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VEILLE ADMINISTRATIVE : Réponse Ministérielle n° 24501 (commentée) – Sur l’application de la jurisprudence « Thalamy » aux travaux dispensés de toutes formalités

Texte de la question (JOAN le : 03/06/2008 page : 4579) :
« Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, de l'énergie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, sur le cas où un immeuble a été réalisé sans permis de construire et où aucune poursuite n'a été engagée dans le délai de prescription. Si ultérieurement le propriétaire souhaite effectuer une extension du bâtiment en cause, elle souhaite savoir si un permis de construire peut être accordé et si ce permis de construire ne doit concerner que les travaux nouveaux envisagés, ou inclure également la construction initiale »

Texte de la réponse (JOAN le : 23/06/2009 page : 6140)
« Lorsqu'un propriétaire souhaite agrandir ou procéder à des travaux sur un bâtiment irrégulièrement construit sans autorisation, il doit déposer une demande de permis de construire portant à la fois sur l'existant et sur le projet à réaliser (Conseil d'État, Thalamy, 9 juillet 1986, n° 51172). Le permis ne pourra être accordé que si l'ensemble de la construction est conforme aux règles d'urbanisme en vigueur au moment de la délivrance. L'autorisation ainsi délivrée permettra à la fois d'autoriser la réalisation des travaux projetés et de régulariser administrativement la construction existante édifiée sans autorisation. Toutefois, l'article L. 111-12 du code de l'urbanisme, introduit par l'article 9 de la loi n° 2006-872 du 13 juillet 2006 portant engagement national pour le logement (ENL), prévoit que « lorsqu'une construction est achevée depuis plus de dix ans, le refus de permis de construire ou de déclaration de travaux (devenue déclaration préalable depuis le 1er octobre 2007) ne peut être fondé sur l'irrégularité de la construction initiale au regard du droit de l'urbanisme ». Le deuxième alinéa de cet article précise que ces dispositions ne sont pas applicables, notamment « lorsque la construction a été réalisée sans permis de construire ». En application du deuxième alinéa de l'article L. 111-12 précité, si l'ensemble de la construction n'est pas conforme aux règles en vigueur, le permis de construire sera donc refusé, même au-delà du délai de dix ans, puisque l'immeuble existant a été réalisé sans permis. La construction existante ne sera donc pas régularisée et le demandeur ne pourra pas réaliser les travaux complémentaires envisagés. En revanche, dans le cas où les travaux projetés portent sur des éléments dissociables de l'immeuble édifié sans permis de construire, le demandeur peut déposer une requête portant sur ces seuls travaux, et n'incluant pas la partie existante. L'autorisation pourra lui être accordée si les règles applicables le permettent. De la même façon, des travaux d'entretien ou de réparations ordinaires (par exemple, le remplacement des huisseries par d'autres identiques) ou des travaux ne modifiant pas l'aspect extérieur de la construction, qui ne sont pas soumis à autorisation, peuvent être effectués (voir réponse ministérielle n° 3439 à Mme Zimmerman publiée au JO du 15 janvier 2008, réponse ministérielle n° 27730 à M. Flory publiée au JO du 16 décembre 2008, réponse ministérielle n° 01578 à M. Masson publiée au JO Sénat du 17 janvier 2008) ».

Commentaire: Comme on le sait, le défaut d’existence légale de la construction sur laquelle les travaux sont projetés est opposable non seulement aux travaux relevant du champ d’application du permis de construire mais également à ceux relevant du champ d’application de la déclaration préalable (CE. 30 mars 1994, Gigoult, req. n°137.881).

Mais il faut s’interroger sur l’opposabilité de l’inexistence légale de la construction sur laquelle les travaux sont projetés lorsque ces derniers sont dispensés de toute formalité au titre de l’article R.421-13 du Code de l’urbanisme, lequel recouvre l’ensemble des travaux projetés sur une construction précédemment édifiée, à l’exception des travaux expressément soumis à permis de construire en application des articles R.421-14 à R.421-16 ou à déclaration préalable.

Précisément, réponse ministérielle relevée aujourd’hui induit qu’ils pourraient être réalisés sans autorisation destinée à régulariser la construction sur laquelle ils portent. Cette solution ne principe nous parait toutefois sujette à caution.

Il est vrai que c’est principalement au stade de la demande de permis de construire ou de la déclaration préalable que l’illégalité de la construction sur laquelle ils portent a vocation à être sanctionnée. A priori, si les travaux projetés sont dispensés de toute formalité au titre du Code de l’urbanisme, on voit mal comment l’administration pourrait s’y opposer au motif tiré de l’irrégularité de la construction initiale.

Il reste que l’article R.421-13 du Code de l’urbanisme vise expressément « les travaux exécutés sur des constructions existantes ».

Il n’est donc pas totalement exclu que les travaux projetés sur une construction dépourvue d’existence légale soient considérés comme ne pouvant pas bénéficier du régime prévu par l’article R.421-13 puisqu’il ressort il ressort de la jurisprudence rendue en la matière que tant le juge administratif (CE. 30 mars 1994, Gigoult, req. n°137.881) que le juge judiciaire (Cass. crim, 9 mars 1993, François Derrien, pourvoi n°92-82.372) tiennent compte de la régularité de la construction pour déterminer l’autorisation à laquelle sont assujettis les travaux projetés sur cet ouvrage mais également pour établir si, le cas échéant, ceux-ci sont dispensés de toute formalité (en ce sens : Concl. : S.Lasvignes sur : CE. 13 octobre 1993, Mme Clément, req.. n°126.112 ; BJDU, n°1/94, p.53).

Partant, on peut donc considérer qu’en l’absence de régularisation de cette construction, l’administration serait en droit d’ordonner l’interruption des travaux sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme dès lors que celui-ci peut être mis en œuvre s’agissant de travaux dispensés de toute formalité dès lors qu’ils sont indissociables d’une construction soumise à autorisation (CAA. Versailles, 7 juin 2007, SCI Eline, req. n°06VE02378 ; CAA. Marseille, 18 mai 2006, M. Georges X…, req. n°03MA00455).



Patrick E. DURAND
Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés

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