Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

  • Sur l’étendue et l’incidence des « dérogations » prévues par le règlement local d’urbanisme

    Une disposition du règlement de PLU introduisant une dérogation susceptible d’excéder les limites d’une simple autorisation d’adaptation mineure n’affecte pas pour autant la légalité de ce règlement.

    CAA. Nancy, 8 novembre 2007, M. Jean-Louis X, req. n°06NC00677



    Voici un arrêt particulièrement intéressant, notamment, en ce qu’il permet de traiter l’un des aspects méconnus du mode d’interprétation des prescriptions du règlement local d’urbanisme par le juge administratif.

    Dans cette affaire était en cause la délibération par laquelle le Conseil municipal de la commune défenderesse avait adopté son PLU ; décision qui devait donc faire l’objet d’un recours fondé, notamment, sur le fait que l’une des dispositions du PLU ainsi approuvé introduisait, selon le requérant, une véritable dérogation à la règle de principe prescrite par son article 11 et, par voie de conséquence, que cette disposition serait illégale au regard de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme.

    On sait, en effet, que antépénultième l'article L. 123-1 du code de l'urbanisme dispose que « les règles et servitudes définies par un plan local d'urbanisme ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation, à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ».

    En résumé, l’article précité s’oppose à ce que l’administration, à travers la délivrance d’une autorisation d’urbanisme, accorde une dérogation à la règle de principe mais lui permet seulement ou, plus précisément, lui impose (sur ce point : TA. Besançon, 30 novembre 2000, Sté SMCI, req. n°99-00642), lorsque les conditions sont remplies, d’autoriser des adaptations mineures mais ce, pour autant qu’une telle autorisation d’adaptation mineure soit justifiée « par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes ».

    Il reste que sans être exceptionnel, il est rare qu’un règlement local d’urbanisme prévoit en tant que telles des possibilités d’adaptations mineures puisque, le plus fréquemment, ces règlements édictent une règle de principe suivie, le cas échéant, de règles « alternatives » à la portée et aux conditions précisément définies et encadrées, lesquelles sont alors constitutives d’autant d’exceptions (et non pas dérogation, sur cette différence : 10 novembre 1993, Epx Sylvestre, req. n°124.532).

    Mais il arrive également qu’à l’égard d’une même situation, le règlement local d’urbanisme prescrive une règle de principe tout en introduisant, d’une façon très générale et sans véritable condition, une possibilité d’assouplissement de ce principe.

    Tel était précisément le cas en l’espèce où à la règle de principe posée par l’article Ua.11 du PLU communal et selon laquelle « les murs non construits avec les mêmes matériaux que les façades principales devront présenter un aspect qui s'harmonise avec celles-ci » s’ajoutait une disposition précisant que « « les projets de dessin contemporain faisant l'objet d'une recherche architecturale manifeste et innovante sont acceptés » et à l’encontre de laquelle le requérant soutenait donc qu’elle méconnaissait l’antépénultième alinéa de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme et, par voie de conséquence, était illégale.

    Mais ce moyen devait être rejeté par la Cour administrative d’appel de Nancy et ce, au motif suivant :

    « Considérant que ces dispositions ne sont susceptibles de s'appliquer qu'aux autorisations de construire ou d'aménagement délivrées sur le fondement d'un plan local d'urbanisme ; que, par suite, le requérant ne saurait utilement faire valoir que certaines prescriptions prévues à titre dérogatoire par le plan local d'urbanisme méconnaîtraient les dispositions précitées en tant qu'elles ne constitueraient pas une adaptation mineure des prescriptions édictées à titre principal ;
    Considérant, en outre, qu'à supposer même que la dérogation introduite par l'article Ua11 du règlement du plan local d'urbanisme, qui spécifie que : « les projets de dessin contemporain faisant l'objet d'une recherche architecturale manifeste et innovante sont acceptés » et pourront, dans ce cas, faire l'objet d'une adaptation du principe selon lequel les murs non construits avec les mêmes matériaux que les façades principales devront présenter un aspect qui s'harmonise avec celles-ci, soit regardée comme excédant le champ d'un simple tempérament apporté à cette règle et remettant en cause le principe même ci-dessus rappelé, cette circonstance demeurerait en tout état de cause sans incidence sur la légalité du plan local d'urbanisme et aurait pour seule conséquence de faire obstacle à la délivrance d'une autorisation de construire sur le fondement de telles dispositions
    ».


    En substance, la Cour a donc considéré qu’une disposition d’un règlement local d’urbanisme introduisant une dérogation ou, plus précisément, une possibilité de déroger à la règle générale n’était pas illégale au regard du principe posé par l’antépénultième alinéa de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme dans la mesure où les dispositions de ce dernier :

    - d’une part, ne sont susceptibles de s'appliquer qu'aux autorisations de construire ou d'aménagement délivrées sur le fondement d'un plan local d'urbanisme ;
    - d’autre part et par voie de conséquence, s’opposent seulement à la délivrance de telles autorisations sur le fondement d’une disposition dérogatoire du règlement local d’urbanisme ;

    et, en résumé, que ce principe est opposable et peut être sanctionné au stade de la délivrance des autorisations (permis ou non-opposition à déclaration) délivrées en application du règlement local d’urbanisme mais n’intéresse pas et ne conditionne pas la légalité de ce dernier.

