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  • Sur l’obligation de recourir à un architecte lorsque le projet porte sur plusieurs constructions

    Le maire peu, sans commettre d'erreur de droit, estimer que la demande de permis de construire est irrecevable dès lors que le projet architectural comprenant deux maisons d'habitation, d'une surface totale de plancher hors oeuvre nette de 252 mètres carrés, n'a pas été établi par un architecte.

    CAA. Lyon, 7 avril 2009, Gardas, req. n°
    06LY02162.pdf  (138e note)



    Voici une décision intéressante – laquelle n’a pas été diffusée sur Légifrance – mais néanmoins curieuse, selon nous, s’agissant de l’application de l’ancien article R.421-1-2 (a) du Code de l’urbanisme aujourd’hui repris par l’article R.431-2 (a) en ce qu’il dispose que : « Conformément à l'article 1er du décret n° 77-190 du 3 mars 1977, ne sont toutefois pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques ou les exploitations agricoles à responsabilité limitée à associé unique qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : une construction à usage autre qu'agricole dont la surface de plancher hors œuvre nette n'excède pas cent soixante-dix mètres carrés ».

    2 maisons.jpgDans cette affaire, le pétitionnaire avait présenté une demande de permis de construire portant sur deux maisons développant une SHON totale de 252 mètres, laquelle devait être rejeté au motif, notamment, que le projet architectural n’avait pas été établi par un architecte comme le prévoyait pas principe, mais sous réserve de l’exception précitée notamment, l’ancien article L.421-2 et le prévoit encore l’actuel article L.431-2 du Code de l’urbanisme. Mais confirmant le jugement de première instance sur ce point, la Cour administrative d’appel de Lyon devait donc valider ce refus de permis de construire et ce, au motif suivant. :

    « Considérant qu’il est constant que la demande de permis de construire, déposée le 20 juillet 2004, porte sur un projet architectural comprenant deux maisons d’habitation, d’une surface totale de plancher hors œuvre nette de 252 mètres carrés ; qu’il n’est pas contesté que ce projet n’a pas été établi par un architecte ;
    Considérant que les dispositions précitées de l’article L. 421-2 du code de l’urbanisme font référence au projet architectural dans son ensemble, sans apporter de distinctions sur le nombre d’entités à construire ; que dès lors la surface hors œuvre nette (SHON) à prendre en compte pour l’application des dispositions de l’article R.421-12 du code de l’urbanisme est la SHON totale du projet de construction figurant dans la demande, sans qu’il y ait lieu de se préoccuper du nombre d’entités à construire dans le projet ; que, dès lors, Madame GARDAS ne pouvait se prévaloir de l’exception prévue à l’article R.421-1-2 du code de l’urbanisme et l’intervention d’un architecte était obligatoire ; que, par suite, le maire de Desaignes a pu sans commettre d’erreur de droit, estimer que la demande déposée par les époux GARDAS n’entrait pas dans le champ d’application de la dérogation prévue au a) de l’article R.421-1-2 du code de l’urbanisme et, en conséquence, que la demande ne pouvait être instruite au motif qu’elle était irrecevable, nonobstant la circonstance que le dossier était complet au sens de l’article R.421-2 du code de l’urbanisme ;
    Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Madame GARDAS n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que le Tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant l’annulation de la décision en date du 25 août 2004
    ».


    En résumé, la Cour administrative de Lyon a donc considéré que le projet architectural de la demande devait être établi par un architecte dès lors que la SHON du projet excédait le seuil de 170 mètres carrés fixé par l’ancien article R.421-1-2 et ce, alors même que le projet portait sur deux bâtiments distincts.

    Il reste que, selon nous, cette décision est quelque peu sujette à caution.

    En premier lieu, la Cour s’est fondée sur la circonstance que l’ancien article L.421-2 du Code de l’urbanisme n’apportait pas « de distinctions sur le nombre d’entités à construire ». Il reste que cet article disposait que « ne sont pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier, pour elles-mêmes, une construction de faible importance dont les caractéristiques, et notamment la surface maximale de plancher, sont déterminées par décret en conseil d'Etat » ; l’article R.421-1-2 disposant lui-même que : « conformément à l'article 1er du décret n° 77-190 du 3 mars 1977, ne sont toutefois pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques ou les exploitations agricoles à responsabilité limitée à associé unique qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : une construction à usage autre qu'agricole dont la surface de plancher hors œuvre nette n'excède pas cent soixante-dix mètres carrés ».

