Un règlement de POS peut-il, à la différence du PLU, édicter des règles différentes au sein d'une même destination ?
Il résulte des dispositions combinées des articles L.123-1 et R.123-21-1 du Code de l'urbanisme les plans d’occupation des sols peuvent délimiter des zones réglementant l’implantation des constructions et la destination de celles-ci et, par ailleurs, pour des motifs d'urbanisme, peuvent édicter des règles différentes selon la nature ou la destination des constructions concernées. En revanche, ne peuvent édicter des règles différentes au sein d'une même destination, a fortiori sans justifier d'un motif d'urbanisme. Partant, l'article 12 d'un règlement de POS modulant les exigences en matière de stationnement selon le caractère individuel ou collectif d'une construction à destination est illégal et inapplicable, et ne peut donc valablement motiver un refus de permis de construire.
TA. Bordeaux, 9 mars 2017, req. n°16-00165 :
"9. Considérant qu’aux termes de l’article UA 12 du règlement du POS de Lège Cap Ferret : « Stationnement des véhicules » : « le stationnement des véhicules doit être assuré en dehors des voies ouvertes à la circulation publique et dans les conditions suivantes, sachant qu’une place correspond à 25 m² (accès compris) :1. Pour les constructions à usage d’habitation individuelle : deux places de stationnement par logement, à aménager sur la propriété. 2/ pour les constructions à usage d’habitation collective : 1 place de stationnement par tranche de 40m² de plancher hors oeuvre nette de construction avec un minimum de 1 place par logement.(…)En cas d’impossibilité technique d’aménager sur le terrain de l’opération le nombre d’emplacements nécessaires a stationnement, le constructeur doit s’acquitter de ses obligations : . Soit en justifiant de l’obtention d’une concession à long terme dans un parc public de stationnement existant ou en cours de réalisation. . Soit par l’aménagement sur un autre terrain situé à moins de 300 m du premier, des surfaces de stationnement qui lui font défaut à condition qu’il apporte la preuve qu’il réalise ou fait réaliser lesdites places. (…) » ;
10. Considérant que la société Bouygues Immobilier invoque par la voie de l’exception, l’illégalité des dispositions précitées du règlement du POS en ce qu’elles font varier les exigences en matière de stationnement lié à l’habitation, selon que le projet concerne des habitations individuelles ou collectives ;
11. Considérant qu’aux termes de l’article L. 174-4 du code de l'urbanisme : « Les plans d'occupation des sols maintenus provisoirement en vigueur en application des dispositions du présent chapitre ont les mêmes effets que les plans locaux d'urbanisme. Ils sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme défini par le titre V du présent livre. Les dispositions de l'article L. 123-1 dans leur rédaction antérieure au 15 décembre 2000 leur demeurent applicables.(…) » ; qu’aux termes de l’article L. 123-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : « Les plans d'occupation des sols fixent, dans le cadre des orientations des schémas directeurs ou des schémas de secteur, s'il en existe, les règles générales et les servitudes d'utilisation des sols, qui peuvent notamment comporter l'interdiction de construire. A cette fin, ils doivent : 1° Délimiter des zones urbaines ou à urbaniser prenant notamment en compte les besoins en matière d'habitat, d'emploi, de services et de transport des populations actuelles et futures. La délimitation de ces zones prend en considération la valeur agronomique des sols, les structures agricoles, les terrains produisant des denrées de qualité supérieure, l'existence de risques naturels prévisibles et de risques technologiques, la présence d'équipements spéciaux importants. Les plans d'occupation des sols déterminent l'affectation des sols selon l'usage principal qui doit en être fait ou la nature des activités dominantes qui peuvent y être exercées. 2° définir, en fonction des situations locales, les règles concernant le droit d'implanter des constructions, leur destination et leur nature. » ; que l’article R. 123-21 du même code, dans sa rédaction alors applicable, dispose que : « Le règlement fixe les règles applicables aux terrains compris dans les diverses zones du territoire couvert par le plan.1° A cette fin, il doit : a) Déterminer l'affectation dominante des sols par zones selon les catégories prévues à l'article R. 123-18 en précisant l'usage principal qui peut en être fait, et s'il y a lieu, la nature des activités qui peuvent y être interdites ou soumises à des conditions particulières, telles que l'ouverture ou l'extension d'établissements industriels, l'exploitation de carrières, les opérations d'affouillement ou d'exhaussement des sols, les défrichements, coupes et abattages d'arbres ainsi que les divers modes d'occupation du sol qui font l'objet d'une réglementation ; b) Edicter, en fonction des situations locales, les prescriptions relatives à l'implantation des constructions par rapport aux voies, aux limites séparatives et autres constructions. 2° Le règlement peut, en outre : a) Edicter les prescriptions relatives à l'accès, à la desserte, à l'équipement en réseaux divers et, le cas échéant, aux dimensions et à la surface desterrains ; b) Edicter les prescriptions relatives à l'emprise au sol des constructions, à leur hauteur et, le cas échéant, à leur aspect extérieur ; c) Edicter les prescriptions relatives aux obligations imposées en matière de réalisation d'aires de stationnement, d'espaces verts et d'aires de jeux et de loisirs ;(…) » ;
12. Considérant qu’il résulte de ces dispositions que les plans d’occupation des sols peuvent délimiter des zones réglementant l’implantation des constructions et la destination de celles-ci, et également édicter des prescriptions relatives aux obligations en matière de réalisation d’aires de stationnement ; que si, dans ces zones, des motifs d'urbanisme peuvent justifier l'application de règles différentes selon la nature ou la destination des constructions concernées, en tout état de cause, en l’espèce, le règlement du plan, d’une part, prévoit l’application de règles différentes en matière de stationnement pour des constructions ayant la même destination d’habitation, et d’autre part, ne justifie une telle distinction par aucun motif d’urbanisme ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que de telles dispositions sont illégales et doivent être écartées ;
13. Considérant que si un permis de construire ne constitue pas un acte d'application de la réglementation d’urbanisme en vigueur et si, par suite, un requérant demandant son annulation ne saurait utilement se borner à soutenir, pour l’obtenir, qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, mais doit faire valoir, en outre, que ce permis méconnaît les dispositions d’urbanisme pertinentes remises en vigueur en application de l’article L. 121-8 du code de l'urbanisme, cette règle ne s’applique pas au refus de permis de construire, lorsqu’il trouve son fondement dans un document d’urbanisme ; que, dans ce cas, l’annulation ou l’illégalité de ce document d’urbanisme entraîne l’annulation du refus de permis de construire pris sur son fondement, sauf au juge à procéder, le cas échéant, à une substitution de base légale ou de motifs dans les conditions de droit commun ;
14. Considérant qu’il résulte de ce qui précède que le motif de refus de permis de construire opposé à la société Bouygues Immobilier, fondé sur les dispositions illégales de l'article UA 12 du règlement du POS de Lège-Cap Ferret relatives aux règles de stationnement de la zone UA est, par voie de conséquence, entaché d’illégalité, les dispositions du même article UA 12 relatives aux stationnement des habitations individuelles ne pouvant en tout état de cause lui être substituées ; que, par suite, la société requérante est fondée à soutenir que le maire ne pouvait légalement lui opposer un tel motif de refus"
Patrick E. DURAND