    En première analyse, une telle solution peut surprendre dans la mesure où elle aboutit à considérer qu’il n’est pas illégal de prévoir une règle qui ne saurait être légalement appliquée au stade de la délivrance des autorisations d’urbanisme.

    Il reste que les dispositions analogues à celles en litige dans l’affaire objet de l’arrêt commenté – c’est-à-dire toutes celles offrant une alternative imprécise et inconditionnée à la règle de principe (sur ce point : concl. Arrighi de Casanova sur : CE. 2 mars 1994, Cne de Maromme, req. n°140.723 ; BJDU, n°6/94, p.3) et, par voie de conséquence, la possibilité de « négocier » avec l’administration l’assouplissement de cette règle – ne sont jamais interprétées comme des « dérogations » mais sont, en fait, (re)qualifiées en autorisations d’adaptation mineure et appliquées comme telles par le juge administratif. A titre d’exemple, le Conseil d’Etat ainsi jugé que :

    « Considérant qu'aux termes des articles UZ 6 et UZ 7 du plan d'occupation des sols de la COMMUNE DE MAROMME, s'agissant respectivement, d'une part, de l'implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques : "Sauf indications particulières portées au plan, les constructions doivent respecter une marge de recul de 10 m minimum, comptée à partir de la limite d'emprise publique" et, d'autre part, de l'implantation des constructions par rapport aux limites séparatives des propriétés : "La distance minimum à respecter entre la limite de propriété et la construction sera égale à la moité de la hauteur de la construction avec un minimum de 5 m" ; que ces mêmes dispositions prévoient que "les cas des ouvrages techniques, de surveillance et de gardiennage, ainsi que l'agrandissement des bâtiments existants pourront faire l'objet de dérogations" ; que cette dernière disposition, qui ne fixe aucune règle précise, ne peut avoir pour effet d'autoriser que des adaptations mineures aux règles précitées du plan d'occupation des sols ;
    Considérant, à supposer que la construction litigieuse constitue l'agrandissement d'une construction existante au sens des dispositions du plan d'occupation des sols précitées, que le permis de construire délivré à la SCI les ateliers du Cailly a autorisé l'implantation de cette construction à 0,50 m de l'alignement de la voie publique et à une distance de la limite de propriété publique voisine qui varie de 0,10 m à 0,50 m ; que de telles dérogations aux règles ci-dessus rappelées du plan d'occupation des sols ne peuvent être regardées comme des adaptations mineures ; que, par suite, la COMMUNE DE MAROMME n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rouen a annulé, pour ce motif, le permis de construire délivré le 26 mars 1991 » (CE. 2 mars 1994, Cne de Maromme, req. n°140.723)


    Et :

    « Considérant qu'aux termes de l'article L 123-1 7ème alinéa 4 du code de l'urbanisme, "les règles et servitudes définies par un plan d'occupation des sols ne peuvent faire l'objet d'aucune dérogation à l'exception des adaptations mineures rendues nécessaires par la nature du sol, la configuration des parcelles ou le caractère des constructions avoisinantes" ; que l'article UB 5-1 du réglement du plan d'occupation des sols de Lay-Saint-Christophe précise que "pour qu'une unité foncière soit constructible, sa façade sur rue ou l'une de ses façades sur rue doit être au moins égale à 12 m dans le cas de construction en mitoyenneté" ; que l'article UB 5-2 dudit réglement prévoit que, "par adaptation mineure et dans les conditions fixées à l'article 4 titre I du présent réglement, la largeur des façades des parcelles insérées entre 2 parcelles déjà construites pourra être inférieure à 12 m." ; que cette dernière disposition doit être interprétée comme signifiant qu'une dérogation à la règle posée à l'article UB 5-1 ne peut être accordée, dans le cas où la parcelle est insérée entre deux parcelles déjà construites, que pour une adaptation mineure de ladite règle ;
    Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que la parcelle sur laquelle M. PILLOY se proposait de construire un garage est insérée entre deux parcelles déjà construites et que la largeur de sa façade sur rue est seulement de quatre mètres ; que l'autorisation donnée par le maire de Lay-Saint-Christophe à M. PILLOY de construire un garage, alors que la largeur de la façade sur rue requise était de douze mètres, ne saurait être regardée comme une adapation mineure de la règle posée à l'article UB 5-1 du réglement du plan d'occupation des sols de cette commune ; que, par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont estimé, à la demande des époux CABOURDIN, que le permis de construire délivré le 21 décembre 1982 à M. PILLOY par le maire de Ly-Saint-Christophe l'avait été en violation des dispositions du plan d'occupation des sols de cette commune et, par suite, de celles de l'article L.123-1 7° du code de l'urbanisme » (CE.12 mars 1986, M. Pilloy, req. n°58.389).


    Dès lors que de telles dispositions dérogatoires sont comprises et appliquées par le juge administratif comme des autorisations d’adaptation mineure, elles ne peuvent donc pas être contraires au principe posé par l’antépénultième alinéa de l’article L.123-1 du Code de l’urbanisme...

    C’est dans cette mesure que la solution retenue par l’arrêt commenté nous paraît justifiée.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • VEILLE ADMINISTRATIVE : SUR LE NOUVEAU DELAI DE RETRAIT DES AUTORISATIONS D’URBANISME

    Réponse n°7544 - Réponse publiée au JO le : 27/11/2007 page : 7495

    Texte de la question :

    « Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le cas d'une demande de permis de construire qui n'a pas été rejetée dans le délai de deux mois. Dans cette hypothèse, le permis de construire est accordé tacitement. Elle souhaiterait savoir si dans le délai de deux mois suivant l'octroi tacite du permis de construire l'administration peut prendre une décision retirant ledit permis au motif qu'il est toujours possible pour l'administration de changer d'avis dans le délai de deux mois ».

    Texte de la réponse :

    « Aux termes de l'article L. 424-5 du code de l'urbanisme, en vigueur à compter du 1er octobre 2007, le permis de construire tacite ne peut être retiré que s'il est illégal et dans les trois mois suivant la date à laquelle il est intervenu. Passé ce délai, le permis ne peut être retiré que sur demande explicite de son bénéficiaire. Pour les permis tacites soumis au régime antérieur au 1er octobre 2007, le retrait est également possible dans les conditions prévues par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 sur les droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations. Cet article autorise le retrait des permis tacites illégaux pendant le délai de recours contentieux si des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre, ou pendant deux mois à compter de la date du permis en l'absence de mesures d'information des tiers. Il autorise également le retrait pendant la durée de l'instance si un recours contentieux a été formé contre le permis. Que le permis soit soumis au régime antérieur ou postérieur au 1er octobre 2007, l'autorité compétente devra mettre en oeuvre la procédure contradictoire prévue par l'article 24 de la loi du 12 avril 2000 précitée et qui permet au titulaire du permis de présenter ses observations préalablement au retrait ».


    On relèvera que la réponse évite subtilement (« en vigueur à compter du 1er octobre 2007 » & « pour les permis tacites soumis au régime antérieur au 1er octobre 2007 »…) de trancher la principale question posée par le nouvel article L.424-5 du Code de l’urbanisme : s’applique-t-il également, à compter du 1er octobre 2007, aux permis délivrés avant cette date ?

    Tel nous semble, toutefois, pouvoir être le cas, pour les permis de construire et les permis de démolir, faute de disposition transitoire prévue par l’article L.424-5 du Code de l’urbanisme.

    On précisera, en effet, que l’article 4 du décret n°2007-817 du 11 mai 2007 en ce qu’il dispose que « les demandes de permis de construire et d'autorisations prévues par le code de l'urbanisme déposées avant le 1er octobre 2007 demeurent soumises aux règles de compétence, de forme et de procédure en vigueur à la date de leur dépôt » ne régit que le « traitement » des demandes et n’a donc pas vocation à organiser le sort des décisions subséquentes et, notamment, leur retrait.

    Or, à titre d’exemple, sous l’empire de l’ancien article L.421-2-8 du Code de l’urbanisme dont on rappellera qu’il disposait que « les demandes de permis de construire sur lesquelles il n'a pas été statué à la date du transfert de compétences continuent d'être instruites et font l'objet de décisions dans les conditions prévues par les dispositions en vigueur au moment de leur dépôt », il a néanmoins été jugé qu’en conséquence de l’intervention d’un transfert de compétences pour la délivrance des autorisations d’urbanisme intervenu entre ces deux décisions, un maire était compétent pour retirer au nom de la commune un permis de construire précédemment délivré par le préfet au nom de l’Etat (CE. 7 octobre 1994, Joly, req. n°90344).

    Mais surtout, le nouvel article L.424-5 du Code de l’urbanisme conditionne non pas la légalité des autorisations d’urbanisme qu’il vise mais régit uniquement la légalité des décisions de retrait de ces dernières pour ce qui concerne le délai dans lequel elles interviennent.

    Or, par principe, la légalité d’une décision administrative s’apprécie en considération des normes applicables à sa date d’édiction et il en va évidemment ainsi des décisions prononçant le retrait d’une autorisation d’urbanisme dont, par voie de conséquence, la légalité s’apprécie au regard des règles en vigueur à la date du retrait et non pas au regard de celles applicables à la date de délivrance de l’autorisation retirée. A titre d’exemple, il a ainsi été jugé que :

    « Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes des dispositions de l'article 23 de la loi susvisée du 12 avril 2000 : Une décision implicite d'acceptation peut être retirée pour illégalité par l'autorité administrative : A. Pendant le délai du recours contentieux, lorsque des mesures d'information des tiers ont été mises en oeuvre ; 2. - Pendant le délai de deux mois à compter de la date à laquelle est intervenue la décision lorsque aucune mesure d'information des tiers n'a été mise en oeuvre ; 3. - Pendant la durée de l'instance au cas où un recours contentieux a été formé ;
    Considérant qu'à la date à laquelle est intervenue la décision de retrait attaquée, la décision implicite d'acceptation du 30 avril 2002 faisait l'objet d'un recours pendant devant le Tribunal administratif de Melun introduit par l'association seine-et-marnaise de sauvegarde de la nature (A.S.M.S.N.) ; que, contrairement aux allégations de la SOCIETE LES REMBLAIS PAYSAGERS, ce recours n'était pas tardif dès lors que la requérante n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les formalités d'affichage de la décision susmentionnée auraient été effectuées ; que, par suite, le maire de Carnetin pouvait
    , conformément aux dispositions précitées de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000, procéder au retrait de l'acte attaqué » (CAA. Paris, 2 octobre 2006, Sté Les Remblayes Paysagers, req. n°05PA03683).


    Ce principe est constant puisqu’il a pu être jugé que la procédure administrative contradictoire instituée par l’article 24 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 s’appliquait à toute décision défavorable prise à compter de son entrée en vigueur, y compris à celle retirant une décision créatrice de droit formée avant cette échéance (pour exemple : CE. 3 décembre 2001, Mme Errify, req. n°230.847) ou, bien plus, qu’en conséquence de l’intervention d’un transfert de compétences pour la délivrance des autorisations d’urbanisme intervenu entre ces deux décisions, un maire était compétent pour retirer au nom de la commune un permis de construire précédemment délivré par le préfet au nom de l’Etat (CE. 7 octobre 1994, Joly, req. n°90344).

    D’ailleurs, les délais de retrait des décisions implicites d’acceptation antérieurement issues de la jurisprudence dite « Dame Cachet » (CE. 3 novembre 1922, Dme Cachet, req. n°74010) ont été substantiellement modifiées par l’article 23 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 dont on précisera qu’elle est entrée en vigueur le 1er novembre de la même année. Or, pour application de ce nouveau dispositif, il a pu être jugé :

    « Considérant que, pour annuler la décision en litige, les premiers juges se sont fondés sur le caractère tardif du retrait ainsi opéré en estimant que le maire n'avait pu légalement y procéder, de sa propre initiative, après l'expiration d'un délai de deux mois suivant la naissance de la décision tacite de non opposition ; que, toutefois, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, la décision de retrait, intervenue avant l'entrée en vigueur de l'article 23 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 susvisée, et alors même qu'elle a été prise de la propre initiative de l'autorité administrative, pouvait légalement intervenir dans le délai de recours contentieux ouvert à l'encontre de la décision tacite ; (CAA. Marseille, 16 mars 2006, Ministre de l’équipement, req. n°03MA00934) ;

    et :

    « Considérant qu'il est constant que la lettre de notification du délai d'instruction en date du 27 mars 2000 n'avait fait l'objet d'aucun affichage ; qu'à la date de la décision de retrait du permis tacite, les dispositions de l'article 23 de la loi du 12 avril 2000 n'étaient pas, en tout état de cause, entrées en vigueur ; que, dans ces conditions, le maire de la COMMUNE DE SAINT-ANDRE-LEZ-LILLE n'a pas porté atteinte à des droits définitivement acquis au bénéfice de la SA X Matériaux en prononçant, le 28 septembre 2000, le retrait du permis de construire délivré implicitement le 17 juin 2000 » (CAA. Douai, 28 avril 2005, Cne de Saint-Andre-les-Lille, req. n°03DA01136).

    Dans ces deux affaires, le juge administratif a donc apprécié la légalité de la décision de retrait en recherchant les règles applicables à leur date d’édiction et ce, indépendamment de toute considération liée à la date de délivrance de l’autorisation retirée.

    Suivant ce principe, le dispositif issu du nouvel article L.424-5 du Code de l’urbanisme aurait donc vocation à conditionner la légalité des décisions de retrait prononcée à compter du 1er octobre 2007, y compris donc pour ce qui concerne celles portant sur des autorisations délivrées avant cette date ; étant précisé qu’une telle interprétation n’a nullement vocation à conférer à ce dispositif une portée rétroactive puisque ce dernier régit la légalité des seules décisions de retrait et qu’elle n’aboutit pas à l’appliquer aux décisions de retrait prononcées avant le 1er octobre 2007.

    Selon nous, la seule réserve pourrait tenir à ce que l’article précité vise des autorisations, tel le permis d’aménager, n’ayant vocation à intégrer l’ordonnancement juridique qu’en conséquence de demandes présentées à compter du 1er octobre 2007.

    Il reste que si c’est cette considération qui devait conduire l’application dans le temps du nouvel article L.424-5 du Code de l’urbanisme, force serait alors d’admettre que son dispositif aurait vocation à s’appliquer non pas seulement aux autorisations d’urbanisme délivrées après le 1er octobre 2007 mais, plus généralement, aux seules autorisations délivrées en conséquence d’une demande présentée après cette échéance.

    Mais au regard des principes gouvernant la légalité d’une décision administrative et, notamment, de cette portant retrait d’une autorisation d’urbanisme, tel ne nous semble pas devoir être le cas.

    Il n’en demeure pas mois qu’en toute hypothèse, on est ici encore forcer de constater l’imperfection du dispositif organisant la réforme des autorisations d’urbanisme. Mais l’expérience prouve qu’il ne faut pas désespérer puisque les rédacteurs du décret du 5 janvier 2007 avaient mis à peine plus de quatre mois pour s’apercevoir que ce dispositif ne comportait aucune mesure transitoire pour les demandes présentées avant le 1er octobre 2007 mais ayant vocation à aboutir après cette échéance ; ce qui fut donc réparé par l’article 4 du décret du 11 mai 2007...


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Retour sur le champ d’application du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme

    L’absence de « volet paysager » au dossier au vu duquel a été délivré le permis de construire en litige entache l’ensemble d’illégalité de ce dernier. Par voie de conséquence, celui-ci ne peut faire l’objet d’une mesure d’annulation partielle au titre du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme, lequel est toutefois applicable en appel, y compris lorsque le jugement attaqué a été rendu avant l’entrée en vigueur de cet article (implicite).

    CAA. Bordeaux, 30 octobre 2007, SCI Les Terrasses de Marie, req.n° 05BX01764

    En revanche, ce nouveau dispositif ne paraît pas applicable en cas de recours à l’encontre d’un refus de permis de construire.

    CAA. Nancy, 11 octobre 2007, Cne de Wolfisheim, req. n°06NC00685


    L’arrêt de la Cour bordelaise est doublement intéressant en ce qu’il contribue, combiné à la décision de la Cour nancéenne, à préciser le champ d’application temporel et matériel du nouvel article L.600-5 du Code de l’urbanisme dans sa rédaction issue de la loi du 16 juillet 2006 dite « ENL ».

    Dans cette affaire, la SCI appelante avait obtenu, le 13 octobre 2004 un permis de construire, délivré en tant que « modificatif », lequel devait cependant être annulé, le 22 juin 2005, par le Tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion au motif tiré, pour ce qui concerne sa légalité externe, d’une part, de la méconnaissance de l’(ancien) article R.421-2 du Code de l’urbanisme et, pour ce qui concerne sa légalité interne, d’autre part, de la violation des prescriptions du l’article 10 du règlement de POS communal.

    Pour sa part, la Cour administrative d’appel de Bordeaux devait annuler le jugement attaqué, dès lors qu’il ne ressortait pas des pièces du dossier que la hauteur de la construction projetée méconnaissait l’article10 susvisé, mais néanmoins prononcer l’annulation d’ensemble du permis de construire contesté et ce au motif suivant :

    « Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le permis de construire délivré le 13 octobre 2004 à la SCI LES TERRASSES DE MARIE a eu pour objet de modifier la superficie du terrain d'assiette pour la porter de 422 à 451 m2, de modifier l'implantation de l'immeuble en le reculant de la limite de propriété pour le mettre en conformité avec les prescriptions du règlement du plan d'occupation des sols, de diminuer l'emprise au sol de la construction, d'augmenter le nombre de logements de 11 à 15 en permettant notamment la création de logements dans les combles, de diminuer les surfaces autorisées en supprimant un niveau de parking souterrain et, enfin, de modifier l'aspect extérieur et l'aménagement des abords ; que le nombre, l'importance et la nature des modifications envisagées par le pétitionnaire, qui entraînent notamment le changement du volume des toitures et la création de nouvelles ouvertures en façade du projet, la transformation des loggias en balcons et la suppression d'emplacements de stationnement alors que le nombre de logements augmente de manière significative, sont de nature à faire regarder le permis de construire litigieux non comme un permis modificatif mais comme un nouveau permis de construire qui se substitue au permis initial qu'il retire ;
    Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme : Le dossier joint à la demande de permis de construire comporte : (...) 5° Deux documents photographiques au moins permettant de situer le terrain respectivement dans le paysage proche et lointain et d'apprécier la place qu'il y occupe. Les points et les angles des prises de vue seront reportés sur le plan de situation et le plan de masse ; 6° Un document graphique au moins permettant d'apprécier l'insertion du projet de construction dans l'environnement, son impact visuel ainsi que le traitement des accès et des abords. Lorsque le projet comporte la plantation d'arbres de haute tige, les documents graphiques devront faire apparaître la situation à l'achèvement des travaux et la situation à long terme ; 7° Une notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet. A cet effet, elle décrit le paysage et l'environnement existants et expose et justifie les dispositions prévues pour assurer l'insertion dans ce paysage de la construction, de ses accès et de ses abords ; qu'il ressort des pièces du dossier que la demande de permis de construire n'était accompagnée ni des documents photographiques ni de documents graphiques ni de la notice permettant d'apprécier l'impact visuel du projet ; qu'aucune des autres pièces jointes ne permettait d'apprécier l'insertion du projet dans l'environnement ni son impact visuel ; qu'ainsi que l'a jugé le tribunal administratif de Saint-Denis de la Réunion, l'absence de ces documents au dossier de demande de permis de construire est de nature à entacher d'illégalité le permis de construire délivré le 13 octobre 2004
    ».


    En résumé, après avoir logiquement – au regard de l’importance des modifications autorisées – requalifier le « modificatif » en cause en nouveau permis de construire, la Cour administrative d’appel de Bordeaux a donc constaté que ce dernier avait été délivré au vu d’un dossier ne comportant pas les documents photographiques, les documents graphiques et la notice paysagère prescrites par les points 5°, 6° et 7° du Code de l’urbanisme et, en d’autre termes, ne comportant pas ce qu’il était convenu d’appeler le « volet paysager ».

    On précisera, en effet, que, contrairement à une idée répandue, le seul fait qu’un permis de construire délivré en tant que « modificatif » apporte des modifications substantielles au projet initial n’emporte pas ipso facto son annulation mais seulement sa requalification en nouveau permis de construire ; requalification dont il résulte que la légalité du permis de construire contesté doit être appréciée en tant que nouveau permis tant pour ce qui concerne la régularité du dossier produit par le pétitionnaire et la procédure préalable que le respect au fond des prescriptions opposables au projet.

    Il reste que, le plus souvent, les demandes de « modificatif » sont présentées sous la forme d’un dossier et font l’objet d’une instruction allégés, si bien que lorsqu’ils sont requalifiés en nouveau permis de construire ils sont annulés pour vice de forme et de procédure.

    Tel fut le cas donc le cas en l’espèce puisque le « modificatif » contesté avait été délivré au vu d’un dossier ne comportant pas de « volet paysager » ; étant, d’ailleurs, relevé que même s’il n’avait pas été requalifié en nouveau permis de construire, il aurait manifestement eu vocation à être annulé puisqu’il autorisait de nombreuses modifications intéressant l’aspect extérieur du projet initialement autorisé, lesquelles rendaient ainsi exigible ce document.

    Mais ce qui est le plus intéressant est que la Cour administrative d’appel de Bordeaux se soit prononcée au titre de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme en jugeant que : « l'insuffisance des documents joints au dossier de demande entache l'ensemble du permis de construire litigieux d'illégalité ; qu'il n'y a pas lieu, dès lors, de prononcer une annulation partielle de cette autorisation ».

    Rappelons, en effet, que l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme dispose que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive ».

    Force est ainsi d’admettre qu’en visant le cas « une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale », l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme n’a donc vocation à s’appliquer que dans la mesure où le permis est entaché d’illégalité interne, c’est-à-dire méconnait les prescriptions d’urbanisme applicable au projet et non pas les règles de forme et de procédure relatives à sa délivrance.

    C’est donc à juste titre que la Cour administrative d’appel de Bordeaux a jugé qu’au regard de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme « l'insuffisance des documents joints au dossier de demande entache l'ensemble du permis de construire litigieux d'illégalité » ; bien qu’il soit permis de s’interroger sur la portée exacte de ce « considérant » qui ne permet pas d’apprécier clairement si la Cour a visé une règle de principe ou s’il s’agit d’une solution propre au cas d’espèce.

    Par ailleurs, il faut rappeler qu’en l’espèce, le permis de construire attaqué datait du 13 octobre 2004 et le jugement contesté avait été rendu le 22 juin 2005, soit à des dates antérieures à l’entrée en vigueur de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme issu, rappelons-le, de la loi dite « ENL » du 16 juillet 2006.

    Dans le prolongement du jugement par lequel le Tribunal administratif d’Amiens a jugé que ce dispositif était d’application immédiate (TA. Amiens, 29 décembre 2006, req. n° 04-01732.pdfy compris dans le cas d’un permis de construire frappé d’un recours introduit avant son entrée en vigueur, l’arrêt commenté induit donc que l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme est applicable en appel, y compris lorsque le jugement attaqué a été rendu avant l’entrée en vigueur de cet article. Il reste qu’il va sans dire qu’en pareil cas, l’annulation globale du permis de construire contesté là où l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme en aurait permis l’annulation partielle ne saurait justifier l’annulation de ce jugement puisqu’il ne saurait être fait grief au juge de première instance de n’avoir pas utiliser un pouvoir dont il ne disposait pas à la date à laquelle il a statué.

    Relevons ainsi que la Cour administrative d’appel de Nancy a récemment jugé, le 11 octobre 2007, que :

    « Considérant que le projet de construction présenté par la société Ab Capim, aux droits de laquelle vient désormais la société Brun Habitat, porte sur l'édification au-delà d'une profondeur de 60 mètres comptés à partir de l'alignement, d'un immeuble collectif de neuf logements ; qu'il ressort des pièces du dossier et notamment des plans de coupe joints au dossier de la demande de permis de construire qu'une rampe, recouverte d'une dalle accolée à la construction et terminée par un muret en limite de propriété, permet l'accès au parking situé en sous-sol de l'immeuble ; qu'elle doit ainsi être regardée comme faisant partie intégrante de la construction, laquelle, d'une hauteur de 13 mètres, excède la limite fixée par l'article 7 UA du plan d'occupation des sols de la commune ; que, par suite, c'est à tort que, pour annuler l'arrêté en date du 26 août 2004 du maire de la COMMUNE DE WOLFISHEIM refusant à la société Brun Habitat la délivrance du permis de construire, le Tribunal administratif de Strasbourg a estimé que le maire avait fait une inexacte application desdites dispositions ».

    Au premier chef, force est ainsi de relever qu’il n’a pas ici été fait application de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme. Et pour cause puisque dans la mesure où ce dernier se borne à préciser que « lorsqu'elle constate que seule une partie d'un projet de construction ou d'aménagement ayant fait l'objet d'une autorisation d'urbanisme est illégale, la juridiction administrative peut prononcer une annulation partielle de cette autorisation. L'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive », force est d’admettre qu’il ne vise pas les décisions portant refus d’autorisation.

    Pour les décisions de refus, le principe reste donc qu’une telle décision ne peut faire l’objet d’une annulation partielle qu’à la condition qu’elle soit divisible, c’est-à-dire porte sur deux projets en tous points distincts.

    Néanmoins, l’arrêt précité s’avère également intéressant sur ce point puisqu’il offre une parfaite illustration de ce pour quoi l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme a été voulu.

    On sait, en effet, que les auteurs de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme ont expliqué que celui-ci avait vocation à « contourner » la jurisprudence du Conseil d’Etat, selon laquelle un permis de construire ne peut faire l’objet d’une annulation partielle que pour autant qu’il soit divisible, dans le cas où le permis de construire serait affecté d’illégalité en raison d’une des composantes accessoires (balcon, escalier extérieur, rampe d’accès, etc.) ; telle étant la raison pour laquelle l’alinéa 2 de cet article précise que « l'autorité compétente prend, à la demande du bénéficiaire de l'autorisation, un arrêté modificatif tenant compte de la décision juridictionnelle devenue définitive », ce qui, en toute hypothèse, semble exclure le cas où la partie du projet représente une composante substantielle du projet.

    Dans cette affaire, en effet, le refus de permis de construire a été validé dans la mesure où la rampe d’accès au parc de stationnement souterrain de l’immeuble projeté – laquelle faisait « partie intégrante » de la construction en cause – méconnaissait les règles d’implantation des constructions prescrites par l’article 7 du règlement local d’urbanisme ; étant rappelé que, sauf disposition contraire, l’ensemble des composantes indivisibles d’une construction doivent être prises en compte pour apprécier la conformité de cette dernière, notamment, par rapport aux prescriptions d’urbanisme relatives à l’implantation des constructions (CE. 23 août 2006, Assoc. Le FOnvairous, req. n°267.578).

    A suivre les auteurs de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme, si la décision en cause avait constitué un permis de construire autorisant ce projet, le juge aurait donc pu (puisqu’en toute hypothèse, la rédaction de cette article induit qu’il ne s’agit que d’une faculté) n’en prononcer que l’annulation partielle et, plus concrètement, n’en prononcer l’annulation qu’en tant qu’il avait autorisé cette rampe d’accès.

    Il reste que ce faisant, cette annulation partielle aurait abouti à la formation d’un permis de construire autorisant un immeuble doté d’un parc de stationnement inaccessible et donc méconnaissant les prescriptions de l’article 12 du règlement local d’urbanisme (pour exemple : CAA. Marseille, 8 février 2007, M. Joseph X., req. n°04MA02390 ; voir ici également), puisque les aires de stationnement inutilisables ne peuvent être prise en compte au titre de ce dernier, et ce, sans qu’il n’y ait aucunement garantie sur la régularisation du projet puisque la mise en œuvre de l’alinéa 2 de l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme implique non seulement que la partie du projet soit régularisable mais en outre « une demande du bénéficiaire de l’autorisation » que rien ne l’oblige à formuler ; étant rappelé que le dispositif mis en place par cet article n’a en effet aucun rapport avec l’annulation conditionnelle préconisée par la commission « Pelletier »…

    Telle étant la raison pour laquelle, à notre sens et sauf à ce qu’il amène le juge administratif à assouplir la notion d’ensemble indivisible, l’article L.600-5 du Code de l’urbanisme n’aura vraisemblablement qu’un impact limité sur le principe selon lequel une autorisation d’urbanisme ne peut être annulée partiellement qu’à la condition qu’elle soit divisible.

    Mais à ce sujet, force est de relever, bien que la généralité de la rédaction du second considérant cité ne permette pas d'en apprécier clairement la portée que, dans un arrêt du 21 juin 2007 (date à laquelle l'article L.600-5 était donc applicable), la Cour administrative de Lyon a, pour annuler sur le fond le permis de construire en litige, précisé que :

    "Considérant que les prescriptions archéologiques concernent ensuite les parcelles correspondant à la nécropole mérovingienne en prévoyant de manière générale sans référence à un plan de délimitation et sans opérer de distinction suivant la valeur des vestiges, que l'ensemble des vestiges repérés devront être préservés d'une part en implantant les pavillons et les voiries en dehors de leur emprise, et d'autre part en les recouvrant d'un remblaiement suffisant ; qu'elles renvoient en outre pour leur mise en oeuvre à une concertation ultérieure en cours de chantier entre le pétitionnaire et la direction régionale des affaires culturelles ; qu'alors qu'un permis de construire ne peut contenir que des dispositions précises et directement applicables, ces prescriptions, générales, imprécises et conditionnelles, qui faisaient en réalité obstacle à la réalisation du projet, rendaient le permis de construire en cause inapplicable ; qu'en outre, dans l'état de leur rédaction, les prescriptions du préfet de région, qui s'imposent à l'autorité d'urbanisme, qui ne peut pas substituer sa propre appréciation sur l'intérêt de tel ou tel vestige, ne pouvaient qu'entraîner un rejet de la demande ; que par suite, en autorisant un projet qui se borne à la suppression de quatre chalets et maintient l'implantation de pavillons sur des parcelles mentionnées comme renfermant des vestiges repérés, le préfet de la Nièvre a entaché, sur ce point, sa décision d'illégalité ; Considérant que les dispositions du permis délivré le 24 mars 2003 par le préfet de la Nièvre à la SCI Domaine du canal pour l'ensemble de la réalisation d'un village de vacances ne sont pas divisibles ; que l'association requérante est fondée à en demander l'annulation" (CAA. Lyon, 21 juin 2007, Ministre de l'équipement, req. n°04LY01501)

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur le contentieux des actes portant approbation d’une carte communale

    Si la délibération approuvant une carte communale n’est qu’un acte préparatoire insusceptible de faire l’objet d’un recours en annulation, son irrégularité peut néanmoins être excipée dans le cadre d’un recours en annulation dirigé à l’encontre de l’arrêté préfectoral approuvant ce document.

    CAA. Nancy, 8 novembre 2007, SCI Gelucourt, req. n°06NC00702


    Voici un arrêt qui, s’il n’appelle que peu de commentaires, mérite néanmoins d’être relevé dans la mesure où il intéresse le contentieux des cartes communales et, plus précisément, la recevabilité des recours introduits à l’encontre de ce document d’urbanisme et l’acte d’approbation contre lequel ils doivent être dirigés (depuis, voir ici).

    Aux termes de article L.124-2 du Code de l’urbanisme, en effet, « les cartes communales sont approuvées, après enquête publique, par le conseil municipal et le préfet. Elles sont approuvées par délibération du conseil municipal puis transmises pour approbation au préfet, qui dispose d'un délai de deux mois pour les approuver. A l'expiration de ce délai, le préfet est réputé les avoir approuvées. Les cartes communales approuvées sont tenues à la disposition du public ».

    Il s’ensuit que l’arrêté préfectoral de « co-approbation » est un véritable acte décisoire et n’est donc pas comparable à la transmission en préfecture de la délibération approuvant un PLU ; cette transmission ayant pour seul effet de conférer au PLU un caractère exécutoire. S’agissant des mesures publicité de la carte communale, l’article R.124-8 du Code de l’urbanisme précise, d’ailleurs, que : « la délibération et l'arrêté préfectoral qui approuvent ou révisent la carte communale sont affichés pendant un mois en mairie ou au siège de l'établissement public de coopération intercommunale compétent et, dans ce cas, dans les mairies des communes membres concernées. Mention de cet affichage est insérée en caractères apparents dans un journal diffusé dans le département. L'arrêté préfectoral est publié au Recueil des actes administratifs de l'Etat dans le département (…) ».

    Une carte communale n’est donc approuvée – et par voie de conséquence, n’acquiert sa place dans l’ordonnancement juridique – qu’après la décision expresse ou tacite du Préfet. C’est ainsi que la Cour administrative d’appel de Nancy avait déjà eu l’occasion de juger que :

    « Considérant qu'il résulte de ces dispositions que la délibération du conseil municipal ou de l'établissement public de coopération intercommunale approuvant une carte communale est un simple acte préparatoire à la décision du préfet arrêtant la carte communale, insusceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ; que par suite, les conclusions de la demande des époux X devant le tribunal administratif étaient irrecevables en tant qu'elles tendaient à l'annulation de la délibération du conseil municipal de la commune d'Aussonce en date du 15 avril 2003 approuvant le projet de carte communale » (CAA. Nancy, 4 août 2006, M. et Mme Jean-Louis X., req. n°05NC00237) ;

    pour ainsi transposer aux cartes communales, la solution qui avait été dégagée s’agissant des anciennes « MARNU » (TA Poitiers, 2 décembre 1997, Cts Bourgeois, AFDUH, 1998, p.332).

    Mais la Cour administrative d’appel de Nancy vient de préciser que :

    « Considérant que s'il résulte des dispositions qui précèdent que les cartes communales font l'objet d'une approbation donnée distinctivement par le conseil municipal et le préfet, leur entrée en vigueur est subordonnée à l'approbation préfectorale ; que si l'approbation donnée par le conseil municipal ne revêt ainsi qu'un caractère préparatoire à la décision du préfet, laquelle peut seule faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, les requérants sont recevables à exciper, à l'appui d'un tel recours, des éventuelles irrégularités entachant la délibération préalable du conseil municipal ».

    Cette décision a un double intérêt.

    D’une part, il est donc clair que la délibération approuvant le projet de carte communale est et reste, en toute hypothèse, un acte préparatoire. Ainsi, même une fois que la carte communale a été approuvé par le Préfet, cette délibération demeure un acte insusceptible de faire l’objet d’un recours en annulation.

    D’autre part, dès lors qu’il constitue un acte préparatoire revêtant un caractère substantiel, son irrégularité intrinsèque, en l’espèce procédant de la méconnaissance de l’article L2131-11 du Code général des collectivités territoriales, peut être invoquée dans le cadre d’un recours en annulation introduit à l’encontre de l’arrêt préfectoral approuvant la carte communale et emporter son annulation.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés