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  • Sur le permis de construire valant division dans un lotissement (soumis à permis d’aménager)

    Une opération relevant, prise isolément, du champ d’application de l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme implique-t-elle, dès lors qu’elle est projetée dans un lotissement, une nouvelle autorisation de lotir (permis d’aménager ou déclaration d’aménagement), le cas échéant modificative, ou peut-elle simplement donner lieu à un permis de construire valant division ?


    Précisons-le d’emblée, selon nous, rien ne semble s’opposer à ce qu’un permis de construire valant division porte sur le lot d’un lotissement dès lors que cette opération respecte tout à la fois la règlementation des lotissements et, surtout, « l’esprit » du permis de construire valant division.

    I.- Pour autant qu’il en soit besoin, rappelons en effet que, d’une part, les divisions pratiquées en exécution d’un permis de construire valant division ne sont pas considérées comme constitutives d’un lotissement en application de l’article R.442-1 (c) du Code de l’urbanisme et que, d’autre part, les terrains issus de ces divisions, notamment, ne sont pas considérés comme des « lots à construire » (art. R.442-2 f) ; C.urb) au sens de l’article R.421-19 (a) du Code de l’urbanisme : ces terrains ne sont donc pas des « lots à construire » au sens de la règlementation sur les lotissements soumis à permis d’aménager.

    De ce fait, nous voyons donc mal comment la délivrance d’un permis de construire valant division portant sur un lot d’un lotissement autorisé pourrait, en elle-même et par principe, constituer un contournement de la règlementation applicable à ce dernier type d’aménagement puisque pour présenter des aspects factuels communs, il n’en demeure pas moins qu’il s’agit de deux procédures totalement distinctes, aux régimes juridiques respectifs en tous points différents.

    lotissement II.jpgD’ailleurs, force est d’admettre que les dispositions combinées des articles R.442-1 (c) et R.442-2 (f) du Code de l’urbanisme, en ce qu’elles excluent du décompte des « lots à construire » au sens de la règlementation sur les lotissements les terrains issus d’une division réalisée au titre de l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme, tendent à établir que ces deux procédures peuvent coexister. Si par nature le lotissement et le permis de construire valant division étaient « incompatibles » dans le cas d’une opération projetée sur un même terrain, on verrait en effet mal l’utilité des dispositions susvisées, laquelle serait à tout le moins substantiellement réduite.

    II.- Mais outre ces deux constats de principe, la délivrance et l’exécution régulières d’un permis de construire valant division dans un lotissement ne nous parait pas pouvoir « concrètement » constituer un détournement de la règlementation applicable à ce dernier type d’aménagement.

    1.- D’un point de vue procédural, en effet, rappelons qu’une demande de permis d’aménager et une demande de permis de construire valant division :

    - d’une part, sont assujetties au même délai d’instruction de principe et sont soumises, pour l’essentiel, aux mêmes cas de prorogations de ce délai ;

    - d’autre part, impliquent l’une et l’autre la présentation d’un dossier générant des contraintes équivalentes d’un point de vue quantitatif et qualitatif.

    A cet égard, et comme à l’égard du point suivant d’ailleurs (le régime propre au lotissement), la combinaison d’un lotissement et d’une « opération groupée » (celle relevant d’un permis de construire valant division) ne pourrait présenter d’intérêt que pour échapper au permis d’aménager en faisant relever le lotissement d’une simple déclaration d’aménagement.

    Il reste qu’aux termes des dispositions combinées des articles R.421-19 (a) et R.423 (a) du Code de l’urbanisme, le premier des critères participant à déterminer si un lotissement est soumis à permis d’aménager ou à déclaration d’aménagement tient au nombre de « lots à construire » (art. R.421-19 ; C.urb) puisqu’en toute hypothèse un lotissement de moins de trois lots n’est jamais assujetti à permis.

    Mais dès lors, l’obtention d’un permis de construire valant division dans un lotissement déclaratif ne saurait caractériser un détournement de la procédure du permis d’aménager puisqu’aux termes de l’article R.441-2 (c) les terrains issus de l’exécution d’un permis de construire valant division ne sont pas des lots à construire au sens de l’article R.421-19 (a) du Code de l’urbanisme et, par voie de conséquence, n’ont pas à être pris en compte pour établir si à cet égard l’opération, prise dans son ensemble, relève d’un permis d’aménager ou d’une simple déclaration.

    2.- Mais c’est bien entendu en considération du régime propre du lotissement et, plus particulièrement, de celui applicable aux lotissements soumis à permis d’aménager que le permis de construire valant division portant sur l’un des lots ainsi autorisés serait susceptible en première analyse d’être considéré comme constitutif d’un détournement de procédure. Tel ne nous parait toutefois pas le cas.

    Il faut, en effet, préciser que l’article R.442-2 (f) du Code de l’urbanisme n’exclut de la notion de « lots à construire » au sens de l’article R.421-19 (a) que les terrains issus des divisions autorisées par le permis de construire délivré en application de l’article R.431-24 – c’est-à-dire celles pratiquées au sein de son périmètre, telles qu’elles sont figurées par le plan de division produit par le pétitionnaire – et non pas l’assiette de cette autorisation lorsque son périmètre ne couvre qu’une partie de l’unité foncière d’origine ; cette assiette pouvant dans ce cas être constitutive d’un lot à construire au sens de la règlementation sur le lotissement.

    Il s’ensuit que lorsqu’il porte sur un lotissement, l’assiette foncière du permis de construire valant division ne se substitue pas au « lot à construire » constituant cette dernière, lequel ne « disparait » donc pas, et n’est donc pas exclu du lotissement considéré. Par voie de conséquence, la délivrance d’un permis de construire valant division sur l’un des lots d’un lotissement n’a pas pour effet de rendre inopposable le régime applicable à ce type d’aménagement et, notamment :

    - d’une part, le corps de règles constituant les garanties offertes à l’acquéreur de ce lot ;

    - d’autre part, les conditions relatives à la délivrance d’un permis de construire portant sur un lot d’un lotissement, telles qu’elles résultent de l’article R.431-18 du Code de l’urbanisme.

    Il est vrai qu’en revanche, les acquéreurs des terrains et des bâtiments objets du permis de construire valant division ne bénéficieront pas de telles garanties alors même que l’opération groupée objet de ce permis est sise au sein d’un lotissement.

    lot III.jpgIl reste qu’il s’agit là d’une conséquence propre à tout permis de construire valant division dont le régime est totalement dissocié de celui du lotissement – y compris lorsque l’opération groupée considérée ne porte que sur des maisons individuelles – puisqu’en substance, si ces deux types d’aménagement ont pour point commun d’impliquer des divisions foncières en propriété ou en jouissance, leur cause et leur finalité respectives sont totalement distinctes, si bien que c’est le régime de droit commun des conditions d’exécution du permis de construire qui est réputé offrir ces garanties. En effet, la finalité première d’une opération de lotissement est principalement de produire des « lots à construire » (art. L.442-1 ; C.urb) ; à charge pour les acquéreurs de ces lots d’y réaliser leurs projets de construction : c’est pourquoi le régime du lotissement tend donc à garantir qu’ils disposeront d’un terrain constructible au regard des prescriptions générales d’urbanisme applicables en la matière.

    Or, pour sa part, le permis de construire valant division constitue une seule et même autorisation permettant tout à la fois l’édification de bâtiments puis le détachement de leur terrain d’assiette.

    Il reste qu’à cet égard, ce permis constitue une autorisation indissociable et non pas la réunion sous un même arrêté de deux autorisations distinctes (en ce sens : CAA. Bordeaux, 17 mars 2009, Sté Bouygues Immobilier, req. n°07BX02438) dont l’une autoriserait un projet de construction et l’autre un projet de division foncière.

    Il s’ensuit que c’est la réalisation de l’ensemble du projet – édification des bâtiments, viabilisation de leur terrain d’assiette tels qu’ils résultent des divisions liés à la commercialisation de ces bâtiments et, le cas échéant, réalisation des équipements communs – qui incombe entièrement au titulaire de cette autorisation, lequel en tant qu’acquéreur du « lot à construire » constituant l’assiette de son permis bénéficie des garanties résultant des obligations mises à la charge du lotisseur, notamment, pour ce qui concerne la viabilisation de ce lot : à travers cette garantie, les acquéreurs des « terrains bâtis » à constituer en exécution du permis de construire valant division ont donc indirectement la garantie que leurs immeubles pourront eux-mêmes être viabilisés.

    A la différence du lotissement, le permis de construire groupé n’a donc pas pour objet d’autoriser la seule vente et la division subséquente d’un terrain à construire mais porte nécessairement sur la vente de terrains bâtis et viabilisés ; ce qui en soi constitue la garantie des acquéreurs de ces ensembles immobiliers.

    A cet égard également, la délivrance d’un permis de construire valant division sur le lot d’un lotissement, même soumis à permis d’aménager, ne nous semble donc pas constituer un détournement du régime propre à ce type d’aménagement.

    3.- Mais en dernier lieu, on pourrait également objecter que la réalisation d’une opération groupée dans un lotissement constitue une méconnaissance de l’autorisation portant sur ce dernier dès lors que le permis d’aménager comme la déclaration d’aménagent autorisent un nombre de lots déterminés que l’exécution du permis de construire valant division augmenterait, donc.

    Il reste qu’une autorisation d’urbanisme se borne à autoriser les travaux et les aménagements relevant de son champ d’application matériel. Or, aux termes de l’article L.442-1 du Code de l’urbanisme, les autorisations de lotissement ont vocation à saisir les divisions foncières pratiquées en vue de l’implantation de bâtiments et, donc, celles aboutissant à la formation de « lots à construire ».

    En revanche, si les articles R.442-1 (c) et R.442-2 (f) excluent du champ d’application du lotissement et de la notion de « lots à construire » les terrains issus d’un permis de construire valant division, c’est précisément parce qu’ainsi qu’il a été pré-exposé, ce dernier autorise la cession de « terrains bâtis » ; les divisions relevant de l’article R.431-24 étant celles générées par la commercialisation des bâtiments édifiés en exécution de l’autorisation délivrée à ce titre : la délivrance d’un permis de construire valant division dans un lotissement n’augmente donc pas le nombre de « lots à construire » que le lotisseur est autorisé à pratiquer au regard de la règlementation sur les lotissement et ne modifie pas à cet égard la consistance de son projet, tel qu’il est autorisé, notamment, par l’arrêté prévu par l’article A.424-10 du Code de l’urbanisme.

    A l’examen du régime du lotissement et de celui du permis de construire valant division ainsi que de leur articulation, rien ne nous paraît donc s’opposer à ce qu’un tel permis ait pour assiette foncière le « lot à construire » d’un lotissement.

    Il n’en demeure pas moins que ce mode opératoire peut, dans certains cas, impliquer l’accomplissement d’une formalité au titre de la règlementation sur les lotissements et qu’en toute hypothèse, sa régularité implique de respecter la finalité et l’esprit du permis de construire valant division.

    Rappelons, en effet, que l’article R.442-21 du Code de l’urbanisme dispose que : « les subdivisions de lots provenant d'un lotissement soumis à permis d'aménager sont assimilées aux modifications de lotissements prévues aux articles L. 442-10 et L. 442-11 sauf lorsqu'elles consistent à détacher une partie d'un lot pour la rattacher à un lot contigu ».

    Or, cet article ne précise aucunement la nature et la finalité de la subdivision en cause : force est donc de considérer qu’il s’applique à toute division foncière d’un ou plusieurs lots d’un lotissement, y compris donc à celles résultant de l’exécution d’un permis de construire valant division.

    Si le lotissement considéré est soumis à permis d’aménager, un permis de construire valant division ne saurait donc être délivré sans l’accord préalable des co-lotis.

    Mais surtout, l’autorisation délivrée au titre de l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme doit être un véritable permis de construire valant division et doit le rester. En substance :

    - d’une part, le permis de construire valant division initial ne doit pas prévoir la formation de terrains nus à bâtir ;

    - d’autre part, ce permis ne doit pas être « démantelé » par le jeu de transferts partiels consistant : soit, à transférer et à céder aux tiers chaque bâtiment et son terrain d’assiette, ce qui aboutirait en fait à la formation de plusieurs permis de construire simple délivrés sur des « lots à construire » de fait ; soit, à transférer aux tiers le permis initial uniquement pour ce qu’il vaut autorisation de construire, son titulaire d’origine le conservant pour ce qu’il vaut permis de diviser, lequel n’en deviendrait ni plus ni moins qu’un permis d’aménager affranchi des contraintes du lotissement…

    Il reste qu’à notre sens, il s’agit là des deux seules limites à la possibilité d’obtenir un permis de construire valant division dans un lotissement.

    IV.- Toutefois, force est de rappeler que la Cour administrative d’appel de Nantes a pu juger qu’en substance, une « opération groupée » projetée dans un lotissement précédemment autorisé constituait elle-même un lotissement et impliquait donc une nouvelle autorisation de lotir, bien que prise isolément, cette opération relevait du champ d’application de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme alors applicable (CAA. Nantes, 29 novembre 2005, req. n°04NT00116).

    Néanmoins, cette solution ne nous parait plus transposable au régime applicable depuis le 1er octobre 2007.

    Il ressort en effet de cet arrêt de la Cour nantaise que celle-ci s’est au premier chef fondée sur l’article R.315-48 du Code de l’urbanisme qui dans sa rédaction alors applicable disposait que :

    « Les subdivisions de lots provenant d'un lotissement sont assimilées aux modifications de lotissements prévues à l'article L. 315-3 lorsqu'elles sont demandées par le lotisseur ou par un ou plusieurs lotis, à moins que, conduisant à la création de plus de deux nouveaux lots, elles ne fassent l'objet d'une autorisation de lotir dans les conditions prévues par le présent chapitre sans qu'il puisse être porté atteinte aux droits des co-attributaires de lots tels qu'ils peuvent résulter de documents régissant le lotissement primitif. Les décisions portant modification sont prises dans les mêmes conditions et formes que celle prévues pour l'autorisation de lotir » ;

    la Cour en ayant expressément conclu que l’opération projetée impliquait la délivrance préalable d’une autorisation de lotir.

    Or, aujourd’hui, ni l’article R.442-21, ni les articles L.442-10 et L.442-11 auxquels il se réfère ne comportent de telles dispositions ; sans compter que l’article L.442-11 n’a strictement aucun rapport avec une modification du lotissement à l’initiative du lotisseur et/ou des colotis puisqu’il procède d’une circonstance de droit extérieure au lotissement (telle la modification du PLU) et appelle une décision unilatérale de l’autorité compétente en application de l’article R.442-19 du Code de l’urbanisme ; décision qui ne saurait évidemment constituer un permis d’aménager qu’aucun pétitionnaire n’a sollicité.

    Il est exact qu’en revanche, l’article R.442-19 du Code de l’urbanisme précise que « l'autorité mentionnée aux articles L. 442-10 et L. 442-11 est l'autorité compétente pour statuer sur les demandes de permis d'aménager ».

    Mais force est d’admettre que si la subdivision d’un lotissement soumis à permis d’aménager impliquait un nouveau permis d’aménager, ou un « modificatif », il n’y aurait pas lieu de préciser que l’autorité compétente pour délivrer ce permis est celle compétente pour délivrer une telle autorisation : il s’agit donc de la même autorité mais intervenant au titre d’une autre compétence que celle qu’elle détient pour la délivrance des permis d’aménager.

    Mais il est vrai qu’en second lieu, la Cour administrative d’appel a également considéré que le fait que l’article R.315-2 (c) du Code de l’urbanisme alors applicable – « peu ou prou » équivalent dans son économie générale à l’actuel article R.442-1 (c) – excluait l’opération groupée en cause du champ d’application de la procédure de lotissement était insuffisant.

    Il reste que le dispositif alors applicable ne comportait pas de disposition équivalente à l’article R.442-2 (f) du Code de l’urbanisme excluant expressément du décompte des « lots à construire », au sens de la règlementation sur le permis d’aménager, les terrains issus de l’exécution d’un permis de construire valant division ; ce à quoi l’article R.442-21 ne précise pas expressément entendre faire exception.

    lot 4.jpgDans cette mesure, l’arrêt en cause nous parait pouvoir être rapproché de celui par lequel il a pu être jugé, au titre de l’ancien article R.315-2 c) du Code de l’urbanisme alors applicable, qu’une division opérée dans le cadre de cet article mais pratiquée sur une unité foncière ayant déjà fait l’objet d’une précédente division – au titre de ce même dispositif – était néanmoins constitutive d’un lotissement puisque le permis de construire sur le terrain issu de cette seconde opération de division portait, du fait de la réalisation de la première, sur une unité foncière préalablement divisée et que prises dans leur globalité, ces opérations avaient abouti à la formation de plus deux lots à construire en moins de dix ans (CAA. Douai, Cne de Bois-Guillaume, req. n°98DA12831) ; solution et conséquences auxquelles, précisément, l’article R.442-2 (f) du Code de l’urbanisme – spécifiquement introduit à cet effet – tend à s’opposer.

    V.- En conclusion, sous les réserves de principe liées à la relative imprécision des textes aujourd’hui applicables en la matière, il nous semble donc néanmoins qu’un permis de construire valant division peut être légalement délivré dans un lot de lotissement ; sans compter que, plus généralement, la solution inverse nous paraîtrait contraire à « l’esprit » de la réforme des autorisations d’urbanisme et du nouveau régime des divisions foncières. Deux observations en ce sens :

    En premier lieu, il faut à nouveau rappeler que les divisions pratiquées en exécution d’un permis de construire valant division ne sont pas considérées comme constitutives d’un lotissement (art. R.442-1 c ; C.urb) et que, d’autre part, les terrains issus de ces divisions, notamment, ne sont pas considérés comme des « lots à construire » (art. R.442-2 f) ; C.urb) au sens de l’article R.421-19 (a) du Code de l’urbanisme. Or, selon nous, ces précisions expressément introduites par le décret du 5 janvier 2007 résultent :

    - d’une part, de la suppression de la condition dite de la « maîtrise d’ouvrage unique » anciennement posée par l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme puisque le critère du nombre de maîtres d’ouvrage a toujours été le premier critère d’assujettissement à la procédure de lotissement (CE. 4 mai 1983, Chapel, req. n°33.620 ; CE. 26 juillet 1985, Guichet, req. n°36.699 ; CAA. Marseille, 9 décembre 2004, Sté Riviéra Conseil, req. n°00MA02339) ;

    - d’autre part, de la circonstance que l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme vise dorénavant les divisions réalisées avant l’achèvement du projet Puisque pour application de l’ancien article L.315-1 du Code de l’urbanisme que le nouvel article L.442-1 n’a pas fondamentalement changé sur ce point – l’un et l’autre visant les divisions pratiquées en vue de l’implantation de bâtiments – « le juge administratif a toujours veillé à éviter les détournements de procédure en incluant dans le champ d’application du lotissement les divisions de terrain réalisées en cours de construction des bâtiments, donc après la délivrance du permis de construire », si bien que, par principe et sauf exceptions expressément prévues, « pour échapper au lotissement, il faut donc diviser le terrain une fois les constructions achevées » (J-Cl. Bonnichot sur : CE. 21 août 1996, Ville de Toulouse, req. n°137.834 in BJDU, n°6/1996, p.404. Voir également : CE. 26 mars 2003, M. et Mme Leclerc, req. n°231.425).

    et, en toute hypothèse, induisent clairement qu’une opération relevant d’un permis de construire valant division peut présenter les caractéristiques de celles relevant de le procédure de lotissement, le cas échéant, soumis à permis d’aménager.

    Et en second lieu, il faut souligner que l’article R.442-21 du Code de l’urbanisme ne vise que les subdivisions de lots provenant d’un lotissement soumis à permis d’aménager cependant que le principal risque de contournement de la règlementation relative à ce permis nous semble lié, au premier chef, à la pratique qui consisterait à créer un « lotissement déclaratif » pour ensuite le subdiviser dans le cadre d’un permis de construire valant division dont l’exécution n’en respecterait pas « l’esprit » ; subdivision pourtant affranchie de l’article R.442-21…



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • De la possible combinaison de la jurisprudence « Fernandez » et de la jurisprudence « SCI de la Paix »

    Sur le maintien de la jurisprudence « Thalamy » à l’encontre des travaux ayant irrégulièrement changé la destination d’une construction existante (suite)

    CE. 27 juillet 2009, SCI La Paix, req. n°305.920 (136e note)

    Dans notre précédente note sur l’arrêt « SCI de la Paix », nous concluions que selon nous cette décision ne marquait pas l’abandon de la jurisprudence « Fernandez ».

    Mais dès lors toute la question est de savoir si lorsque les travaux en cause relèvent d’une entreprise de construction distincte de celle ayant précédemment emporté un changement de destination irrégulier, il faut néanmoins s’en tenir à la destination de fait du bâtiment en cause pour considérer, par voie de conséquence, et le cas échéant, que les travaux projetés emportent un changement de destination alors même que la destination de l’immeuble devant résulter de leur exécution serait identique à celle initialement autorisée mais ultérieurement changée de façon irrégulière.

    extension-ronde-2.jpgA notre sens non, il faut, en effet, préciser que dans l’affaire objet de l’arrêt « Fernandez » du mois de janvier 2007, outre que le requérant n’établissait pas de façon probante que la destination de l’immeuble en cause avait irrégulièrement changée, le Conseil d’Etat a annulé la solution, inverse, retenue par le juge de première instance pour avoir « recherch(er) les conditions dans lesquelles la destination du bâtiment avait évolué depuis sa construction ». La solution retenue par la Haute Cour impliquant, donc, également, qu’au stade de l’instruction de la déclaration préalable ou de la demande de permis de construire, l’administration n’est pas tenue, en l’absence d’information sur ce point, de rechercher les conditions dans lesquelles la destination initiale du bâtiment en cause a été modifiée.

    Il reste qu’a contrario – et comme l’induit finalement indirectement l’arrêt « SCI La Paix » – rien ne nous semble s’opposer à ce qu’un « tiers-pétitionnaire » puisse se prévaloir, pour autant qu’il le démontre :

    - d’une part, de l’irrégularité de la destination actuelle du bâtiment en cause ;
    - et d’autre part, de la destination initiale de ce même bâtiment ;

    aux fins d’établir que son opération n’emporte pas un changement de destination ; la jurisprudence « Fernandez » n’impliquant donc pas selon nous de s’en tenir, en toute hypothèse, à la destination apparente du bâtiment en cause.

    On sait d’ailleurs que si pour application de l’ancien article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme le pétitionnaire, faute d’indication contraire, était réputé propriétaire apparent du terrain à construire, cette présomption ne s’est jamais opposée à ce qu’en cas de contestation sérieuse sur ce point, cette qualité lui soit déniée.

    En outre, il faut souligner que la jurisprudence « Fernandez » procède d’une interprétation du droit qui certes déresponsabilise l’administration mais est également et au premier chef favorable au pétitionnaire.

    extension-de-maison-2.jpgOr, compte tenu de « l’esprit » de celle-ci, on verrait mal pourquoi l’irrégulier changement de destination opéré par un tiers pourrait bénéficier au pétitionnaire pour établir qu’il n’y a pas de changement de destination, et ainsi obtenir l’autorisation sollicitée, mais qu’en revanche, cette irrégularité devrait lui être opposée et justifier un refus d’autorisation alors que son projet n’emporte aucun changement au regard de la destination initiale et régulière du bâtiment sur lequel les travaux sont projetés… 

    Mais pour conclure, on « relativisera » l’intérêt de la question puisque si sous l’empire du dispositif applicable avant le 1er octobre 2007, tout travaux s’accompagnant d’un changement de destination impliquait l’obtention d’un permis de construire (anc. art. L.421-1 & R.422-2 ; C.urb), tel n’est plus le cas aujourd’hui dès lors que l’article R.421-14 du Code de l’urbanisme dispose que :

    « Sont soumis à permis de construire les travaux suivants, exécutés sur des constructions existantes, à l'exception des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires :
    a) Les travaux ayant pour effet la création d'une surface hors œuvre brute supérieure à vingt mètres carrés ;
    b) Les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination entre les différentes destinations définies à l'article R. 123-9 ;
    c) Les travaux ayant pour effet de modifier le volume du bâtiment et de percer ou d'agrandir une ouverture sur un mur extérieur ;
    d) Les travaux nécessaires à la réalisation d'une opération de restauration immobilière au sens de l'article L. 313-4
    » ;


    ce dont il résulte qu’un changement de destination n’est assujetti à permis de construire que pour autant qu’il s’accompagne de travaux modifiant les structures porteuses du bâtiment et/ou ses façades ; sans compter que l’article précité précise que « pour l'application du b du présent article, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ».

    En dehors de ce cas, la seule question est de savoir s’il y a lieu de formuler une déclaration préalable en application de l’article R.421-17 (b) du Code de l’urbanisme (sur la problématique du changement de destination sans travaux voir ici et là).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur l’appréciation de l’impact d’un « modificatif » au regard de l’objet du permis de construire

    Un « modificatif » ayant pour objet d’augmenter le nombre d’aires de stationnement projetées peut être requalifié en nouveau permis de construire alors même qu’il ne porte pas sur le bâtiment objet du « primitif »

    CAA. Bordeaux, 30 juillet 2009, Association de défense du site de Bilaa, req. n°08BX00323 (135e note)


    Dans cette affaire, une commune s’était « auto-délivrée » un permis de construire ayant pour objet de rénover un château sis dans un site boisé et, prévoyant, notamment la création de 57 places de stationnement, lequel devait être attaqué par une association de défense de l’environnement ainsi que le « modificatif » ultérieurement obtenu par la commune aux fins de supprimer ces 57 places pour en créer 207 ailleurs.

    Mais en première instance, le recours en annulation à l’encontre du « modificatif » devait être rejeté comme irrecevable au motif tiré de l’article R.600-1 du Code de l’urbanisme – ce que l’association requérante ne contesta pas en appel … Quant au recours contre le « primitif », celui-ci devait lui-même être rejeté après que le juge administratif eu statué sur les conclusions de l’association requérante, laquelle interjeta appel de ce jugement ; requête que la Cour administrative d’appel devait donc rejeter au motif suivant :

    « Considérant que le projet autorisé par le permis de construire délivré le 19 décembre 2006 portait sur la rénovation et la réhabilitation du château du Bilaa, situé dans un site boisé, en vue d'y créer une salle convivialité ; que ce projet incluait la réalisation sur le site de 57 places de stationnement ; que le permis de construire délivré le 28 mai 2007 supprime les divers sites de stationnement initialement prévus et prévoit, sur d'autres emplacements, la création de 207 places de stationnement, ce qui entraîne l'abattage de nombreux arbres ; que, compte tenu de l'ampleur des modifications ainsi apportées au projet initial, et même si ces modifications n'affectent pas le projet architectural relatif au château, ce permis doit être regardé non pas comme un simple modificatif au permis initialement délivré, mais comme un nouveau permis ; que ce nouveau permis a implicitement mais nécessairement retiré le permis délivré le 19 décembre 2006 ; que ce retrait, définitif faute d'avoir été contesté, a privé d'objet les conclusions de l'association dirigées contre le permis de construire du 19 décembre 2006 ; que, par suite, le tribunal administratif aurait dû, par son jugement du 4 décembre 2007, prononcer un non-lieu à statuer sur les conclusions à fin d'annulation de ce permis ; que ce jugement doit, dans cette mesure, être annulé ; qu'il convient, après évocation, de décider qu'il n'y a pas lieu de statuer sur ces conclusions ».

    A titre liminaire, on soulignera que le « modificatif » en cause – requalifié en nouveau permis de construire et considéré comme ayant emporté le retrait implicite mais nécessaire du précédent – avait été édicté le 28 mai 2007.

    La légalité de cet arrêté ayant vocation à être appréciée en considération des circonstances de droit et de fait présentes à sa date d’édiction, tant en ce qu’il valait permis de construire qu’en ce qu’il valait retrait de permis, il n’y avait donc pas lieu d’appliquer l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme, lequel en ce qu’il dispose que « le permis de construire, d'aménager ou de démolir, tacite ou explicite, ne peut être retiré que s'il est illégal et dans le délai de trois mois suivant la date de cette décision. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire » est certes issu de l’article 6 de la loi dite « ENL » du 13 juillet 2006 mais n’est entré en vigueur que le 1er octobre 2007.

    Le 28 mai 2007, la légalité et l’effet du « modificatif » en cause en ce qu’il valait retrait du permis précédent avaient donc vocation à être appréciés en considération de la règle dégagée par la jurisprudence « Vicqueneau ».

    parking.jpgMais sur le fond, force est surtout de souligner que la Cour bordelaise a donc requalifié le « modificatif » attaqué en nouveau permis de construire au regard de l’importance des modifications en cause, lesquelles n’intéressaient que l’aménagement des abords de la construction  mais en aucune mesure cette dernière.

    Or, aucun de ces aménagements - aires de stationnement  et abattage d'arbres - pris isolément, ne relevait du champ d’application du permis de construire.

    Il reste qu'aux termes de l'article L. 421-6 du Code de l'urbanisme, lequel reprend l’économie générale de l’ancien article L.421-3 alors applicable, « le permis de construire ou d'aménager ne peut être accordé que si les travaux projetés sont conformes aux dispositions législatives et réglementaires relatives à l'utilisation des sols, à l'implantation, la destination, la nature, l'architecture, les dimensions, l'assainissement des constructions et à l'aménagement de leurs abords et s'ils ne sont pas incompatibles avec une déclaration d'utilité publique ». Et à ce titre, l'Administration a l'obligation de prendre parti sur l'ensemble des composantes du projet (CE, 7 nov. 1973, n° 85237, Giudicelli. Sur l'aménagement intérieur des « ERP » : CAA Marseille, 22 déc. 2003, n° 99MA00462, SCI Magniola ) ; ce qui implique qu'elle en ait une parfaite et complète connaissance.

    Telle est, notamment, la raison pour laquelle les documents que le pétitionnaire doit produire à l'appui de sa demande doivent figurer non seulement les constructions projetées mais également, notamment, la plupart des aménagements extérieurs prévus. Et bien entendu, toute insuffisance du dossier de demande sur l'un de ces aspects du projet peut suffire à emporter l'annulation du permis de construire obtenu (pour l'exemple récent de l'absence de figuration du traitement des espaces extérieurs du terrain d'assiette du projet après abattage des arbres s'y trouvant : CAA Bordeaux, 17 avr. 2008, n° 06BX00558, Cne Biganos. Voir également : CAA. Paris, 3 juillet 2009, Guy X., req. N°07PA00677).

    Or, l'Administration est réputée statuer au vu du dossier produit par le pétitionnaire (CE, 18 mars 1970, Rodde : Rec. CE 1970, p. 208) et, par voie de conséquence, autoriser l'ensemble des composantes du projet figuré par celui-ci. C'est ainsi que, par principe, ces travaux et ces aménagements extérieurs aux constructions formeront avec celles-ci un tout indivisible au regard du permis de construire les autorisant. A titre d'exemple, la non conformité aux prescriptions d'urbanisme opposables au projet d'une terrasse et d'un muret pourra ainsi justifier l'annulation de l'ensemble du permis de construire autorisant, au principal, le bâtiment au regard duquel ils constituent des travaux extérieurs (CAA Lyon, 19 avr. 1994, n° 93LY01230, Préfet du Dpt de Haute-Corse) ; bien qu'isolément de tels ouvrages ne relèvent pas nécessairement de la procédure de permis de construire.

    À tous les égards, un permis de construire autorise donc l'ensemble du projet figuré par le pétitionnaire dans son dossier de demande et non pas seulement ceux des ouvrages relevant intrinsèquement du champ d'application matériel de cette autorisation. C'est pourquoi, plus spécifiquement, la chambre civile de la Cour de cassation a jugé (Cass. 1re civ., 24 oct. 2006, n° 05-19.708, F-D, SCI Arzac) que l'engagement de n'exercer aucun recours à l'encontre d'un permis de construire valait pour l'ensemble du projet immobilier ainsi autorisé, y compris donc pour ses composantes ne relevant pas isolément du champ d'application de cette autorisation d'urbanisme.

    Bien plus, il a pu être notamment jugé que :

    - d’une part, l'annulation d'un permis de construire interdisait la poursuite de l'ensemble des travaux se rapportant au projet précédemment autorisé, y compris s'il s'agit de simples travaux d'aménagement intérieur (Voir notre note : « Sur l'objet du permis de construire et les conséquences de son annulation sur la poursuite des travaux », CA Bordeaux, 21 févr. 2008, n° 07/004980, Sté Hatexim, Construction & Urbanisme n° 6/2008) puisque même si par principe le permis de construire ne sanctionne pas en tant que tel l'aménagement intérieur d'une construction – hors du cas des « ERP » pour ce qui concerne les règles de sécurité et d’accessibilité » – il n'est pas non plus totalement étranger à cette question dès lors qu'il la saisit indirectement à travers la destination de l'ouvrage, dont il s'ensuit, d'ailleurs, que si de simples différences entre l'aménagement intérieur autorisé et celui réalisé ne sauraient permettre à l'Administration de contester la conformité des travaux, il en va différemment lorsque les aménagements effectivement exécutés traduisent un changement de destination de l'ouvrage au regard de celle autorisée (CAA Bordeaux, 30 mars 2000, n° 97BX00229, Rassinoux ) ;

    - d’autre part, lorsque le projet n'est pas conforme aux prescriptions d'urbanisme lui étant opposables, l'Administration est tenue d'opposer un refus de permis de construire pour l'ensemble du projet, y compris pour ses composantes impliquant des travaux qui, pris isolément, ne relèvent pas du champ d'application du permis de construire ; étant relevé que dans cette affaire, il s'agissait précisément de travaux d'aménagement intérieur destinés pour la plupart à modifier la destination d'une construction existante que, par voie de conséquence, la cour jugea ainsi indivisibles du projet soumis à autorisation (CAA Bordeaux, 30 juill. 2001, n° 98BX01492, Cne Saint-Philippe).

    Mais en l’espèce, on pouvait s’interroger sur la nécessité même d’obtenir à tout le moins un « modificatif » puisqu’il s’agissait de créer 207 aires de stationnement en un autre endroit que celles initialement prévues cependant que la Cour administrative d’appel de Bordeaux puis le Conseil d’Etat avaient précédemment jugé que si par principe toute modification d’un projet soumis à permis de construire implique l’obtention d’un modificatif, il en va différemment lorsque les constructions, aménagements et où installations en cause ne sont ni attenants, ni structurellement liés à la construction objet du permis de construire en cours d’exécution (voir nos notes : « La réalisation d’une piscine découverte isolée et dissociable d’une construction objet d’un permis de construire relève de la déclaration préalable et n’impose donc pas l’obtention d’un « modificatif », CAA. Bordeaux, 27 juin 2007, Ville de Toulouse, Construction & Urbanisme, n°9/2007 & « Aménagement accesoire d'une construction illégale: permis de construire, modificatif ou déclaration préalable ? », CE, 9 janvier 2009, Ville de Toulouse, AJDA, n°11/ 2009).

    Il reste, et c’est selon le nous le critère déterminant sur ce point, qu’il ne s’agissait pas seulement de créer ces aires mais également de supprimer celles initialement prévues pour satisfaire a priori aux prescriptions applicables en la matière.

    Or, quand bien même la création de ces places aurait-elle été, prise isolément, dispensée de toute formalité, ou assujettie alors à autorisation « ITD », puis effectivement réalisées, il n’en aurait pas mois demeuré que la non réalisation des 57 places initialement prévues aurait justifié que l’administration conteste la conformité des travaux réalisés au titre du permis de construire obtenu dès lors que cette conformité doit être exclusivement appréciée au regard des travaux prévus par l’autorisation dont l’exécution et l’achèvement ont déclenché les opérations de récolement.

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Veille administrative : réponse ministérielle sur la suppression de l'avis conforme des "ABF" dans les ZPPAUP

    ANABF.jpgCinq questions (QE n° 4460, 53426, 53427, 54793 et 54794)   pour une même réponse (JOAN - 08/09/2009; p. 8512) :

    « L'article 9 de la loi n° 2009-967 du 3 août 2009 de programmation relative à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement - dite « Grenelle I » - prévoit désormais que l'avis des Architectes des bâtiments de France (ABF), préalable à la délivrance de l'autorisation pour exécuter des travaux dans le périmètre des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), est un avis simple. Par voie de conséquence, la procédure de recours administratif contre l'avis de l'architecte des Bâtiments de France auprès du préfet de région a été supprimée.

    Ces nouvelles dispositions ne mettent en cause, ni l'économie générale du dispositif des ZPPAUP, ni sa pérennité.

    ZPPAUP.jpgD'abord, l'autorité compétente pour la délivrance des autorisations d'urbanisme demeure bien entendu liée par les dispositions réglementaires de la ZPPAUP, sauf à prendre le risque d'une annulation de sa décision par le juge administratif, saisi par le représentant de l'État ou par des tiers. Ensuite, le nombre infime de recours enregistrés chaque année, jusqu'à ce jour, contre les avis des Architectes de Bâtiments de France en ZPPAUP, permet de penser que l'autorité compétente pour délivrer les autorisations d'urbanisme continuera, dans l'immense majorité des cas, de suivre ces avis.

    Les collectivités territoriales qui ont choisi la ZPPAUP comme instrument pour de leur politique de protection et de mise en valeur patrimoniale, dans le cadre d'un partenariat étroit avec l'État, comptent en effet, plus que jamais, sur l'expertise et l'appui des Architectes de Bâtiments de France, avec lesquels ils ont tissé des relations de confiance. Enfin, le ministre chargé de la culture conserve la faculté d'évoquer tout dossier dont l'Architecte des bâtiments de France est saisi. Le législateur a donc estimé que l'État devait conserver, sous cette forme, une procédure rapide et efficace pour garantir l'intérêt général de la protection et de la mise en valeur du patrimoine.

    Cette décision manifeste clairement, s'il en était besoin, l'intérêt accordé par le Parlement et le Gouvernement aux ZPPAUP, dispositif éprouvé qui concerne aujourd'hui plus de 600 communes. C'est la raison pour laquelle, au-delà de la question de la forme de l'avis de l'architecte des Bâtiments de France, la modernisation de la conception et de la gestion des ZPPAUP constitue un chantier capital. D'ores et déjà, la définition progressive d'une approche régionale de la politique des ZPPAUP, favorisée par la fusion des directions régionales des affaires culturelles (DRAC) et des services départementaux de l'architecture et du patrimoine (SDAP), permettra de conforter la lisibilité et, partant, la légitimité de l'action des Architectes des Bâtiments de France dans ces zones de protection. En outre, il est nécessaire d'examiner tous les moyens d'améliorer le régime de la ZPPAUP, tant du point de vue de son contenu que de ses procédures d'instruction et de ses modalités de gestion, et de s'interroger, à cette occasion, sur la répartition des rôles entre l'État et les collectivités territoriales dans sa mise en oeuvre. C'est pourquoi vient d'être confié à M. Thierry Tuot, conseiller d'État, le soin d'animer une mission de concertation et de propositions associant des élus nationaux et territoriaux aux professionnels de l'architecture et de la protection du patrimoine. Les conclusions de cette mission seront présentées dans des délais compatibles avec le calendrier des travaux parlementaires, l'objectif étant d'intégrer les pistes de travail retenues dans la loi dite « Grenelle II », dont le projet sera examiné par le Parlement à partir du mois d'octobre prochain ».

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés