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  • Quelles sont les pièces et les informations à fournir au dossier de demande de permis de construire ?

    Au-delà des prescriptions des articles R.431-5 et suivants du Code de l’urbanisme, le dossier produit par le pétitionnaire doit comporter l’ensemble des informations requises pour permettre à l’administration d’apprécier en toute connaissance de cause la conformité du projet objet de la demande aux normes d’urbanisme lui étant opposables.

    CAA. Bordeaux, 26 avril 2011, Sté Erentzin, req. n°10BX01940


    Voici un arrêt qui en lui-même n’est pas inintéressant mais qui nous offre surtout un prétexte pour revenir sur ce qui constitue assurément l’une des plus belles « erreurs de communication » de l’administration centrale au sujet de la réforme des autorisations d’urbanisme en vigueur depuis le 1er octobre 2007.

    Dans cette affaire, le pétitionnaire avait présenté une demande de permis de construire portant exclusivement sur la construction de logements. Le projet objet de cette demande n’incluait donc aucun « ERP » et, partant, le dossier présenté par le pétitionnaire n’avait pas à comporter le « volet sécurité » et le « volet accessibilité » prévus par l’article R.431-30 du Code de l’urbanisme.

    Pour autant, le pétitionnaire avait néanmoins produit à son dossier une notice de sécurité, notamment dédiée à la gestion des risques d’incendie. Toutefois, le Maire devait estimer que cette notice était insuffisante et, sans même avoir préalablement invité le pétitionnaire à la compléter, devait ainsi opposer un refus à la demande motivé par l’article R.111-2 du Code de l’urbanisme ; refus que devait donc valider le Tribunal administratif puis la Cour administrative d’appel de Bordeaux au motif suivant :

    « Considérant que la SARL ERENTZIN fait appel du jugement du 3 juin 2010 par lequel le Tribunal administratif de Pau a rejeté sa demande dirigée contre l'arrêté en date du 11 août 2008 du maire d'Hendaye refusant de lui délivrer un permis de construire ;
    Considérant que le contenu du dossier de demande de permis de construire déposé par la SARL ERENTZIN n'imposait pas à la commune d'Hendaye de notifier au pétitionnaire la liste des pièces manquantes ;
    Considérant qu'aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme : Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la notice de sécurité jointe à la demande de permis de construire présentée par la SARL ERENTZIN ne donne aucune indication sur l'existence à proximité du terrain d'assiette du projet d'un réseau d'eau et d'une borne incendie ayant un débit suffisant pour assurer la défense contre l'incendie du projet de construction de soixante logements ; que, dans ces conditions, la notice de sécurité jointe à la demande de permis de construire est incomplète, et ne permet pas à l'administration de vérifier si la défense contre l'incendie du projet était assurée
    ».


    Pour autant, comme on le sait, l’administration l’a dit et répété – et c’est écrit en gras le formulaire « CERFA » – les seules pièces exigibles du pétitionnaire sont celles limitativement énumérées par le Code de l’urbanisme ; il s’agirait d’une des grandes innovations de la réforme entrée en vigueur le 1er octobre 2007. (voir récemment : Rép. Min. n°98187, publiée au JO le : 26/04/2011 page : 4324).

    Ceci est pour partie exact mais a été mal expliqué et/ou mal interprété tant par de nombreux constructeurs, pensant qu’ils n’ont donc aucune autre pièce ou information à produire que celles prescrites par le Code de l’urbanisme, que par certains services instructeurs allant même jusqu’à considérer qu’ils leur incombent de refuser les pièces qu’entant produire le pétitionnaire alors qu’elles ne sont pas requises par le Code de l’urbanisme.

    Il y a en effet une différence à faire entre, en substance, les « pièces exigibles » de l’administration et les « pièces à produire » pour permettre à l’administration de ce prononcer en toute connaissance de cause sur. Ceci n’est pas nouveau et la réforme du 1er octobre 2007 n’y a pas changé grand-chose.

    Il est vrai que l’article R.431-38 dispose que : « lorsque le dossier ne comprend pas les pièces exigées en application du présent livre, l'autorité compétente, dans le délai d'un mois à compter de la réception ou du dépôt du dossier à la mairie, adresse au demandeur ou à l'auteur de la déclaration une lettre recommandée avec demande d'avis de réception ou, dans le cas prévu par l'article R. 423-48, un courrier électronique, indiquant, de façon exhaustive, les pièces manquantes » là où l’ancien article R.421-12 du Code de l’urbanisme se bornait à viser le cas où « le dossier est incomplet » ; sans autre précision sur ce qu’il fallait entendre par « dossier incomplet ».

    Pour autant, la jurisprudence rendue en application de l’ancien article R.421-12 du Code de l’urbanisme fut constante : compte tenu du caractère limitatif des pièces énumérées par le Code de l’urbanisme, l’administration ne pouvait légalement exiger aucune autre pièce au titre de cet article. Ce caractère limitatif avait une première conséquence :

    • lorsque le dossier était incomplet au regard des dispositions du Code de l’urbanisme, l’administration ne pouvait légalement motiver un refus de permis de construire par l’incomplétude du dossier sans avoir préalablement invité le pétitionnaire à compléter son dossier ;
    • en revanche, lorsque les pièces produites par le pétitionnaire ne permettaient pas d’établir la conformité du projet, l’administration pouvait légalement opposer un refus à la demande sans avoir à solliciter du pétitionnaire qu’il produise la pièce qui aurait permis d’établir cette conformité.

    C’est pourquoi l’arrêt commenté a validé le refus de permis de construire contesté après avoir précisé que « le contenu du dossier de demande de permis de construire déposé par la SARL ERENTZIN n'imposait pas à la commune d'Hendaye de notifier au pétitionnaire la liste des pièces manquantes ».

    Il reste, surtout, que le fait que l’administration ne puisse pas légalement exiger une pièce au titre de l’ancien article R.421-12 ou de l’actuel article R.431-38 du Code de l’urbanisme ne signifie donc pas que l’absence de production de cette pièce ne puisse pas motiver un refus de permis de construire lorsque que l’absence de cette pièce n’a privé les services instructeurs d’une information nécessaire à l’appréciation de la conformité du projet. A titre d’exemple, il a en effet été jugé que :

    « Considérant d'une part que par une lettre en date du 13 février 1997, le service instructeur de la demande de permis de construire déposée par M. X a demandé à ce dernier de lui fournir les autorisations données par les ayants-droits de la cour commune existante au droit du terrain d'assiette du projet pour la réalisation de la canalisation d'eaux usées et pour le raccordement sur la canalisation d'eaux pluviales existante ; que ces autorisations, qui ne relèvent pas des pièces qui, selon les articles R. 421-2 à R. 421- 7 doivent être jointes au dossier de demande de permis de construire, ne pouvaient faire l'objet d'une demande de pièces complémentaires de la part du service instructeur » (CAA. Paris, 7 aout 2003, Dugravot, req. n°00PA01735) ;

    mais néanmoins que :

    « Considérant, en deuxième lieu, qu'il est constant qu'à la date des actes entrepris MM. X... ne disposaient pas des autorisations de passage nécessaires à la desserte de leurs terrains par le réseau d'eau public ; que si MM. X... invoquent l'existence de servitudes de passage qu'ils ont obtenues en 1993 celles-ci n'étaient pas indiquées sur les plans masse du dossier de permis de construire soumis à l'administration ; qu'ainsi les refus de permis de construire se fondaient légalement sur le fait que leurs terrains, de superficies inférieures à 4000 m2 et non desservis par le réseau d'eau public, étaient inconstructibles en application de l'article NB5 du réglement du P.O.S. ;
    Considérant, en troisième lieu, que les dispositions des articles R.421-2 et suivants du code de l'urbanisme énumèrent de façon limitative les documents qui doivent être joints à une demande de permis de construire ; que, dès lors, les requérants ne peuvent utilement prétendre que le maire de SEILLONS-SOURCE-D'ARGENS était tenu de les inviter à fournir les attestations établissant l'existence de servitudes de passage avant de statuer sur leurs demandes de permis de construire, dès lors que de telles pièces ne sont pas requises pour demander un permis de construire
    » (CAA. Lyon, 25 avril 2000, Louis Arnaud, req. n°96LY00006).


    La distinction à opérer entre les « pièces exigibles » du pétitionnaire en raison du caractère limitatif des pièces énumérées par le Code de l’urbanisme et les « pièces à produire » de sorte à faire apparaitre la conformité du projet aux normes d’urbanisme lui étant opposable apparait également à travers la jurisprudence rendue au sujet des prescriptions pouvant légalement être édictées par un POS/PLU et de la mise en œuvre de ces prescriptions.

    Comme on le sait en effet, les règlements locaux d’urbanisme ne peuvent légalement édicter que des conditions de fond d’octroi du permis de construire et, par voie de conséquence, ne peuvent en principe pas imposer la production de pièces autres que celles prévues par le Code de l’urbanisme. C’est à ce titre que la Cour administrative d’appel de Paris a notamment jugé que :

    « Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme que les plans d'occupation des sols ne peuvent comporter que des conditions de fond de l'octroi du permis de construire ; qu'il suit de là qu'il n'appartient pas aux auteurs des règlements d'urbanisme de fixer les règles de composition des dossiers de demandes de permis de construire ; que c'est, dès lors, à juste titre que le Tribunal administratif de Paris a estimé illégale la disposition de chacun des articles 13 du règlement applicable aux secteurs UA, UB, UC, UD, UE, UF, UL et UZA, aux termes de laquelle « toute demande de permis de construire devra être accompagnée d'un plan comportant le relevé des plantations à abattre ou à créer », alors même que cette disposition ne ferait que reprendre une disposition analogue énoncée à l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme » (CAA. Paris, 29 décembre 2006, Cne de Rueil-malmaison, req. n°03PA01979).

    Pour autant, la même Cour a également considéré que :

    « Considérant, en premier lieu, qu'aux termes du 4° de l'article UH 13.1 du règlement du POS susvisé : Les espaces libres doivent faire l'objet d'un traitement végétal de qualité. Le nombre d'arbres à grand et moyen développement devra correspondre au minimum à un sujet par fraction entière de 100m² de la superficie totale des espaces libres du terrain. ; que l'annexe 1 audit POS définit pour les plantations exigées trois catégories d'arbres à grand, moyen ou petit développement ;
    Considérant que les requérants soutiennent que le projet, compte tenu de sa superficie globale, devrait en application des dispositions précitées, comporter un minimum de cinq arbres à grand et moyen développement alors que le dossier de demande de permis de construire ne permet pas, tant au niveau des plans que des descriptions, de savoir si cette catégorie d'arbres sera bien plantée ; qu'il n'est pas contesté que les sujets devant être plantés dans le jardin relèvent de la catégorie des arbres à grand ou moyen développement ; que si le document graphique joint à la demande de permis de construire fait apparaître la présence de dix végétaux, soit cinq sujets de plus que le minimum requis, aucun autre élément du dossier ne permet cependant d'en apprécier la nature et la catégorie de développement ; que dès lors, le permis attaqué méconnaît les dispositions précitées de l'article UH 13.1
    » (CAA. PARIS, 3 juillet 2009, Guy X., req. n°07PA00677) ;


    cette seconde décision présentant un point commun avec l’arrêté commenté ce jour. Dans ces deux affaires en effet, il ne ressortait pas clairement des pièces produites par le pétitionnaire que le projet n’était pas conforme aux normes d’urbanisme lui étant opposables mais dans la mesure où, en fait, ces pièces ne permettait d’apprécier si le projet était ou non conforme à ces normes, le juge administratif a estimé que cette carence préjuger d’une méconnaissance de la règle de fond.

    Il faut en effet rappeler que :

    • l’administration est réputée statuer au vu des pièces du dossier de demande de permis de construire produit par le pétitionnaire ;
    • à travers la décision par laquelle elle statue sur la demande et, le cas échéant, à travers la délivrance du permis de construire l’administration doit prendre parti sur l’ensemble des aspects du projet qu’une telle autorisation a vocation à sanctionner au titre de l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme ;
    • par voie de conséquence, le dossier produit par le pétitionnaire doit en toute hypothèse permettre à l’administration de se prononcer en toute connaissance de cause sur la conformité de la demande au regard de l’ensemble des aspects du projet sanctionnés par l’article précité.

    Il incombe donc au pétitionnaire de produire l’ensemble des pièces et des informations requises pour permettre au service instructeur d’apprécier la conformité du projet objet de la demande, y compris si cette exigence implique de produire des documents qui ne sont pas prévus par le Code de l’urbanisme.

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Veille jurisprudentielle n°36 : 19 décisions signalées

    INTERPRETATION & APPLICATION DES NORMES

    CAA. Lyon, 26 avril 2011, Cne de Roche-la-Molière, req. n°09LY01506
    « Considérant qu'aux termes de l'article UCb7 du règlement du plan local d'urbanisme de la COMMUNE DE ROCHE-LA-MOLIERE relatif à l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives : Les constructions peuvent s'implanter: / - soit à une distance des limites séparatives au moins égale à la hauteur du bâtiment et jamais inférieur à 4 mètres. / - soit le long des limites séparatives : / *si leur hauteur n'excède pas 3,50 m sur la limite séparative. / *s'il existe déjà un bâtiment édifié en limite séparative sur la parcelle voisine à condition de ne pas dépasser la hauteur existante. / *à l'intérieur d'un lotissement ou groupe de maisons individuelles comportant des maisons en bande ou jumelées. / Des implantations autres que celles prévues au paragraphe 7 peuvent être autorisées lorsqu'il s'agit :(...) / - de la construction d'une piscine (à un mètre minimum de la limite séparative) ; que, pour l'application d'une telle règle, la hauteur s'apprécie, sauf dispositions contraires du document d'urbanisme, à partir du terrain naturel et jusqu'au niveau de l'égout du toit pour l'ensemble des façades et au niveau du point le plus élevé du toit pour les murs-pignons ; qu'il ressort des plans produits que la hauteur en limite séparative du mur pignon excède les 3m50 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la construction litigieuse puisse être regardée comme une maison en bande ou jumelée ; qu'ainsi l'arrêté contesté méconnaît l'article UCb7 du règlement du plan local d'urbanisme ».

    CAA. Lyon, 12 avril 2011, Mireille C., req. n°09LY01252
    « Considérant qu'il est constant que le permis de construire, délivré le 20 mars 2008 à la société civile immobilière Les Lilas-M. D comportait une clause de cession gratuite du terrain nécessaire à l'élargissement de la voie, au profit de la commune de Crolles, d'un tènement d'une superficie de 108 m2 en application du 2ème alinéa de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme ; que le Conseil constitutionnel a été saisi le 1er juillet 2010 par la Cour de cassation d'une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité du dispositif de cessions gratuites de terrains prévu à l'article L. 332-6-1 e) précité ; que le Conseil constitutionnel, par une décision en date du 22 septembre 2010 a déclaré contraire à la constitution l'article L. 332-6-1 2°) e du code de l'urbanisme et a précisé que cette déclaration d'inconstitutionnalité prend effet à compter de la publication de la présente décision et qu'elle peut être invoquée dans les instances en cours à cette date et dont l'issue dépend de l'application des dispositions déclarées inconstitutionnelles ; que la cession précitée étant dépourvue de base légale, la commune ne peut s'en prévaloir ; qu'ainsi, le respect des dispositions de l'article UC 6 du règlement du POS ne peut être assuré par la cession gratuite de terrain à la commune ; que la seule délimitation d'un emplacement réservé par le plan d'occupation des sols ne saurait être regardé comme un alignement nouveau ; que, dès lors, seul l'alignement délimité par le POS, sans prise en compte de l'emplacement réservé devait permettre d'apprécier l'implantation de la construction sur le fondement des dispositions de l'article UC6 du règlement du POS ; que si la commune fait valoir que compte tenu de la configuration de la parcelle en triangle, une autre implantation pouvait être acceptée, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette implantation dérogatoire soit justifiée pour des raisons d'architecture, de salubrité ou de sécurité ; que, dans ces conditions, les requérants sont fondés à soutenir que l'arrêté attaqué a méconnu l'article UC6 précité »

    CAA. Lyon 12 avril 2011, Cne de Viviers, req. n°09LY01635
    « Considérant, en second lieu, qu'aux termes de l'article ND 1 du règlement du plan d'occupation des sols : Ne sont admises que les occupations et utilisations du sol ci-après : (...) L'aménagement sans extension, la restauration sans extension, ou l'extension mesurée ( 30% de la SHON ) des bâtiments existants ayant une surface hors oeuvre nette d'au moins 60 m², sans changement de destination (...) ; qu'il est constant que le terrain d'assiette du projet litigieux est situé en zone ND1 du POS approuvé en 1993 ; que, s'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment existant, une lapinière, n'est plus exploitée depuis environ 15 ans, il n'était pas à la date de la décision attaquée utilisé pour une autre destination que son affectation initiale et n'avait pas perdu sa destination agricole d'origine ; que, d'ailleurs, le demandeur de l'autorisation sollicitée a, dans son dossier de demande de permis de construire, présenté explicitement son projet comme tendant au changement de destination d'un bâtiment existant ; que, par suite, le maire de la COMMUNE DE VIVIERS était fondé à opposer à la demande présentée par M. A un refus au motif de ce que le projet entraînerait un changement de destination de la construction existante ; que, dans ces conditions, la COMMUNE DE VIVIERS est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a fait droit à la demande d'annulation présentée par M. A »

    CE. 14 mars 2011, Cne d’Ajaccio, req n°308.987
    « Considérant qu'aux termes de l'article 7 du règlement du lotissement de La Colline du Scudo, dans lequel se situe le terrain d'assiette du projet litigieux : (...) la hauteur des constructions mesurée de l'égout du toit au point le plus bas de ladite construction, ne pourra dépasser une hauteur maximale de 8 mètres ; qu'eu égard à l'objet de la règle ainsi édictée, la hauteur de la construction doit être mesurée à partir du niveau du sol au-dessus duquel la construction est visible ; qu'en tenant compte de l'épaisseur de la dalle sur hérisson sur laquelle a été élevée la construction litigieuse pour apprécier la hauteur maximale prévue par l'article 7 du règlement du lotissement, au lieu de rechercher à quel niveau se situe le sol, la cour a commis une erreur de droit »

    CAA. Paris, 3 mars 2011, SCI CNC, req .n°09PA01454
    « Considérant qu'il ressort des pièces versées au dossier que le projet litigieux porte sur une construction unique comportant deux logements dont les accès privatifs se font par l'extérieur ; qu'en effet, le premier logement, qui bénéficie, à l'extérieur de la construction, de deux places de stationnement accessibles par deux portails, dispose d'un accès par le premier étage depuis un escalier externe ; que le second logement est accessible depuis l'extérieur par une porte située au rez-de-chaussée et donnant sur l'aire de stationnement affectée au premier logement ; que, par ailleurs, les deux logements sont desservis depuis la rue par un portillon comm un ; que, par suite, cette aire de stationnement doit être regardée comme une partie commune ; que, dans ces conditions, le permis de construire critiqué porte sur l'édification d'un habitat collectif au sens des dispositions de l'article UB 14 du POS de la commune de Nanteuil-lès-Meaux telles qu'elles sont éclairées par le lexique qui y est annexé ; que, dès lors, le COS applicable ne pouvait être de 0,50 mais seulement de 0,20 ; que, par suite, la SHON autorisée ne pouvait excéder une SHON de 123,20 m² ; que le permis de construire litigieux autorisant une SHON de 306,76 m² a été délivré en méconnaissance des dispositions sus rappelées de l'article UB 14 du POS »


    PLU/POS

    CAA. Marseille, 31 mars 2011, X…, req. n°09MA01536
    « Considérant en deuxième lieu que la société appelante invoque, par la voie de l'exception, l'illégalité de l'article II NB2 du règlement du plan d'occupation des sols ; que, contrairement à ce qui est soutenu, un lotissement constitue un type d'occupation et d'utilisation des sols ; que l'interdiction de ce type d'occupation des sols fait partie des choix dont disposent les auteurs d'un plan d'occupation des sols en application de l'article R.123-9 du code de l'urbanisme, même dans une zone suffisamment équipée ; que les requérants ne démontrent pas que ce choix reposerait en l'espèce sur une erreur manifeste d'appréciation ; que le moyen tiré de l'exception d'illégalité du règlement doit par suite être écarté »

    CA. Nîmes, 22 février 2011, Cne de Pujaut, arrêt n°150, R. G : 10/ 04869
    « La Cour observe en premier lieu que si les juridictions de l'ordre judiciaire sont compétentes pour préciser le sens des actes administratifs réglementaires, il n'appartient qu'à la juridiction administrative d'en contrôler la légalité et en second lieu qu'il n'est tiré aucune conséquence de cette exception sur le plan procédural puisque les intimés concluent au débouté alors que la juridiction de l'ordre judiciaire à laquelle est opposée l'exception d'illégalité est seulement tenue de surseoir à statuer si cette exception présente un caractère sérieux et porte sur une question dont la solution est nécessaire au règlement au fond du litige. En l'occurrence il est argué de la non-conformité des règles du plan d'occupation des sols et du permis de construire aux dispositions de l'article R. 123 – 9 du code de l'urbanisme en ce que ce dernier ne prévoit pas de règles relatives au nombre de logements par terrain. Cette exception est dépourvue de caractère sérieux alors que l'arrêté de permis de construire a toutes les apparences de la légalité et que l'article précité n'est pas limitatif »


    EMPLACEMENTS RESERVES

    CAA. Nantes, 18 février 2011, Jean-Martial X…, req. n°09NT02804
    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de l'opération projetée par M. X est constitué par les parcelles cadastrées AN 511 et AN 513, grevées par le futur plan local d'urbanisme de la servitude précitée ; que l'instauration de cette servitude répond aux objectifs du plan local d'urbanisme à venir, tendant notamment à densifier le centre-ville de La Chapelle-sur-Erdre, dont les équipements publics, et plus particulièrement les écoles, sont insuffisamment utilisés, et les commerces trop peu fréquentés et à résorber le déficit communal en matière de logements sociaux ; que l'édification sur cet emplacement réservé d'un ensemble immobilier comportant la réalisation de cinq logements, dont aucun logement social, et de 197 m² de commerces, pour une surface hors oeuvre nette totale de 760,40 m², aurait, en raison de son incompatibilité avec la densité et le type de logements imposés pour lesdites parcelles par la servitude précitée, compromis et rendue plus onéreuse l'exécution du plan en cours d'élaboration, alors même que la réalisation dans la commune de plusieurs programmes de logements locatifs sociaux est programmée à terme et que l'opération projetée est compatible avec les prescriptions du plan arrêté applicables à la zone UA du centre-ville et avec les objectifs du projet d'aménagement et de développement durable ; qu'ainsi, le maire de La Chapelle-sur-Erdre a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, opposer un sursis à statuer à la demande de permis de construire de l'intéressé »


    DROIT DE PREEMPTION

    CE. 2 mars 2011, Cne de Bretignolles-sur-Mer, req. n°315.880
    « Considérant, en premier lieu, que l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales dispose que le maire peut, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : / (...) 15° D'exercer, au nom de la commune, les droits de préemption définis par le code de l'urbanisme, que la commune en soit titulaire ou délégataire, de déléguer l'exercice de ces droits à l'occasion de l'aliénation d'un bien selon les dispositions prévues au premier alinéa de l'article L 213-3 de ce même code dans les conditions que fixe le conseil municipal (...) ; qu'il résulte des termes mêmes de ces dispositions que la définition par le conseil municipal des conditions d'exercice de la délégation ne concerne, en tout état de cause, pas la délégation au maire lui-même de l'exercice du droit de préemption urbain ;
    Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le conseil municipal de la COMMUNE DE BRETIGNOLLES-SUR-MER, qui avait, par une délibération du 13 novembre 2002 prise sur le fondement de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales, délégué au maire le pouvoir d'exercer au nom de la commune le droit de préemption urbain, n'était pas tenu de fixer des conditions particulières à cette délégation ; que cette délibération était dès lors, contrairement à ce que soutient la commune, suffisamment précise et ne nécessitait pas de nouvelle délibération du conseil municipal pour permettre à son maire d'exercer le droit de préemption au nom de la commune ; qu'en l'absence de toute délibération ultérieure rapportant cette délégation, le conseil municipal devait être regardé comme s'étant dessaisi de sa compétence ; que c'est, par suite, à bon droit que le tribunal administratif de Nantes a jugé que la délibération litigieuse du 25 mars 2004 était entachée d'incompétence »


    TRAVAUX SUR EXISTANT

    CAA. Nantes, 25 mars 2011, M. X…, req. n°10NT00079
    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le terrain d'assiette de l'extension envisagée est classé en zone A par le plan local d'urbanisme communal ; qu'il n'est pas contesté que la maison d'habitation des requérants, dont la surface hors oeuvre nette était alors de 118 m², a bénéficié le 15 janvier 2002 d'un permis de construire autorisant une première extension de 46 m² ; que cet agrandissement étant supérieur à celui autorisé par les dispositions précitées de l'article 2 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme, le maire de Sainte-Anne d'Auray a fait une exacte application de cet article en refusant le permis de construire sollicité pour une seconde extension de 30 m² ; que si les articles 9 et 14 du règlement de la zone A du plan local d'urbanisme disposent, respectivement, que l'emprise au sol des constructions n'est pas limitée et que le coefficient d'occupation des sols ne l'est pas davantage, lesdits articles ne peuvent être utilement invoqués à l'appui de la demande d'extension litigieuse »


    AUTORISATIONS D’URBANISME

    CE. 27 avril 2011, Association La Demeure Historique, req. n°309.709
    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 621-27 du code du patrimoine : L'inscription au titre des monuments historiques est notifiée aux propriétaires et entraînera pour eux l'obligation de ne procéder à aucune modification de l'immeuble ou partie de l'immeuble inscrit, sans avoir, quatre mois auparavant, avisé l'autorité administrative de leur intention et indiqué les travaux qu'ils se proposent de réaliser. / Lorsque les constructions ou les travaux envisagés sur les immeubles inscrits au titre des monuments historiques sont soumis à permis de construire, à permis de démolir, celui-ci ne peut être délivré sans l'accord de l'autorité administrative chargée des monuments historiques. / Les autres travaux envisagés sur les immeubles inscrits au titre des monuments historiques ne peuvent être entrepris sans la déclaration prévue au premier alinéa. L'autorité administrative ne peut s'opposer à ces travaux qu'en engageant la procédure de classement au titre des monuments historiques prévue par le présent titre. (...) ; que l'article 41 du décret attaqué dispose que : Lorsqu'il est envisagé de réaliser sur un immeuble inscrit des constructions ou travaux autres que, d'une part, des travaux d'entretien ou de réparation ordinaires qui sont dispensés de toute formalité et, d'autre part, des constructions ou travaux mentionnés au deuxième alinéa de l'article L. 621-27 du code du patrimoine, la déclaration prévue au premier alinéa du même article est souscrite quatre mois au moins avant la date de leur réalisation. (...) ; qu'en soumettant à déclaration préalable les travaux de modification des immeubles inscrits, le législateur a entendu viser les travaux qui sont de nature soit à affecter la consistance ou l'aspect de la partie inscrite de l'immeuble, soit à compromettre la conservation de celle-ci ; qu'en excluant de la déclaration préalable les travaux d'entretien ou de réparation ordinaires , les auteurs du décret attaqué ont entendu viser les seuls travaux qui ne sont pas de nature à avoir un tel effet et n'ont pas méconnu les dispositions précitées de l'article L. 621-27 du code du patrimoine »

    CAA. Marseille, 14 avril 2011, Laurence A., req. n°09MA02044
    « Considérant que la notification du délai d'instruction adressée le 18 décembre 2007 par le maire de la commune de Lucciana à Mme Laurence A ne pouvait être fondée sur l'article R.421-19 du code de l'urbanisme dont les dispositions avaient été abrogées à compter du 1er octobre 2007 ; que la mention erronée de ce délai n'a pu avoir aucune incidence sur le délai d'instruction commun fixé pour les maisons individuelles à deux mois par l'article R.423-23 du code de l'urbanisme ;
    Considérant que le maire aurait pu justifier la prolongation à trois mois de ce délai par la consultation de services que les particularités de l'instruction du dossier aurait rendu nécessaire ; que, toutefois, la seule mention de cette nécessité, sans citer les consultations estimées nécessaires et sans en produire de justificatifs, alors que le refus de permis de construire ne vise aucune consultation, ne permettait pas au maire de prolonger discrétionnairement ce délai à trois mois »

    CAA. Marseille, 14 avril 2011, Association Sauvons le Business Club, req. n°09MA03433
    « Considérant, en dernier lieu, qu'aux termes de l'article R. 431-13 du code de l'urbanisme : Lorsque le projet de construction porte sur une dépendance du domaine public, le dossier joint à la demande de permis de construire comporte une pièce exprimant l'accord du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public. ; qu'il résulte de ces dispositions que lorsqu'un permis de construire est demandé pour l'édification d'un ouvrage sur le domaine public ou le surplombant, il ne peut être légalement accordé que si le pétitionnaire justifie d'un accord exprès du gestionnaire du domaine pour engager la procédure d'autorisation d'occupation temporaire du domaine public pour l'ouvrage qu'il se propose d'édifier ; que les requérants soutiennent que la société ne pouvait pas présenter la demande d'autorisation attaquée dès lors que diverses parties du bâtiment sont en saillie sur la voie publique et qu'aucune autorisation d'occupation du domaine public ne lui a été délivrée »

    CAA. Nancy, 12 avril 2011, Association Vivre à Chanaz, req. n°09LY00480
    « Considérant, en deuxième lieu, que l'ASSOCIATION VIVRE à CHANAZ et Mme A, qui invoquent un détournement de procédure, soutiennent que l'administration aurait dû porter une appréciation globale sur le projet d'aménagement du plan d'eau et de son port et de construction des huit chalets lacustres ; que, toutefois, la création du plan d'eau est soumise à une législation particulière, au titre de la loi n° 92-3 du 3 janvier 1992 sur l'eau, désormais codifiée aux articles L. 214-1 et suivants du code de l'environnement ; qu'en application de cette loi, la commune de Chanaz a déposé une déclaration, qui a donné lieu, le 14 mars 2006, à un récépissé du préfet de la Savoie ; que la construction des chalets lacustres est soumise à la législation distincte de l'urbanisme ; qu'ainsi, en l'absence de toute scission artificielle d'un projet qui serait en réalité indivisible, le moyen doit être écarté »


    CAA. Nancy, 14 mars 2011, Sté ACACIO Promotions, req. n°09NC01584
    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la SOCIETE ACACIO PROMOTIONS a obtenu, le 2 mars 2006, un permis de construire un ensemble pavillonnaire de 19 maisons individuelles, qui a été modifié le 19 avril 2006 compte tenu de la réduction du projet initial à 17 maisons individuelles ; que le respect des prescriptions de l'article I NA 12 du règlement du plan d'occupation des sols précitées nécessitait que le projet modifié comprenne 47 places ; qu'il ressort des pièces du dossier de la demande de permis de construire produit par la commune dans le cadre du supplément d'instruction ordonné le 9 décembre 2010, et plus particulièrement des plans de ce dossier, que chaque lot comprend un garage et une place de stationnement extérieur, soit 34 emplacements, auxquels il faut ajouter 4 emplacements supplémentaires, soit 38 places au total ; que ces plans ne permettent pas de tenir pour établie l'allégation du pétitionnaire selon laquelle chaque lot comprendrait deux emplacements extérieurs alors même que le formulaire CERFA établi à l'occasion de la demande initiale de permis de construire indiquait 19 garages et 43 emplacements extérieurs ; que, par suite, le dossier de la demande de permis de construire soumis au service instructeur ne permettant pas d'identifier les 47 emplacements nécessaires, la SOCIETE ACACIO PROMOTIONS n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le Tribunal administratif de Strasbourg a annulé les arrêtés en date du 2 mars et 19 avril 2006 par lesquels le maire d'Hettange-Grande lui a délivré un permis de construire en vue d'édifier un ensemble de 17 maisons individuelles à raison de la méconnaissance de l'article I NA 12 du règlement du plan d'occupation des sols »


    CONTRIBUTIONS, PARTICIPATIONS & FISCALITE DE L’URBANISME

    CE. 27 avril 2011, SCI Archanciel, req. n°320.207
    « Considérant qu'aux termes de l'article 1585 A du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à la date du permis de construire : Une taxe locale d'équipement, établie sur la construction, la reconstruction et l'agrandissement des bâtiments de toute nature, est instituée : / 1°) De plein droit : / a) Dans les communes de 10 000 habitants et au-dessus ; / b) Dans les communes de la région de l'Ile-de-France (...) / 2° Par délibération du conseil municipal dans les autres communes (...) ; qu'aux termes de l'article 1585 D du code général des impôts, dans sa rédaction applicable : I. L'assiette de la taxe est constituée par la valeur de l'ensemble immobilier comprenant les terrains nécessaires à la construction et les bâtiments dont l'édification doit faire l'objet de l'autorisation de construire. / Cette valeur est déterminée forfaitairement en appliquant à la surface de plancher développée hors oeuvre une valeur au mètre carré variable selon la catégorie des immeubles (...) ; qu'en vertu de l'article 1599 B du même code, dans sa rédaction applicable, la taxe pour le financement des dépenses des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement est assise et recouvrée selon les mêmes modalités et sous les mêmes sanctions que la taxe locale d'équipement ; qu'aux termes de l'article L. 142-2 du code de l'urbanisme relatif à la taxe départementale des espaces naturels sensibles, dans sa rédaction applicable : (...) La taxe est soumise aux règles qui gouvernent l'assiette, la liquidation, le recouvrement, les sanctions et le contentieux de la taxe locale d'équipement (...) ; qu'aux termes de l'article 317 septies de l'annexe II au code général des impôts, dans sa rédaction applicable : Est prise en compte pour l'assiette de la taxe locale d'équipement la surface hors oeuvre nette telle qu'elle est définie à l'article R. 112-2 du code de l'urbanisme ; qu'aux termes de l'article R. 112-2 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable : La surface de plancher hors oeuvre brute d'une construction est égale à la somme des surfaces de plancher de chaque niveau de la construction. / La surface de plancher hors oeuvre nette d'une construction est égale à la surface hors oeuvre brute de cette construction après déduction (...) ;
    Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que la taxe locale d'équipement et les autres taxes locales ou nationales d'urbanisme dont l'assiette est identique sont dues à l'occasion de toute opération de construction, de reconstruction ou d'agrandissement ; que doit être regardée comme un agrandissement une opération conduisant à une augmentation de la surface hors oeuvre nette ; qu'ainsi l'aménagement de locaux existants, autorisé au titre d'un changement de destination, ne constitue pas, par lui-même, un agrandissement dès lors qu'il n'emporte aucune augmentation de la surface hors oeuvre nette »


    CONTENTIEUX DES AUTORISATIONS

    CE. 5 mai 2011, Ministre de l’écologie, req. n°336.893
    « Considérant que sauf dans le cas où des dispositions législatives ou réglementaires ont organisé des procédures particulières, toute décision administrative peut faire l'objet, dans le délai imparti pour l'introduction d'un recours contentieux, d'un recours gracieux ou hiérarchique qui interrompt le cours de ce délai ; que les dispositions précitées du code de l'urbanisme, qui limitent le délai pendant lequel une autorisation de construire peut être retirée, spontanément ou à la demande d'un tiers, par l'autorité qui l'a délivrée, n'ont ni pour objet ni pour effet de faire obstacle, d'une part, à ce que le représentant de l'Etat puisse former un recours gracieux, jusqu'à l'expiration du délai dont il dispose pour déférer un tel acte au tribunal administratif, et d'autre part à ce que le cours de ce délai soit interrompu par ce recours gracieux ; que d'ailleurs, alors même que le délai de trois mois fixé par l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme serait arrivé à son terme, un tel recours n'est pas dépourvu d'utilité, soit que l'auteur de l'acte litigieux justifie de la légalité de celui-ci, soit que son bénéficiaire sollicite son retrait au profit d'une nouvelle décision légalement prise »

    CE. 27 avril 2011, SARL FLASH BACK, req. n°342.329
    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 214-1 du code de l'urbanisme : Le conseil municipal peut, par délibération motivée, délimiter un périmètre de sauvegarde du commerce et de l'artisanat de proximité, à l'intérieur duquel sont soumises au droit de préemption institué par le présent chapitre les cessions de fonds artisanaux, de fonds de commerce ou de baux commerciaux. / (...) Chaque cession est subordonnée, à peine de nullité, à une déclaration préalable faite par le cédant à la commune. Cette déclaration précise le prix et les conditions de la cession. / (...) Le silence de la commune pendant le délai de deux mois à compter de la réception de cette déclaration vaut renonciation à l'exercice du droit de préemption. Le cédant peut alors réaliser la vente aux prix et conditions figurant dans sa déclaration ;
    Considérant qu'il ressort des énonciations de l'ordonnance attaquée que la SARL FLASH BACK, qui avait informé la commune de Gennevilliers de son intention de céder à la SARL LB PRESTATIONS DE SERVICES le droit au bail commercial dont elle était titulaire, et qui s'était vu notifier le 1er juin 2010 une décision par laquelle la commune renonçait à exercer le droit de préemption qu'elle détenait sur ce bail commercial en vertu des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 214-1 du code de l'urbanisme, a alors cédé ce bail à la SARL LB PRESTATIONS DE SERVICES avant que, par une seconde décision du 2 juillet 2010 prise dans ce même délai de deux mois, la commune de Gennevilliers ne décide d'exercer son droit de préemption sur le bail commercial en cause ; qu'en estimant que la SARL LB PRESTATIONS DE SERVICES et la SARL FLASH BACK ne pouvaient utilement se prévaloir de la passation de l'acte de cession pour justifier l'urgence de leur demande de suspension de la seconde décision du 2 juillet 2010, au motif que cet acte de cession était intervenu de leur seul fait avant l'expiration du délai de préemption de deux mois, le juge des référés du tribunal administratif de Cergy-Pontoise a commis une erreur de droit ; que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, son ordonnance doit être annulée »

    CAA. Marseille, 14 avril 2011, Cne de Cogolin, req. n°09MA01964
    « Considérant, en revanche, que le règlement du plan d'occupation des sols autorise la construction des bâtiments d'exploitation destinés au logement des récoltes, des animaux et du matériel agricole ; que, par un arrêté du 23 janvier 2002, un permis de construire a été délivré à M. Roque A pour la construction d'un hangar agricole développant une surface hors oeuvre brute de 360 m² sur les parcelles AY 55,56,58 et 65 ; que les travaux exécutés n'étant pas conformes aux plans annexés à la demande de permis de construire, M. Roque A a été invité par les services de la COMMUNE DE COGOLIN à déposer une nouvelle demande ; que, le maire de la COMMUNE DE COGOLIN ne démontre pas que le logement des récoltes et du matériel agricole de M. Roque A ne nécessiterait pas la construction, sur les mêmes parcelles, d'un hangar développant une surface hors oeuvre brute de 680 m² ;
    Considérant que les dispositions du permis de construire en cause, qui refuse à la fois, les constructions séparées d'un hangar et d'une maison d'habitation, présentent un caractère divisible ;
    Considérant qu'il résulte de ce qui précède, eu égard au caractère divisible de ses dispositions, que la COMMUNE DE COGOLIN est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a annulé sa décision en date du 22 novembre 2004 en tant qu'elle refuse la construction d'un hangar agricole »

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • La décision modificative de non-opposition à déclaration de travaux

    Lorsqu'un arrêté de non opposition aux travaux déclarés a été délivré sans que soient respectées des formes ou formalités, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par un arrêté modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté initial de non opposition aux travaux déclarés.

    CE. 6 mai 2011, Ministre de l’écologie, req. n°336.919 (ici)



    Voici un arrêt qui appelle peu de commentaires mais s’avère néanmoins d’importance, et qui d’ailleurs  aurait peut-être mérité à notre sens d’être mentionné au Recueil. Mais il est vrai que selon nous la réponse était presque évidente…du moins dans son principe puisque son champ d’application semble en revanche revêtir quelques subtilités.

    Dans cette affaire, le requérant avait formulé une déclaration de travaux portant sur la construction d’un mur paravent, laquelle donna lieu le 11 avril 2008 à une décision de non-opposition expresse qui devait être attaquée au motif, notamment, qu’elle ne comportait pas le nom de son titulaire, le déclarant.

    En conséquence, le Maire édicta le 29 juillet 2008 un nouvel arrêté complémentaire comportant le non de l’auteur de la déclaration initiale.

    Pour autant, le Tribunal administratif de Montpelier devait juger que l’arrêté du 29 juillet 2008 n’était pas susceptible de régulariser l’arrêté initial du 11 avril 2008 et, par voie de conséquence, annuler la décision de non-opposition du 11 avril 2008.

    En l’état, on ne sait exactement sur quel fondement ledit Tribunal a prononcé cette annulation. On peut peut penser qu’il a considéré que l’absence de mention du nom du déclarant constituait un vice substantiel dans la mesure où ce faisant, l'autorisation délivrée n'avait pas de titulaire (TA. Versailles, 26 octobre 1993, Segal, DA 1994, comm. n°57).

    Mais en toute hypothèse, il faut admettre que la décision de non-opposition initiale était assortie de prescriptions puisque ce n’est que dans ce cas qu’une telle décision doit nécessairement prendre la forme d’un arrêté exprès et qu'en dehors de ce cas, les vices de forme affectant une décision de non-opposition délivrée sous la forme d’une arrêté que rien n’imposait ne sauraient l’affecter d’illégalité puisque le conseil d’Etat a jugé que :

    « Considérant, en deuxième lieu, qu'il résulte des dispositions combinées des articles L. 441-2, L. 441-3 et L. 422-2 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction applicable à la date de l'arrêté attaqué, que l'édification d'une clôture, qui est subordonnée à une simple déclaration préalable, peut être exécutée en l'absence d'opposition dans le délai d'un mois suivant le dépôt de la déclaration, sous réserve, le cas échéant, du respect des prescriptions notifiées dans les mêmes conditions ; que les travaux de cette nature ne donnent donc en principe pas lieu à une décision explicite de l'autorité compétente, sauf en cas d'opposition ou de prescriptions particulières ; que toutefois, à la suite de la déclaration déposée le 4 novembre 2002 par Mme A, le maire de la commune d'Audresselles a pris, le 3 décembre 2002, une décision explicite de non-opposition à travaux, sans imposer le respect de prescriptions particulières, alors même qu'il n'était pas tenu de le faire ; qu'il suit de là que l'irrégularité formelle de l'arrêté du 3 décembre 2002 résultant de ce que n'y figure pas la mention du nom et du prénom de son auteur, comme l'imposent les dispositions de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000, ne présente pas, en l'espèce, un caractère substantiel ; que, par suite, le moyen tiré de cette irrégularité doit être écarté » (CE. 14 mai 2008, M. et Mme B., req. n° 289.745).

    Mais surtout, on ne sait pourquoi le Tribunal administratif de Montpelier a considéré que l’arrêté du 29 juillet 2008 n’était pas susceptible de régulariser la décision initiale du 11 avril 2008 (si certains lecteurs disposent du jugement, nous sommes évidemment preneur).

    Deux motifs sont possibles.

    D’une part, on peut penser que le Tribunal a considéré qu’une décision modificative ne pouvait pas régulariser le vice de forme affectant l’autorisation initiale puisqu’en substance, l’édiction d’une seconde décision fut-elle présentée sous la forme d’une décision modificative ne changeait rien au fait que la première ne mentionnait pas le nom de son titulaire.

    Sur ce point, il ne peut être pas anodin de rappeler que le Tribunal administratif de Montpelier relève du ressort de la Cour administrative d’appel de Marseille, laquelle de façon isolée (CAA. Paris, 30 octobre 2008, M. Gilbert Y., req. n°05PA04511 ; CAA. Nantes, 27 mars 2007, Cne de la Faute-sur-Mer, req. n°06NT01269) a jugé qu’un « modificatif » ne pouvait pas régulariser un permis de construire primitif ne comportant pas le nom et prénom de son auteur comme l’impose l’article 4 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 (CAA. Marseille, 16 mai 2007, M.Y., req. n°04MA01336).

    D’autre part, et plus fondamentalement, on ne peut exclure que le Tribunal ait considéré qu’une décision de non-opposition était par nature insusceptible de faire l’objet une décision modificative ; possibilité que n’avait pourtant pas réellement semblé exclure la Cour administrative d’appelle de Marseille dans l’arrêt par lequel elle avait précédemment jugé que :

    « Considérant, d'autre part, que contrairement à ce que soutient M. X, la déclaration de travaux à laquelle s'est opposé le maire de BREIL-SUR-ROYA ne peut être regardée comme une déclaration modificative de celle qu'il avait déposée en vue de la réfection de la toiture et à laquelle ne s'était pas opposée cette même autorité administrative par décision du 19 juillet 1994, dès lors que l'objet des travaux à réaliser était différent et sans lien direct ; que dans ces conditions, le maire de BREIL-SUR-ROYA a pu légalement, par décision du 10 janvier 1996, s'opposer aux travaux déclarés par M. X » (CAA. Marseille, 9 octobre 2003, Jean-Pierre X., req. n99MA01672).

    Mais en toute hypothèse l’arrêt commenté en ce qu’il a donc jugé que :

    « Considérant que lorsqu'un arrêté de non opposition aux travaux déclarés a été délivré sans que soient respectées des formes ou formalités, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par un arrêté modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises ; que les irrégularités ainsi régularisées ne peuvent plus être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir dirigé contre l'arrêté initial de non opposition aux travaux déclarés ; qu'ainsi en jugeant que l'arrêté complémentaire du 29 juillet 2008 n'était pas susceptible de régulariser l'illégalité dont se trouvait entaché l'arrêté du 11 avril 2008, le tribunal administratif a entaché sa décision d'erreur de droit ; que dès lors son jugement en date du 17 décembre 2009 doit être annulé ».

    est susceptible d’écarter l'un comme l'autre de ces deux motifs.

    D’une part, et comme on le sait, le Conseil d’Etat a jugé que « lorsqu'un permis de construire a été délivré (…) sans que soient respectées les formes ou formalités préalables à la délivrance des permis de construire, l'illégalité qui en résulte peut être régularisée par la délivrance d'un permis modificatif dès lors que celui-ci assure les respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises » (CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315).

    Or, par « forme », on voit mal ce que le Conseil d’Etat pouvait entendre si ce n’est principalement les mentions de l’autorisation d’urbanisme en cause.

    De ce fait, il est donc possible de considérer que ce faisant la Haute Cour a également annoncé la possibilité de régulariser une autorisation méconnaissant l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 par une simple décision « modificative ».

    En effet, nous voyons mal ce qui pourrait expliquer que l’absence de mention du nom du bénéficiaire constitue un vice substantiel, si ce n’est qu’à défaut d’une telle précision l’arrêté doivent être considéré comme n’ayant pas de titulaire ou, à tout le moins, que le défaut de cette mention prive de destinbatire la prescription assortissant la décision. 

    Or, une autorisation d’urbanisme sans titulaire peut constituer un acte inexistant (voir toutefois: CAA. Bordeaux, 30 décembre 2005, LPA, n°88/2006) alors que le défaut de mention du nom et du prénom du signataire d’une décision administrative constitue un pur vice forme ne suffisant pas en lui-même à préjuger de l’incompétence dudit signataire.

    Dès lors que, dans cette mesure, l’absence du nom et du prénom du signataire d’une autorisation d’urbanisme constitue un vice « moins » substantiel que le défaut d’indication du nom du titulaire de cette autorisation, on voit donc mal pourquoi le premier ne pourrait pas être régularisé par une décision modificative alors que tel peut être le cas du second.

    D’autre part, et surtout, le Conseil d’Etat vient donc de reconnaitre la propension d’une décision de non-opposition à déclaration préalable à faire l’objet d’une décision « modificative ».

    Voici, donc une décision qui soulagera ceux lassés d’entendre qu’une telle décision ne peut faire l’objet d’une « modificative » dans la mesure où… il n’existe aucun formulaire « CERFA » prévu à cet effet.

    Tout en ayant une pensée pour les « précurseurs » ayant osé solliciter des permis modificatifs et des transferts de permis bien avant l’impression de formulaires « CERFA » prévus pour ce faire, on rappellera en effet que le formulaire « CERFA » et ses mentions n’ont strictement aucune valeur règlementaire et qu'une demande d’autorisation peut être valablement présentée sans recourir à un tel formulaire dès lors que la lettre de demande fournit l’ensemble des renseignements requis.

    Mais surtout, on rappellera que les travaux visés par l’ancien article R.421-2 du Code de l’urbanisme et par l’actuel article R.421-17 ne sont pas subordonnés à la formulation d’une déclaration préalable mais à la formation ou à l’obtention d’une décision de non-opposition.

    Ces travaux sont donc soumis à autorisation, en l’occurrence à une décision de non-opposition qui certes a en principe a vocation à être tacite mais qui à cet égard n’en constitue pas pour autant une décision plus particulière que le permis de construire ; étant rappelé que si en l’absence de réponse expresse une demande de permis de construire aboutit en principe à un permis tacite c’est par exception au principe général selon lequel à défaut de réponse expresse favorable, une demande d’autorisation doit être réputée rejetée.

    Une décision de non-opposition à déclaration préalable, même tacite, constitue donc ni plus ni moins qu’une autorisation au même titre qu’un permis de construire, d’aménager ou de démolir. Dès lors, on voyait mal pourquoi une telle décision ne pourrait pas donner lieu à une décision « modificative ».

    Pour autant, le champ d’application de décision de non-opposition modificative semble plus restreint que celui du permis modificatif.

    Force est en effet de constater que si le Conseil d’Etat a donc jugé que l’illégalité affectant une décision de non-opposition « peut être régularisée par un arrêté modificatif dès lors que celui-ci assure le respect des règles de fond applicables au projet en cause, répond aux exigences de forme ou a été précédé de l'exécution régulière de la ou des formalités qui avaient été omises », il ne vise que le cas où cette illégalité résulte du fait qu’elle ait été délivrée sans que ne soient respectées « des formes ou des formalités » et, a contrario, ne vise pas le cas où cette illégalité résulte de la méconnaissance d’une règle de fond.

    Certes, on pourrait penser que ceci procède du fait que la décision en cause dans cette affaire était affectée d’un vice de forme.

    Il reste que dans l’arrêt par lequel le Conseil d’Etat a reconnu la propension du permis de construire modificatif à régulariser l’autorisation primitive, le permis de construire en cause dans cette affaire était affecté d’un vice de procédure, en l’occurrence liée à la consultation de l’ABF.

    Pour autant, le Conseil d’Etat a étendu le champ d’application du « modificatif » de régularisation au cas où « un permis de construire a été délivré en méconnaissance des dispositions législatives ou réglementaires relatives à l'utilisation du sol ou sans que soient respectées des formes ou formalités préalables » (CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315).

    En l’état, le champ d’application de la décision de non-opposition « modificative » apparait donc limité à la régularisation formelle ou procédurale et ne semble donc pas envisageable pour une modification du projet lui-même, y compris dans un but de régularisation de la décision initiale au regard des règles de fond lui étant opposables.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés
     

  • Travaux sur les constructions irrégulières : premier infléchissement de la jurisprudence « Thalamy »

    Si dans l'hypothèse où un immeuble a été édifié sans autorisation l’administration saisie d'une demande tendant à ce que soient autorisés des travaux portant sur cet immeuble est tenue d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble du bâtiment, l’autorité compétente a toutefois la faculté, dans l'hypothèse d'une construction ancienne, à l'égard de laquelle aucune action pénale ou civile n'est plus possible, après avoir apprécié les différents intérêts publics et privés en présence au vu de cette demande, d'autoriser, parmi les travaux demandés, ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes, alors même que son édification ne pourrait plus être régularisée au regard des règles d'urbanisme applicables.

    CE. 3 mai 2011, Chantal Gisèle A., req. n°320.545.


    Voici un arrêt d’importance en ce qu’il marque un infléchissement du Conseil d’Etat dans la mise en œuvre la jurisprudence « Thalamy » (CE. 9 juillet 1986, Mme Thalamy, req. n°51.172).

    Par principe, en effet, les constructions dépourvues d’existence légale – c’est-à-dire édifiées sans autorisation, en méconnaissance des prescriptions de l’autorisation obtenue ou en exécution d’une autorisation annulée ou retirée ou précédemment frappée de caducité – non seulement ne bénéficient pas du régime des travaux sur existant mais en outre ne sauraient faire l’objet de travaux sans avoir été précédemment ou être concomitamment régularisées.

    Ainsi, lorsqu’une construction dépourvue d’existence au regard du droit de l’urbanisme n’a pas été précédemment régularisée, les travaux projetés sur celle-ci doivent normalement donner lieu à une autorisation portant non seulement sur ces travaux mais également sur cette construction et ce, comme si celle-ci constituait un ouvrage à réaliser (CE.12 mars 1990, M. Serais, req. n°80.401) ; cette régularisation devant être possible au regard des normes alors en vigueur et non pas en considération de celles applicables à l’époque de la réalisation des travaux litigieux (CAA. Marseille, 28 décembre 1996, SCI La Ferrusse, req. n°98MA02687).

    Cette règle s’applique tant s’agissant des travaux projetés sur une construction en elle-même dépourvue de toute existence légale qu’à l’égard de ceux portant sur une construction initialement régulière mais ayant ensuite fait l’objet de travaux non autorisés ; pour autant, bien entendu, que la construction initiale (CE. 15 mars 2006, Ministère de l’équipement, req. n°266.238) ou les travaux ultérieurs dont elle avait déjà fait l’objet étaient effectivement soumis à autorisation à la date de leur réalisation (CE. 9 juillet 1993, M. Pontier, req. n°99755). Surtout, dès lors qu’une telle autorisation était requise au moment de l’exécution des travaux, la construction résultant de ceux irrégulièrement réalisés doit en principe être régularisée et ce, quelle que soit l’importance de la construction initiale, son ancienneté ou la nature des travaux projetés sur celle-ci (CE. 28 octobre 1987, Mme Christiane X., req. n°61.223).

    Pendant longtemps, cette règle de principe n’a connu aucune exception avant que le législateur n’introduise la « prescription décennale » prévue par l’article L.111-12 du Code de l’urbanisme.

    Mais précisément, l’apport de l’arrêt commenté est d’opérer une exception à la jurisprudence « Thalamy » dont le champ d’application non seulement est indépendant de l’article précité mais en outre va pour partie au-delà de ce dispositif.

    Il faut en effet relever que la première décision en litige dans cette affaire (la seconde n’étant qu’une décision confirmative) datait du 30 juin 2006 et était donc antérieure à l’entrée en vigueur de l’article L.111-12 du Code de l’urbanisme introduit par la loi n°2006-872 du 13 juillet 2006. De ce fait, et en toute hypothèse, cet article n’était donc pas opposable à la décision contestée (CAA. Marseille, 31 décembre 2007, Cne d’Egalyères, req. n°05MA02836).

    Mais surtout, l’exception introduite par l’arrêt commenté est susceptible d’être mise en œuvre « dans l'hypothèse où un immeuble a été édifié sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables ».

    Le Conseil d’Etat n’a donc opéré aucune distinction quant à la nature de l’autorisation à laquelle étaient assujettis les travaux. De même, il ne semble y avoir aucune distinction à faire selon que l’irrégularité des travaux procède de ce qu’aucune autorisation n’ait jamais été délivrée ou de ce que l’autorisation au titre de laquelle les travaux ont été réalisés a ultérieurement été annulée ou retirée.

    Partant, cette exception semble donc pourvoir s’appliquer en toute hypothèse, y compris donc lorsque la construction initiale était assujettie à permis de construire et qu’aucun permis de construire n’a jamais été obtenu alors que pour sa part l’article L.111-12 du Code de l’urbanisme exclut notamment du bénéfice de la prescription décennale qu’il prévoit le cas où « la construction a été réalisée sans permis de construire ».

    Il reste qu’a contrario, là où l’article précité ne prévoit aucune limite quant à l’importance et la nature des travaux susceptibles d’être exécutés sur une construction initialement illégale dès lors que celle-ci bénéficie de la prescription décennale qu’il prévoit, l’arrêt commenté limite les travaux qui sont susceptibles d’être exécutés à ce titre sur l’immeuble à « ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes ».

    Il s’agit là de la première difficulté générée par le champ d’application de l’exception introduite par l’arrêt commenté puisque l’on ne sait ce qu’il faut entendre par « respect » des normes, ni de quelles « normes » il s’agit.

    Il reste que cette exception a vocation à s’appliquer lorsque la construction initiale ne peut « plus être régularisée au regard des règles d'urbanisme applicables ». Or, si cette régularisation n’est pas possible, c’est par définition que la construction ne peut pas respecter les normes d’urbanisme applicables.

    Il pourrait donc s’agir de normes de construction nécessaires à la préservation de l’immeuble ; ce qui reste à confirmer puisqu’en principe le respect de telles normes n’a pas vocation à être sanctionné par les autorisations d’urbanisme.

    Mais la mise en œuvre de l‘exception introduite par l’arrêt commenté génère également de nombreuses interrogations et difficultés.

    Tout d’abord, il faut relever que si le Conseil d’Etat a rappelé que par principe l’administration saisie d'une demande tendant à ce que soient autorisés des travaux portant sur cet immeuble « est tenue » d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble du bâtiment, il a revanche précisé que l’administration n’a que « la faculté » d’autoriser les travaux nécessaires à la préservation de l’immeuble et au respect des normes.

    A priori, l’administration n’est donc pas nécessairement tenue de mettre en œuvre cette exception et peut donc s’en tenir à une application pure et simple de la jurisprudence « Thalamy ».

    En outre, cette faculté a vocation à être exercée au cas par cas, au gré de l’examen des demandes d’autorisation d’urbanisme alors que s’il est possible d’assouplir la règle de principe posée par la jurisprudence « Sekler » – applicable aux immeubles légalement édifiés mais n’étant plus conformes aux règles local d’urbanisme applicables aux travaux ultérieurement projetés sur celui-ci – cette assouplissement doit résulter du document d’urbanisme lui-même et, le cas échéant, doit alors être mis en œuvre par l’autorité administrative.

    En second lieu, pour que l’administration puisse légalement mettre en œuvre l’exception introduite par l’arrêté commenté deux conditions doivent être réunies.

    D’une part, l’autorité administrative doit apprécier « les différents intérêts publics et privés en présence » et doit donc mette en œuvre une forme de « théorie du bilan » pas si éloignée de celle mise en œuvre par le juge administratif pour apprécier l’urgence à suspendre un permis de construire.

    Reste cependant à savoir si l’intérêt public doit justifier la mise en œuvre de cette exception ou s’il est seulement requis que l’intérêt public ne s’y oppose pas.

    Dans la mesure où les intérêts privés vont naturellement dans le sens de la mise en œuvre de cette exception et où il s’agit de les mettre en balance avec les intérêts publics en présence, on peut donc penser qu’il est seulement nécessaire que l’intérêt public ne s’oppose pas à la réalisation des travaux en cause.

    Mais dès lors force est d’admettre que rares seront les cas où l’intérêt public s’oppose à la préservation d’un immeuble et surtout au respect des normes.

    D’autre part, il est nécessaire qu’il s’agisse d’une construction « à l'égard de laquelle aucune action pénale ou civile n'est plus possible ».

    La mise en œuvre de cette exception implique donc que l’administration soit en mesure d’apprécier si les actions pénales et civiles possibles sont ou non prescrites ; sans compter que si à la date à laquelle l’administration est saisie d’introduction de telles actions n’apparait plus possibles, il n’en demeure pas moins qu’elles peuvent déjà avoir été précédemment introduites sans que l’administration n’en ait connaissance.

    En dernier lieu, il faut relever que l’arrêt commenté énonce que « dans l'hypothèse où un immeuble a été édifié sans autorisation en méconnaissance des prescriptions légales alors applicables, l'autorité administrative, saisie d'une demande tendant à ce que soient autorisés des travaux portant sur cet immeuble, est tenue d'inviter son auteur à présenter une demande portant sur l'ensemble du bâtiment ; que dans l'hypothèse où l'autorité administrative envisage de refuser le permis sollicité parce que la construction dans son entier ne peut être autorisée au regard des règles d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision ».

    S’il ne couvre vraisemblablement pas que celle-ci, il envisage néanmoins l’hypothèse où, d’une part, la demande ne porte pas sur l’ensemble de l’immeuble et où, d’autre part, cette immeuble ne peut pas être régularisé.

    Saisie d’une demande et d’un dossier ne portant que sur les nouveaux travaux projetés, et non pas donc sur l’ensemble de l’immeuble, l’administration doit donc néanmoins examiner l’ensemble de la construction pour apprécier si elle peut ou non être régularisée dans son ensemble.

    D’ailleurs, sur ce point il faut relever une particularité : rendue à propos d’une déclaration de travaux le considérant de principe de l’arrêt commenté vise uniquement le cas où « l'autorité administrative envisage de refuser le permis sollicité ».

    S’il l’on voit mal pourquoi il faudrait exclure du bénéficie de cette exception la déclaration préalable, il n’en demeure pas moins qu’il est pour le moins difficile d’apprécier la propension d’une construction à être régularisée dans son ensemble au vu des seules pièces d’un dossier déclaratif.

    Mais quoi qu’il en soit si cette régularisation n’apparait pas possible, et que les conditions requises à cet effet sont réunies, l’administration a alors la faculté « d'autoriser, parmi les travaux demandés, ceux qui sont nécessaires à sa préservation et au respect des normes ».

    Il s’ensuit que l’autorité compétente a vocation à mettre en œuvre l’exception introduite par l’arrêté commenté dès la décision prise sur la demande initiale dont elle est saisie.

    Il ne lui incombe donc pas de rejeter la demande en indiquant au pétitionnaire qu’il lui serait en revanche possible de présenter une demande se limitant aux travaux éventuellement nécessaires à la préservation de l’immeuble et au respect des normes.

    Saisie d’une demande portant sur un ensemble de travaux, l’administration doit donc faire le tri entre ceux nécessaires à la préservation de l’immeuble et au respect des normes et ceux qui ne tendent pas à la réalisation de cet objectif ; sans compter que l’on peut se demander dans quelle mesure ce tri doit avoir une incidence sur la nature de l’autorisation à délivrer et/ou sur les modalités d’appréciation de sa régularité procédurale lorsque la demande est une demande de permis de construire alors que les seuls travaux susceptibles d’être autorisés relèvent du champ d’application de la déclaration préalable.

    En revanche, si l’on s’en tient à l’hypothèse visée par l’arrêt commenté, il semble que l’exception qu’il introduit se limite au cas où l’immeuble existant ne peut pas être régularisé.

    Si cette régularisation apparait possible l’administration devrait donc purement et simplement rejeter la demande en invitant le pétitionnaire à présenter une demande portant sur l’ensemble de l’immeuble ; le pétitionnaire devant alors espérer qu’au vu un tel dossier, l’administration n’opère pas une appréciation différente de la propension de l’immeuble à être régularisé…

     


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés