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Droit pénal de l'urbanisme

  • Quand le Maire est-il dans l'obligation d'ordonner l'interruption des travaux, et y'a-t-il une présomption d'urgence à suspendre sa décision ?

    Le maire est tenu de dresser un procès-verbal en application de l'article L. 480-1 du code de l'urbanisme Lorsqu'il a connaissance d'une infraction mentionnée à l'article L. 480-4, résultant soit de l'exécution de travaux sans les autorisations prescrites par le livre IV du code, soit de la méconnaissance des autorisations délivrées. Si, après établissement d'un procès-verbal, le maire peut, dans le second cas, prescrire par arrêté l'interruption des travaux, il est tenu de le faire dans le premier cas. En outre, le maire est également tenu de dresser un procès-verbal lorsqu'il a connaissance d'une infraction mentionnée à l'article L. 610-1 du même code, résultant de la méconnaissance des dispositions du plan local d'urbanisme. Il ne saurait cependant, dans cette hypothèse, prendre un arrêté interruptif pour des travaux exécutés conformément aux autorisations d'urbanisme en vigueur à la date de sa décision, même s'il estime que les travaux en cause méconnaissent les règles d'urbanisme et notamment le plan local d'urbanisme. En tout état de cause, la condition d'urgence posée par l'article L.521-1 du Code de justice ne saurait être regardée comme étant par principe satisfaite.

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  • Quel sort l'administration doit-elle réserver à une demande de permis de construire uniquement destinée à faire obstacle à l'exécution d'une condamnation pénale à démolir ?

    Lorsqu'elle est saisie d'une demande d'autorisation d'urbanisme visant à régulariser les travaux dont la démolition, la mise en conformité ou la remise en état a été ordonnée par le juge pénal, l'autorité compétente n'est pas tenue de la rejeter et il lui appartient d'apprécier l'opportunité de délivrer une telle autorisation de régularisation, compte tenu de la nature et de la gravité de l'infraction relevée par le juge pénal, des caractéristiques du projet soumis à son examen et des règles d'urbanisme applicables.

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  • La destination « CINASPIC » au sens de l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme n’est pas exclusive pour application de l’article R.424-17 b) du Code de l’urbanisme

     

    Même à admettre que ces deux affectations répondent à la notion de « CINASPIC », la transformation d’un hôtel des impôts en établissement d’enseignement constitue un changement de destination soumis à déclaration préalable au titre de l’article R.424-17 du Code de l’urbanisme.

    Cass. crim, 26 février 2013, pourvoi n°12.80-973

    Voici un arrêt qui s’il appelle relativement peu de commentaires n’en est pas mois intéressant en ce qu’il traite d’une problématique singulière dont nous ne pensions pas qu’elle serait si « rapidement » tranchée par la jurisprudence, en l’occurrence judiciaire.

    Dans cette affaire, le prévenu avait acquis un immeuble à usage d’hôtel des impôts mais qu’il avait ensuite transformé en établissement d’enseignement et ce, sans avoir sollicité la moindre autorisation d’urbanisme.

    Mais celui-ci devait ainsi être poursuivi puis condamné pour avoir procéder à un changement de destination sans avoir formulé la déclaration requise par l’article R.421-17 du Code de l’urbanisme ; la Cour d’appel de Versailles, aux termes d’une analyse quelque peu particulière, ayant estimé que l’immeuble existant était ainsi passé de construction à destination « de bureaux nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif » à « celle de construction et installation nécessaire aux services publics ou d'intérêt collectif comme assurant une activité exercée sous le contrôle de l'Etat dans le but de satisfaire un besoin d'intérêt général, mais ne répondant plus à la destination de bureaux ».

    Outre que cette distinction entre « CINASPIC » n’a évidemment pas lieu d’être au regard de l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme, du moins pour application de l’article R.421-17, il faut surtout préciser à titre liminaire qu’il n’est pas si certain et loin s’en faut que l’immeuble dans son état initial constituait un « CINASPIC » dès lors qu’en tant qu’hôtel des impôts il était principalement affecté à usage de bureau et d’archivages.

    Or, comme on le sait, « la notion d’équipement public ne saurait se confondre avec celle de bâtiment public, ni bien sûr avec celle de bâtiment accueillant du public. (…) Les bureaux de la CPAM, où les agents accomplissent leur travail, ne sont pas des équipements publics comme le sont une école, un hôpital, une piscine ou une bibliothèque, lesquels accueillent du public pour lui offrir un service d’enseignement, de soins, de loisirs. Il y’a dans la notion d’équipement public, l’idée de réponse apportée à un besoin collectif, par la mise à disposition d’installations sportives, culturelles, médicales, etc., ce que ne recouvre pas une simple construction de bureaux administratifs, même s’ils accueillent du public » (Concl. MITJAVILLE : CE. 3 mai 2004, CPAM de la Meuse, req. n°223.091).

    Il n’en demeure pas moins que dans son pourvoi en cassation, le prévenu devait contester cette distinction opérée par la Cour d’appel pour évidemment soutenir que dès lors qu’un hôtel des impôts et un établissement d’enseignement étaient l’un comme l’autre des « CINASPIC », il n’y avait eu aucun changement de destination au sens de l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme et, partant, qu’aucune déclaration n’était requise.

    On sait en effet que pour apprécier s’il y a ou non changement de destination l’article R.424-17 précité, (comme l’article R.421-14 d’ailleurs) vise les différentes destinations définies à l'article R.123-9 du Code de l’urbanisme dont on rappellera qu’il dispose que « les règles édictées [par un règlement de PLU] peuvent être différentes, dans une même zone, selon que les constructions sont destinées à l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt. En outre, des règles particulières peuvent être applicables aux constructions et installations nécessaires aux services publics ou d'intérêt collectif ».

    Toute la question est ainsi de savoir :

    • si la notion de « CINASPIC » correspond à une destination « primaire » et autonome de celles par ailleurs visées par l’article précité (« l'habitation, à l'hébergement hôtelier, aux bureaux, au commerce, à l'artisanat, à l'industrie, à l'exploitation agricole ou forestière ou à la fonction d'entrepôt ») et ou, plus spécifiquement, et pour application de l’article R.421-17, si elle prime celles-ci ;

    • ou si au contraire elle peut correspondre à une destination « secondaire » et revêtant un caractère mixte dont il faut alors prendre en compte toutes ses composantes pour apprécier si son changement d’usage est ou non constitutif d’un changement de destination.

    Or, c’est la seconde option que nous semble avoir retenu la Cour de cassation en jugeant que :

    « Attendu que, pour déclarer l'Institut de formation de Saint-Quentin-en-Yvelines coupable d'exécution irrégulière de travaux soumis à une déclaration préalable, l'arrêt attaqué constate que cet organisme n'a déposé aucune déclaration de travaux ; que les juges relèvent que le bâtiment acquis par le prévenu dans son état d'origine, à savoir un hôtel des impôts, puis aménagé par celui-ci en établissement d'enseignement, est une construction et installation nécessaire aux services publics ou d'intérêt collectif comme assurant une activité exercée sous le contrôle de l'Etat dans le but de satisfaire à un besoin d'intérêt général, mais ne répondant plus à la destination de bureaux ; qu'ils en déduisent que le changement de destination est démontré ;
    Attendu qu'en se déterminant par des motifs exempts d'insuffisance, d'où il résulte que le bâtiment existant était, au moins partiellement, destiné à un usage autre que de bureaux, la cour d'appel, abstraction faite de motifs erronés relatifs à la nécessité des services publics et à l'intérêt collectif, a justifié sa décision
    ».


    La solution n’était pas totalement évidente.

    Si au regard ddes destinations énoncées par l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme, certains types de construction sont par nature des « CINASPIC » (écoles, musées, hôpitaux, etc.), si bien qu’aucune autre de ces destinations ne peut les définir, d’autres peuvent parfaitement correspondre d’un point de vue physique et/ou fonctionnel à l’une de ces destinations mais néanmoins être qualifiées de « CINASPIC ».

    C’est ainsi qu’à titre d’exemple, une usine d’incinération constituant pourtant intrinsèquement une construction à destination industrielle, peut néanmoins accéder au statut de « CINASPIC » (CE. 23 décembre 1988, Association pour la défense de l’environnement de Miremont, req. n°82.863).

    A cet égard, la notion de CINASPIC correspond donc à une destination mixte ou, pour reprendre les termes de la Cour d’appel, à une destination « plus large que les autres et les recouvrant ».

    Il n’en demeure pas moins que lorsqu’à titre d’exemple, une usine d’incinération constitue un « CINASPIC » – ce qui ne va pas non plus de soi puisque rappelons-le la notion de « CINASPIC » est à géométrie variable et dépend de la réalité des besoins d’intérêt général auxquels elle a vocation à répondre (pour un exemple de ce mode d’appréciation en la matière : CAA. Lyon, 5 février 2013, Groupe Pizzorno Environnement, req. n°12LY01578) – elle s’en trouve alors soumise aux prescriptions spécifiquement prévues par le PLU pour ce type particulier de constructions et ce, alors même que ce même PLU vise spécifiquement les construction industrielle (CE. 16 juin 2004, Laboratoire de Biologie Végétale – Yves ROCHER, req. n° 254.172).

    Dans cette mesure, la notion de « CINASPIC » correspond ici à une destination exclusive qui prime celles par ailleurs énoncées par l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme.

    Cela étant, ces jurisprudences ont trait à la détermination des règles du PLU effectivement applicables aux permis de construire cause dans ces affaires ; ce qui renvoie à la fonction et à l’utilité de cette notion – et selon cet article à celles des « règles particulières » qu’elle permet d’édicter – qui « vise à fonder une faculté de dérogation aux règles générales » (Concl Y.AGUILA sur CE. 23 novembre 2005, req. n°262.105, in BJDU, n°1/2006, p.20).

    Ce sont donc les règles spéciales que constituent les normes propres aux CINASPIC qui priment les règles générales édictées et le cas échéant modulées selon les autres destinations visées par l’article R.123-9 du Code de l’urbanisme.

    Or, en l’espèce, il ne s’agissait pas de déterminer en aval les normes applicables au projet mais d’apprécier en amont s’il impliquait ou non une déclaration préalable.

    Il n’en demeure pas moins que la solution retenue par la Cour de cassation apparait parfaitement fondée au regard tant de la finalité de la déclaration prévue par l’article R.424-17 b) du Code de l’urbanisme qu’au regard de l’utilité de ces « règles particulières ».

    D’une façon générale, il faut en effet rappeler qu’un projet portant sur un bâtiment existant et emportant un changement de destination sans travaux, ou sans travaux saisis par le droit des autorisations d’urbanisme, est néanmoins soumis aux normes d’urbanisme applicables en conséquence de sa nouvelle destination. La déclaration prévue par l’article R.421-17 b) du Code de l’urbanisme permet donc au premier chef de vérifier que ce changement de destination n’emporte pas une méconnaissance de ces règles.

    Plus spécifiquement, l’article R.123-9 précité vise l’édiction de « règles particulières » permettant donc uniquement d’apporter une « dérogation » ou, plus précisément, une exception aux règles générales ; ce dont il résulte que cet article n’a pas vocation à permettre d’affranchir les « CINASPIC » de toute règle ou, a contrario, implique néanmoins de les soumettre au « minimum normatif » requis.

    Cela étant, il est pour le moins fréquent que ces règles particulières soient exprimées de façon relativement souple et non quantifiée en prévoyant qu’à titre d’exemple, le nombre de places de stationnement requis doit être fixé en considération des besoins propres à l’équipement d’intérêt collectif considéré.

    Or, même si la destination du bâtiment existant et sa destination future présentent les caractéristiques propres aux « CINASPIC », il n’en demeure pas moins que ces besoins en matière de stationnement peuvent varier selon l’affectation effective du bâtiment en cause.

    C’est dans cette mesure que la décision commentée ce jour apparait justifier.

    Pour conclure, et bien que cet autre point particulier n’ait pas été abordé, on peut néanmoins relever que pour la Cour de cassation, il y avait bien changement de destination dès lors que le bâtiment « était, au moins partiellement, destiné à un usage autre que de bureaux » alors que rappelons-le l’article R.421-17 b) du Code de l’urbanisme précise également pour « l'application du présent alinéa, les locaux accessoires d'un bâtiment sont réputés avoir la même destination que le local principal ».

    Il reste que si les bureaux étaient les locaux principaux de l’hôtel des impôts existant (dont les locaux accessoires étaient les salles d’archivage), ils avaient a priori vocation à devenir en revanche les locaux accessoires d’une construction à destination principale d’établissement d’enseignement.

     

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur le fractionnement dans le temps du changement de destination et des travaux s’y rapportant

    Des travaux qui pris isolément ne relèvent pas de cette procédure sont néanmoins assujettis à permis de construire dés lors qu’ils sont liés à un changement de destination de l’immeuble, y compris si celui-ci a précédé de plusieurs mois les travaux en cause.

    CAA. Lyon, 17 juin 2008, SARL « Sur La Montagne », req. n°06LY01472


    Bien que le champ d’application de cet arrêt se soit substantiellement réduit depuis le 1er octobre 2007, son intérêt demeure puisque si, par principe, d’une part, les travaux sur construction existante sont dispensés de toute formalité et si, d’autre part, les changements de destination sont soumis à déclaration même lorsqu’ils ne s’accompagnent pas de travaux (voir, toutefois, ici), l’article R.421-14 (b) du Code de l’urbanisme assujettit à permis de construire « les travaux ayant pour effet de modifier les structures porteuses ou la façade du bâtiment, lorsque ces travaux s'accompagnent d'un changement de destination ».

    On sait, en effet, que la condition tenant à ce que les travaux soient liés à un changement de destination de l’immeuble ou que le changement de destination de ce dernier s’accompagne de travaux pour que l’opération relève d’un permis de construire avait été considérée comme la porte ouverte à la pratique, frauduleuse, consistant à dissocier dans le temps ledit changement et lesdits travaux.

    C’était mal connaître le juge administratif. Et l’arrêt commenté ce jour en est un exemple.

    Dans cette affaire, le requérant avait acquis en octobre 2003 un ensemble immobilier comportant un local commercial à usage de librairie qu’il avait, dès le mois de décembre, utilisé en restaurant. Mais en 2004, celui-ci entreprit des travaux d'aménagement intérieur, d'isolation phonique et thermique, dont le Maire devait ordonner l’interruption sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme et, plus précisément, pour défaut de permis de construire ; décision que la Cour administrative d’appel de Lyon devait ainsi valider au motif suivant :

    « Considérant que la SARL SUR LA MONTAGNE a acquis le 31 octobre 2003 un ensemble immobilier composé notamment d'un local commercial situé au rez-de-chaussée et du sous-sol placé à son aplomb ; qu'il est constant que le rez-de-chaussée était utilisé depuis les années 1990 à usage de librairie, papeterie et presse ; que si antérieurement à la réalisation des travaux litigieux depuis décembre 2003, soit la saison précédente, le rez-de-chaussée a été utilisé à usage de restaurant il n'est pas contesté que ce changement de destination n'avait pas donné lieu à une demande de permis de construire ; qu'il ressort des pièces du dossier que les travaux entrepris en octobre 2004, qui ont donné lieu à la passation d'un marché et à l'intervention d'une dizaine d'entreprises sur le chantier étaient en cours à la date de la décision attaquée comme le précise d'ailleurs le maire ; que ces travaux d'aménagement intérieur, d'isolation phonique et thermique ont consisté comme l'a indiqué le rapport final de contrôle technique de Socotec intervenue sur le chantier, en l'aménagement d'un restaurant au rez-de-chaussée et au sous-sol ; que de tels travaux destinés à adapter les locaux de la SARL SUR LA MONTAGNE à leur nouvelle destination nécessitaient l'obtention d'un permis de construire en application des dispositions de l'article L. 421-1 alinéa 2 précité du code de l'urbanisme ; que dès lors et à supposer même que la partie de ces travaux relative à la modification du tuyau d'évacuation extérieur n'était pas encore réalisée à la date de la décision attaquée et que l'aspect extérieur du bâtiment n'était ainsi pas modifié, le maire de Val d'Isère, agissant au nom de l'Etat, était tenu d'ordonner l'interruption des travaux litigieux » ;

    et, donc, nonobstant le fractionnement dans le temps du changement de destination du local considéré et des travaux s’y rapportant.

    En première analyse, une telle décision peut surprendre dans la mesure où, comme on le sait (voir ici), le Conseil d’Etat a récemment jugé que :

    « Considérant que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a relevé que le bâtiment en cause, initialement à usage agricole, avait ensuite été transformé à usage d'habitation ; qu'il a ensuite jugé que, dès lors que le propriétaire n'établissait pas que cette transformation avait fait l'objet d'un permis de construire l'autorisant, les travaux envisagés ne relevaient pas du régime de la déclaration de travaux et qu'il y avait lieu de régulariser le changement de destination de l'immeuble par le dépôt d'une demande de permis de construire ; qu'en recherchant les conditions dans lesquelles la destination du bâtiment avait évolué depuis sa construction et en annulant la décision attaquée au motif que le changement de cette destination n'avait pas régulièrement, dans le passé, fait l'objet d'une autorisation d’urbanisme, les juges du fond ont commis une erreur de droit ; que, dans ces conditions, les époux Fernandez et la commune de Carcassonne sont fondés à demander l'annulation du jugement attaqué ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que le bâtiment faisant l'objet de la déclaration de travaux en cause était déjà à usage d'habitation à la date de cette déclaration ; qu'il est constant que les travaux qui ont été déclarés, n'ont pas pour effet de changer la destination de ce bâtiment ; que si Mme soutient que ce bâtiment était initialement à usage de remise agricole et qu'ensuite, il y a plusieurs années, il a été transformé en bâtiment à usage d'habitation sans qu'une autorisation d’urbanisme ne soit intervenue, cette circonstance est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ; que ces travaux relèvent donc du régime de la déclaration dès lors qu'il n'est pas contesté qu'ils remplissent les conditions prévues à l'article R. 422-2 du code de l’urbanisme; qu'ainsi, Mme n'est pas fondée à demander l'annulation de la décision par laquelle le maire de Carcassonne ne s'est pas opposé à la réalisation des travaux déclarés par M.
    » (CE. 12 janvier 2007, Epx Fernandez., req. n°274.362).


