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JURISURBA - Page 112

  • L’aménagement d’une aire de stockage de bateaux est assujetti à autorisation « ITD » et les travaux préparatoires s’y rapportant peuvent, à défaut d’autorisation, être interrompus sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme.

    Un bateau constitue un véhicule au sens de l’article R.422-2 du Code de l’urbanisme. Par voie de conséquence, les aires de stockage de bateaux de dix unités et plus, aménagées pour une durée supérieure à trois mois, relèvent du champ d’application de l’autorisation d’installations et de travaux divers. Par ailleurs, dès lors que les travaux préparatoires en cours d’exécution ne sont pas détachables d’un projet assujetti à une autorisation d’urbanisme, ceux-ci peuvent légalement donner lieu à l’édiction d’un l’arrêté interruptif pris sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme, y compris s’ils ne sont en eux-mêmes assujettis à aucune autorisation.

    CAA. Marseille, 18 mai 2006, M. Georges X…, req. n°03MA00455

    Dans cette affaire, la demande d’autorisation d’installations et de travaux divers (« ITD ») présentée par le pétitionnaire avait été rejetée au motif tiré de ce que l’aménagement projeté – en l’occurrence, une aire de stockage de bateaux assortie d’une rampe d’accès à la mer – méconnaissait les dispositions de l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme ainsi que les prescriptions subséquentes des articles ND.1 et ND.2 du POS communal. Mais nonobstant ce refus d’autorisation, le pétitionnaire devait engager les travaux projetés, lesquels firent conséquemment l’objet d’un arrêt en ordonnant l’interruption sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme.

    Après que le recours en annulation engagé à l’encontre tant de l’arrêté portant refus d’autorisation que de l’arrêté interruptif des travaux eu été rejeté par le Tribunal administratif de Nice, le constructeur saisit alors la Cour administrative d’appel de Marseille.

    S’agissant de la légalité du refus d’autorisation, d’une part, la principale question avait trait à l’assujettissement des travaux projetés à autorisation « ITD » dont le champ d’application est strictement défini par l’article R.442-2 du Code de l’urbanisme, lequel vise notamment « les aires de stationnement ouvertes au public et les dépôts de véhicules, lorsqu'ils sont susceptibles de contenir au moins dix unités» (b), « lorsque l'occupation ou l'utilisation du terrain doit se poursuivre durant plus de trois mois ». En effet, lorsqu’un projet de construction n’est pas assujetti à l’autorisation d’urbanisme pourtant sollicitée par le constructeur, l’administration doit la refuser mais ce, uniquement sur le motif tiré du non-assujettissement à l’autorisation demandée : tout autre motif de refus étant donc illégal (pour exemple : TA. Nice, 18 novembre 1999, M. Carl c/ Cne de Menton, req. n°95-3794).

    Et sur ce point, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé « qu’il ressort des pièces du dossier que le projet en litige visait à organiser sur un terrain de 1940 m2 comportant déjà un bâtiment à usage de garage à bateaux, le stationnement en extérieur de bateaux de plaisance en nombre supérieur à 10 pour une durée de plus de trois mois ; qu'à supposer même que ce projet prenne la suite d'une précédente activité de stockage de bateaux antérieure à l'approbation du plan d'occupation des sols de la commune, qui au demeurant n'avait jamais fait l'objet d'une autorisation, il porte sur une extension de cette activité devant faire l'objet de l'autorisation prévue à l'article R.442-2 du code de l'urbanisme ».

    En d’autres termes, la Cour a donc considéré qu’un bateau constitue donc un véhicule au sens de l’article R.442-2-b) du Code de l’urbanisme et, par voie de conséquence, a donc jugé que l’aménagement d’une aire de stockage de bateaux d’une capacité d’accueil de dix unités et plus exigeait l’obtention préalable d’une autorisation « ITD ». Il faut donc en déduire que l’article précité vise tout type de véhicules, à savoir non seulement les véhicules terrestres mais également les véhicules nautiques, voire les véhicules aériens.

    Constatant que l’aire de dépôt projetée était incompatible avec les prescriptions de l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme et, en outre, interdite par les prescriptions combinées des articles ND.1 et ND.2 du POS communal, la Cour administrative d’appel de Marseille a donc validé tant le refus d’autorisation « ITD » opposé au pétitionnaire que son motif.

    Quant à la légalité de l’arrêté interruptif des travaux, d’autre part, le requérant faisait valoir que les travaux constatés par le procès-verbal d’infraction étaient des travaux préparatoires dont l’exécution ne pouvait justifier un arrêté interruptif des travaux dans la mesure où, pris isolément, ces travaux ne relevaient du champ d’application d’aucune autorisation d’urbanisme.

    On sait en effet que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de préciser qu’un arrêté interruptif pris sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme est illégal si les travaux sont achevés et qu’il en va ainsi lorsque les travaux en cours d’exécution sont des travaux de finition ne relevant pas en eux-mêmes du champ d’application d’une autorisation d’urbanisme (CE. 2 mars 1994, Cne de Saint-Tropez, req. n°135.448).

    A priori, la même conclusion pouvait s’imposer pour ce qui concerne les travaux préparatoires. Il reste que la position du Conseil d’Etat sur ce point n’est pas si éloignée de celle au terme de laquelle il considère, en tant que juge des référés, qu’il n’y a plus urgence à suspendre un permis de construire lorsque les travaux sont achevés ou quasi-achevés et, par voie de conséquence, il n’y a plus lieu alors de statuer sur les requêtes présentées à cet effet (CE. 26 juin 2002, Demblans, Juris-data n°2002-064059).

    Or, s’il n’est plus utile d’ordonner l’interruption des travaux illégalement entrepris lorsque ceux-ci sont quasi-achevés, force est d’admettre qu’il peut être opportun d’ordonner l’interruption de travaux préparatoires à une opération assujettie à l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme. D’ailleurs, le Conseil d’Etat déduit l’urgence à suspendre l’exécution d’une autorisation d’urbanisme du seul fait que les travaux ainsi autorisés sont susceptibles d’être entrepris à tout moment.

    Et précisément, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé que « si M. X soutient que le maire de Théoule-sur-Mer ne pouvait ordonner l'interruption de travaux qui n'étaient pas soumis à délivrance d'une autorisation, il ressort de l'instruction que les travaux entrepris n'étaient pas détachables de l'opération dont la réalisation avait fait l'objet d'un refus le 31 mars 2000 ; qu'au vu du procès-verbal constatant cette infraction, le maire de Théoule-sur-Mer était donc tenu, comme il l'a fait le 5 octobre 2001, de prendre un arrêté prescrivant la cessation des travaux en cause, sur le fondement des dispositions de l'article L.480-2 du code de l'urbanisme ».

    S’ils sont illégaux, les travaux préparatoires à une opération assujettie à autorisation d’urbanisme peuvent donc être interrompus sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme, y compris s’ils n’exigent pas en eux-mêmes une telle autorisation puisqu'ils doivent néanmoins relever de celle-ci (sur ce point, voir ici).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • L’élargissement de la voie motivant une cession gratuite du terrain doit être prévu à la date délivrance du permis de construire pour être pris en compte au titre de l’article R.111-4

    Si eu égard à sa largeur, la voie assurant la desserte du terrain à construire ne répond pas aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme, la cession d’une portion de ce terrain, imposée au pétitionnaire au titre de l’article R.332-15 du Code de l’urbanisme, aux fins d’assurer son élargissement ne peut être prise en compte si les travaux projetés à cet effet ne sont pas prévus à la date de délivrance du permis de construire

    CAA. Marseille, 4 mai 2006, EURL C2C, req. n°02MA021327

    L’arrêt de la Cour administrative d’appel de Marseille du 4 mai 2006 apporte certaines précisions sur les conditions dans lesquelles les voies futures ou les futurs travaux d’aménagement des voies existantes peuvent être pris en compte aux fins d’établir la conformité d’une autorisation d’urbanisme aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme dont on rappellera qu’il s’impose tant aux permis de construire et aux déclarations de travaux qu’aux autorisations de lotir.

    On sait, en effet, qu’en application du principe selon lequel la légalité d’une autorisation d’urbanisme s’apprécie en considération des circonstances de droit et de fait présentes à sa date de délivrance, le terrain d’assiette d’une opération assujettie au respect des prescriptions de l’article précité doit, à la date de délivrance de ce dernier, être desserve par une voie présentant des caractéristiques techniques et fonctionnelles adaptées à l’importance et à la destination des constructions projetées, de sorte à garantir leur accessibilité et la sécurité tant de leurs occupants que des tiers.

    Il peut, toutefois, arriver qu’à date où le pétitionnaire présente son projet à l’administration et, le cas échéant, obtient son permis de construire, le terrain d’assiette du projet soit enclavé ou desservi par une voie ne présentant pas les caractéristiques requises mais qu’en revanche, la réalisation d’une voie nouvelle ou l’élargissement d’une voie existante soient envisagée par l’administration.

    La question est alors de savoir si ces travaux d’aménagement routier peuvent être pris en compte pour apprécier la conformité du permis de construire obtenu aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme. Il ressort des quelques affaires où le juge administratif ait eu à se prononcer sur cette problématique que des tels travaux peuvent être pris en compte pour autant qu’à la date de délivrance de l’autorisation attaquée, deux conditions soient réunies (toutefois, voir ici).

    Au premier chef, la réalisation des travaux d’aménagement routier considérés doit avoir été effectivement planifiée, ce qui implique qu’elle ait à tout le moins fait l’objet d’une décision de principe de la collectivité compétente (CE. 28 juillet 2000, Cne de Decines-Charpieu, req. n°199.325. Voir également, à propos de l’illégalité d’un refus de permis de construire motivé par l’article R.111-4 en considération d’un projet de giratoire n’ayant fait l’objet d’aucune décision de principe : CAA. Lyon, 2 novembre 2004, M. Jaunay, req. n°98LY00089).

    Mais bien plus, il est également nécessaire que la date de réalisation des travaux puisse être établie avec un certain degré de certitude. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a jugé que le seul projet d’aménagement d’un passage non viabilisé ne pouvait être pris en compte dès lors que sa date de réalisation était incertaine (CE. 7 mai 1986, Mme Kindersmans, req. n°59.847 ; voir également : CAA. Bordeaux, 4 décembre 2003, Cne de Toulouse, req. n°99BX00686) et que le Tribunal administratif de Nice a considéré qu’il en allait de même à l’égard d’un projet d’élargissement d’une voie planifié par le POS dès lors que l’échéance et les modalités de réalisation de ce projet n’étaient pas arrêtées à la date de délivrance du permis de construire en cause (TA. Nice, 5 mars 1998, M. Macherez, req. n°94-03028).

    On peut même raisonnablement penser que le seul fait que la date de réalisation des travaux soit connue ne suffirait pas si elle était trop éloignée. En toute hypothèse, force est de constater que dans l’une des rares affaires où le juge administratif a tenu compte de travaux d’aménagement routier futurs, ces derniers avait non seulement fait l’objet d’une déclaration d’utilité publique mais étaient en outre en voie d’achèvement à la date de délivrance du permis de construire contesté (TA. Nice. 31 janvier 1984, Gianotti, req. n°83-0011 ; voir ici) et, à tous le moins, que cette achèvement soit prévu à brève échéance (voir là).

    Il reste que dans ces affaires, il n’existait strictement aucun lien juridique entre les permis de construire attaqués et les projets d’aménagement considérés. En revanche, dans l’affaire objet de l’arrêt commenté, l’élargissement de la voie publique desservant les terrains objets des deux autorisations lotir contestées était évoqué par le lotisseur dans la mesure où, en application de l’article R.332-15 du Code de l’urbanisme, l’administration lui avait prescrit de céder une partie de ces terrains aux fins de procéder à cet élargissement.

    La réalisation des lotissements projetés était donc conditionnée à ces cessions de terrains aux fins d’élargir la voie devant en assurer la desserte. Pour autant, la Cour administrative d’appel a jugé :

    « Considérant que, par arrêtés en date du 17 octobre 2000 et du 8 novembre 2000, le maire de Marseille a autorisé l'EURL C2C à créer respectivement le lotissement «Verte Feuille» comprenant quatre lots sur un terrain, sis 50 traverse Montcault, et le lotissement «Le Clos Montcault» comprenant onze lots sur un terrain sis 67 traverse Montcault ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment des plans d'accès, que les deux lotissements projetés doivent être implantés de part et d'autre de la traverse Montcalt, voie au profil particulièrement sinueux d'une longueur de 1.100 mètres, présentant en maints endroits une largeur insuffisante pour permettre à des véhicules de se croiser dans des conditions de sécurité suffisante ; que si les deux autorisations de lotir en litige étaient assorties d'une obligation de cession gratuite de terrain au profit de la Ville de Marseille en vue de permettre l'élargissement de la voie de desserte au droit de ces lotissements, les travaux d'aménagement de la chaussée n'étaient pas encore prévus aux dates auxquelles ces autorisations ont été délivrées ; qu'ainsi, alors que la voie de desserte des projets supporte déjà le trafic généré par les riverains, dans un quartier résidentiel, auquel viendra s'ajouter celui induit par les deux projets autorisés qui créeront au total 15 logements supplémentaires, le maire de Marseille, en délivrant ces deux autorisations de lotir à l'EURL C2C, a entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation ».

    Dans cette affaire, la Cour a donc considéré que l’élargissement allégué ne pouvait donc être pris en compte pour apprécier la conformité des autorisations de lotir attaquées aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme puisque « les travaux d'aménagement de la chaussée n'étaient pas encore prévus aux dates auxquelles ces autorisations ont été délivrées » et qu’a fortiori, leur date de réalisation n’était pas alors connu et ne modifiait donc rien à la circonstance qu’à ces dates, la voie devant assurer la desserte des lotissements projetés était d’une largeur insuffisante pour permettre le croisement de deux véhicules.

    Le seul fait que l’élargissement de la voie soit directement saisi par l’autorisation d’urbanisme en cause via une prescription imposée au titre de l’article R.332-15 du Code de l’urbanisme ne modifie donc en rien les conditions nécessaires pour que des travaux d’aménagement routier futurs puissent assurer la conformité d’un projet au regard de l’article précité.

    Il faut dire qu’une telle prescription ne garantie pas à elle seule la réalisation des travaux de voirie la motivant dans la mesure où non seulement l’administration bénéficiaire n’a aucun délai pour les réaliser (Cass. civ. 20 janvier 2002, Epx Bourbigot, pourvoi n°010571) mais qu’en outre, celle-ci n’a même aucune réelle obligation de les exécuter puisqu’aucune disposition du Code de l’urbanisme ne lui impose de rétrocéder le terrain lorsqu’ils n’ont pas été réalisés (CE. 11 janvier 1995, Epx Thot, req. n°119.144).

    Au surplus, on pouvait même s’interroger sur la légalité de la cession de terrain imposée au lotisseur dans cette affaire puisque la légalité d’une telle prescription semble subordonnée à l’existence d’un projet précis d’aménagement routier (en ce sens : CE. 20 juin 2006, M. et Mme Jean A…, req. n°281.253), ce qui n’était donc pas le cas en l’espèce.

    Mais toute hypothèse, sans que cela ait nécessairement été le cas dans cette affaire, il résulte de cet arrêt que l’administration et le pétitionnaire ne peuvent que difficilement s’entendre sur l’édiction d’une prescription fondée sur l’article R.322-15 du Code de l’urbanisme dans le seul but assurer la conformité d’un projet de construction à l’article R.111-4 puisqu’il est nécessaire qu’à la date de délivrance du permis de construire en constituant le fait générateur, le projet de création, d’élargissement ou de redressement de la voie la motivant ait été précédemment établi de façon précise.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • Le pétitionnaire peut présenter deux titres habilitant à construire de nature distincte

    Une demande de permis de construire portant sur deux parcelles distinctes satisfait aux prescriptions de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme dès lors que le pétitionnaire justifie d’un titre habilitant à construire sur chacune d’entre elles. Ce dont il résulte qu’un permis de construire peut légalement porter sur deux unités foncières distinctes, lesquelles constituent le terrain d'assiette du projet au sens de l'article R.111-4 du Code de l'urbanisme et, a priori et de façon plus générale, au sens de la législation sur le permis de construire.

    CAA. Marseille, 13 avril 2006, Mme Ginette X & M. Jean-Paul Y., req. n°04MA01013


    Dans cette affaire, le permis de construire obtenu par la société SMCI DEVELOPPEMENT, le 2 juillet 2002, était contesté par deux particuliers, lesquels lui faisaient, notamment, grief de méconnaître les prescriptions de l’article R.421-1-1.al.-1 du Code de l’urbanisme aux termes duquel la demande de permis de construire doit être présentée soit par le propriétaire du terrain à construire, soit par son mandataire, soit par une personne disposant d’un titre habilitant à construire.

    En l’espèce, le terrain objet de la demande de permis de construire était constituée de deux parcelles ; la première appartenant à une société tierce, la seconde à la Ville de Marseille. Il s’ensuit que le pétitionnaire n’était ni propriétaire des parcelles à construire, ni mandataire des propriétaires de ces dernières. En revanche, à la date de délivrance du permis de construire, son dossier de demande comportait, d’une part, une attestation notariale émanant de la société propriétaire de la première parcelle, établissant qu’elle l’avait autorisé à présenter une demande de permis de construire sur cette dernière et d’autre part, d’une délibération par laquelle le conseil municipal de Marseille avait approuvé la cession de la seconde au profit du pétitionnaire.

    C’est dans cette mesure que la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé que :

    « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article R. 421-1-1 du code de l'urbanisme : « La demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain » ; qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette du projet est constitué de deux parcelles cadastrées M 78 et M 118 ; qu'à l'appui de la demande de permis, était jointe, d'une part, une attestation notariale selon laquelle les propriétaires de la parcelle M. 78 autorisaient la société SMCI DEVELOPPEMENT, gérant de la société MARSEILLE 9ème -12 avenue MARIUS OLIVE, ou toute autre société civile immobilière pouvant s'y substituer, à déposer une demande de permis de construire sur leur parcelle ; que la société pétitionnaire justifiait ainsi d'un titre l'habilitant à construire sur ladite parcelle M 78 ; que, d'autre part, par délibération du 28 janvier 2002, le conseil municipal de Marseille a approuvé la convention de cession entre la ville de Marseille et la société SMCI DEVELOPPEMENT, ou toute société qui s'y substituerait, portant sur la parcelle M 118 ; qu'en l'absence de toute contestation, la société MARSEILLE 9ème -12 avenue MARIUS OLIVE a été regardée à bon droit par le service instructeur de la demande comme également titulaire d'un titre l'habilitant à construire sur cette parcelle, alors même que l'acte de cession n'était pas intervenu lors de la délivrance du permis de construire contesté ; que, contrairement à ce que soutiennent les requérants, le terrain d'assiette du projet n'est pas enclavé dès lors que la parcelle M 78 dispose d'un accès direct sur l'avenue Marius Olive, dont il n'est pas contesté qu'elle présente le caractère d'une voie ouverte à la circulation publique ; que, par suite, la société pétitionnaire n'avait pas à justifier du désenclavement de la parcelle M 118 non plus que d'un droit à utiliser ladite voie ».

    Cet arrêt confirme clairement qu’un pétitionnaire peut présenter plusieurs qualités et titres distincts à l’égard du terrain objet de sa demande de permis de construire ; l’essentiel étant qu’ils l’habilitent à construire sur l’ensemble de celui-ci.

    On sait, en effet, que la Cour administrative d’appel de Paris avait pu précédemment juger qu’un permis de construire pouvait être légalement délivré à un mandataire agissant pour le compte d’une société propriétaire d’une partie du terrain à construire et titulaire d’une promesse de vente sur l’autre partie de ce terrain (CAA. Paris, 19 mars 1997, Sté total, req. n°95PA01502).


    Il reste que dans la mesure où une promesse de vente confère non pas un titre habilitant à construire à proprement parler mais la qualité de propriétaire apparent du terrain sur lequel elle porte (CE. 13 janvier 1993, M. et Mme Mijon, req. n°118.347), le bénéficiaire du permis de construire présentait donc, dans cette affaire, une seule et même qualité à l’égard de l’ensemble du terrain d’assiette du projet.

    En revanche, dans l’affaire objet de l’arrêté commenté, le pétitionnaire disposait de deux titres différents lui conférant deux qualités distinctes puisque l’attestation notariale établissant l’autorisation consentie par la société propriétaire de la première parcelle constituant le terrain à construire ne faisait état d’aucune promesse de vente consentie au pétitionnaire. On peut, toutefois, relever que s’agissant du titre présenté sur la parcelle relevant de la Ville de Marseille, la Cour a estimé que la délibération approuvant la cession de celle-ci au pétitionnaire suffisait dès lors qu’elle était antérieure à la date de délivrance du permis de construire, sans rechercher si ultérieurement cette vente avait été effectivement réalisée. Or, si le juge administratif admet que des « actes préparatoires » existants à la date de délivrance du permis de construire peuvent conférer une qualité et un titre habilitant à construire au sens de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme, c’est dans la mesure où ceux-ci sont confortés par des éléments postérieurs à cette date (à propos de la délibération autorisant la signature d’un bail emphytéotique, conclu postérieurement au permis de construire : CE. 26 février 1988, Assoc. pour la sauvegarde du Parc Saint-Leu, Rec., p.90) : ce que la Cour administrative d’appel de Marseille n’a donc pas cru devoir vérifier ou, à tout le moins, relever.

    Par voie de conséquence, cet arrêt apporte également deux autres confirmations importantes.

    D’une part et au delà de la problématique liée à la qualité et au titre habilitant à construire, un même permis de construire peut donc être délivré sur deux unités foncières distinctes puisque dans cette affaire les deux parcelles à construire pour être contiguës n’en relevaient pas moins de deux propriétaires différents à la date de délivrance du permis de construire attaqué. Et si le pétitionnaire avait manifestement vocation à acquérir la propriété de la parcelle relevant de la Ville de Marseille, rien ne laisse à penser qu’il en était de même s’agissant de l’autre. Plus généralement d’ailleurs, rien ne semble s’opposer à ce qu’un même permis de construire porte sur des unités foncières non contiguës et ce, d’autant moins que l’éventuelle indivisibilité de l’opération projetée impose au pétitionnaire de présenter une demande unique, le cas échéant dans chacune des mairies concernées par son projet lorsque le terrain d’assiette de ce dernier, éventuellement formé de plusieurs unités foncières, est sis sur le territoire de plusieurs communes (CE. 26 mars 1997, ADLA, req. n°172.183).

    D’autre part, la notion de terrain au sens de la législation sur le permis de construire s’entend, par principe, de l’ensemble des parcelles sur lesquelles porte la demande, qu’elles constituent une ou plusieurs unités foncières. On rappellera, en effet, qu’aux termes de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme le permis de construire peut être refusé si « les terrains » ne sont pas desservi par des voies répondant à l’importance et à la destination des constructions projetées. Or, dans l’affaire objet de l’arrêt commenté, la Cour administrative d’appel de Marseille a estimé que le terrain d’assiette du projet ne pouvait être considéré comme enclavé dans la mesure où si l’unité foncière appartenant à la Ville de Marseille ne disposait pas d’un accès à une voie ouverte à la circulation publique, l’unité foncière contiguë sur laquelle portait également la demande de permis de construire disposait, en revanche, d’un tel accès : il n’était donc pas nécessaire que le pétitionnaire justifie du désenclavement de la première. C’est donc bien le terrain d’assiette du projet conçu comme la réunion des parcelles le constituant qui doit satisfaire aux prescriptions de l’article R.111-4 du Code de l’urbanisme, sans qu’il soit besoin, le cas échéant, que tel soit le cas de l’ensemble des unités foncières qu’il englobe.

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • La suppression d’une ZAC n’est pas nécessairement assujettie à concertation et peut être régulièrement motivée par l’intérêt financier de l’aménageur

    Par principe et nonobstant les dispositions des articles L.300-2 et R.311-32 (anc.) du Code de l’urbanisme selon lesquelles, d’une part, la« création de zone d’aménagement concerté » est soumise à concertation et, d’autre part, « la suppression d’une zone d’aménagement concerté est prononcée (…) dans les formes prescrites pour la création de la zone », la suppression d’une ZAC ne relève pas du champ d’application de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme. Par ailleurs, cette suppression peut être motivée par des considérations tenant à l’aménageur de cette zone et, notamment, par son intérêt financier.

    CAA. Paris, 2 février 2006, Cne de Puteaux, req. n°03PA00122


    Par un arrêté du 19 avril 1994, le Préfet des Hauts-de-Seine avait créé la ZAC « Nord du Rond-Point des Bergères » sur le territoire de la commune de Puteaux, dont l’EPAD fut ensuite désigné aménageur. Toutefois, ne pouvant faire face aux charges financières relatives à l’acquisition des terrains nécessaires à la réalisation de la ZAC, l’EPAD sollicita du représentant de l’Etat dans le département qu’il abroge l’arrêté du 19 avril 1994 et, en d’autres termes, supprime la ZAC précédemment créée ; ce que celui-ci fit par un nouvel arrêté du 8 juillet 2000.

    La commune de Puteaux exerça alors un recours en annulation à l’encontre de l’arrêté du 8 juillet 2000 qui fut rejeté comme irrecevable par le Tribunal administratif de Paris et ce, pour violation des prescriptions de l’article L.2122-22 du Code général des collectivités territoriales. La commune interjeta appel de ce jugement auprès de la Cour administrative d’appel de Paris, laquelle annula le jugement de première instance mais rejeta néanmoins sur le fond le recours en annulation à l’encontre de l’arrêté du 8 juillet 2000 et ce faisant, apporta deux précisions d’importance en matière de suppression de ZAC, la première concernant la procédure préalable, la seconde ayant trait aux motifs de cette suppression.

    La commune de Puteaux soutenait, en effet, que la procédure de concertation organisée par l’EPAD avant de solliciter la suppression de la ZAC créée en 1994 n’avait pas respecté les prescriptions de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme.

    On sait en effet qu’à la date d’édiction de l’arrêté contesté – le 8 juillet 2000, soit antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 dite « SRU » – l’article R.332-30 du Code de l’urbanisme alors applicable disposait que « la suppression d’une zone d’aménagement concerté est prononcée (…) dans les formes prescrites pour la création de la zone ». Et précisément, aux termes de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme toute « création de zone d’aménagement concerté » doit être précédée de la procédure de concertation qu’il organise.

    Pour autant, la Cour administrative d’appel de Paris refusa d’apprécier la régularité de la « concertation » organisée par l’EPAD à la lumière de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme et, par voie de conséquence, rejeta le moyen tiré de ce dernier à l’encontre de l’arrêté du 8 juillet 2000 :

    « Considérant que la décision de suppression d'une zone d'aménagement concerté ne figure pas parmi les catégories d'actes pour lesquels, en vertu des dispositions combinées de l'article L. 300-2 et de l'article R. 300-1 du code de l'urbanisme pris pour l'application du c) de l'article L. 300-2, l'organisation d'une concertation préalable est obligatoire ; que, si l'article R. 311-32 précité impose que l'acte de suppression d'une zone d'aménagement concerté soit pris dans les mêmes formes que celui par lequel la zone a été créée, il n'implique la répétition des procédures préalables à la création avant l'intervention de l'acte de suppression que pour autant que ces procédures soient de nature à mieux éclairer l'auteur de la décision à prendre ; que tel n'était pas le cas de la procédure de concertation de l'article L. 300-2 précité, eu égard aux motifs budgétaires qui justifiaient la suppression de la zone et au peu d'influence de la mesure sur les conditions de vie des résidents du quartier, alors même que l'arrêté de création n'avait reçu aucun réel commencement d'exécution ; qu'ainsi, l'EPAD n'était pas tenu de mettre en oeuvre cette procédure avant de saisir le préfet d'une demande d'abrogation de l'arrêté du 19 avril 1994, portant création de la zone d'aménagement concerté Nord du Rond-Point des Bergères ;
    Considérant que, compte tenu de ce qui a été dit ci-dessus, la concertation dont le conseil d'administration de l'EPAD a décidé l'organisation par une délibération du 7 juillet 1999 avait un caractère facultatif ; que l'EPAD ne s'est pas référé à l'article L. 300-2 et qu'il n'était donc pas tenu d'en respecter toutes les exigences procédurales ; qu'ainsi les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article L. 300-2 ont été méconnues en ce que le conseil d'administration n'a pas déterminé toutes les modalités de la concertation et que la COMMUNE DE PUTEAUX n'a pas donné son accord sur ces modalités sont, en tout état de cause, inopérants ; que les modalités de la concertation, qui consistaient en une information dans deux journaux et la tenue d'un registre en mairie, étaient suffisantes eu égard à la nature du projet concerné, qui n'était pas de nature à modifier de manière substantielle le cadre de vie ou l'activité économique de la commune ; que, compte tenu de l'opposition du maire de Puteaux, la tenue d'un registre à la mairie de la commune a revêtu le caractère d'une formalité impossible et que l'EPAD a pu, sans commettre d'illégalité, y substituer la tenue d'un registre dans un local situé dans la zone d'aménagement concerté et mis à disposition des habitants par l'EPAD ; que, dès lors, les moyens relatifs à la régularité de la concertation préalable doivent être écartés
    »

    Il faut ainsi relever que malgré les dispositions expresses de l’ancien article R.311-32 du Code de l’urbanisme et selon lesquelles « la suppression d’une zone d’aménagement concerté est prononcée (…) dans les formes prescrites pour la création de la zone », la Cour administrative d’appel de Paris a donc considéré qu’une telle suppression ne relevait pas de la procédure de concertation prescrite par l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme s’agissant des créations de ZAC.

    Pour ce faire, la Cour s’est attachée, d’une part et de façon générale, à la finalité de la l’article R.311-32 du Code de l’urbanisme qui, pour elle, « n'implique la répétition des procédures préalables à la création avant l'intervention de l'acte de suppression que pour autant que ces procédures soient de nature à mieux éclairer l'auteur de la décision à prendre » et d’autre part et plus spécifiquement, « aux motifs budgétaires qui justifiaient la suppression de la zone et au peu d'influence de la mesure sur les conditions de vie des résidents du quartier, alors même que l'arrêté de création n'avait reçu aucun réel commencement d'exécution ». Il semble donc que la Cour a considéré qu’en l’espèce, la concertation prescrite par l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme n’était ni utile, compte tenu des motifs budgétaires de la suppression de ZAC contestée par la commune de Puteaux, qui ne semblent donc pas être de ceux sur lesquels les administrés ont vocation à s’exprimer, ni nécessaire dans la mesure où cette suppression intervenait avant que la réalisation de la ZAC n’ait été engagée, si bien qu’elle ne modifiait pas les conditions de vie des administrés concernés puisqu’ainsi, ces dernières demeureraient telles qu’elles étaient avant la création de la ZAC finalement supprimée.

    Par voie de conséquence, la Cour administrative d’appel de Paris a donc jugé que la concertation engagée par l’EPAD avant de solliciter du Préfet des Hauts-de-Seine qu’il supprime la ZAC créée en 1994 présentait un caractère facultatif.

    Il reste que lorsqu’une personne publique s’auto-assujettit à une règle de procédure pourtant facultative celle-ci est tenue de la suivre strictement, sauf à entacher la décision subséquente d’illégalité (CE. 10 décembre 1993, Assoc. « Bellerive Malmaison » ; Circulaire n°95-25 du 10 avril 1995, BOME, n°95/12, p.73). Toutefois, la Cour a relevé que si le conseil d’administration de l’EPAD avait décidé d’engager une procédure de concertation préalable, sa décision ne s’était toutefois pas expressément référée aux dispositions de l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme pour ainsi en déduire que l’EPAD « n'était donc pas tenu d'en respecter toutes les exigences procédurales » et, par voie de conséquence, que « les moyens tirés de ce que les dispositions de l'article L. 300-2 ont été méconnues en ce que le conseil d'administration n'a pas déterminé toutes les modalités de la concertation et que la COMMUNE DE PUTEAUX n'a pas donné son accord sur ces modalités sont, en tout état de cause, inopérants ».

    Sur ce point, la Cour s’en est donc tenue au cadre dans lequel l’EPAD avait entendu intervenir ou, plus précisément n’avait pas expressément entendu intervenir plutôt que de rechercher la finalité ainsi poursuivie par son conseil d’administration.

    Toutefois, dans la mesure où l’EPAD s’était auto-assujetti à une forme de concertation (bien qu’il ne s’agisse donc pas de celle prévue par l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme) la Cour administrative d’appel de Paris a néanmoins vérifié si les modalités de cette concertation avait été respectée et ce, conformément au principe selon lequel l’auto-assujettissement à un règle de procédure facultative emporte l’obligation de la respecter.

    Mais à cet égard, la Cour administrative d’appel de Paris a considéré qu’il ne pouvait être fait grief à l’EPAD de ne pas avoir strictement respecté ce qu’il avait prévu dans la décision initiant la concertation qu’il avait décidé d’engager avant de la solliciter la suppression de la ZAC en cause – en l’occurrence, la tenue d’un registre d’observations en mairie de Puteaux – dans la mesure où si l’EPAD y avait finalement substitué la tenue d’un registre dans un autre local situé au sein du périmètre de cette ZAC, c’est dans la mesure où la commune de Puteaux s’était elle-même opposée à ce que registre soit établi dans sa mairie.

    On peut ainsi rapproché cette analyse de la modification apportée par la loi du 2 août 2003 dite « Urbanisme & Habitation » à l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme, au terme de laquelle : « les documents d'urbanisme et les opérations mentionnées aux a, b et c ne sont pas illégaux du seul fait des vices susceptibles d'entacher la concertation, dès lors que les modalités définies par la délibération prévue au premier alinéa ont été respectées ».

    Il reste que la solution proposée par la Cour administrative d’appel de Paris ne semble donc pas constituer une solution de principe s’imposant en toute hypothèse mais qu’au contraire certaines mesures de suppression de ZAC aient à être précédées de la procédure de concertation prescrite par l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme lorsque leurs motifs relèvent de ceux sur lesquelles les administrés concernés peuvent avoir intérêt à exprimer utilement leur opinion et/ou que la suppression en cause puisse avoir un impact significatif sur les conditions de vie de ces derniers. On peut ainsi penser, à titre d’exemple, qu’une suppression de ZAC décidée en cours de réalisation de cette dernière et motivée par la modification substantielle des besoins en ayant justifié la création serait assujettie à cette concertation.

    Il faut cependant nuancer cette conclusion ou, plus précisément, la cantonner aux décisions de suppression de ZAC édictées antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi « SRU » puisqu’aux termes de l’article R.311-12 du Code de l’urbanisme – dans sa rédaction issue de cette dernière – la suppression d’une zone d’aménagement concerté n’est plus prononcée, de façon générale, dans les formes prescrites pour la création de la zone mais « sur proposition ou après avis de la personne publique qui pris l'initiative de sa création, par l'autorité compétente, en application de l'article L. 311-1, pour créer la zone », cette proposition devant comprendre « un rapport de présentation qui expose les motifs de la suppression »..

    On précisera, toutefois, que selon l’article R.311-12 du Code de l’urbanisme « la modification d'une zone d'aménagement concerté est prononcée dans les formes prescrites pour la création de la zone ». Et sur ce point, on peut relever que le Conseil d’Etat a implicitement jugé qu’une modification de ZAC était assujettie à la procédure de concertation prescrite par l’article L.300-2 du Code de l’urbanisme et ce, indépendamment de toute considération liée aux motifs de cette modification ou à son impact sur les conditions de vie des administrés concernés (CE. 20 septembre 1999, Assoc. « Zone ZAC », req. n°156.958). Mais il est vrai que dans une certaine mesure la modification d’une ZAC préexistante aboutie à la création d’une ZAC distincte de celle initialement soumise à concertation ; on sait, d’ailleurs, qu’une collectivité publique ne peut légalement créer une ZAC s’écartant trop substantiellement du projet soumis à concertation sans avoir préalablement renouvelé cette procédure (en ce sens : CE. 18 mars 1994, Copropriété le Melchior, Rec., p.1244).

    Par ailleurs, la commune de Puteaux contestait la légalité du motif ayant conduit à la suppression de la ZAC en cause, en l’occurrence les difficultés financières rencontrées par l’EPAD. Mais cet égard, la Cour administrative d’appel de Paris a donc jugé que :

    « Considérant (…) que la demande de suppression de la zone d'aménagement concerté présentée par l'EPAD tenait essentiellement à l'impossibilité pour l'établissement de faire face à ses obligations financières liées notamment aux mises en demeure d'acquérir des biens immobiliers situés dans la zone, présentées ou susceptibles de l'être, par les propriétaires de ces biens ; qu'un tel motif financier, dont la réalité n'est pas contestée et quelle qu'en ait été la cause, était de nature à justifier légalement la demande d'abrogation présentée par l'EPAD (…) que la suppression décidée est la conséquence de l'impossibilité pour l'EPAD de faire face aux contraintes financières liées à la réalisation de l'opération du fait du désengagement de la COMMUNE DE PUTEAUX ; qu'ainsi le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi ».

    A ce sujet, on rappellera que dans la mesure où la décision de créer une ZAC n’est pas créatrice de droits (CE. 22 juin 1984, SCI Palaiseau-Villebon, Rec., p.773), l’administration peut à tout moment supprimer une ZAC pour un motif d’intérêt général – dont peuvent relever des considérations d’ordre économique et financier – même d’opportunité (CAA. Lyon 18 mai 1983, EURL SSD, req. n°92LY00066) sans que l’aménageur de celle-ci ne puisse s’y opposer. Mais il résulte donc de l’arrêt commenté que l’administration qui a créer une ZAC peut donc également la supprimer en considération de l’intérêt financier de l’aménageur sans que la commune sur le territoire de laquelle cette opération d’aménagement était projetée ne puisse s’y opposer.

    Il est, toutefois, surprenant que la Cour administrative d’appel de Paris n’est pas précisé en quoi la difficultés financières de l’aménageur relevaient d’une considération d’intérêt général au regard des préoccupations ayant concouru à la création de la ZAC en cause.

    Mais en toute hypothèse, cette décision ne saurait ici encore constituer une solution de principe dans la mesure où il n’est pas si certain qu’elle aurait été identique si l’aménageur de cette ZAC n’avait pas été une personne publique…


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat à la Cour
    Cabinet Frêche & Associés