    Mais il est vrai que rare sont les cas où le Code de l’urbanisme envisage le cas où la demande porte sur plusieurs constructions.

    En deuxième lieu, force est de constater que la Cour s’est bornée à prendre en compte la SHON globale du projet sans distinguer celle de chacune des constructions projetées alors qu’à titre d’exemple, le Conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article R.421-1-1 du code de l'urbanisme : "Conformément à l'article 1er du décret n° 77-190 du 3 mars 1977 du 3 mars 1977 modifié, ne sont pas tenues de recourir à un architecte pour établir le projet architectural à joindre à la demande d'autorisation de construire, les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : a une construction à usage autre qu'agricole dont la surface de plancher hors oeuvre nette n'excède pas 170 mètres carrés" ; que dans son recours dirigé contre le jugement en date du 17 avril 1985 par lequel le tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du commissaire de la République du département du Var en date du 19 juillet 1983 refusant à M. Guy X... un permis de construire un logement, une niellerie et une bergerie à La Roquebrussane Var , le ministre de l'urbanisme se borne à soutenir que le permis ne pouvait être accordé dès lors que le projet n'était pas présenté par un architecte, alors que la surface hors oeuvre nette affectée à l'habitation était au minimum de 240m2 ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le projet présenté comportait la construction de deux bâtiments distincts, l'un à usage d'habitation et à usage agricole, l'autre à usage de bergerie ; que la partie non affectée à l'usage agricole du bâtiment d'habitation n'excèdait pas 170m2
    ; qu'il suit de là que le MINISTRE DE L'URBANISME, DU LOGEMENT ET DES TRANSPORTS n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé le refus de permis de construire ensemble le rejet du recours gracieux formé par M. X...
    » (CE. 29 avril 1987, Lemoult, req. n°69.743).


    Il reste que dans cette affaire les deux bâtiments en cause présentaient une affectation différente et s’en trouvaient de ce fait assujettis à des dispositions et des seuils distincts.

    En troisième lieu, le critère déterminant de la solution retenue par la Cour tient à ce que les deux constructions projetées relevaient d’une seule et même demande de permis de construire. Et il est vrai que le Conseil d’Etat jugé que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme, dans la rédaction que lui a donnée le décret n° 77-739 du 7 juillet 1977 en vigueur à la date de l'arrêté attaqué : "Conformément à l'article 1er du décret n° 77-190 du 3 mars 1977 modifié, ne sont pas tenues de recourir à un architecte pour établir le projet architectural à joindre à la demande d'autorisation de construire, les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : ...b) une construction à usage agricole dont la surface de plancher hors-oeuvre brute n'excède pas 800 mètres carrés ...." ; Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'autorisation contestée est relative à la construction d'un bâtiment à usage de poulailler d'une surface de 785 m2 ; que, dès lors que ce bâtiment était distinct des autres bâtiments à même usage édifiés sur le même terrain, la surface de plancher à prendre en compte pour l'application des dispositions précitées était uniquement celle du bâtiment pour lequel l'autorisation de construire était sollicitée ; que cette surface étant inférieure au seuil fixé par lesdites dispositions, le moyen ne saurait être accueilli » (CE. 23 mars 1990, Montagne, req. n°62.643. Voir également : CAA. Nantes, Le Jeune, req. n°93NT00270) ;

    induisant ainsi que, s’il n’y a pas lieu de prendre en compte ce qui a déjà été fait sur le même terrain, c’est néanmoins l’ensemble la SHON du projet objet de la demande qui doit effectivement être pris en compte.

    En outre, l’ancien article L.421-2 comme le nouvel article L.431-2 du Code de l’urbanisme assimilent création et modification d’une construction. Or, à ce titre et s’agissant de travaux d’extension, le Conseil a jugé que l’obligation de recourir à un architecte s’impose dès lors que les travaux projetés ont pour effet de porter la SHON l’immeuble au dessus de ce seuil, y compris si le bâtiment existant avant travaux d’extension développe une SHON inférieure à 170 mètres carrés et alors même que les travaux d’extension projetés emportent une création de SHON nouvelle inférieure à ce seuil (CE. 19 janvier 1994, Cne de Lormont, req. n°118.334. Voir également : CE. 30 mai 2007, M. X…, req. n°292.741).

    Il reste que, tout d’abord, dans l’arrêt précité (« Montagne ») le Conseil d’Etat a néanmoins souligné que le bâtiment objet de la demande était distinct de ceux déjà présents sur le terrain qu’ensuite, le régime applicable à des travaux d’extension n’est pas nécessairement transposable au cas d’espèce puisqu’il se rapporte à une même construction et qu’enfin, le Conseil d’Etat a pu juger que :

    « Considérant qu'en vertu de l'article L. 421-2 du code de l'urbanisme : "Ne sont pas tenues de recourir à un architecte pour établir le projet architectural faisant l'objet de la demande de permis de construire les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes une construction de faible importance dont les caractéristiques, et notamment la surface maximale de plancher, sont déterminées par décret en Conseil d'Etat ; qu'aux termes de l'article R. 421-1-2 du même code : "Conformément à l'article 1er du décret n° 77-190 du 3 mars 1977 modifié, ne sont pas tenus de recourir à un architecte ... les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier pour elles-mêmes : a) une construction à usage autre qu'agricole dont la surface de plancher hors oeuvre nette n'excède pas 170 mètres carrés" ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire présentée par M. X... portait sur la modification d'une partie d'un bâtiment d'habitation sis au 2 bis et au ..., en vue d'édifier au n° 4, après démolition de 120 m2, une partie neuve de 168 m2 ; qu'il n'est pas contesté que l'immeuble sis au 2 bis et au ... couvre une superficie de 335 m2 ; que la circonstance que l'extension projetée par la demande de permis de construire ne portait que sur la partie de l'immeuble d'habitation sis au n° 4, alors que les deux bâtiments ne sont pas distincts et constituent ensemble un bâtiment d'habitation, ne permet pas à elle seule d'avoir le bénéfice de la dérogation prévue par les textes précités à l'obligation de recourir à un architecte ; qu'ainsi c'est par une exacte inexacte application desdites dispositions que le tribunal administratif de Bordeaux a regardé la demande présentée par M. X... comme entrant dans le champ d'application de la dérogation prévue au a) de l'article R. 421-1-2 du code de l'urbanisme ; que la VILLE DE BORDEAUX est, dès lors, fondée à soutenir que les premiers juges se sont à tort fondés sur ce motif pour annuler la décision attaquée par laquelle le maire avait rejeté la demande de permis présentée par M. X
    » (CE. 8 novembre 1995, Ville de Bordeaux, req. n°121.099).


    De ce fait, le seul fait que la demande de permis de construire en cause portait sur un projet de 252 mètres carrés ne nous paraissait pas suffisant pour conclure à l’obligation de faire établir le projet architectural par un architecte. Est-ce à dire que la solution retenue par la Cour administrative d’appel de Lyon est totalement infondée. Pas nécessairement.

    Il faut en effet préciser que la dispense prévue par l’ancien article R.421-1-2 et l’actuel article R.431-2 du Code de l’urbanisme procèdent de l’ancien article L.421-2 et de l’actuel L.431-3 en ce qu’il disposait et dispose respectivement que :

    • d’une part, « conformément aux dispositions de l'article 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, par dérogation au quatrième alinéa ci-dessus, ne sont pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques qui déclarent vouloir édifier ou modifier, pour elles-mêmes, une construction de faible importance dont les caractéristiques, et notamment la surface maximale de plancher, sont déterminées par décret en conseil d'Etat. Ces caractéristiques peuvent être différentes selon la destination des constructions » ;
    • d’autre part, « conformément aux dispositions de l'article 4 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, par dérogation à l'article L. 431-1, ne sont pas tenues de recourir à un architecte les personnes physiques ou exploitations agricoles à responsabilité limitée à associé unique qui déclarent vouloir édifier ou modifier, pour elles-mêmes, une construction de faible importance dont les caractéristiques, notamment la surface maximale de plancher, sont déterminées par décret en Conseil d'Etat. Ces caractéristiques peuvent être différentes selon la destination des constructions »

    Or, si l’on ne peut l’exclure, force est d’admettre qu’il ne va pas de soi qu’une même personne fasse construire, sur le même terrain, deux maisons d’habitation individuelles autonomes pour elle-même.

    Il n’en demeure pas moins que l’on aurait aimé que la Cour s’attache à cette circonstance de fait et à ce point de droit…



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Vers le renouveau de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme ?

    L’article L.600-5 du Code de l’urbanisme implique-t-il (encore) que l’annulation partielle du permis de construire porte nécessairement sur une composante divisible du projet ?

    CAA. Nancy, 2 juillet 2009, Association « Pare-Brise », Req. n°08NC00126 (137e note)

    Voici une note qui porte bien mal son nom si l’on s’en tient au sens de l’arrêt référencé puisque, précisément, cet arrêt apparait consacré l’inutilité intrinsèque du dispositif prévu par l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme au regard de la jurisprudence antérieure au 17 juillet 2009.

    L’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, introduit par la loi du 16 juillet 2006 dite « ENL », prévoit que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation » et, le cas échéant, que « l'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive ». Il reste que le seul fait de prévoir pour le juge administratif la possibilité de prononcer l’annulation partielle d’une autorisation d’urbanisme n’est pas d’une absolue nouveauté puisqu’il s’y autorisait déjà lorsque l’autorisation en cause est divisible, c’est-à-dire lorsque la composante du projet illégale est dissociable des autres d’un point de vue juridique et technique, voir fonctionnel.

    Or, pour sa part, l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme se borne à viser le cas, plus général, où « seule une partie du projet (…) est illégale » et, ainsi, semble tendre à élargir les hypothèses dans lesquelles l’autorisation d’urbanisme contestée pourra ne faire l’objet que d’une annulation partielle.

    Néanmoins plus de trois ans après son entrée en vigueur, force est de constater que l’article L.600-5 n’a donné lieu qu’à peu de décisions jurisprudentielles alors qu’au regard de sa rédaction (« lorsqu’elle constate… ») il n’est pas besoin que les parties en aient sollicité l’application qui pour être facultative (« la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle … ») est néanmoins ouverte pour l’ensemble des recours en cours d’instance, qu’ils aient ou non été introduits avant l’entrée en vigueur de la loi « ENL » (TA. Amiens, 29 décembre 2006, req. n° 04-01732), tant devant le juge administratif de première instance que devant les juges d’appel et de cassation lorsqu’ils sont appelés à statuer sur le fond du litige.

    Mais précisément, il est permis de se demander si cette application marginale de ce nouveau dispositif n’est pas le signe de ce qu’il ne revêt pas en lui-même tout l’intérêt que certains ont voulu y voir ou lui conférer.

    En effet, toute la difficulté est d’établir quand et jusqu’à quel stade est-il possible de considérer que seule une partie du projet est illégale, notamment, lorsqu’il s’agit d’un projet formant ce qu’il convenait jusqu’à récemment encore de qualifier d’ensemble indivisible ou d’opération indissociable et dont, par voie de conséquence, aucune partie ne peut être dissociée et isolée.

    Or, précisément, et à quelques exceptions près, à s’en tenir à la jurisprudence rendue en la matière, l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme ne semble avoir vocation à s’appliquer qu’aux composantes juridiquement dissociables du projet d’ensemble - y compris si son irrégularité peut être régularisée par un simple « modificatif » (CAA. Nantes, 25 juin 2008, Cne de Bucy, req. n°07NT03015 & CAA. Lyon, 1er juillet 2008, Cne de Valmeinier, req. n°07LY02364) que l’article L.600-5 ne prévoit d’ailleurs que comme une simple faculté – et ce, aux fins de ne pas aboutir à la formation d’un permis de construire qui, après annulation partielle, ne respecterait toujours pas les prescriptions d’urbanisme lui étant opposables (pour exemple : CAA. Marseille, 8 février 2007, M. Joseph X., req. n°04MA02390 & CAA. Bordeaux, 11 décembre 2007, SCI Redon, req. n°06BX01060).

    On pouvait ainsi se demander si l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme aurait une réelle incidence sur les règles gouvernant l’annulation partielle du permis de construire puisqu’à titre d’exemple, pour censurer l’ensemble d’un permis de construire méconnaissant les conclusions d’un diagnostic d’archéologie préventive et n’annuler que partiellement un permis de construire un parc éolien, la Cour administrative d’appel de Lyon a motivé sa première décision par le fait que les dispositions de cette autorisation « pour l'ensemble de la réalisation d'un village de vacances (n’étaient) pas divisibles » (CAA. Lyon, 21 juin 2007, Ministre de l'équipement, req. n°04LY01501) et sa seconde par la circonstance que « les éoliennes n° 2 et n° 3 sont des ouvrages distincts des trois autres éoliennes dont la construction a été autorisée par le permis (et) que les dispositions de ce permis applicables aux dites éoliennes sont, dans cette mesure, divisibles des autres dispositions de ce même permis » (CAA. Lyon, 23 octobre 2007, SARL, Le Pré Bossu, req. n°06LY02337).

    Or, précisément, dans l’affaire objet de l’arrêt de la présente note, la Cour administrative d’appel de Nancy devait juger que :

    éole.jpg« Considérant qu'aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme : Lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. (...) ; que l'éolienne n° 3 est un ouvrage distinct des deux autres éoliennes dont la construction a été autorisée par le permis de construire contesté ; que les dispositions de ce permis applicables à ladite éolienne sont, dans cette mesure, divisibles des autres dispositions de ce même permis ; Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner la production de l'avis émis par la direction départementale des affaires sanitaires et sociales des Vosges, qui figure au dossier de première instance, M. X et l'ASSOCIATION PARE-BRISE sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nancy a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation du permis de construire accordé le 4 mai 2006 par le préfet des Vosges à la SARL Vosges Eole , en tant qu'il porte sur l'éolienne n°3 et, dans cette mesure, à en demander l'annulation » ;

    et, donc, ne faire application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme à l’éolienne en cause que dans la mesure où celle-ci était divisible des deux autres.

    En résumé et au regard de ces premières années d’application, l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme n’apparaissait ainsi pour l’essentiel que comme la simple consécration des exceptions au principe d’indivisibilité du permis de construire telles qu’elles avaient été dégagées par la jurisprudence administrative (CE. 2 février 1979, Cts Sénécal, req. n° 05.808 ; CE. 16 février 1979, SCI Cap Naio c/ Dlle Fournier, Rec., p.66)

    Or, l’indivisibilité du permis de construire avait pour autre corolaire, notamment, l’impossibilité de fractionner la réalisation d’un ensemble immobilier indivisible ne pouvaient légalement faire l’objet de plusieurs permis de construire distincts. Mais comme on le sait, le Conseil d’Etat a considérablement assouplit ce principe et ce, surtout,

    - d’une part, en se référant à la notion d’ensemble immobilier unique et non plus d’ensemble indivisible ou d’opération indissociable, et pour cause puisque si un ensemble immobilier unique peut néanmoins faire l’objet de plusieurs permis de construire, c’est donc qu’il n’est pas indivisible à cet égard ;

    - d’autre part, en mettant en œuvre des critères d’ordre exclusivement physique et fonctionnel et, donc, indépendamment de toute considération liée à l’interdépendance juridique des composantes du projet.

    Par cet « abandon » de la notion d’ensemble indivisible et cette prédominance du fonctionnel sur le juridique est assurément de nature à donner une nouvelle dimension, et a priori un nouvel intérêt, à l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Veille administrative - Application dans le temps du décret du 19 décembre 2008

    TEXTE DE LA QUESTION (publiée au JO le : 14/04/2009 page : 3412):

    M. Pierre Morel-A-L'Huissier attire l'attention de M. le secrétaire d'État chargé de l'aménagement du territoire sur l'application du décret n° 2008-1353 du 19 décembre 2008. Ce décret est notamment venu prolonger le délai de validité des permis de construire, d'aménager ou de démolir. Il lui demande de lui indiquer la date à laquelle ce nouveau dispositif s'applique et s'il entre immédiatement en application pour les permis en cours

    TEXTE DE LA QUESTION (publiée au JO le : 06/10/2009 page : 9472):

    En ce qui concerne les autorisations demandées ou les déclarations faites avant le 1er octobre 2007, il y a lieu d'appliquer les dispositions du décret n° 2008-1353 du 19 décembre 2008 relatif au délai de validité des autorisations d'urbanisme. En effet, même si l'article 26 du décret du 5 janvier 2007 précise que ces autorisations ou déclarations restent soumises aux règles de compétence, de forme et de procédure en vigueur à la date de leur dépôt, la durée de validité est une règle de fond et non une règle de forme ou de procédure. L'article 26 ne leur est pas applicable. Le décret du 19 décembre 2008 est également applicable aux permis de construire accordés avant le 1er octobre 2007.



    On voit en effet mal comment il pourrait en être autrement dès lors que, d'une part, la caducité d'une autorisation a sauf disposition contraire vocation à s'apprécier en considération des normes en vigueur à la date ou la question de pose et non pas donc en considération de celles applicables à sa date de délivrance et que, d'autre part, pour ce qui concerne les autorisations sollicitées et/ou obtenues avant le 1er octbre 2007, l'ancien article R.421-32 du Code de l'urbanisme (voir ici).




    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Veille administrative : 2 réponses ministérielles

    TEXTE DE LA QUESTION (publiée au JO le : 16/06/2009 page : 5738) :
    « M. Lionnel Luca attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur les articles L. 128-1 et L. 128-2 du code de l'urbanisme qui autorisent un dépassement du COS lorsque ce dépassement est motivé par la promotion de la performance énergétique dans les bâtiments à usage commercial et artisanal. L'inscription de ces dispositions, issues de la loi n° 2005-781 du 13 juillet 2005, dans le chapitre intitulé " dispositions favorisant la performance énergétique et les énergies renouvelables dans l'habitat" semblent exclure de fait les activités économiques. Le décret d'application n'ayant apporté aucune précision en la matière, il lui demande de bien vouloir lui préciser si ces articles du code de l'urbanisme peuvent également s'appliquer aux bâtiments tertiaires »

    TEXTE DE LA REPONSE (publiée au JO le : 29/09/2009 page : 9246) :
    « L'article L. 128-1 du code de l'urbanisme dispose que le dépassement du coefficient d'occupation des sols est autorisé, dans la limite de 20 % et dans le respect des autres règles du plan local d'urbanisme, pour les constructions remplissant des critères de performance énergétique ou comportant des équipements de production d'énergie renouvelable. Un décret en Conseil d'État détermine les critères de performance et les équipements pris en compte. L'article L. 128-2 précise que ces dispositions sont rendues applicables dans la commune par décision de son conseil municipal. Ces dispositions ne mentionnent pas qu'elles ne s'appliquent qu'aux constructions à usage d'habitation, à l'exclusion des autres constructions. Par ailleurs, les critères de performance énergétique et les équipements pris en compte sont ceux définis par l'article R. 111-21 du code de la construction et de l'habitation, en vigueur depuis le 1er janvier 2007 et applicable aux demandes de permis de construire déposées à compter de cette date ; ces critères de performance énergétique sont applicables à l'ensemble des constructions, quel que soit leur usage, et non aux seules constructions à usage d'habitation. L'intitulé du chapitre VIII « Dispositions favorisant la performance énergétique et les énergies renouvelables dans l'habitat », dans lequel figurent ces articles L. 128-1 et L. 128-2 du code de l'urbanisme n'apparaît donc pas en cohérence avec les dispositions qu'il contient. Il devra donc être prochainement modifié. Le projet de loi portant engagement national pour l'environnement, actuellement en examen devant le Parlement, prévoit, en effet, d'autoriser le Gouvernement à prendre une ordonnance visant à apporter au régime des autorisations d'urbanisme, les corrections qui pourraient apparaître nécessaires »


    TEXTE DE LA QUESTION (publiée au JO le : 31/03/2009 page : 2994) :
    « M. Rudy Salles attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur le cas où un immeuble a été réalisé sans permis de construire et où aucune poursuite n'a été engagée dans le délai de prescription. Il lui demande si, dans le cas où le propriétaire souhaite effectuer une extension du bâtiment en cause, un permis de construire peut être accordé et si ce permis de construire ne doit concerner que les travaux nouveaux envisagés, ou inclure également la construction initiale »

    TEXTE DE LA REPONSE (publiée au JO le : 29/09/2009 page : 9242) :
    « Au terme d'une jurisprudence constante depuis la décision du Conseil d'État du 9 juillet 1986 (Mme Thalamy), effectuer des travaux sur une construction réalisée sans permis exige l'obtention d'un permis visant à autoriser les futurs aménagements et à régulariser le bâtiment en place. En conséquence, la demande comme les plans doivent prendre en considération l'existant sous peine de voir le permis censuré par le juge administratif, sans que l'extinction des délais de recours concernant la construction initiale ne puisse rentrer en ligne de compte. Il n'existe que deux exceptions au principe ainsi posé. La première concerne les constructions qui ont été édifiées avant la généralisation du permis de construire par la loi du 15 juin 1943 (CAA de Marseille 23 novembre 2006 M. Giganot 04MA01369). La seconde vise les travaux qui n'avaient pas à être autorisés par un permis de construire à la date à laquelle ils ont été réalisés, en raison par exemple de dérogations inscrites au code de l'urbanisme alors en vigueur (CE 15 mars 2006, ministre de l'équipement, des transports, du tourisme et de la mer n° 266238). Dans ces deux cas, il est possible de délivrer un permis ne s'intéressant qu'au futur projet du constructeur dans la mesure où les bâtiments déjà édifiés ne nécessitaient pas d'autorisation au moment de leur réalisation. Hormis ces deux hypothèses, une autorisation de construire couvrant la construction initiale et les travaux à venir pourra être délivrée à condition que les règles d'occupation du sol en vigueur sur la commune le permettent »


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés