L'autorité administrative compétente est-elle recevable à agir à l'encontre du permis de construire qu'elle a délivré sur injonction du juge ?
L'autorité administrative qui a délivré un permis de construire sur injonction du juge administratif, qu'il lui ait été ordonné de prendre une mesure dans un sens déterminé ou de statuer à nouveau sur la demande d'un administré, n'a qualité ni pour demander l'annulation ou la suspension de sa propre décision, ni pour exercer une voie de recours contre une décision juridictionnelle rejetant la demande de tiers tendant aux mêmes fins. Il appartient seulement à cette autorité, si elle s'y croit fondée, d'exercer les voies de recours ouvertes contre la décision juridictionnelle qui a prononcé l'injonction.
CE. 15 octobre 2018, Cne des Sables-d'Olonne, req. n°416.670 :
"1. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la société Daniel Ashde a sollicité, le 10 mars 2014, la délivrance d'un permis de construire pour un immeuble comprenant treize logements situé avenue Joseph Chaillet aux Sables-d'Olonne ; que, par un arrêté du 5 juin 2014, le maire a rejeté sa demande ; que, par une ordonnance du 7 août 2014, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes, saisi par la société Daniel Ashde, a suspendu cette décision et a enjoint au maire de procéder à une nouvelle instruction de la demande ; que, par un arrêté du 18 décembre 2014, le maire des Sables-d'Olonne a de nouveau opposé un refus à la demande de permis de construire de la SAS Daniel Ashde pour des motifs différents ; que, par une ordonnance du 28 janvier 2015, le juge des référés du tribunal administratif de Nantes a suspendu ce nouvel arrêté et enjoint au maire de procéder à une nouvelle instruction de la demande ; que, par arrêté du 19 février 2015, le maire a délivré à la société un permis de construire provisoire en exécution de cette ordonnance ; que, par un jugement du 13 décembre 2016, dont la commune a interjeté appel, le tribunal administratif de Nantes a annulé les refus de permis de construire des 5 juin et 18 décembre 2014 ; que, par jugement du même jour, ce tribunal a rejeté la requête de plusieurs riverains, MmeE..., M. et MmeD..., M. et Mme H...et M. et Mme C..., tendant à l'annulation du permis de construire provisoire délivré le 19 février 2015 ; que, par arrêt du 20 octobre 2017, la cour administrative d'appel de Nantes a rejeté pour défaut de qualité pour agir l'appel formé par la commune des Sables-d'Olonne contre ce jugement ; que la commune se pourvoit en cassation contre cet arrêt ;
2. Considérant que l'autorité administrative qui a pris une décision sur injonction du juge administratif, qu'il lui ait été ordonné de prendre une mesure dans un sens déterminé ou de statuer à nouveau sur la demande d'un administré, n'a qualité ni pour demander l'annulation ou la suspension de sa propre décision, ni pour exercer une voie de recours contre une décision juridictionnelle rejetant la demande de tiers tendant aux mêmes fins ; qu'il appartient seulement à cette autorité, si elle s'y croit fondée, d'exercer les voies de recours ouvertes contre la décision juridictionnelle qui a prononcé l'injonction ;
3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède qu'en retenant que le jugement du tribunal administratif de Nantes rejetant la demande de tiers tendant à l'annulation du permis de construire provisoire délivré par le maire des Sables-d'Olonne à la société Daniel Ashde ne faisait pas grief à la commune, la cour n'a pas commis d'erreur de droit ; que, par suite, la commune des Sables-d'Olonne n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt attaqué".
Patrick E. DURAND