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Sur la conventionnalité et le champ d’application matériel de l’article 11 de la loi n°2005-809 du 20 juillet 2005 portant validation des conventions et concessions d’aménagement antérieures à son entrée en vigueur

Les dispositions du traité de l'Union européenne qui soumettent l'ensemble des contrats conclus par les pouvoirs adjudicateurs aux obligations minimales de publicité et de transparence propres à assurer l'égalité d'accès à ces contrats s'appliquent nonobstant l’article 11 de la loi n°2005-809 du 20 juillet 2005, validant les conventions publiques d'aménagement conclues sans publicité et mise en concurrence avant le 21 juillet 2005, dont les dispositions contraires au traité doivent être écartées. Entre outre et en toute hypothèse, les dispositions de l’article 11 précité ne saurait être appliquées à l’acte par lequel le maire signe la convention dès lors qu’il s’agit d’un acte pris dans le cadre de la procédure préalable à la conclusion desdites conventions, laquelle n’est pas saisie par cet article.

TA. Versailles, 22 juin 2007, Mme Christine BUFFET, req. n° 05-05044 (voir,toutefois, ici).


Comme on le sait, la Cour administrative d’appel de Bordeaux avait jugé que les anciennes dispositions de l’article L.300-4 du Code de l’urbanisme relatives aux conventions publiques d’aménagement (sur cette notion, voir ici) ne s’opposaient pas à l’application à leur égard des dispositions du Traité de l’Union européenne imposant que l'ensemble des contrats conclus par les pouvoirs adjudicateurs respectent des obligations minimales de publicité et de transparence propres à assurer l'égalité d'accès à ces contrats (CAA. Bordeaux, 9 novembre 2004, SOGEDIS, req. n°01BX00381).

Cet arrêt a conduit le législateur a adopté la loi n°2005-809 du 20 juillet 2005, laquelle a non seulement réformé le régime applicable à la passation des contrats visés par l’article L.300-4 du Code de l’urbanisme (art.1er) mais également validé l’ensemble des conventions et concessions d’aménagement conclues avant le 21 juillet 2005 (art.11).

Mais les plus extrêmes réserves s’imposaient sur ce second point puisqu’en validant des contrats directement contraires aux principes du droit communautaire, cette loi apparaissait elle-même contraires à ces dernières et, par voie de conséquence, « inconventionnelle ».

Cette question a, toutefois, fait l’objet de réponses divergentes puisque si le Tribunal administratif de Nantes (TA. Nantes, 7 août 2006, Courtin, MTP, 27 octobre 2006, suppl. p.14) a fait application de l’article 11 de la loi du 20 juillet 2005, le Tribunal administratif de Rennes s’y est en revanche refusé (TA. Rennes, 13 avril 2006, M. Josse, req. n°03-00729). Et pour sa part, le Tribunal administratif de Versailles vient donc de juger que :

« Considérant, toutefois, que si, en vertu du dernier alinéa de l'article L.300-4, ladite convention n'entrait pas dans le champ d'application des dispositions de la loi n°93-122 du 29 juin 1993 reprises aux articles L. 1411-1 et suivants du Code général des collectivités territoriales, elle n'était pas pour autant exclue du champ d'application des règles fondamentales posées par le traité de l'Union, qui soumettent l'ensemble des contrats conclus par les pouvoirs adjudicateurs aux obligations minimales de publicité et de transparence propres à assurer l'égalité d'accès à ces contrats ; que ces règles s'appliquent nonobstant l'article 11 de la loi du 20 juillet 2005, qui prévoit la validation des conventions publiques d'aménagement conclu sans publicité et mise en concurrence avant le 21 juillet 2005, et dont les dispositions contraires au traité doivent être écartées ».

et, en résumé, que les dispositions de l’article 11 de la loi du 20 juillet 2005 méconnaissaient les principes du Traité de l’Union européenne et, par voie de conséquence, qu’elles ne pouvaient être appliquées.

Mais le plus intéressant est que le Tribunal a estimé qu’en toute hypothèse, l’article 11 précité, compte tenu de son champ d’application matériel, n’était pas applicable à l’acte attaqué ; en l’occurrence, la décision prise par le maire de signer la convention publique d’aménagement en cause.

L’article 11 de la loi susvisée dispose, en effet, que « sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, sont validés, en tant que leur légalité serait contestée au motif que la désignation de l'aménageur n'a pas été précédée d'une procédure de publicité permettant la présentation de plusieurs offres concurrentes :
1° Les concessions d'aménagement, les conventions publiques d'aménagement et les conventions d'aménagement signées avant la publication de la présente loi ;
2° Les cessions, locations ou concessions d'usage de terrains ainsi que l'ensemble des actes effectués par l'aménageur pour l'exécution de la concession ou de la convention
».

A s’en tenir à sa lettre, l’article précité valide donc uniquement, d’une part, les conventions et concessions d’aménagement en elles-mêmes et, d’autre part, les actes effectués par l’aménageur en exécution de celles-ci.

Or, la décision de signer un contrat en est un acte détachable et, pour autant qu’il soit besoin de le préciser, ne se rapporte pas à son exécution mais à la procédure préalable à sa passation.

Telle est la raison pour laquelle, outre son « inconventionnalité », le Tribunal administratif de Versailles a jugé qu’il n’y avait pas lieu de faire application de l’article 11 de la loi du 20 juillet 2005 en l’espèce dès lors que ses dispositions « s’appliquent aux conventions publiques d’aménagement signées avant le 21 juillet 2005 et non aux délibérations et décisions prises lors de la procédure préalable à la conclusion desdites conventions ».

A cet égard et indépendamment de toute considération liée à la « conventionnalité » de l’article 11 précité, la solution retenue est donc de nature à fragiliser l’ensemble des conventions et concessions d’aménagement conclues avant le 12 juillet 2005 puisque, pour conclure, on soulignera que le Tribunal a non seulement annulé l’acte de signature attaqué du 13 mai 1998 – suivant un recours introduit le 3 juin 2005 et jugé non tardif dès lors que la preuve de la publication de cet acte n’avait pas été rapportée – mais a également enjoint à la commune défenderesse, sur le fondement de l’article L.911-1 du Code de justice administrative, de poursuivre la résolution de la convention d’aménagement ainsi signée…


Patrick E. DURAND
Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés

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