    Mais outre qu’en l’espèce les travaux d’aménagement en cause étaient, pris isolément, dispensés de toute formalité alors que dans l’arrêté précité ceux projetés relevaient du régime déclaratif et donc d’une procédure de contrôle préalable, les faits de ces deux cas nous paraissent substantiellement différents.

    En effet, dans l’affaire objet de l’arrêt du Conseil d’Etat précité, le changement de destination au demeurant opéré plusieurs années auparavant s’était déjà à l’époque accompagné de travaux s’y rapportant : les nouveaux projetés n’avaient donc pas en eux-mêmes pour effet d’emporter le changement de destination.

    En revanche, dans l’affaire en cause, le changement de destination avait initialement procédé d’un simple changement usage – que ne connaissait pas alors le droit des autorisations d’occupation du sol – suivi quelque temps après de travaux à l’égard desquels la Cour a souligné qu’il avaient « consisté comme l'a indiqué le rapport final de contrôle technique de Socotec intervenue sur le chantier, en l'aménagement d'un restaurant au rez-de-chaussée et au sous-sol » et qu’ils étaient donc « destinés à adapter les locaux de la SARL SUR LA MONTAGNE à leur nouvelle destination » ; ce qui n’était donc pas le cas dans l’affaire objet de l’arrêt du Conseil d’Etat.

    De ce fait, nonobstant le sens de l’arrêt « Epoux Fernandez » précité, la solution retenue par la Cour administrative d’appel de Lyon apparaît difficilement contestable dans la mesure où :

    - d’une part, la destination d’un immeuble est indissociable des travaux s’y rapportant, même s’ils ne consistent qu’en des travaux d’aménagement d’intérieur (notre note : « « Sur l'objet du permis de construire et les conséquences de son annulation sur la poursuite des travaux », CA. Bordeaux, 21 févr. 2008, n° 07/004980, Sté Hatexim, Construction & Urbanisme n° 6/2008 ») puisqu’à titre d’exemple, il a pu être jugé :

    « considérant que la société Groupagro soutient que la commune ne pouvait régulièrement refuser de lui délivrer le permis demandé pour des travaux qui en auraient été exemptés ; qu'il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de permis souscrite par la société, que les travaux projetés, et qui portaient sur la remise en état d'anciens poulaillers en vue d'y pratiquer l'élevage de porcelets, comportaient la transformation d'une maison d'habitation en local sanitaire à usage vétérinaire, et de l'ancien local d'abattage en bureaux ; que de tels travaux, entrepris en vue d'une modification de la destination des immeubles sur lesquels ils sont réalisés, nécessitent bien un permis de construire ; que par suite, le permis étant sur ce point indivisible, tous les autres travaux projetés relèvent du même régime ; qu'en tout état de cause, l'erreur qu'aurait pu commettre le maire dans la qualification de l'acte par lequel il a rejeté la demande de la société est sans influence sur sa légalité ; que dès lors les moyens tirés de la superficie de la surface hors ouvre réalisée, de l'accolement ou non des constructions nouvelles aux constructions existantes, ainsi que de la faible importance de ces travaux, sont inopérants et doivent par suite être écartés" (CAA. Bordeaux, Cne de Saint-Philippe, req. n°98BX01492) ;

    - d’autre part, le fractionnement dans le temps d’une même opération est sans incidence sur la nature de l’autorisation à obtenir (notre note : « « Des constructions constituant un ensemble indivisible doivent faire l’objet d’un permis de construire unique », CE. 10 octobre 2007, Association de défense de l'environnement d'une usine située aux Maisons à Saint-Jory-Lasbloux, req. n°277.314, Construction & Urbanisme, n°11/2007 »).





    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés