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  • VEILLE ADMINISTRATIVE : QUATRE REPONSES MINISTERIELLES EN RAPPORT AVEC LA REFORME DES AUTORISATIONS D’URBANISME (DONT DEUX COMMENTEES)

    Question n°12446

    Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7580

    Mme Marie-Jo Zimmermann attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur le cas où les murs et le gros oeuvre d'un bâtiment sont réalisés puis laissés à l'abandon plusieurs années. Elle souhaite savoir si l'édifice correspondant est considéré comme une construction existante du point de vue de l'urbanisme, et susceptible à ce titre d'être l'objet d'aménagements et de travaux permettant de le rendre habitable

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1647

    Comme le prévoit l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, le permis de construire est périmé lorsque les travaux autorisés par ledit permis ne sont pas engagés dans un délai de deux ans à compter de la notification du permis. Il est également périmé si, passé ce délai, les travaux commencés sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. Des travaux d'aménagement peuvent être effectués sur une construction inachevée en vue de la rendre habitable, sous réserve de l'obtention d'une nouvelle autorisation portant sur la partie restante.

    Obs : Voici, une réponse qui marque un changement de position de l’administration, laquelle, il est vrai, a récemment été contredite sur ce point par le juge administratif.

    Au sujet des constructions inachevées, le Ministère de l’équipement avait en effet précédemment estimé que lorsque les travaux autorisés n’ont pas été entièrement exécutés dans le délai de validité du permis de construire, l’ouvrage ainsi réalisé devait être considéré comme non conforme au permis délivré et devait donc donner lieu à l’établissement d’un procès-verbal d’infraction en application de l’article L.480-1 du Code de l’urbanisme ; l’administration devant également inviter le pétitionnaire à régulariser les travaux accomplis par le dépôt d’un nouveau permis de construire destiné à entériner la réduction de son projet (Rép. min. JOAN Q, 5 juin 2000, p.3465). A suivre, cette analyse les travaux projetés sur une construction inachevée relevaient donc du principe issu de la jurisprudence dite « Thalamy ». Mais cette position appelait, toutefois, une triple réserve.

    Tout d’abord, une autorisation d’urbanisme n’a pas d’autre finalité que de contrôler la régularité des ouvrages projetés au regard des prescriptions d’urbanisme qui leur sont opposables et, par voie de conséquence, n’emporte pas l’obligation de construire (Rép. min. n°7028 : JOAN, 2 mars 1974, p.967). Quant aux opérations de contrôle générées par l’achèvement des travaux et pouvant le cas échéant aboutir à la délivrance d’un certificat de conformité, celles-ci visent seulement à vérifier que ceux effectués l’ont été conformément au permis de construire obtenu et ce, sur les seuls aspects visés par l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme.

    Or, un ouvrage pour être inachevé peut néanmoins ne contrevenir en l’état à aucune prescription d’urbanisme et, par ailleurs, les travaux effectivement accomplis peuvent avoir été réalisés conformément à l’autorisation d’urbanisme délivrée. En d’autres termes, l’inachèvement des travaux autorisés au regard des aspects visés par l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme peut certes amener l’administration à contester la conformité des travaux mais ne préjuge pas nécessairement de l’irrégularité des travaux et de l’ouvrage effectivement accomplis au regard du droit de l’urbanisme.

    Ensuite et aux termes de l’article L.480-4 du Code de l’urbanisme, l’inachèvement d’une construction n’est constitutif d’une infraction que s’il consiste en « l’inexécution, dans les délais prescrits, de tous travaux accessoires d’aménagement ou de démolition imposés » par les autorisations prévues par le Code de l’urbanisme, ce que le juge pénal apprécie strictement.

    C’est ainsi que la chambre criminelle de Cour de cassation a pu casser un arrêt d’appel ayant condamné le prévenu aux peines prévues par l’article L.480-4 du chef de ne pas avoir aménagé le garage et la cave annoncés dans la demande de permis de construire et ce, au motif que cet inachèvement du projet n’était constitutif d’aucun délit dès lors que la réalisation des ouvrages en cause n’avait pas été prescrite par l’autorisation obtenue à cet effet (Cass. crim. 18 janvier 1983, Garcia Malode Molinas, RDI, 1983). Au regard du droit pénal de l’urbanisme, l’inachèvement d’une construction n’est donc délictueux que s’il emporte la méconnaissance des prescriptions expresses du permis de construire (Cass. crim. 4 février 1992, Juvet, pourvoi n°90-87590) dont on rappellera qu’elles ont vocation à assurer la conformité d’un projet de construction aux règles d’urbanisme qui lui sont applicables.

    Enfin, si à défaut d’exécution de tout travaux, la péremption du permis de construire rend le recours en annulation exercé à son encontre sans objet ou irrecevable, selon qu’il a été introduit avant ou après l’expiration du délai de validité de l’autorisation attaquée (CE. 25 novembre 1987, Raimond, req. n°48.710), le Conseil d’Etat a précisé qu’en revanche, la caducité du permis de construire ne prive pas d’objet le recours en annulation exercé à son encontre lorsque celui-ci a fait l’objet d’un commencement d’exécution (CE. 25 mai 1975, Fauchille, req. n°82.613). En pareil cas, la caducité du permis de construire n’emporte donc pas sa disparition de l’ordonnancement juridique et dans la mesure où, en toute hypothèse, elle n’a aucune incidence sur sa légalité (CE. 23 février 1990, M. et Mme Charrier, req. n°66.983), un ouvrage inachevé à la date d’expiration du délai de validité dudit permis n’en conserve donc pas moins une existence légale.

    Force était donc de considérer qu’un ouvrage inachevé n’est irrégulier – en tant que tel – que pour autant que les travaux non-accomplis rendent celui-ci non conforme à la réglementation d’urbanisme en vertu de laquelle l’autorisation de construire a été délivrée et/ou que les travaux effectivement réalisés ne correspondent pas de ce fait à ceux qui avaient été prescrits et, a contrario, que la seule caducité du permis de construire n’a pas pour effet de rendre illégal l’ouvrage ainsi réalisé.

    Le juge administratif a récemment précisé qu’un ouvrage inachevé à la date d’expiration du délai de validité du permis de construire peut néanmoins constituer une construction juridiquement existante au regard du droit de l’urbanisme et, par voie de conséquence, que certains des travaux projetés sur celui-ci peuvent donc relever du champ d’application de la déclaration de travaux, tel qu’il est défini par l’article R.422-2 du Code de l’urbanisme (dans le même sens : CE. 29 mars 2006, Cne d’Antibes, req. n° 280.194 ; CAA. Marseille, 8 décembre 2005, Cne d’Eguilles, req. n° 02MA01240 ; TA. Nice, 23 février 2006, M. Cozza, req. n°01-05873).

    Il reste qu’il est également nécessaire que les travaux précédemment engagés aient été suffisamment avancés pour conférer à l’ouvrage en résultant le statut d’une véritable construction (sur ce point et l’ensemble de cette problématique : P.E.DURAND « Le statut des ouvrages inachevés en droit de l’urbanisme », RDI, n°5/2006 & La réunion de murs et d’une toiture forme une construction existante au regard du droit de l’urbanisme » (CAA. Marseille, 8 décembre 2005), AJDA, n°20/2006).



    Question n°9731

    Question publiée au JO le : 13/11/2007 page : 6946

    M. Christian Jacob interroge M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur l'application des articles L. 442-1 et R. 421-19 du code de l'urbanisme. S'agissant d'opérations de division en cours à la date du 1er octobre 2007 et ayant fait l'objet d'un permis de construire délivré avant le 1er octobre 2007, la signature de l'acte authentique, est subordonnée, compte tenu des pratiques actuelles des notaires, à la souscription d'une déclaration préalable en vertu des dispositions du a) de l'article R. 421-19 du code, ce qui peut retarder le caractère effectif de la transaction. Il lui demande, dans ces conditions, s'il est possible de considérer que l'obtention du permis avant le 1er octobre 2007 entérine la division foncière.

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1640

    Depuis le 1er octobre 2007, les divisions de terrain en vue de construire sont soumises soit à déclaration préalable pour les plus simples, soit à permis d'aménager lorsque le projet prévoit la création de voies ou espaces communs. Toutefois, lorsqu'un projet de division a fait l'objet, avant le 1er octobre 2007, d'une autorisation de lotir ou d'une déclaration au titre de l'ancien article R. 314-54 du code de l'urbanisme, il peut être procédé, même après le 1er octobre 2007, à la division du terrain sans que le propriétaire ait à présenter une nouvelle déclaration ou une nouvelle demande de permis d'aménager. En effet, dès lors que l'autorisation de lotir est toujours en cours de validité, les divisions autorisées ne sont pas remises en cause par les nouvelles dispositions du code de l'urbanisme. Il en est de même pour les projets de divisions ayant fait l'objet d'une déclaration au titre de l'ancien article R. 315-54 du code de l'urbanisme, cette déclaration n'ayant quant à elle aucune limite de validité dans le temps. Les nouvelles dispositions relatives aux formalités à accomplir préalablement aux divisions de terrains ne s'appliquent donc pas aux divisions ayant déjà fait l'objet, avant le l'octobre 2007, d'une déclaration ou d'une demande d'autorisation de lotir selon les procédures alors en vigueur et ce indépendamment du fait qu'une demande de permis de construire ait été déposée sur le terrain

    Obs : Dans son régime issu de la loi du 13 décembre 2000 « SRU » la procédure déclarative prévue par l’ancien article R.315-54 est strictement informative, n’appelle aucune décision de l’administration et, par voie de conséquence, ne génère aucune autorisation susceptible de créer des droits acquis ; sans compter, d’ailleurs, que cette déclaration n’a aucune durée de validité.

    Selon nous, il n’est donc pas si certain qu’une division foncière réalisée après le 1er octobre 2007 en vue de l’implantation d’un bâtiment et ayant donc pour effet de créer un « lot à construire » au sens de l’article L.442-1 du Code de l’urbanisme échappe au régime du lotissement dès lors que l’opérateur en aura informé la mairie, avant le 1er octobre 2007, selon la procédure prévue par l’ancien article R.315-54.



    Question n°12258

    Question publiée au JO le : 04/12/2007 page : 7602

    Mme Michèle Tabarot attire l'attention de Mme la ministre de l'intérieur, de l'outre-mer et des collectivités territoriales sur la mise en oeuvre de la réforme des autorisations d'urbanisme. Un maire de sa circonscription lui a fait part de son inquiétude face à une évolution qui obligerait certaines communes, qui ne sont pas dotées d'un service adapté, à procéder à l'instruction de demandes d'urbanisme jusqu'alors instruites par les services de l'État. Aussi, il lui serait utile de savoir dans quelle mesure un dispositif d'accompagnement des communes pourrait être mis en place pour aider les municipalités concernées par cette évolution

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1646

    Le principe de la mise à disposition gratuite des services de l'État n'est pas remis en cause par la réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme. Le nouvel article L. 422-8 du code de l'urbanisme dispose que les services de l'État sont gratuitement mis à la disposition des communes de moins de 10 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale de moins de 20 000 habitants si les maires ou les présidents le leur demandent. Les conventions passées entre les services de l'État et les collectivités locales ont pour objet d'organiser cette mise à disposition mais ne peuvent en aucune façon remettre en cause les obligations de l'État définies dans cet article



    Question n°11639

    Question publiée au JO le : 27/11/2007 page : 7390

    M. Dominique Dord attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, sur la mise en oeuvre de l'ordonnance du 8 décembre 2005 relative à la réforme du code de l'urbanisme, complétée par le décret d'application du 5 janvier 2007. Si cette ordonnance unifie l'instruction des permis de construire et garantit des délais d'instruction rapides, elle multiplie cependant les tâches administratives et les frais postaux, ce qui n'est pas sans conséquence pour les communes rurales. Par ailleurs, certaines communes rurales s'inquiètent d'avoir à établir les certificats de conformité. Les DDE peuvent aider les communes de moins de 10 000 habitants en leur portant plus particulièrement une assistance technique, d'instruction ou de contentieux. Elles souhaiteraient cependant être assurées que l'État continuera de les assister, notamment dans le contrôle de la conformité des travaux. Bien que cette procédure de récolement constitue une opération ponctuelle, celle-ci engage, de fait, la responsabilité juridique des communes. Il le remercie donc de lui préciser quelles mesures il envisage de prendre afin d'équilibrer ce qui peut être assimilé à un transfert de charge de l'État sur les communes rurales

    Réponse publiée au JO le : 26/02/2008 page : 1645

    La réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme doit être l'occasion de mettre à jour les conventions de mise à disposition gratuite des services de l'État à travers une vraie concertation entre les élus et les directions départementales de l'équipement. Elle ne doit en aucun cas être un prétexte pour imposer un quelconque désengagement des services du ministère de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables, notamment en ce qui concerne le contrôle de la conformité des travaux. L'article L. 422-8 du code de l'urbanisme, issu de l'ordonnance du 8 décembre 2005 dispose que les services de l'État sont gratuitement mis à la disposition des communes de moins de 10 000 habitants et des établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) de moins de 20 000 habitants si les maires ou les présidents le leur demandent. Les conventions passées entre les services de l'État et les collectivités locales ont pour objet d'organiser cette mise à disposition. Elles ne peuvent en aucune façon remettre en cause les obligations de l'État définies dans cet article qui incluent notamment le contrôle de la conformité des travaux. Conscient des problèmes posés par la prise en charge des frais postaux correspondant aux envois de courriers par lettre recommandée avec accusé de réception, le ministre de l'écologie, du développement et de l'aménagement durables a donné son accord à un amendement dans la proposition de loi qui vient d'être adoptée par l'Assemblée nationale en deuxième lecture, relative à la simplification du droit. L'article 16 du chapitre III relatif aux dispositions simplifiant le fonctionnement des collectivités territoriales, réintroduit dans le code de l'urbanisme la possibilité, pour le maire ou le président de l'EPCI, de déléguer sa signature au service chargé de l'instruction pour les actes d'instruction. Lorsque le maire ou le président de l'EPCI décidera d'utiliser cette faculté, le coût des envois correspondants sera bien évidemment pris en charge par les services de l'État. Une telle délégation de signature permettrait également de résoudre les problèmes de délai auxquels les élus locaux risquent d'être confrontés. La réforme du permis de construire bouleverse les habitudes et il est bien naturel, malgré le travail de préparation et d'explication qui a été mené avant sa mise en oeuvre, qu'elle provoque des interrogations et des inquiétudes. Un comité de suivi de la réforme du permis de construire et des autorisations d'urbanisme composé à parité d'élus, de représentants des professions et de représentants de l'administration sera chargé de veiller à la bonne mise en oeuvre des nouvelles dispositions du code de l'urbanisme et de proposer les adaptations éventuelles pour corriger les difficultés qui pourraient apparaître.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Le requérant ne peut utilement se borner à exciper de l’illégalité d’un règlement local d’urbanisme en vigueur à sa date de délivrance pour conclure à l’annulation d’un permis de construire

    Dès lors que l’annulation ou la déclaration d’illégalité d’un document local d’urbanisme a pour effet de remettre en vigueur le document qui lui est immédiatement antérieur, le requérant ne peut utilement se borner à exciper de l’illégalité d’un règlement d’urbanisme local pour conclure à l’annulation d’un permis de construire mais doit également invoquer l’illégalité de cette autorisation au regard des prescriptions du document antérieur ayant vocation à être remis en vigueur.

    CE. 7 février 2008, Cne de Courbevoie, req. n° 297.227


    Voici une décision dont on ne sait si elle a vocation à être publiée au Recueil mais qui, en toute hypothèse, a bien plus d’importance qu’elle n’y paraît ; bien qu’elle appelle peu de commentaires.

    Dans cette affaire, le permis de construire en litige était contesté au motif tiré, notamment, de l’illégalité du POS communal en vigueur à la date de délivrance de cette autorisation.

    Il reste qu’en elle-même, la simple illégalité du document local d’urbanisme alors en vigueur ne saurait emporter l’annulation d’un permis de construire délivré au vu de ce document puisqu’une telle autorisation n’est pas un acte d’application de ce document ; et pour cause puisque si, lors qu’il existe, cette autorisation doit respecter ce document, l’existence d’un tel document n’est évidemment pas une condition sine qua none à la délivrance d’une telle autorisation.

    On sait, en effet, qu’il est de jurisprudence bien établie que l’illégalité et l’annulation éventuelle d’un document local d’urbanisme entache d’illégalité les autorisations d’urbanisme délivrées sur son fondement uniquement lorsque ce document a eu « pour objet de rendre possible l’octroi » (CE. 12 décembre 1986, GEPRO, Rec., p.292) de l’autorisation litigieuse. A titre d’exemple, le Conseil d’Etat a en effet jugé que :

    « Considérant que, si le permis de construire ne peut être délivré que pour un projet de construction respectant la réglementation d'urbanisme applicable, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation ; qu'il suit de là que l'annulation d'un plan d'occupation des sols n'entraîne pas de plein droit celle d'un permis de construire délivré sous l'empire de ce plan, à l'exception du cas où cette annulation aurait été prononcée en raison de l'illégalité d'une disposition ayant pour objet de rendre possible l'octroi du permis litigieux ; qu'en dehors de ce cas, il appartient au juge, s'il est saisi de moyens en ce sens par la partie qui critique le permis de rechercher si le projet de construction autorisé est ou non compatible avec les dispositions d'urbanisme redevenues applicables à la suite de l'annulation du plan » (CE. 28 janvier 1987, Comité de défense des espaces verts, req. n° 39146).

    En résumé, selon la jurisprudence susvisée, soit le règlement local d’urbanisme a eu « pour objet de rendre possible l’octroi » du permis de construire contesté et dès lors l’illégalité de ce règlement emporter ipso facto l’annulation du permis, soit tel n’est pas et dés lors la légalité du permis de construire contesté doit être appréciée au regard du règlement local d’urbanisme immédiatement antérieur – ou, à défaut d’un tel règlement, de la carte communale ou du MARNU (CE. 30 décembre 2002, M. Jeandey, req. n°239.380) l’ayant précédé, voire du règlement national d’urbanisme (CE. 13 mars 2002, Heukeshoven, req. n°228.570) – l’article L.121-8 du Code de l’urbanisme disposant que « l'annulation ou la déclaration d'illégalité d'un schéma de cohérence territoriale, d'un plan local d'urbanisme, d'une carte communale, d'un schéma directeur ou d'un plan d'occupation des sols ou d'un document d'urbanisme en tenant lieu a pour effet de remettre en vigueur le schéma de cohérence territoriale, le schéma directeur ou le plan local d'urbanisme, la carte communale ou le plan d'occupation des sols ou le document d'urbanisme en tenant lieu immédiatement antérieur ».

    Il s’ensuit, donc, que le seul constat illégalité du document local d’urbanisme en vigueur ne saurait emporter l’annulation d’un permis de construire délivré au vu de ce document puisqu’il est encore nécessaire d’établir que la délivrance du permis de construire litigieux a été rendue possible du fait de ce document ou que ce permis méconnait les prescriptions du document d’urbanisme immédiatement antérieur.

    Or, à ce sujet, le Conseil d’Etat vient donc de juger que :

    « Considérant toutefois que, si le permis de construire ne peut être délivré que pour un projet qui respecte la réglementation d'urbanisme en vigueur, il ne constitue pas un acte d'application de cette réglementation ; que, par suite, un requérant demandant l'annulation d'un permis de construire ne saurait utilement se borner à soutenir qu'il a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal, quelle que soit la nature de l'illégalité dont il se prévaut ; que, cependant, il résulte de l'article L. 125-5 devenu L. 121-8 du code de l'urbanisme que la déclaration d’illégalité d’un document d’urbanisme a, au même titre que son annulation pour excès de pouvoir, pour effet de remettre en vigueur le document d’urbanisme immédiatement antérieur ; que, dès lors, il peut être utilement soutenu devant le juge qu’un permis de construire a été délivré sous l'empire d'un document d'urbanisme illégal - sous réserve, en ce qui concerne les vices de forme ou de procédure, des dispositions de l’article L. 600-1 du même code -, à la condition que le requérant fasse en outre valoir que ce permis méconnaît les dispositions pertinentes ainsi remises en vigueur ;
    Considérant qu’aucun moyen de cette sorte n’a été invoqué par Mme Gaudin et autres, lesquels n’auraient au demeurant pas été recevables à excéder les limites du renvoi préjudiciel ; que, par suite, c’est à tort que le tribunal administratif de Paris s’est fondé sur l’illégalité du règlement du plan d’aménagement de zone de la ZAC « Jules Ferry » pour déclarer illégal l’arrêté du 23 décembre 1998 par lequel le maire de COURBEVOIE a délivré un permis de construire à M. Giacalone
    ».


    En substance, le requérant ne saurait donc se borner à soutenir que le permis de construire contesté est illégale par voie de conséquence de l’illégalité du document d’urbanisme au vu duquel il a été délivré puisque pour que son moyen d’annulation soit « recevable » il lui faut encore démontrer ou, à tout le moins, soutenir avec un degré suffisant de précision que ce permis méconnait les prescriptions du document d’urbanisme immédiatement antérieur et ayant vocation à être remis en vigueur du fait du fait de l’éventuel constat de l’illégalité de son successeur.

    Si cette décision apparaît difficilement contestable au regard du principe préexposé et de la règle selon laquelle le requérant a, à tout le moins, la charge de l’allégation, ce qui lui impose de procéder à un minimum de démonstration juridique sans que, sauf exception, le juge administratif ne puisse palier sa carence, il n’en demeure pas moins qu’elle s’avère pour le moins contraignante puisque le document immédiatement antérieur peut lui-même être illégal, ce qui impose alors de prendre en compte celui ayant précédé ce dernier (CAA. Nantes, 15 février 1998, CNe de Mozé-sur-Louet, req. n°97NT00370). Le cas échéant, il peut donc incomber au requérant d’établir, tout d’abord, que le PLU au vu duquel a été délivré le permis de construire contesté est illégal, ensuite, que le POS l’ayant précédé est tout autant illégal pour, enfin, démontrer que l’autorisation litigieuse méconnait le MARNU antérieur à ce POS…

    Mais pour conclure, c’est surtout le « considérant » de principe précité qui nous intrigue : pourquoi ce dernier ne traite pas (plus ?) du cas particulier où le document d’urbanisme dont illégalité est excipée a eu « pour objet de rendre possible l’octroi » du permis de construire contesté .. ?



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur la désignation et l’identification des membres de la commission départementale d’équipement commercial

    L'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial appelée à statuer sur une demande d'autorisation de création d'un équipement commercial doit permettre de connaître à l'avance l'identité des personnes susceptibles de siéger par la désignation des membres qui la composent, soit, en vertu de la qualité au nom de laquelle elles sont appelées à siéger, lorsque cette mention suffit à les identifier, soit, dans l'hypothèse où un membre peut se faire représenter par l'indication nominative de la personne qui pourra le représenter.

    CE. 16 janvier 2008, Sté Leroy Merlin, req. n°296.558


    Bien que nous en partagions pas totalement le sens et la portée, voici un arrêt qui a le mérite d’être le bienvenu - lequel sera, d’ailleurs, publié au Recueil – puisqu’il tend à trancher la question de la désignation des membres de la commission départementale d’équipement commercial par l’arrêté préfectoral en fixant la composition.

    On sait, en effet (cf : veille jurisprudence spéciale du 10/01/2008 & note du 23/08/2007), que cette question avait fait l’objet de réponses forts différentes de la part des Cours administratives d’appel ; à tel point, d’ailleurs, qu’il y avait presque autant de réponses distinctes que de Cours ayant été appelées à se prononcer sur cette question (comparer : CAA. Nancy, 8 novembre 2007, ATAC, req. n° 07NC00100 ; CAA. Bordeaux, 22 octobre 2007, SAS Immobilière Frey, req. n° 05BX02442 ; CAA. Lyon, 24 mai 2007, Ebt Pierre Fabre, req. n°04LY00261CAA ; CAA. Bordeaux, 21 mai 2007, req.n°04BX00374 ; CAA. Nantes, 19 décembre 2006, req. n°05NT01988 ; CAA Versailles, 8 juin 2006, req. n°04VE00164).

    Mais le Conseil d’Etat vient donc de remédier à ces divergences en jugeant que :

    « Considérant qu'aux termes de l'article L. 720-8, devenu L. 751-2, du code de commerce : La commission départementale d'équipement commercial (…) est composée : / 1° Des trois élus suivants : / a) Le maire de la commune d'implantation ; / b) Le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'aménagement de l'espace et de développement dont est membre la commune d'implantation ou, à défaut, le conseiller général du canton d'implantation ; / c) Le maire de la commune la plus peuplée de l'arrondissement, autre que la commune d'implantation ; en dehors des départements des Hauts-de-Seine, de la Seine-Saint-Denis, du Val-de-Marne et des communes de l'Essonne, du Val-d'Oise, des Yvelines et de Seine-et-Marne appartenant à l'agglomération parisienne, dans le cas où la commune d'implantation appartient à une agglomération multicommunale comportant au moins cinq communes, le maire de la commune la plus peuplée est choisi parmi les maires des communes de ladite agglomération ; / 2° Des trois personnalités suivantes : / a) Le président de la chambre de commerce et d'industrie dont la circonscription territoriale comprend la commune d'implantation, ou son représentant ; / b) Le président de la chambre de métiers dont la circonscription territoriale comprend la commune d'implantation, ou son représentant ; / c) Un représentant des associations de consommateurs du département. / Lorsque le maire de la commune d'implantation ou le maire de la commune la plus peuplée visée ci-dessus est également le conseiller général du canton, le préfet désigne pour remplacer ce dernier un maire d'une commune située dans l'agglomération multicommunale ou l'arrondissement concernés ; qu'aux termes de l'article 10 du décret du 9 mars 1993, devenu R. 751-6 du code de commerce : Pour chaque demande d'autorisation, un arrêté préfectoral fixe la composition de la commission ; que l'article 22 du même texte, devenu R. 752-23 du code de commerce, dispose que : Dans le délai d'un mois à compter de la date d'enregistrement d'une demande d'autorisation, les membres de la commission départementale d'équipement commercial reçoivent, par lettre recommandée avec demande d'avis de réception, communication de cette demande accompagnée : - de l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission ; - de la lettre d'enregistrement de la demande prévue à l'article 21 ; - du formulaire visé à l'article 11 ; qu'enfin le formulaire visé à l'article 11 du même texte, devenu l'article R. 751-7 du code de commerce, est le document que chaque membre de la commission doit remettre dûment rempli au président de la commission pour pouvoir siéger et par lequel il déclare les intérêts qu'il détient et les fonctions qu'il exerce dans une activité économique ;
    (…)
    Considérant, en second lieu, qu'eu égard à l'objet et à la finalité des dispositions ci-dessus rappelées l'arrêté préfectoral fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial appelée à statuer sur une demande d'autorisation de création d'un équipement commercial doit permettre de connaître à l'avance l'identité des personnes susceptibles de siéger par la désignation des membres qui la composent, soit, en vertu de la qualité au nom de laquelle elles sont appelées à siéger, lorsque cette mention suffit à les identifier, soit, dans l'hypothèse où un membre peut se faire représenter par l'indication nominative de la personne qui pourra le représenter ; que, dès lors, en jugeant que cet arrêté préfectoral devait préciser l'identité des représentants éventuels des élus et autorités mentionnées par les dispositions de l'article L. 720-8 du code de commerce et en en déduisant qu'était illégal l'arrêté du préfet des Yvelines du 10 juillet 2001 fixant la composition de la commission départementale d'équipement commercial des Yvelines appelée à se prononcer sur la demande d'autorisation présentée par la SOCIETE LEROY MERLIN, au motif qu'il se bornait à désigner les élus locaux et les représentants des compagnies consulaires en précisant que les uns et les autres pourraient se faire représenter sans indiquer le nom de ce représentant éventuel, la cour administrative d'appel n'a pas commis d'erreur de droit
    ».


    En résumé, l’arrêté fixant la composition de la commission départementale d’équipement commercial, peut, d’une part, se limiter à identifier le maire de la commune d'implantation, le président de l'établissement public de coopération intercommunale compétent en matière d'aménagement de l'espace et de développement dont est membre la commune d'implantation ou, à défaut, le conseiller général du canton d'implantation, le maire de la commune la plus peuplée de l'arrondissement, autre que la commune d'implantation, le président de la chambre de commerce et d'industrie ainsi que le président de la chambre de métiers dont la circonscription territoriale comprend la commune d'implantation par la simple indication de ces qualités mais en revanche doit, d’autre part, identifier nominativement les représentants éventuels de ces derniers ainsi que cexux des associations départementales de consommateurs appelées à siéger.

    En cela, l’arrêt commenté contredit donc clairement la position de la doctrine administrative et, plus précisément, de l’article 127 de la circulaire ministérielle du 16 janvier 1997, portant application des dispositions de la loi d’orientation du commerce et de l’artisanat du 27 décembre 1973, lequel avait précisé que « l’arrêté décrit la composition de la commission, telle qu’elle figure à l’article 30 de la loi du 27 décembre 1973 modifiée. Seuls apparaissent nominativement les représentants, titulaire et suppléant, des associations de consommateurs ».

    Néanmoins, nous ne partageons pas le sens et la portée de l’arrêt commenté dans la mesure où :

    - tout d’abord et d’une façon générale, aucune disposition du Code de commerce ne prévoit cette désignation nominative des membres de la commission cependant que lorsque ses auteurs ont jugé utile une telle désignation, il n’ont pas manqué de le préciser expressément, notamment, dans le cadre de la procédure de vote pour laquelle les bulletins doivent être nominatifs en application de l’article R.752-30 du Code de commerce ;
    - ensuite et de façon plus spécifique, si cette désignation nominative tend à permettre le contrôle de l’impartialité des membres de la commission, le Code de commerce prévoit que ce contrôle a vocation à être assuré, après l’arrêté de fixation de la composition de la commission, par le Préfet à travers l’examen des formulaires de déclaration d’intérêts prescrits par l’article R.751-7 du Code de commerce ;
    - enfin et plus concrètement, cependant que les membres de la commission ont, à cet égard, pour seule obligation de transmettre leur formulaire de déclaration d’intérêt avant, mais sans délai particulier, que la commission ne délibère sur la demande d’autorisation, la désignation nominative de certains de ces membres dès l’édiction de l’arrêté en cause implique de « cristalliser » la composition de la commission au moins un mois avant qu’elle ne procède à cette délibération et, le cas échéant, de reprendre la procédure à ce stade lorsque les personnes nominativement désignées ne peuvent participer à la réunion, si bien que leur empêchement de dernière minute ne permet pas d’atteindre le quorum requis pour délibérer, alors que les délais pour ce faire sont strictement encadrés...



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur la date à prendre en compte pour apprécier la formation d’une décision tacite de prorogation du délai de validité d’un permis de construire

    Il résulte des dispositions combinées de l’article R.421-32 du Code de l’urbanisme et de l’article 16 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 que l’autorité compétente doit, pour apprécier la durée de deux mois dans laquelle est susceptible d’intervenir une prorogation tacite du délai de validité du permis de construire, prendre en compte la date d’envoi postal de la demande de prorogation, quelle que soit sa date de réception. Dès lors, lorsque la preuve de l’envoi d’une demande de prorogation au moins deux mois avant l’expiration dudit délai est apportée, la prorogation tacite est alors acquise à l’issue du délai de validité initial du permis de construire.

    TA. Nice, 6 décembre 2007, Mme Léon, req. n°04-04424 (signalé dans la lettre du TA de Nice n°6 - février 2008.pdf)


    Voici un jugement doublement intéressant, d’abord, de par l’originalité et le pragmatisme de la solution retenue, ensuite et surtout, parce qu’il touche à une problématique qu’a certes traitée la récente réforme des autorisations d’urbanisme mais ce, d'une façon nettement moins originale et, surtout, judicieuse.

    Comme on le sait, le délai de validité initial de deux ans du permis de construire régi par l’ancien article R.421-32 du Code de l’urbanisme pouvait être prorogé d’un an – et le peut, d’ailleurs, encore (art. R.424-23 & R.424-23 ; C.urb) - « sur demande de son bénéficiaire adressée à l’autorité administrative l’expiration du(dit) délai » ; cette « prorogation (étant) acquise au bénéficiaire si aucune décision ne lui a été adressée dans le délai de deux mois suivant la date de l’avis de réception postal ou de la décharge, de l’autorité compétente pour statuer sur la demande ».

    Il reste que suivant la lettre de l’ancien article R.421-32 du Code de l’urbanisme (ou de son prédécesseur l’ancien article R.421-38) et le principe selon lequel les délais d’action ouvert à l’administration pour statuer sur les demandes dont elle est saisie courent à compter de la réception de cette demande, il avait été jugé qu’il était nécessaire que la demande non seulement soit envoyée mais encore qu’elle soit reçue par l’autorité compétente au moins deux mois avant l’extinction du délai de validité initial du permis de construire (pour exemple : CE. 12 octobre 1979, Antonini, req. n°13331) puisqu’à défaut il ne pouvait y avoir de prorogation tacite dès lors que la seule demande de prorogation n’interrompt pas ce délai (pour exemple : CE. 14 mars 1973, SCI Plein Ciel, req. n°87.547) et qu’en toute logique, un permis de construire caduc ne peut être la base légale d’aucun acte subséquent : « modificatif », transfert ou, donc, prorogation (CE. 4 juin 1982, Tradimmo, Rec.,p.213).

    Mais depuis l’entrée en vigueur des dispositions précitées de l’article R.421-32 du Code de l’urbanisme et la jurisprudence susvisée, est intervenue une disposition nouvelle et de nature législative, en l’occurrence l’article 16 de la loi n°2000-321 du Code de l’urbanisme dont on précisera qu’il dispose :

    « Toute personne tenue de respecter une date limite ou un délai pour présenter une demande, déposer une déclaration, exécuter un paiement ou produire un document auprès d'une autorité administrative peut satisfaire à cette obligation au plus tard à la date prescrite au moyen d'un envoi postal, le cachet de la poste faisant foi, ou d'un envoi par voie électronique, auquel cas fait foi la date figurant sur l'accusé de réception ou, le cas échéant, sur l'accusé d'enregistrement adressé à l'usager par la même voie conformément aux dispositions du I de l'article 5 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives. Ces dispositions ne sont applicables ni aux procédures régies par le code des marchés publics, ni à celles relevant des articles L. 1411-1 et suivants du code général des collectivités territoriales, ni à celles pour lesquelles la présence personnelle du demandeur est exigée en application d'une disposition particulière ».

    En substance, l’article précité pose donc le principe selon lequel l’obligation d’accomplir une formalité, telle la présentation d’une demande, à une date ou une échéance déterminée est respectée dès lors que, notamment, cette demande est envoyée, au plus tard, à cette date ou à l’issue de cette échéance et ce, alors même qu’elle est reçue par l’administration ultérieurement.

    C’est pourquoi le Tribunal administratif de Nice vient donc de juger qu’il résulte des dispositions combinées de l’article R.421-32 du Code de l’urbanisme et de l’article 16 de la loi n°2000-321 du 12 avril 2000 que l’autorité compétente doit, pour apprécier la durée de deux mois dans laquelle est susceptible d’intervenir une prorogation tacite du délai de validité du permis de construire, prendre en compte la date d’envoi postal de la demande de prorogation et ce, quelle que soit sa date de réception.

    Ainsi, lorsque la preuve de l’envoi d’une demande de prorogation au moins deux mois avant l’expiration dudit délai est apportée, la prorogation tacite est alors acquise à l’issue du délai de validité initial du permis de construire, y compris, donc, lorsque la demande a été reçue par l’administration après cette échéance.

    Il reste que pour être pragmatique, cette solution n’a plus autant d’intérêt dans le dispositif issu du décret du 5 janvier 2007 et ce, bien que les nouveaux articles R.424-22 et R.424-23 du Code de l’urbanisme issu de ce décret disposent, eux-mêmes, respectivement que, d’une part, « la demande de prorogation est établie en deux exemplaires et adressée par pli recommandé ou déposée à la mairie deux mois au moins avant l'expiration du délai de validité » et que, d’autre part, « la prorogation est acquise au bénéficiaire du permis si aucune décision ne lui a été adressée dans le délai de deux mois suivant la date de l'avis de réception postal ou de la décharge de l'autorité compétente pour statuer sur la demande (…) ».

    En effet, l’objet du jugement ici commenté – et ce qui nous semble pouvoir expliquer et, en toute hypothèse, justifier son pragmatisme – procède de la problématique posée par le dispositif de l’ancien article R.421-32 du Code de l’urbanisme dont il résultait que la prolongation d’un an prenait effet dès la décision de la date l’accordant et non pas à compter de l’expiration du délai initial de validité du permis de construire (CE. 7 mai 2003, Association pour la protection du patrimoine martiniquais, req. n°251.196).

    Il s’ensuivait qu’un constructeur prudent prenant le soin d’adresser sa demande plus de deux mois avant l’expiration du délai de validité de son autorisation perdait le bénéficie du temps restant à courir à la date à laquelle l’administration accordait cette demande ; d’où la tentation d’optimiser le délai de validité du permis de construire en adressant la demande de prorogation quelques jours seulement avant l’échéance prévue pour ce faire et ainsi de prendre le risque que celle-ci ne soit reçue qu’après cette échéance.

    Or, tel ne sera plus le cas, puisque le nouvel article R.424-23 du code de l’urbanisme précise expressément que « la prorogation prend effet au terme de la validité de la décision initiale ».

    Il reste qu’outre cette condition d’ordre procédural, la prorogation du délai de validité du permis de construire et sa légalité restent subordonnées, sur le fond, à la condition que « les prescriptions d'urbanisme et les servitudes administratives de tous ordres auxquelles est soumis le projet n'(aie)nt pas évolué de façon défavorable à son égard » (art. R.424-21 ; C.urb) à la date de la décision accordant cette prorogation.

    Or, la règle introduite par l’article R.424-23 du Code de l’urbanisme et selon laquelle « la prorogation prend effet au terme de la validité de la décision initiale » a une autre conséquence : puisque ce n’est qu’à compter de l’expiration du délai visé par le nouvel article R.424-17 du code de l’urbanisme que prend effet la prolongation, quand bien même aura-t-elle était accordée avant cette échéance, on voit mal ce qui pourrait s’opposer, en l’état, à ce que les opérateurs anticipent, bien en amont et sans conséquence, une éventuelle évolution défavorable des prescriptions d’urbanisme et des servitudes administratives opposables à leur projet puisque dès lors que l’article R.424-23 ne prévoit pas la date à partir de laquelle la demande de prorogation peut être présentée, celui-ci n’empêche pas, en lui-même, qu’après avoir obtenu un permis de construire, son titulaire en sollicite la prorogation dès le lendemain pour ainsi l’obtenir, au plus tard, 22 mois avant l’expiration du délai de validité initial de son autorisation.

    En l’absence d’une modification de ce dispositif, force est d’admettre qu’une telle pratique ne devrait pas manquer de se développer ; ce qui pourrait, d’ailleurs, conduire le Conseil d’Etat a introduire dans le droit de l’urbanisme une notion certes connexe de la de fraude mais néanmoins distincte et qui lui est étrangère : l’abus de droit.

    Quant à l’autre principale modification du régime de validité du permis de construire, la suspension du délai de validité d’un permis de construire par le simple jeu d’un recours en annulation à son encontre, nous aurons surement l’occasion de traiter ultérieurement du cas du pétitionnaire qui « fait attaquer » sa propre autorisation…


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés