dans l'hypothèse d'une division en propriété ou en jouissance, à savoir la note de présentation prévue à l'article R. 315-5 a) et les différentes pièces relatives à la constitution d'une association syndicale prévues à l'article R. 315-6 ; que, dans ces conditions, M. B et Mme B sont également fondés à soutenir que l'arrêté litigieux autorisant le lot A a été délivré irrégulièrement ».

    En l’absence de toute autre indication, la Cour s’est donc exclusivement fondée sur la conception d’ensemble du projet ce qui – à notre connaissance – est une première puisque si la jurisprudence offre de nombreux exemples où cette « conception » a été prise en compte, cet élément d’appréciation a toujours été combiné à d’autres (CE. 27 avril 1994, M. Vuillerme, req. n°139.238).

    D’ailleurs, en l’absence de tout élément avéré, certaines Cour ont préféré adopté une position différente. C’est ainsi qu’à l’égard d’un projet de trois bâtiments regroupant dix logements, la Cour administrative de Nantes a jugé que :

    « Considérant, d'autre part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la parcelle servant d'assiette à l'ensemble immobilier de dix logements autorisé devait faire l'objet d'une division ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'absence au dossier de demande de permis de construire des documents exigés par les articles R. 315-5, R. 315-6 et R. 421-7-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur, en cas de division de la parcelle servant d'assiette au projet faisant l'objet du permis de construire contesté est inopérant » (CAA. Nantes, 8 avril 2008, Cne d’Arradon, req. n°07NT02525).

    En revanche, on sait que pour exclure le projet du champ d’application tant de la règlementation sur les lotissements que de la procédure du permis de construire valant division, la Cour administrative d’appel de Versailles puis le Conseil d’Etat se sont fondés sur la circonstance que le pétitionnaire avait expressément précisé dans son dossier que les cinq maisons à construire étaient destinées à la location division (CE. 7 mars 2008, Cne de Mareil-le-Guyon, req. n°296.287).

    Mais le nouvel article R.431-24 génère sur ce point une véritable problématique puisqu'il conviendra dorénavant d'établir non seulement que l'opération implique une division foncière mais en outre que cette division a vocation à intervenir avant l'achèvement du projet...

    A ce stade, il faut ainsi constater que les permis de construire attaqués ont été exclusivement annulés au motif tiré de la méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, les dossiers produits par le pétitionnaire ne comportant pas les pièces alors prévues par les anciens articles R.315-5 (a) et R.315-6 ; étant rappelé que sous l’empire de ce dispositif le plan de division n’était requis que lorsque le pétitionnaire entendait ventiler la SHON constructible du terrain d’origine entre les différents lots à créer (il est aujourd’hui systématiquement requis mais a contrario ne permet pas de s’opposer à l’article 14 d’un règlement de POS/PLU imposant d’appliquer le COS lot par lot).

    Or, il est toujours curieux de voir des permis de construire annuler du seul fait d’un vice se rapportant à la composition du dossier de demande puisque l’on sait qu’en principe, toute irrégularité sur ce point peut aisément être corrigée par un simple « modificatif ».

    C’est précisément ce qu’a fait le pétitionnaire dans la seconde affaire (req. n°09NC00357) où le permis de construire attaqué avait été contesté au motif tiré de la méconnaissance de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, le dossier initial ne comportant pas la notice prévue par l’ancien article R.315-5 (a).

    En effet, le pétitionnaire obtint ultérieurement un « modificatif » délivré au vu d’un dossier comportant cette notice, ce qui régularisa le permis initial et rendit sans objet le moyen présenté sur ce point à son encontre :

    « Considérant, en troisième lieu, que lorsqu'un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre le permis initial ; qu'aux termes des dispositions alors en vigueur de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme: Lorsque la demande de permis de construire porte sur la construction, sur un même terrain, par une seule personne physique ou morale, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par les documents énumérés à l'article R. 315-5 (A) (...) et qu'aux termes de l'article R. 315-5 dudit code : Le dossier joint à la demande est constitué des pièces ci-après : a) Une note exposant l'opération, précisant ses objectifs et indiquant les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans le site, le respect de l'environnement et la qualité de l'architecture et pour répondre aux besoins en équipements publics ou privés découlant de l'opération projetée (...) ; que, si le dossier de la demande du permis de construire délivré le 17 octobre 2005 à la société immobilière de la Wantzenau ne comportait pas la note requise par les dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier que ce document figurait dans le dossier de la demande du permis de construire modificatif accordé à ladite société le 16 février 2006 ; qu'ainsi, la requérante ne peut plus invoquer utilement la méconnaissance des dispositions précitées ».

    Mais bien que ce moyen n’ait apparemment pas été soulevé par les requérants et bien que cet arrêt soit quelque peu « imprécis » sur ce point puisque :

    - d’une part, on ne sait si le dossier initial comportait certaines des autres pièces visées par l’ancien article R.421-7-1 ;
    - d’autre part, on peut même se demande si le projet relevait de la procédure du permis de construire valant division dès lors que sur le moyen tiré de la méconnaissance de la règlementation sur les lotissements la Cour a jugé que : « la construction par la société immobilière de la Wantzenau, seule maître d'ouvrage, sur une même unité foncière, constituée des parcelles cadastrées BX n° 52/12 et BX n° 12, de deux maisons et de trois logements collectifs ne constitue pas un lotissement au sens des dispositions précitées, dès lors que cette opération n'implique aucune division foncière » ;

    cette décision soulève en toute hypothèse une question : est-il si évident de régulariser un permis initialement délivré en méconnaissance de l’ancien article R.421-7-1 ou de l’actuel article R.431-24.

    La réponse n’est pas si simple puisqu’il faut déterminer la nature de l’autorisation résultant d’un dossier ne comportant aucune des pièces par les articles précités. Cette question est en effet essentielle puisqu’elle est déterminante de l’objet et des effets de l’autorisation de régularisation ultérieure. En substance, on peut la résumer comme suit : l’autorisation initiale constitue-t-elle néanmoins un permis de construire valant division, ce dont il résulterait que la régularisation à opérer serait d’ordre strictement formelle ou s’agit-il d’un permis simple dont la régularisation implique en fait de le transformer en un permis de construire valant division.

    A notre sens, l’autorisation obtenue dans ces conditions est un permis simple et, par voie de conséquence, sa régularisation emporte sa transformation en un permis de construire valant division.

    En effet, le permis de construire se borne à autoriser le projet présenté par le pétitionnaire dans son dossier de demande. C’est donc la demande et les pièces du dossier qui déterminent la nature de l’autorisation sollicitée et les règles d’instruction applicables au projet.

    On rappellera d’ailleurs que dans l’affaire « François Poncet » (CE. 22 novembre 2002, François Poncet, req. n°204.244), un permis de construire avait initialement été obtenu pour la réalisation d’un hôtel et de quarante maisons individuelles projetées sur treize parcelles distinctes.

    Pour autant, cette autorisation avait été délivrée sur la base d’un dossier ne comportant pas les pièces prévues par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme. Alors qu’elle était devenue définitive, l’autorisation initiale devait ultérieurement faire l’objet d’une autorisation de transfert partiel et d’un permis modificatif. Sans changer le nombre de constructions projetées, ces deux autorisations eurent toutefois pour effet de porter le nombre de parcelles à créer de treize à quarante. C’est en conséquence, que ces deux autorisations délivrées par l’administration en tant que simples « modificatifs » furent requalifiées en nouveaux permis de construire ; le Conseil d’Etat précisant que :

    « Considérant (…) qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire initial délivré le 18 mai 1982 à la société Le Grand Carénage prévoyait l'édification d'un hôtel et de quarante maisons individuelles sur treize parcelles référencées au cadastre AW 11 à AW 23, alors que les arrêtés contestés ont été pris sur la base d'une nouvelle division parcellaire des terrains d'assiette intervenue postérieurement au permis initial, le permis délivré le 15 novembre 1990 à la société Le Grand Carénage portant sur un hôtel et vingt-deux maisons situées sur vingt-deux parcelles cadastrales, et le permis transféré à la même date à la société Immobart autorisant, quant à lui, la construction de dix-huit maisons individuelles situées sur autant de parcelles ; que cette nouvelle division parcellaire, alors que le permis initial n'a pas été instruit en application des dispositions de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme qui permettent une division ultérieure en propriété ou en jouissance des terrains d'assiette, constitue une modification d'une nature et d'une importance telles que les arrêts contestés doivent être regardés non comme des décisions modificatives d'un permis de construire antérieur, mais comme délivrant deux nouveaux permis de construire dont la légalité doit être examinée en elle-même ».

    Faute d’être instruite en application de l’ancien article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme, on voit donc mal comment la demande peut aboutir à la formation d’un permis de construire valant division.

    D’ailleurs, il faut relever que dans ses conclusions sur cette affaire, le Commissaire du gouvernement a souligné que : « il nous semble que des permis modificatifs délivrés sur la base d’une nouvelle division parcellaire modifient nécessairement l’économie d’ensemble du projet initial. Cette nouvelle division a en effet une incidence sur l’application des règles de desserte des terrains d’assiette, de raccordement aux réseaux publics et surtout de distance par rapport aux limites séparatives (…) La solution serait sans doute différente si le permis initial avait été instruit selon les règles du Code de l’urbanisme qui permettent une division ultérieure en propriété ou en jouissance des terrains d’assiette mais tel n’est pas le cas » (Concl. F. Séners, BJDU, n°6/2002, p.443).

    La solution retenue dans cette affaire procédait donc au premier chef du fait qu’un permis de construire simple n’était alors pas instruit dans les mêmes conditions qu’un permis de construire valant division.

    Dans le cas d’un permis de construire simple les règles d’urbanisme opposables au projet sont en effet appliquées à l’échelle de l’ensemble du terrain constituant l’assiette foncière de l’autorisation. En revanche, dans le cas d’un permis de construire valant division, il fallait alors tenir compte des divisions foncières à réaliser pour ainsi appliquer les règles d’urbanisme à l’échelon de chacun des terrains devant résulter de ces divisions.

    De ce fait, cette jurisprudence nous semble aujourd’hui obsolète.

    Aux fins de répondre aux interrogations et aux difficultés générées par la jurisprudence rendue au sujet des modalités d’application des règles d’urbanisme aux opérations impliquant la réalisation de divisions foncières, le dispositif entrée en vigueur le 1er octobre 2007 a comme on le sait introduit au sein du Code de l’urbanisme le nouvel l’article R.123-10-1 : « dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur un même terrain, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, les règles édictées par le plan local d'urbanisme sont appréciées au regard de l'ensemble du projet, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ».

    Si les dispositions de l’article précité ne sont pas d’une extrême clarté, il ressort en revanche clairement des travaux préparatoires à la réforme des autorisations d’urbanisme dont il est issu que sa finalité tend à ce qu’il soit fait « abstraction » des divisions foncières induites par l’opération considérée et, en d’autres termes, que la conformité de cette dernière aux prescriptions d’urbanisme communal lui étant opposables soit appréciée à l’échelle de l’ensemble du terrain d’assiette de l’opération et non pas à l’échelon de chacun des « lots » susceptibles de résulter desdites divisions.

    Il s’ensuit notamment qu’une demande de permis de construire valant division a par principe vocation à être instruite dans les mêmes conditions qu’une demande de permis de construire simple.

    Par voie de conséquence, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, n’a en principe aucune incidence sur les modalités d’instruction de la demande initiale. Au regard de la jurisprudence précitée (CE. 22 novembre 2002, François Poncet, req. n°204.244), l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme est donc de nature à permettre que cette transformation s’opère par le jeu d’un simple « modificatif ».

    Il reste que l’article précité précise que la règle de principe qu’il pose vaut « sauf si le règlement de ce plan s'y oppose ». En d’autres termes, les règlements de PLU peuvent donc prévoir que dans le cadre d’une demande de permis de construire valant division notamment les prescriptions fixées par ce règlement ont vocation à s’appliquer non pas à l’échelle de l’ensemble de l’assiette foncière du projet mais à l’échelon de chacun des terrains issus des divisions prévues par le projet. En pareil cas, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, peut modifier les conditions dans lesquelles la demande initiale a été instruite.

    Toutefois, lorsque les auteurs des PLU décident d’utiliser l’exception prévue par l’article R.123-10-1, ils n’ont pas nécessairement l’obligation de prévoir une règle générale valant pour l’application de l’ensemble des prescriptions du règlement. La mise en œuvre de cette exception peut se limiter à seulement certaines de ces règles, voire comme c’est souvent le cas être circonscrite à seulement l’une d’entre elles, telle notamment l’article 5 du règlement relatif à la superficie minimale des terrains constructibles.

    Dans ce cas, la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, aura certes un impact sur les modalités d’instruction de la demande initiale mais cette modification n’aura qu’une ampleur limitée. Or, contrairement à une idée rependue, rien ne s’oppose à ce que l’assiette foncière d’un permis de construire soit modifiée par le jeu d’un simple « modificatif » (TA. Poitiers, 25 octobre 2007, Mme Servouse, req. n°06-01532) ; la légalité d’une telle modification s’appréciant, comme pour tout autre aspect du projet, en considération de l’importance de la modification ainsi apportée au projet initial (TA. Rouen, 2 mars 1994, Mentionné au Tables du Recueil).

    Par voie de conséquence, de deux choses l’une à notre sens :

    - soit, le règlement de PLU applicable s’oppose à la règle de principe posée par l’article R.123-10 du Code de l’urbanisme pour une part significative des prescriptions édictées par ce règlement et la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, aura un impact significatif sur les modalités d’instruction de la demande initiale : cette transformation impliquera l’obtention d’un nouveau permis de construire ;
    - soit, le règlement de PLU applicable ne s’oppose à la règle de principe posée par l’article R.123-10 que pour un nombre limité des prescriptions édictées par ce règlement et la transformation d’un permis simple en un permis de construire valant division, ou l’inverse, n’aura qu’un impact réduit sur les modalités d’instruction de la demande initiale : cette transformation pourra s’opérer par le jeu d’un simple « modificatif ».

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Les PLU peuvent-ils différencier les règles qu’ils édictent selon d’autres critères que la destination des constructions ?

    Dès lors que les circonstances locales le justifient, les articles L.121-1 et L.123-1 du Code de l’urbanisme permettent aux PLU d’interdire les habitations collectives et limiter le nombre de constructions par unité foncière.

    CAA. Versailles, 10 juin 2010, M. et Mme A, req. n°09VE01586 & 09VE01593



    Comparé à l’ancien article R.123-21 du Code de l’urbanisme relatif aux règlements de POS, la « particularité » de l’article R.123-9 relatif aux règlements de PLU est de préciser que les prescriptions que ces derniers édictent « peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt ». Deux lectures des ces dispositions sont (étaient) possibles :

    - Une lecture permissive au terme de laquelle elles se bornent à consacrer une possibilité reconnue par la jurisprudence aux anciens règlements de POS ;
    - Une lecture restrictive au terme de laquelle les règlements de PLU ne peuvent opérer aucune autre différenciation que celle fondée sur la destination de la construction en cause

    C’est cette seconde lecture qu’a retenu l’administration centrale en précisant notamment que : « de même, le règlement ne peut édicter des règles différentes dans une même zone pour des destinations autres que celles limitativement énumérées à l'article R. 123-9 du code de l'urbanisme en différenciant, par exemple, les constructions à usage d'habitat individuel et collectif à l'intérieur d'une destination déterminée (l'habitation) » (Rép. min. 06076 ; publiée dans le JO Sénat du 02/04/2009 - page 819 ).

    L’article R.123-9 pris isolément, force est d’admettre que cette lecture est parfaitement recevable et que l’on peut même lui trouver une justification.

    Là où elle devient problématique, c’est au regard de l’économie générale du régime du PLU et, notamment, des objectifs assignés à ces documents par le Législateur à travers les articles L.121-1 et L.123-1 du Code de l’urbanisme qui pour ce faire ne disposerait donc plus que du « zonage », lequel ne permettrait d’ailleurs de réaliser tous ces objectifs et pourrait même aboutir à des situations totalement absurdes.

    Comment en effet assurer la diversité de l’offre commerciale et, notamment, le maintien et/ou le développement du commerce de proximité, si les auteurs des PLU ne peuvent opérer aucune distinction entre les différentes formes de commerces (voir ici) ? En outre, si les PLU ne pouvait interdire les « habitations collectives », le seul moyen de conserver le caractère pavillonnaire d’une zone serait d’y interdire toute nouvelle construction à destination qu’elle qu’en soit la forme….

    Précisément, c’est au seul regard des articles L.121-1 et L.123-1 du Code de l’urbanisme que la Cour administrative d’appel de Versailles a donc jugé :

    « Considérant, d'une part, qu'aux termes de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme : (...) Les plans locaux d'urbanisme comportent un règlement qui fixe, en cohérence avec le projet d'aménagement et de développement durable, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols permettant d'atteindre les objectifs mentionnés à l'article L. 121-1, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire, délimitent les zones urbaines ou à urbaniser (...) et définissent, en fonction des circonstances locales, les règles concernant l'implantation des constructions ; qu'il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme, qui ne sont pas liés par les modalités existantes d'utilisation du sol, de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer, en conséquence, le zonage et les possibilités de construction ; que leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif que dans le cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts ;
    Considérant, d'autre part, que l'article UH 1 litigieux du règlement du plan local d'urbanisme de la commune d'Andrésy interdit, notamment, l'habitat collectif dans cette zone à dominante d'habitations individuelles et que l'article UH 2 de ce règlement prescrit, notamment, la limitation des constructions à usage d'habitation à raison d'une construction par unité foncière ;
    Considérant que les auteurs du plan local d'urbanisme de la commune d'Andrésy ont pu, sans erreur de droit, interdire l'habitat collectif en zone UH ; que cette interdiction, combinée à la limitation d'une construction à usage d'habitation par unité foncière prescrite par l'article UH 2 du règlement du plan local d'urbanisme de la commune, ne saurait être regardée comme instituant une limitation illégale du nombre de logements ou du coefficient d'occupation des sols par unité foncière ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que cette restriction au droit de construire portée au règlement du plan local d'urbanisme soit incompatible avec les orientations générales du projet d'aménagement et de développement durable, notamment celles d'équilibre entre renouvellement urbain, de développement urbain maîtrisé et de développement de l'espace rural dans un souci de protection des espaces naturels et paysagers, ainsi que d'utilisation économe de l'espace ; que le parti a d'ailleurs été pris, quant à ce dernier objectif, de densifier la proximité immédiate du centre-ville et de préserver la densité moindre de l'urbanisation de la zone UH dont s'agit ; qu'il ne ressort pas davantage des pièces du dossier, compte tenu des caractéristiques des terrains situés en zone UH, que la limitation à une seule construction à usage d'habitation par unité foncière soit entachée d'une erreur manifeste d'appréciation
    » (req. n°09VE01593).


    Nonobstant l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme – que la Cour n’évoque d’ailleurs pas – les articles L.121-1 et L.123-1 du Code de l’urbanisme permettent donc aux PLU d’interdire les habitations collectives, pour autant bien entendu que cette interdiction soit justifiée au regard des caractéristiques de la zone ou du secteur où elle a vocation à s’appliquer.

    Mais ces mêmes articles leur permettent donc également de limiter le nombre de constructions par unité foncière.

    Ceci était toutefois plus évident des lors qu’une telle limitation ne heurte en aucune façon les dispositions précitées de l’article R.123-9 qui par ailleurs permettent au règlement de définir « les occupations et utilisations du sol interdites » et « les occupations et utilisations du sol soumises à des conditions particulières » ; règles qui constituent l’instrument privilégié pour réaliser les objectifs de l’article L.123-1 en ce qu’il précise que les PLU peuvent « préciser l'affectation des sols selon les usages principaux qui peuvent en être fait ou la nature des activités qui peuvent y être exercées » et « définir, en fonction des situations locales, les règles concernant la destination et la nature des constructions autorisées », sans pour autant imposer aux PLU de s’en tenir à la destination des constructions. Et si l’on pourrait faire grief à une telle solution de permettre de contourner les limitations que le législateur a voulu apporter au recours à l’article 5 des règlements locaux d’urbanisme sur la superficie minimale des terrains, il reste que dans cette affaire la Cour nous semble avoir valider la disposition en cause pour des motifs pas si éloigné de l’article L.123-1 en ce qu’il permet à ces règlements de « fixer une superficie minimale des terrains constructibles lorsque cette règle est justifiée (…) pour préserver l'urbanisation traditionnelle ou l'intérêt paysager de la zone considérée ».

    Mais par ailleurs dès lors qu’une seule construction est autorisée par unité foncière, une telle disposition a ipso facto pour effet d’interdire la réalisation d’opérations groupées et permet donc d’opposer un refus à une demande de permis de construire groupé (qu’il vaille ou non division).

    Or, comme on le sait, l’administration centrale considère qu’un règlement d’urbanisme local ne peut légalement interdire les lotissements ou les opérations groupées puisqu’il s’agit de procédures.

    Indirectement, cet arrêt infirme donc la position de l’administration sur ce point, de la même façon d’ailleurs que cette même Cour l’avait fait à l’égard des lotissements (voir ici).

    De la même façon que le lotissement n’est pas une procédure mais un type d’utilisation du sol contrôlé par une procédure, le permis d’aménager ou la déclaration, l’opération groupée est une forme d’occupation du sol contrôlée par une procédure, le permis de construire valant le cas échéant division. Partant, lorsque les circonstances le justifient, on voit donc mal pourquoi un PLU ne pourrait pas interdire directement ou indirectement les opérations groupées.

    NB : Au surplus, à ma connaissance aucune jurisprudence ne dit qu’un POS/PLU ne peut légalement interdire une procédure puisque sauf erreur de ma part (et la rubrique « commentaires » est là pour me corriger le cas échéant), la jurisprudence n’a jamais posé que le principe selon laquelle ces documents ne pouvaient assujettir les demandes d’autorisation à une procédure autre que celle prévue par le Code de l’urbanisme.

    Mais le PLU en cause dans cette affaire illustre les limites de l’exercice en la matière ou, à tout le moins, démontre les précautions que doivent prendre les auteurs de telles dispositions.

    En l’espèce, il semble en effet que le règlement de PLU en cause se bornait à interdire l’édification de plusieurs constructions sur une même unité foncière mais ce, sans préciser la date à laquelle il fallait se placer pour apprécier l’unité foncière en cause.

    Or, en pareil cas, l’unité foncière doit s’apprécier telle qu’elle est constituée à la date à laquelle l’administration statue sur la demande d’autorisation. C’est pourquoi dans cette affaire la Cour a souligné que le terrain sur lequel portait la demande objet du refus contesté non seulement accueillait déjà deux constructions mais en outre n’avait pas été divisé :

    « Considérant, en troisième lieu, qu'une unité foncière est un îlot de propriété d'un seul tenant, composé d'une parcelle ou d'un ensemble de parcelles appartenant à un même propriétaire ou à la même indivision ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet litigieux était prévu sur une unité foncière de 3 310 m² comportant déjà deux maisons d'habitation ; que ce terrain n'a fait l'objet d'aucune division ; que l'unité foncière dont s'agit ne pouvait pas, par suite, recevoir une nouvelle construction » (req. n°09VE01586).

    Il semble s’ensuivre que pour contourner cette interdiction et l’objectif ainsi poursuivi, il aurait suffit de diviser au préalable le terrain…

    C’est sur ce point que l’on peut s’interroger sur la légalité de la disposition en cause dès lors que l’on sait, à titre d’exemple, qu’un PLU limitant les possibilités de construction à l’extension limitée des bâtiments existants doit préciser l’époque à laquelle il faut se placer pour apprécier l’importance de l’extension en cause (voir ici).

    Mais pour conclure, et être complet, il faut relever que le requérant soutenait que la commune ne pouvait opposer un refus de permis de construire sur le fondement de son PLU interdisant la construction de plusieurs bâtiments sur une même unité foncière dans la mesure où cette possibilité était prévue par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme.

    Or, si la Cour a rejeté ce moyen ce moyen ce n’est pas en tant qu’il était inopérant mais parce que le projet objet de la demande ne portait que sur un seul bâtiment : il ne relevait donc pas d’un permis de construire valant division :

    « Considérant, enfin, qu'aux termes de l'article R. 421-7-1 du code de l'urbanisme, lequel était applicable jusqu'au 31 mars 2007 : Lorsque la demande de permis de construire porte sur la construction, sur un même terrain, par une seule personne physique ou morale, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par les documents énumérés à l'article R. 315-5 (a) et, le cas échéant, à l'article R. 313-6 ; que les requérants soutiennent que leur projet devait être examiné non au regard du plan local d'urbanisme, mais de ce dernier article, qui rend possible la construction de plusieurs bâtiments sur une même unité foncière devant être divisée ; que, toutefois, le projet litigieux, qui consistait en la construction d'une seule maison d'habitation, par transformation et agrandissement d'un garage existant, ne portait pas sur la construction de plusieurs bâtiments au sens et pour l'application de l'article précité ; qu'en outre, la demande ne comportait les documents prévus à cet article, s'agissant d'une division du terrain en trois lots simplement envisagée par un projet de 1990 auquel les pétitionnaires entendait se référer ; que le moyen doit donc être écarté ».

    Néanmoins, même si tel avait été le cas, la solution n’aurait pas été différente puisqu’en amont et dans les deux affaires, la Cour avait validé l’interdiction édictée par le règlement de PLU en cause indépendamment des autorisations auxquelles elle avait vocation à être appliquée. Et au surplus, on voit mal comment la légalité d’une prescription de fond d’un PLU pourrait être appréciée au regard d’une règle de procédure relative au dossier de demande de permis de construire…

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Peut-on invoquer l’illégalité du permis de construire en vertu duquel un bâtiment à reconstruire à l’identique a été initialement édifié ?

    Dès lors qu’il est devenu définitif, l’illégalité du permis de construire initial ne saurait être excipée, y compris lorsqu’il a été délivré par une autorité territorialement incompétente.

    CAA. Marseille, 7 mai 2010, Cne de Tomino, req. n°08MA01778



    RAS.jpgDans cette affaire, le pétitionnaire avait sollicité un permis aux fins de reconstruire un bâtiment détruit par un sinistre et ce, en application de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme disposant alors : « la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié ».

    Ce bâtiment ayant initialement été édifié à cheval sur deux communes, le pétitionnaire présenta comme il le devait sa demande dans chacune des mairies concernées puisque comme on le sait :

    - d’une part et d’une façon générale, un projet de construction à cheval sur le territoire de deux communes doit faire l’objet d’un permis de construire délivré conjointement par les deux autorités compétentes (CE. 26 mars 1997, ADLA, req. n° 172.183) ;
    - d’autre part et plus spécifiquement, « l’identité » requise par l’article L.111-3 précité exige notamment une identité d’implantation (CAA. Marseille, 20 novembre 2009, Michelle A, req. n°07MA03486).

    Mais cette demande devait être rejetée par le Maires des communes concernées, lesquels par une « substitution de motifs » pratiquée en cours d’instance devait exciper de l’illégalité du permis de construire en vertu duquel le bâtiment à reconstruire avait été initialement construire pour ainsi soutenir que ce bâtiment n’avait pas été régulièrement édifié au sens de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme.

    Ce moyen devait cependant être rejeté par la Cour administrative d’appel de Marseille au motif suivant :

    « Considérant, d'une part, que les requérantes excipent de l'illégalité du permis de construire délivré à M. A le 23 novembre 1968 par le maire de Tomino en faisant valoir que la partie du bâtiment dont la construction était projetée sur le territoire de la commune de Meria n'avait pas été autorisée par le maire de cette commune ; que, toutefois, une décision emportant droit de reconstruire un bâtiment, sur le fondement de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, ne peut utilement être contestée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision initiale créatrice d'un droit de construire dès lors que cette décision, comme en l'espèce, n'a été ni retirée par l'administration ni annulée par le juge administratif ; que, par suite et, en tout état de cause, le moyen est inopérant et ne peut qu'être écarté ».

    La possibilité d’exciper de l’illégalité du permis de construire initial avait déjà été écartée par le Conseil d’Etat dans un arrêt ayant plus largement permis de définir la notion de construction dotée d’une existence légale au regard du droit de l’urbanisme :

    « considérant qu'aux termes de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un sinistre est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale ou le plan local d'urbanisme en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié " ; que s'il résulte de ces dispositions que les bâtiments construits sans autorisation ou en méconnaissance de celle-ci, ainsi que ceux édifiés sur le fondement d'une autorisation annulée par le juge administratif ou retirée par l'administration, doivent être regardés comme n'ayant pas été " régulièrement édifiés ", en revanche, un permis de construire délivré sur le fondement des dispositions de cet article ne saurait être utilement contesté au motif de l'illégalité du permis de construire initial ; que, par suite, le moyen tiré de ce que le permis de construire délivré à M. X... en mars 1969 aurait été entaché d'une erreur manifeste d'appréciation était sans incidence sur la légalité du permis délivré le 17 septembre 2002 aux consorts X... et autorisant la reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit par un attentat en 1994 ; qu'en estimant néanmoins que ce moyen était propre à créer un doute sérieux quant à la légalité du permis du 17 septembre 2002, le juge des référés a commis une erreur de droit ».

    Dans cette affaire, le Commissaire du gouvernement STALH avait ainsi expliqué la solution que devait donc retenir la Haute Cour :

    « la délivrance d’un permis de construire constitue une autorisations d’urbanisme qui présente le caractère d’une décision créatrice de droits. Dès lors que cette autorisation est devenue définitive, les droits à construire qu’elle a sanctionnés deviennent intangibles et ne sauraient être remis en cause ni par l’autorité administrative, ni par un tiers, ni même par le juge, quand bien même la décision administrative serait-elle illégale. Il ne pourrait être dérogé par le législateur à ces principes essentiels que de manière expresse et formelle. En traitant de la reconstruction des bâtiments détruits par un sinistre et en usant de la formule de « bâtiments régulièrement édifiés », le législateur ne peut à notre avis être regardé comme ayant entendu déroger à ces principes. L’expression de « construction régulièrement édifiée » nous paraît avoir une signification claire en droit de l’urbanisme : elle vise les constructions édifiées conformément à un permis de construire ».

    Par voie de conséquence, dès lors qu’il n’a pas été annulé ou retiré et qu’il a été régulièrement exécuté, l’illégalité éventuelle du permis de construire en vertu duquel avait été édifié le bâtiment à reconstruire ne saurait être légalement opposée à demande d’autorisation présentée sur le fondement de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme, ni utilement reprochée à l’autorisation délivrée sur ce fondement (CE. 5 mars 2003, Nicolas Lepoutre, req. n°252.422).

    En l’espèce, le moyen présentait cependant une particularité puisque le permis de construire initial n’avait été délivré que par l’un des deux maires des communes sur le territoire desquelles était implanté de bâtiment.

    Cette spécificité n’a cependant eu aucune incidence dans cette affaire ; et c’est bien normal.

    En effet, le permis de construire délivré par un Maire sur un terrain ne relevant pas de son ressort géographique est « simplement » entaché d’incompétence territoriale mais n’en constitue donc pas pour autant un « acte inexistant » : il confère donc à son titulaire des droits acquis et à la construction en résultant une existence légale.

    Certes, dans le cas d’une demande ultérieure de reconstruction à l’identique cette situation à pour effet de placer l’autorité compétente devant le fait accompli et de la lier par jeu d’une décision qu’elle n’a pas prise. Il reste que :

    - le droit de reconstruire à l’identique constitue un régime dérogatoire procédant de considération pour l’essentiel étrangère à la police de l’urbanisme ;
    - la situation n’est pas différente s’agissante des constructions édifiées à une époque où aucune autorisation n’était exigible, lesquelles ont néanmoins une existence légale (CE. 15 mars 2006, Ministère de l’Equipement, req. n°266.238) ;
    - en toute hypothèse, les communes conservent la possibilité de s’opposer ou d’encadrer l’exercice de ce droit par leurs documents d’urbanisme.

    On voit donc mal pourquoi le fait qu’elle n’ait pas délivrer le permis de construire initial permettrait à une commune de s’opposer au droit de reconstruire à l’identique dès lors qu’elle n’a pas manifesté la volonté de le faire à travers son document d’urbanisme.

    En toute hypothèse, l’illégalité du permis de construire initial ne saurait donc être utilement excipée pour s’opposer à l’application de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme et, plus généralement, une construction dispose donc d’une existence légale dès lors qu’elle a été édifiée conformément à un permis de construire, quel que soit les vices dont celui-ci pouvait être entaché.

    Il faut toutefois précisé que si le permis de construire ayant autorisé le bâtiment initial n’est pas encore devenu définitif, celui-ci pourra faire l’objet d’un recours en annulation, y compris si ce recours a pour but de faire regarder le bâtiment comme n’ayant pas été régulièrement édifié au sens de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme et ce, afin de contester l’autorisation de reconstruire délivrée sur ce fondement (CE. 13 décembre 2006, M. et Mme Caitucoli, req. n°284.237).

    Mais en dehors de ce cas, les possibilités d’exciper l’illégalité du permis de construire initial nous apparaissent pour le moins limitées, pour ne pas dire nulles.

    On pourrait en effet s’interroger sur le cas où la construction initiale a été édifiée conformément à un permis de construire qui pour n’avoir été ni annulé ni retiré a cependant été obtenu par fraude puisqu’une autorisation obtenue dans ces conditions ne confère aucun droit acquis.

    Il reste que tant que cette fraude n’a pas été sanctionnée par l’administration ou par le juge, la fraude entachant le permis de construire initial ne saurait, selon nous, être opposé à une demande ou à une autorisation de reconstruire sur le fondement de l’article L.111-3 du Code de l’urbanisme.

    En effet, si elle ne confère pas de droit acquis, une autorisation obtenue par fraude n’en est pas pour autant totalement assimilable à un acte juridiquement inexistant et s’il est d’usage de présenter un permis de construire obtenue par fraude comme insusceptible de devenir définitif, il reste que ceci ne vaut que s’agissant de la possibilité subséquemment offerte à l’administration de le retirer à tout moment et, en d’autres termes, n’a en revanche aucune incidence sur les délais ouverts aux tiers pour le contester devant le juge administratif.

    Or, dès lors que le permis de construire est devenu définitif au regard du délai de recours des tiers, le requérant ne saurait utilement se prévaloir de son caractère frauduleux pour contester les autorisations ultérieures dont il constitue la base légale (à propos d’un « modificatif » : CAA. Marseille, 26 juin 2008, Association de Défense des Riverains du projet du Mas Belle-Garde, req. n°05MA02704).

    De ce fait, il ne semble pas qu’un recours dirigé à l’encontre d’une autorisation de reconstruire délivrée sur le fondement de l’article L.111-3 du code de l’urbanisme puisse utilement se borner à exciper du caractère frauduleux du permis de construire en vertu duquel a été édifié le bâtiment initial dès lors que ce permis n’a été ni annulé, ni retiré ; le requérant conservant en revanche la possibilité de solliciter le retrait de ce permis pour le cas échéant faire ensuite annuler la décision refusant de procéder à son retrait et conséquemment obtenir du juge qu’il enjoigne à l’autorité compétente de retirer le permis contesté.

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Veille jurisprudentielle n°33 : 31 décisions signalées

    Avant la rentrée, c’est notre « veille jurisprudentielle » qui fait son grand retour après plus de trois mois d’absence… Compte tenu du retard à rattraper, je me contenterai le plus souvent pour ce retour de citer le(s) considérant(s) des arrêts relevés.
    J’en profite également pour préciser que la finalité première de ces « veilles » n’est pas de signaler les grands arrêts rendus en la matière (NB : ils ne sont donc pas tous systématiquement mentionnés) mais tout au contraire de constituer une base de données composée d’arrêts souvent de moindre importance mais néanmoins utile à la pratique. Et bien entendu je reste « preneur » des jugements de TA que vous voudrez bien me communiquer.



    INTERPRETATION & APPLICATION DES NORMES :

    CAA. Nancy, 5 août 2010, Ministère de l’écologie, req. n°09NC01395

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet autorisé par le permis de construire du 14 mai 2008 consiste en l'édification d'une maison d'habitation d'une surface hors oeuvre nette de 134 m², comportant deux niveaux, dont un niveau en sous-sol, surmontée par une toiture-terrasse végétale, se présentant sous la forme d'un parallélépipède d'une longueur de 26 mètres et d'une largeur de 4,65 mètres ; que, compte tenu de ces caractéristiques architecturales très atypiques, ce projet est en totale rupture avec le bâti environnant, constitué essentiellement de maisons d'habitation de style traditionnel ; que, dans ces conditions, le maire de Heiligenberg a commis une erreur manifeste d'appréciation, au regard des dispositions précitées de l'article R. 111-21 du code de l'urbanisme, en autorisant la construction litigieuse »

    CAA. Nancy, 5 août 2010, M. André B, req. n°09NC01763
    « Considérant, en cinquième lieu, qu'aux termes de l'article UB 3, intitulé Conditions de desserte des terrains par les voies publiques ou privées et d'accès aux voies ouvertes au public , du plan local d'urbanisme de la commune de Woippy, dans sa rédaction, issue de la révision simplifiée du 9 février 2006, en vigueur à la date de l'arrêté du 15 juin 2006 attaqué : 1. Voirie. (...) Les voies nouvelles en impasse ouvertes à la circulation automobile doivent être aménagées dans leur partie terminale de façon à permettre aux véhicules de service de faire demi-tour. Elles ne doivent pas dépasser 50 mètres de longueur (...) ; que les requérants ne peuvent utilement soutenir que la voie de desserte interne du terrain d'assiette des constructions autorisées par le permis de construire en litige ne respecte pas les prescriptions des dispositions précitées, dès lors que celles-ci ne s'appliquent qu'aux voies d'accès au terrain de la construction et non aux voies situées à l'intérieur de ce terrain »

    CE. 19 juillet 2010, Assoc « Quartier du Haut de Choiseul », req. n°328.687
    « Considérant qu'il est énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement à laquelle le Préambule de la Constitution fait référence en vertu de la loi constitutionnelle du 1er mars 2005 que : Lorsque la réalisation d'un dommage, bien qu'incertaine en l'état des connaissances scientifiques, pourrait affecter de manière grave et irréversible l'environnement, les autorités publiques veillent, par application du principe de précaution et dans leurs domaines d'attributions, à la mise en oeuvre de procédures d'évaluation des risques et à l'adoption de mesures provisoires et proportionnées afin de parer à la réalisation du dommage ; que ces dernières dispositions qui n'appellent pas de dispositions législatives ou réglementaires en précisant les modalités de mise en oeuvre s'imposent aux pouvoirs publics et aux autorités administratives dans leurs domaines de compétence respectifs ; que, dès lors, en estimant que le principe de précaution tel qu'il est énoncé à l'article 5 de la Charte de l'environnement ne peut être pris en compte par l'autorité administrative lorsqu'elle se prononce sur l'octroi d'une autorisation délivrée en application de la législation sur l'urbanisme, le tribunal administratif d'Orléans a commis une erreur de droit ; que l'ASSOCIATION DU QUARTIER LES HAUTS DE CHOISEUL est, dès lors, fondée à demander l'annulation du jugement qu'elle attaque » (Mais bon, on l'avait deviné depuis le 16 juin précédent...)

    CAA. Marseille, 2 juillet 2010, Alain A., req. n°05MA03347
    « Considérant, en deuxième lieu, qu'ainsi qu'il vient d'être évoqué, le territoire de la commune de Beausoleil est prolongé au sud, sans solution de continuité, par celui de la principauté de Monaco où domine une architecture d'immeubles de grande hauteur et de tours ; qu'eu égard à cette particularité géographique, les auteurs du plan d'occupation des sols de Beausoleil, à qui il appartient de définir sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir les orientations et les choix d'aménagement de l'espace urbain, peuvent décider, sans erreur de droit et sans méconnaitre les dispositions de l'article L.123-1 du code de l'urbanisme relatif au champ d'application communal des plans locaux d'urbanisme, d'options et de dispositifs réglementaires adaptés aux particularités nées de la seule situation géographique de la commune, en tenant compte le cas échéant comme en l'espèce des spécificités de l'urbanisation d'un territoire voisin faisant partie d'un état étranger »

    CAA. Versailles, 10 juin 2010, Cne de Suresnes, req. n°08VE03991
    « Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article UD 7 du règlement du plan d'occupation des sols de la ville de Suresnes relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : (...) 7.2.1 - Pour les unités foncières dont la largeur de façade est inférieure ou égale à 20 mètres, les constructions peuvent s'implanter : Soit sur les limites séparatives (limites latérales et fonds de parcelle) si la façade sur la limite est aveugle ou ne comporte que des jours de souffrance. Soit en retrait de ces limites et conformément aux prescriptions de l'article 7.1 (...) ; que sont considérées comme façades au sens dudit règlement, selon son annexe 1, les parties de construction comportant des vues (telles que définies par l'article 677 du code civil) intégrées à des toitures ;
    Considérant que, par un arrêté du 26 octobre 2006, le maire de Suresnes a, notamment, autorisé Mme Hillairet-Sarrola à réaliser une extension d'une maison individuelle située sur un terrain sis 71, rue Paul Bert ; qu'il ressort des pièces du dossier que le projet d'extension litigieux prévoit la réalisation, au 1er étage, d'une terrasse donnant sur le fonds voisin appartenant à M. A ; qu'il sera accessible par une porte-fenêtre vitrée depuis le bureau mezzanine envisagé au même niveau ainsi que depuis une des chambres du bâtiment principal ; que l'extension projetée, dont la terrasse constitue un élément de construction indissociable, doit être implantée sur les limites séparatives latérales de la parcelle de Mme Hillairet-Sarrola ; que cette terrasse comporte des vues sur la parcelle de M. A et constitue une façade au sens de l'annexe 1 audit règlement du plan d'occupation des sols ; que l'extension dont s'agit méconnaît donc les dispositions précitées du paragraphe 7.2.1 de l'article UD 7 ; que la COMMUNE DE SURESNES n'est, par suite, pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Versailles a, par le jugement attaqué, annulé l'arrêté de son maire du 26 octobre 2006 en tant qu'il autorisait ladite extension »  


    PLU/POS :

    CE. 18 juin 2010, Ville de Paris, req. n°326.708
    « Considérant que si, eu égard à l'objet de ces dispositions, le règlement du plan local d'urbanisme ou, à défaut, les documents graphiques, doivent fixer des règles précises d'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques et aux limites séparatives, ces règles ne doivent pas nécessairement se traduire par un rapport quantitatif ; qu'ainsi, après avoir estimé à bon droit que les règles d'implantation par rapport aux voies, emprises publiques et limites séparatives ne peuvent demeurer abstraites, la cour administrative d'appel de Paris a commis une erreur de droit en jugeant que ces règles doivent, quelles que soient les circonstances locales, déterminer entre ces voies, emprises et limites et les constructions un rapport dont le respect puisse être concrètement apprécié et en annulant pour ce motif les règlements des zones UV et N du plan local d'urbanisme ; que dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens des pourvois, les articles 1er et 2 des arrêts attaqués doivent être annulés ;
    Considérant, en troisième lieu, que le règlement de la zone UV du plan local d'urbanisme prévoit, en son article UV6, que l'implantation de toute construction (...) doit permettre sa bonne insertion dans le paysage environnant ; que l'article UV7 permet de refuser l'implantation d'une construction en limite séparative si elle a pour effet de porter gravement atteinte aux conditions d'habitabilité d'un immeuble voisin ou à l'aspect du paysage urbain et prévoit que l'implantation de toute construction doit permettre son insertion harmonieuse dans le paysage environnant ; que les articles N6 et N7 du règlement de la zone N prévoient que l'implantation des constructions (...) doit respecter le milieu naturel et permettre leur insertion harmonieuse dans le site ; que ces dispositions, qui ne fixent aucune règle précise et se bornent à évoquer des objectifs généraux à atteindre, méconnaissent les dispositions des articles L. 123-1 et R. 123-9 du code de l'urbanisme ; que, cependant, cette illégalité n'entache que les articles UV6, UV7, N6 et N7, qui sont divisibles des autres dispositions du règlement ».

    CE. 26 mai 2010, Manuel A, req. n°320.780
    « Considérant que la délimitation, dans les documents graphiques d'un plan local d'urbanisme, au titre des orientations d'aménagement, d'une zone verte au sein d'une zone à urbaniser, qui ne peut être assimilée ni à la définition, en application de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme, d'une zone naturelle à protéger, ni à la fixation d'un emplacement réservé aux espaces verts en application du 8° du même article de ce code, ni au classement en espace boisé, au sens de l'article L. 130-1 précité du même code, ne suffit pas, par elle-même, à conférer à cette zone un caractère inconstructible »


    EMPLACEMENTS RESERVES :

    CAA. Lyon, 29 juin 2010, Monique A., req. n°08LY02349
    « Considérant, enfin, toutefois, qu'il ressort des pièces du dossier que la réalisation de places de stationnement sur le terrain des requérantes conduira à la destruction d'un mur de clôture coûteux, qui a été construit récemment par ces dernières, avec l'aide de la commune de Goncelin elle-même, laquelle a notamment participé au coût des travaux ; que cette commune n'indique pas pour quelles raisons un projet de stationnement public, qui n'aurait pu être envisagé avant la réalisation des travaux de construction du mur, serait désormais justifié sur ledit terrain ; qu'en revanche, Mmes A produisent un plan annoté, complété par des photographies, qui fait apparaître qu'aucune pénurie de stationnement n'existe dans le secteur ; que, dans les circonstances particulières de l'espèce, en instituant l'emplacement réservé n° 15 litigieux, le conseil municipal a entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation »



    DROIT DE PREEMPTION :

    CE. 16 juillet 2010, SCI Lacha, req. n°325.236
    « Considérant, en premier lieu, qu'en jugeant que la commune de Briançon justifiait d'un objectif d'intérêt général permettant de fonder légalement la préemption litigieuse, décidée en vue de la rétrocession du bien préempté à une entreprise, en se donnant comme but de permettre à cette entreprise de développer son activité, alors même que celle-ci n'était pas déterminante pour le maintien du niveau de l'activité salariée dans la commune, et après avoir relevé que l'augmentation de l'activité de la société dépendait notamment de la possibilité d'étendre ses installations, la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas commis d'erreur de droit ni d'erreur de qualification juridique ;

    Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que la cour n'a pas commis d'erreur de droit, entaché son arrêt d'une insuffisance de motivation ni dénaturé les pièces du dossier en ne prenant pas en compte, pour apprécier si la décision litigieuse était justifiée par un intérêt général suffisant, l'existence d'un projet de l'acquéreur évincé pouvant également concourir au maintien, à l'extension ou à l'accueil des activités économiques ».

    CE. 7 juillet 2010, Cne de Chateaudouble, req. n°331.412
    « Considérant que si l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme permet au titulaire du droit de préemption, lorsqu'une opération d'aménagement le justifie, d'exercer son droit de préemption urbain sur la fraction de l'unité foncière mise en vente qui est comprise dans une zone soumise à ce droit, et précise qu'en ce cas le propriétaire peut exiger du titulaire du droit de préemption qu'il se porte acquéreur de l'ensemble de l'unité foncière, il n'autorise pas le titulaire du droit de préemption à préempter ceux des éléments d'une unité foncière qui sont situés dans une zone où le droit de préemption ne peut pas s'exercer ; qu'il est constant qu'une des parcelles faisant l'objet de la décision de préemption du 6 juin 2003 est située en zone NC dans laquelle le droit de préemption de la commune ne peut pas s'exercer ; qu'une décision de préemption, qui porte sur une unité foncière unique, présente un caractère indivisible, nonobstant les possibilités de préemption partielle ouvertes par l'article L. 213-2-1 du code de l'urbanisme dans des conditions strictement définies »

    CAA. Lyon, 22 juin 2010, Guy A., req. n°09LY00361
    « Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la sauvegarde ou la mise en valeur des espaces naturels n'est pas au nombre des objets en vue desquels le droit de préemption peut être mis en oeuvre ; qu'il ressort des pièces du dossier que la préemption litigieuse a été exercée dans le but de louer à un agriculteur le terrain qui a fait l'objet de cette préemption, en vue de mettre en valeur le plateau de la Novaz, en lui conservant son environnement naturel ; que, par suite, en décidant, par la délibération attaquée, de préempter pour ce motif le terrain que M. A souhaitait acquérir, la commune du Planay a méconnu le champ d'application de la loi ; qu'il s'ensuit que, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête, M. A est fondé à soutenir que cette délibération est entachée d'illégalité »


    LOTISSEMENT & DIVISIONS FONCIERES :

    CAA. Nantes, 4 mai 2010, Cne de Belz, req. n°09NT01343

    Possibilité de régulariser une autorisation de lotir frappée de recours par un permis d’aménager modificatif.


    TRAVAUX SUR EXISTANT :

    CE. 23 juillet 2010, Patrick B., req. n°325.724

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, notamment du bail conclu le 20 juillet 1994 entre le requérant et la société Megève Chimie et de l'attestation produite devant le tribunal, que le niveau R+1 consistait à l'origine en une dépendance des locaux commerciaux situés au rez-de-chaussée ; que si une partie du niveau R+1 a été utilisée comme bureaux depuis 1999, les travaux faisant l'objet de la déclaration consistent en l'ouverture de cinq fenêtres et quatre velux en partie haute ; qu'ils créent ainsi un éclairage naturel des locaux permettant une utilisation autonome à usage de bureaux de la totalité du niveau ; que, dès lors que ces travaux entrainent ainsi un changement de destination, fût-il partiel, ils ne rentrent pas dans le champ de la déclaration de travaux et nécessitent, en application des dispositions précitées du code de l'urbanisme, l'obtention d'un permis de construire »

    CE. 8 juin 2010, SARL IMMO Concept, req. n°317.469
    « Considérant qu'en jugeant, après avoir relevé que l'interdiction de toute nouvelle implantation de bureaux ou de services en rez-de-chaussée avenue de Longueil n'était ni générale ni absolue et qu'elle était destinée à assurer l'objectif de protection des commerces traditionnels dans le centre ville, figurant dans le rapport de présentation, que cette interdiction ne portait pas une atteinte illégale à la liberté du commerce et de l'industrie ou au droit de propriété, les premiers juges n'ont pas commis d'erreur de droit ;
    Considérant, en second lieu, que les dispositions précitées du plan d'occupation des sols de Maisons-Laffitte interdisant toute nouvelle implantation de bureaux ou de services en rez-de-chaussée avenue de Longueil ne visent pas seulement les constructions nouvelles, mais également tout changement d'affectation conduisant à la création de bureaux ou de services ; que, dès lors, en jugeant que les travaux objet de la déclaration de la SARL IMMO-CONCEPT qui prévoyaient l'extension d'une agence immobilière située au 30, avenue de Longueil, en lui adjoignant le local commercial situé au rez-de-chaussée du n°32 de cette voie, exploité précédemment comme bijouterie, entraient dans le champ d'application des dispositions de l'article UA 2-4 du plan d'occupation des sols de Maisons-Laffitte, le tribunal n'a ni entaché son jugement d'erreur de droit ni commis d'erreur de qualification juridique »


    RECONSTRUCTION A L’IDENTIQUE :

    CAA. Marseille, 7 mai 2010, Cne de Tomino, req. n°08MA01778

    « Considérant, d'une part, que les requérantes excipent de l'illégalité du permis de construire délivré à M. A le 23 novembre 1968 par le maire de Tomino en faisant valoir que la partie du bâtiment dont la construction était projetée sur le territoire de la commune de Meria n'avait pas été autorisée par le maire de cette commune ; que, toutefois, une décision emportant droit de reconstruire un bâtiment, sur le fondement de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, ne peut utilement être contestée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision initiale créatrice d'un droit de construire dès lors que cette décision, comme en l'espèce, n'a été ni retirée par l'administration ni annulée par le juge administratif ; que, par suite et, en tout état de cause, le moyen est inopérant et ne peut qu'être écarté ;
    Considérant, d'autre part, qu'aux termes de l'article L. 421-5 du code de l'urbanisme : Lorsque, compte tenu de la destination de la construction projetée, des travaux portant sur les réseaux publics de distribution d'eau, d'assainissement ou de distribution d'électricité sont nécessaires pour assurer la desserte de ladite construction, le permis de construire ne peut être accordé si l'autorité qui le délivre n'est pas en mesure d'indiquer dans quel délai et par quelle collectivité publique ou par quel concessionnaire de service public lesdits travaux doivent être exécutés. ; que ces dispositions ne peuvent faire obstacle au régime dérogatoire du droit à reconstruire un bâtiment détruit par un sinistre prévu par l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme ».


    AUTORISATIONS D’URBANISME :

    CE. 5 juillet 2010, Jérôme A., req. n°334.778

    Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 423-1 du code de l'urbanisme : Les demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir et les déclarations préalables sont adressées par pli recommandé avec demande d'avis de réception ou déposées à la mairie de la commune dans laquelle les travaux sont envisagés : / a) Soit par le ou les propriétaires du ou des terrains, leur mandataire ou par une ou plusieurs personnes attestant être autorisées par eux à exécuter les travaux (...) ; qu'aux termes du dernier alinéa de l'article R. 431-5 du même code : La demande comporte également l'attestation du ou des demandeurs qu'ils remplissent les conditions définies à l'article R. 423-1 pour déposer une demande de permis ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que la SAS Wilson Nivel a attesté, dans sa demande, satisfaire aux conditions lui permettant de présenter la demande de permis de construire et a, au surplus, produit le procès-verbal de l'assemblée générale des copropriétaires du 23 mai 2008, qui faisait apparaître que celle-ci s'était prononcée sur le projet au vu de documents comportant l'état actuel et l'état projeté du bâtiment ; que, dans ces conditions, eu égard à son office, le juge des référés n'a commis aucune erreur de droit et n'a pas dénaturé les pièces du dossier en relevant que le moyen tiré du défaut de qualité du demandeur du permis de construire n'était pas de nature, en l'état de l'instruction, à faire naître un doute sérieux sur la légalité de la décision attaquée

    CAA. Lyon, 29 juin 2010, Cne de Clichy, req. n°09LY00597
    Considérant que, par décision en date du 14 avril 2006, le maire de la COMMUNE DE VICHY a opposé un premier refus à la demande de permis de construire déposée par la société Immofrais en vue de la création d'une surface commerciale Allée des Ailes, avant de rapporter cette décision ; qu'il a opposé un nouveau refus, par une décision en date du 27 septembre 2006, se fondant notamment sur les risques pour la circulation générale et la sécurité des usagers du projet ; que cette décision a été annulée par le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand par un jugement en date du 22 mai 2007, confirmé par un arrêt de la Cour administrative d'appel de Lyon en date du 11 décembre 2007 ; que par une troisième décision en date du 19 novembre 2007, la commune a réitéré son refus au motif, que le carrefour giratoire d'accès prévu par le demandeur pour desservir son projet n'est pas compatible avec la création d'un autre giratoire situé à moins de 160 mètres au sud, dont la réalisation est prévue par le conseil général de l'Allier dans le cadre du réaménagement des accès aux équipements de ce secteur ... [que] dès lors ... la demande de permis déposée par le demandeur ne permet pas d'assurer dans de bonnes conditions, notamment de sécurité, l'accès à la surface commerciale projetée. ;
    Considérant qu'un refus de permis de construire ne peut être fondé sur les conditions générales de la circulation dans le secteur, dès lors que les modalités selon lesquelles les constructions envisagées sont directement desservies apparaissent suffisantes ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment de l'avis en date du 24 mars 2006 de la direction départementale de l'équipement, que l'accès du projet à la route départementale permet une desserte de l'opération dans les meilleures conditions de sécurité ; que, dès lors, le maire, ne pouvait refuser le permis en se fondant sur un projet au surplus hypothétique de réaménagement des équipements du secteur dans lequel est implanté le terrain d'assiette du projet ;
    Considérant, en troisième lieu, que le refus antérieur de délivrance de permis de construire pour le même projet, annulé par le Tribunal administratif de Clermont-Ferrand, confirmé par la cour administrative d'appel, était fondé sur une motivation similaire à celle de la décision attaquée ; qu'ainsi cette décision fait obstacle à l'autorité de la chose jugée, ce qui doit être assimilé, dans les circonstances de l'espèce à un détournement de pouvoir »

    CAA. Nancy, 10 juin 2010, Cne de Besançon, req. n°09NC01028
    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme alors en vigueur : Les contributions aux dépenses d'équipements publics prévus au 2° de l'article L. 332-6 sont les suivantes (...)2° (...)e) Les cessions gratuites de terrains destinés à être affectés à certains usages publics qui, dans la limite de 10 % de la superficie du terrain auquel s'applique la demande, peuvent être exigées des bénéficiaires d'autorisations portant sur la création de nouveaux bâtiments ou de nouvelles surfaces construites ;(...) ; que ces dispositions n'ouvrent à l'administration qu'une faculté de mettre à la charge du pétitionnaire une cession gratuite de terrain dont elle n'est pas tenue de faire usage ;
    Considérant, en l'espèce, que M. A a déposé le 29 mai 2007 une demande de permis de construire une maison d'habitation ; que par un courrier en date du 22 juin 2007, il lui a été notifié le délai d'instruction de sa demande qui devait s'achever le 29 juillet 2007, date à laquelle, faute de décision , il était réputé être bénéficiaire d'un permis de construire tacite ; qu'il est constant qu'à l'issue du délai d'instruction de cette demande, un permis de construire tacite est né le 29 juillet 2007 dépourvu par définition de toute contribution ; que par un arrêté en date du 14 août 2007 le maire de la COMMUNE DE BESANCON a accordé à M. A le permis de construire sollicité en l'assortissant cependant de prescriptions dont la cession gratuite de 10 % du terrain d'assiette du projet ; que cette décision, en tant qu'elle porte cession gratuite d'une partie du terrain, doit être regardée comme ayant rapporté la décision implicite du maire en date du 29 juillet 2007 de ne pas soumettre le bénéficiaire du permis à cette contribution ; que cependant, le permis de construire de M. A pouvait être légalement délivré sans qu'il soit assorti d'une obligation de cession gratuite, celle-ci étant, comme il a été dit ci-dessus, facultative ; que par suite, le maire de la COMMUNE DE BESANCON ne pouvait, par l'arrêté du 14 août 2007, procéder au retrait de la décision du 29 juillet 2007, créatrice de droits, qui n'était entachée d'aucune illégalité en ne comportant pas cette obligation de cession »

    CAA. Lyon, 25 mai 2010, Cne d’Amberieu-en-Bugey, req. n° 08LY02410
    « Considérant que, contrairement à ce que soutient la commune, pour obtenir la surface hors oeuvre nette, aucune déduction ne peut être effectuée en application des dispositions précitées de l'article R. 112-2 du code de l'urbanisme, le projet, qui consiste à construire 22 garages destinés à la location, ne pouvant, par suite, être regardé comme comportant des surfaces aménagées en vue du stationnement des véhicules au sens de ces dispositions, qui ne s'appliquent que dans l'hypothèse d'un stationnement présentant un caractère accessoire, et non, comme en l'espèce, dans l'hypothèse d'un usage professionnel ; qu'ainsi, la surface hors oeuvre nette excédant 170 m², le projet ne peut être dispensé du recours à un architecte ; que, par suite, la condition fixée par le c) du B de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme n'est pas remplie ».

    CAA. Nancy, 29 avril 2010, GNC Hloding, req. n°08NC01854
    « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 421-1 du code de l'urbanisme, un permis de construire est exigé pour les travaux exécutés sur les constructions existantes, lorsqu'ils ont pour effet d'en changer la destination, de modifier leur aspect extérieur ou leur volume ou de créer des niveaux supplémentaires (...) et qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du même code : La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain, soit par une personne ayant qualité pour bénéficier de l'expropriation dudit terrain pour cause d'utilité publique. (...) ; qu'il ressort des pièces du dossier que, par l'effet d'un contrat de vente en l'état futur d'achèvement conclu le 30 juin 2004 entre la société GNC HOLDING et la SCI Saint Jean, cette dernière a immédiatement acquis la propriété d'un terrain, cadastré section 8, n° 32, sis au parc Bisanne, route nationale n° 57, sur le territoire de la commune de Jouy-aux-Arches, ainsi que, au fur et à mesure de sa construction, la propriété d'un bâtiment, dénommé bâtiment 1 , à usage d'activités et de bureaux, édifié par la société GNC HOLDING en vertu du permis de construire initial qui lui a été délivré le 29 décembre 2003 et de deux permis modificatifs ultérieurs ; qu'il ressort d'une attestation établie le 28 juin 2004 par l'architecte chargé de la construction de ce bâtiment qu'à cette date les travaux de clos et de couvert du bâtiment en cause étaient entièrement achevés ; que la circonstance que les travaux autorisés par le permis de construire dont bénéficiait la société GNC HOLDING n'avaient pas fait l'objet de la déclaration prévue par l'article R. 460-1 du code de l'urbanisme attestant leur achèvement ne faisait pas obstacle à ce que la SCI Saint Jean puisse bénéficier, le 10 février 2005, en sa qualité de propriétaire de la construction existante, d'un nouveau permis de construire l'autorisant à changer la destination de ce bâtiment et à en augmenter la surface, sans qu'elle ait à obtenir l'accord de la société GNC HOLDING dès lors que la délivrance de ce nouveau permis à la SCI Saint Jean ne peut être regardée comme comportant un transfert de tout ou partie du permis précédemment délivré à la société GNC HOLDING »


    SURSIS A STATUER :

    CE. 16 juillet 2010, SARL FRANCIMO, req. n°338.860

    « Considérant qu'il résulte du rapprochement des dispositions rappelées plus haut que si l'article L. 600-2 du code de l'urbanisme ne fait pas obstacle, par lui-même, à ce que la demande de permis de construire confirmée par le pétitionnaire dans les conditions qu'il prévoit fasse l'objet du sursis à statuer prévu par l'article L. 111-7 du même code, le prononcé de ce sursis ne peut être fondé, dans une telle hypothèse, sur la circonstance que la réalisation du projet de construction litigieux serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution d'un plan local d'urbanisme intervenu postérieurement à la date de la décision de refus annulée, dès lors que cette circonstance, qui repose sur l'anticipation de l'effet que les règles futures du plan local d'urbanisme auront sur l'autorisation demandée, ou celle-ci sur leur mise en oeuvre, ne pourrait motiver un nouveau refus ou l'édiction de prescriptions spéciales portant sur le permis demandé sans méconnaître les dispositions de l'article L. 600-2 »


    FISCALITE :

    CE. 30 juillet 2010, Ministère de l’écologie, req. n°312.204

    « Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 520-2 du code de l'urbanisme, éclairées par les travaux préparatoires de la loi du 3 décembre 1982 portant réforme de la redevance pour création de locaux à usage de bureaux et à usage industriel en région d'Ile-de-France, qu'en prévoyant que l'avis de mise en recouvrement doit être émis dans les deux ans qui suivent la délivrance du permis de construire, le dépôt des déclarations qu'il mentionne ou, à défaut, le début des travaux, le législateur n'a pas entendu viser les cas dans lesquels des locaux à usage de bureaux ou des locaux de recherche sont construits ou des locaux précédemment affectés à un autre usage sont transformés en de tels locaux en méconnaissance des dispositions imposant l'obtention d'un permis de construire ou le dépôt d'une déclaration, mais seulement les cas dans lesquels aucun texte ne requiert l'obtention d'un tel permis ou le dépôt d'une telle déclaration ; que, dans l'hypothèse d'une construction ou d'une transformation en infraction aux dispositions relatives au permis de construire ou aux déclarations exigibles, seule trouve à s'appliquer la prescription prévue par les dispositions de l'article L. 186 du livre des procédures fiscales, qui court à compter de l'achèvement des travaux ou des aménagements exécutés sans autorisation ou sans déclaration en vue de la construction de locaux à usage de bureaux ou de locaux de recherche ou de la transformation en de tels locaux, fait générateur de l'imposition ;
    Considérant par suite qu'en jugeant qu'il résultait de l'article L. 520-2 du code de l'urbanisme que l'action en recouvrement de la redevance pour la création de locaux à usage de bureaux en Ile-de-France se prescrivait, à défaut de délivrance d'un permis de construire ou de dépôt de l'une des déclarations prévues par les articles L. 520-9 et R. 422-3 du code de l'urbanisme, dans les deux ans qui suivaient le début des travaux, même dans l'hypothèse où le redevable se serait illégalement soustrait à l'obligation de demander un permis de construire ou de déposer l'une des déclarations mentionnées ci-dessus, le tribunal administratif de Versailles a entaché son jugement d'une erreur de droit ; que ce jugement doit, dès lors, être annulé ».


    CONTENTIEUX :

    CAA. Bordeaux, 29 juillet 2010, S.C.E.A, req. n°10BX00154

    L’annulation partielle d’un permis de construire fait partiellement revivre le permis précédemment accordé pour le même projet

    CE. 7 juillet 2010, EARL des Noels, req. n°311.477
    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la décision attaquée, qui impose à l'EARL DES NOELS de verser à la commune de Dosches une participation financière pour la réalisation des travaux de viabilité et d'équipement propres à la construction autorisée, trouve son fondement légal dans les dispositions de l'article L. 332-15 du code de l'urbanisme ; qu'en jugeant que ces dispositions peuvent, à la demande de la commune, être substituées à celles de l'article L. 332-8 du même code qui concernent la réalisation d'équipements publics exceptionnels nécessitées par la construction envisagée, la cour administrative d'appel de Nancy n'a pas commis d'erreur de droit dès lors, en premier lieu, que la délivrance du permis de construire est subordonnée au versement de participations financières pour l'aménagement du chemin d'accès au nouveau bâtiment et sa desserte en électricité, en deuxième lieu, que cette substitution de base légale n'a pour effet de priver l'intéressé d'aucune garantie et, en troisième lieu, que l'administration dispose du même pouvoir d'appréciation pour appliquer l'une ou l'autre de ces deux dispositions ».

    CE. 1er juillet 2010, Centre hospitalier de Menton, req. n°330.702
    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis au juge des référés que le panneau d'affichage du permis de construire litigieux, mis en place le 31 juillet 2008, ne comportait pas la mention prévue par l'article A. 424-17 du code de l'urbanisme mais uniquement la mention tout recours doit être exercé dans le délai fixé par l'article R. 490-7 du code de l'urbanisme ; qu'en jugeant que cette circonstance n'était pas de nature à faire obstacle au déclenchement du délai de recours contentieux à l'égard du requérant, alors que l'article R. 490-7, qui n'était alors plus en vigueur, fixait de façon différente le point de départ du délai de recours contentieux, le juge des référés a commis une erreur de droit ; que, dès lors le CENTRE HOSPITALIER DE MENTON - LA PALMOSA est fondé à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée ».

    CE. 30 juin 2010, SARL Château d’Epinay, avis n°334.747
    « Un pétitionnaire n'est pas recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre une décision de refus de permis de construire faisant suite à un avis négatif de l'architecte des Bâtiments de France sur cette demande de permis, s'il n'a pas, préalablement, saisi le préfet de région d'une contestation de cet avis, selon la procédure spécifique prévue à l'article R. 421-38-4 (devenu l'article R. 424-14) du code de l'urbanisme. La notification de la décision de refus de permis de construire n'est toutefois de nature à faire courir le délai de deux mois que ces dernières dispositions impartissent au pétitionnaire pour saisir le préfet de région qu'à la condition que l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, comme les voies et délais de recours ouverts à son encontre, aient été portés à sa connaissance. Dans l'hypothèse où le maire ou l'autorité compétente pour délivrer le permis ont eux-mêmes contesté l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, comme lorsque le ministre a usé du pouvoir d'évocation qui lui est attribué par les dispositions susmentionnées, le pétitionnaire est dispensé de former lui-même un recours préalable obligatoire pour être recevable à introduire un recours à l'encontre de la décision prise sur le fondement de cet avis »

    CAA. Bordeaux, 11 mai 2010, Suzanne A., req. n°09BX02058
    « Considérant que la mise en demeure adressée par le maire de Beaumont de Lomagne à Mme A d'avoir à démolir une véranda qu'elle aurait irrégulièrement édifiée ne peut se rattacher à aucun pouvoir du maire, et comporte une injonction ; qu'elle présente ainsi le caractère d'une décision faisant grief ; que le maire, qui ne tenait d'aucun texte le pouvoir d'adresser à Mme A la mise en demeure litigieuse, a ainsi entaché sa décision d'incompétence ; que Mme A est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande comme dirigée contre un acte insusceptible de recours, et à demander l'annulation tant de l'ordonnance attaquée que de la décision litigieuse »


    QUESTION PRIORITAIRE DE CONSTITUTIONNALITE :

    CE. 16 juillet 2010, SCI La Saulaie, req. n°334.665

    « Considérant que la SCI LA SAULAIE soutient que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme est contraire au droit de propriété énoncé aux articles 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 et au principe constitutionnel d'égalité devant les charges publiques ; que, toutefois, d'une part, le Conseil constitutionnel a eu l'occasion de faire à plusieurs reprises application de ces dispositions à valeur constitutionnelle ; que, d'autre part, l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme, qui ne pose pas un principe général de non indemnisation des servitudes d'urbanisme mais l'assortit expressément de deux exceptions touchant aux droits acquis par les propriétaires et à la modification de l'état antérieur des lieux et qui ne saurait avoir ni pour objet ni pour effet, ainsi que l'a jugé le Conseil d'Etat statuant au contentieux dans sa décision du 3 juillet 1998 n° 158592, de faire obstacle à ce que le propriétaire dont le bien est frappé d'une servitude prétende à une indemnisation dans le cas exceptionnel où il résulte de l'ensemble des conditions et circonstances dans lesquelles la servitude a été instituée et mise en oeuvre, ainsi que de son contenu, que ce propriétaire supporte une charge spéciale et exorbitante, hors de proportion avec l'objectif d'intérêt général poursuivi, n'a, par conséquent, pour effet ni de priver le propriétaire, dont le bien serait frappé d'une telle servitude, de la propriété de son bien, ni de porter à cette propriété une atteinte d'une gravité telle que le sens et la portée de ce droit s'en trouvent dénaturés, ni d'exclure tout droit à réparation du préjudice résultant d'une telle servitude ; que par suite, la question soulevée n'est pas nouvelle et ne présente pas un caractère sérieux ; qu'ainsi, sans qu'il soit besoin de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée, le moyen tiré de ce que l'article L. 160-5 du code de l'urbanisme porte atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution doit être écarté »

    CE. 9 juillet 2010, M & Mme A., req. n°338.977
    « Considérant que l'article L. 318-3 du code de l'urbanisme dispose que : La propriété des voies privées ouvertes à la circulation publique dans des ensembles d'habitations peut, après enquête publique, être transférée d'office sans indemnité dans le domaine public de la commune sur le territoire de laquelle ces voies sont situées. / La décision de l'autorité administrative portant transfert vaut classement dans le domaine public et éteint, par elle-même et à sa date, tous droits réels et personnels existant sur les biens transférés. / Cette décision est prise par délibération du conseil municipal. Si un propriétaire intéressé a fait connaître son opposition, cette décision est prise par arrêté du représentant de l'Etat dans le département, à la demande de la commune (...) ;
    Considérant que ces dispositions, qui permettent à l'autorité administrative de transférer d'office la propriété de voies privées ouvertes à la circulation générale et situées dans des ensembles d'habilitation afin de les incorporer dans le domaine public communal, sans indemnisation préalable de leur propriétaire, sont applicables au litige, au sens du 1° de l'article 23-2 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 ; qu'elles n'ont pas déjà été déclarées conformes à la Constitution par le Conseil constitutionnel ; que le moyen tiré de ce qu'en ne prévoyant pas une juste et préalable indemnisation des propriétaires, elles portent atteinte au droit de propriété garanti par l'article 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, à laquelle renvoie le Préambule de la Constitution, soulève une question présentant un caractère sérieux ; qu'ainsi, il y a lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée »


    ET POUR RIRE

    CAA. Lyon, 12 juillet 2010, Assoc « SOS Paul Mistral », req. n°09LY01860

    Il s’agit de l’arrêt intervenant suite au renvoi opéré par le Conseil d’Etat au terme de l’arrêt « Ville de Grenoble ». Et là, comment dirais-je, quelque chose à dû m’échapper…Il n’est même plus expressément question du fractionnement du projet en deux permis de construire. Par voie de conséquence, on cherche en vain les critères dégagés par le Conseil d’Etat dans l’arrêt précité.
    Surtout, on sait que le Conseil d’Etat avait annulé l’arrête d’appel du seul fait qu’il avait prétendument sanctionné le permis attaqué en raison du fractionnement du projet dont il procédait ; ce qui n’était aucunement le cas puisque la Cour avait sanctionné ce fractionnement en raison de son incidence sur le déroulement et l’objet de l’enquête publique. La copie revue et corrigé par la Cour me laisse pantois : « Considérant, en quatrième lieu, que l'enquête publique était préalable à la délivrance à la communauté d'agglomération du permis de construire un stade et non à celle du permis de construire un parking public réalisé par la commune sous celui-ci ; que dès lors, l'appréciation sommaire des dépenses prévues par l'article 6 du décret du 23 avril 1985 n'avait pas à inclure les coûts de réalisation du parking alors même que les deux projets étaient techniquement liés »…
    Nous voilà bien avancés.

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés