Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

L'inexistance légale de la fosse à lisier s'oppose aux distances imposées par le réglement sanitaire, et l'acceptation du risque de nuisances olfactives par le voisin, à l'article R.111-2 du Code de l'urbanisme...

Dès lors qu'elle est indissociable du projet de construction agricole autorisé par le permis de construire, une fosse à lisier aménagée après la caducité de ce permis, et ainsi dépourvue d'existence légale, n'emporte pas l'application des règles de distance imposée aux habitations par le règlement sanitaire départemental. Par ailleurs, dès lors que le maitre d'ouvrage de cette habitation a présenté sa demande de permis de construire en toute connaissance de cause des nuisances olfactives existantes, l'article R.111-2 du Code de l'urbanisme n'est pas opposable à ce permis de construire.

CAA. Douai, 30 mai 2018, req. n°16DA02341 :

"2. Aux termes de l'article 79 A - Fosses à purin et à lisier - du règlement sanitaire départemental du Pas-de-Calais modifié par arrêté du préfet du Pas-de-Calais du 12 novembre 1977 : " Ces fosses doivent être établies en dehors des périmètres de protection immédiate, des sources et des captages d'eau, à plus de cinq mètres des voies et bâtiments publics ainsi que des habitations des tiers, et à plus de 35 mètres des puits servant à l'alimentation et des cours d'eaux. / Elles ne peuvent être autorisées qu'aux mêmes conditions que pour les dépôts de fumiers dans les périmètres de protection rapprochée et éloignée des sources et captages. / Dans le cas de fosses destinées à recevoir les déjections à la fois solides et liquides des animaux, appelées lisier, et notamment s'il s'agit de lisiers de porcs ou de bovins d'engraissement, la distance par rapport aux bâtiments publics et aux habitations des tiers ne peut être inférieure à 35 mètres. / (...) / Les fosses à ciel ouvert ne peuvent être tolérées que si elles sont éloignées de plus de 50 mètres des habitations et des voies et bâtiments publics ; elles doivent être entourées d'un grillage protecteur ; un rideau d'arbustes est également souhaitable. ".

3. Il résulte de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime que les règles de distance imposées, par rapport notamment aux habitations existantes, à l'implantation d'un bâtiment agricole en vertu, en particulier, de la législation relative aux installations classées pour la protection de l'environnement sont également applicables, par effet de réciprocité, à la délivrance du permis de construire une habitation située à proximité d'un tel bâtiment agricole. Il appartient ainsi à l'autorité compétente pour délivrer le permis de construire un bâtiment à usage d'habitation de vérifier le respect des dispositions législatives ou réglementaires fixant de telles règles de distance, quelle qu'en soit la nature. L'exigence d'éloignement imposée par ces dispositions aux projets de construction à usage d'habitation ne s'applique toutefois qu'à l'égard de bâtiments agricoles régulièrement édifiés et exploités.

4. Il ressort des pièces du dossier que M.I..., exploitant agricole dans la commune de Wavrans-sur-l'Aa, a déposé, le 11 octobre 1996, une demande de permis de construire sur les parcelles 369 a et 370 a jouxtant le terrain d'assiette du permis de construire présenté dans la présente instance, ce projet portant notamment sur la construction d'une fumière et d'une fosse à purin. Par un arrêté du 3 décembre 1996, le maire de la commune a accordé le permis de construire ainsi sollicité.

5. Aux termes de l'article R. 421-32 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction en vigueur du 21 février 1985 au 30 janvier 2002 : " Le permis de construire est périmé si les constructions ne sont pas entreprises dans le délai de deux ans à compter de la notification visée à l'article R. 421-34 ou de la délivrance tacite du permis de construire. Il en est de même si les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année. / (...) ".

6. Il ressort des photographies aériennes produites par les appelants qu'en 2004 la fosse de M.I..., qui est une construction permanente et doit être regardée comme un bâtiment agricole au sens et pour l'application de l'article L. 111-3 du code rural et de la pêche maritime, n'avait pas encore été réalisée alors qu'elle apparaît sur une autre photographie aérienne de 2009. Les appelants produisent, par ailleurs, une attestation d'un agriculteur du 11 juillet 2017, non sérieusement remise en cause par M.I..., selon lequel cette fosse était en cours de construction en 2007 lorsque cet agriculteur s'est rendu sur l'exploitation de M. I...pour un différend concernant des bovins. Si M. I...fait valoir que la fosse a été réalisée pendant la période de validité du permis de construire délivré le 3 décembre 1996, il ne fournit aucun document attestant l'achèvement des travaux et se borne à produire des factures émises au cours de la période allant du 20 octobre 1999 au 20 mars 2004 qui portent sur la location d'une tonne à lisier. Ces factures, dont certaines portent au demeurant une adresse correspondant à une autre exploitation de l'intéressé, ne constituent pas par elles-mêmes la preuve de l'édification de la fosse à lisier en cause. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que la fosse à purin, qui faisait partie intégrante de la demande de permis de construire accordée le 3 décembre 1996, a été construite dans les délais de validité du permis, tels que fixés par les dispositions de l'article R. 421-32 du code de l'urbanisme, dans leur rédaction alors en vigueur. En outre, les documents fournis par les appelants permettent d'établir de manière suffisamment certaine qu'elle a été réalisée après cette période de validité. Aucun document ne permet de constater que cette construction a été régularisée. Dès lors, la distance de 50 mètres fixée par le règlement sanitaire départemental du Pas-de-Calais ne pouvait être opposée au projet de M. H...et de MmeE.... Par suite, les appelants sont fondés à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont retenu le moyen tiré de la méconnaissance de la règle de distance de 50 mètres prévue par le règlement sanitaire départemental du Pas-de-Calais pour prononcer l'annulation du permis de construire en litige.

En ce qui concerne le second motif d'annulation tiré de la méconnaissance de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme :

7. Aux termes de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, alors en vigueur : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations ".

8. Il est constant que la fosse à purin de M. I...ne créée pas de nuisances visuelles pour la construction projetée dans la mesure où cette fosse est cachée par une haie végétale qui la rend totalement invisible depuis le fondsH.... Il n'est, par ailleurs, ni soutenu ni allégué, et il ne ressort pas des pièces du dossier, qu'elle créée des nuisances sonores. En outre, les consorts H...E...souhaitent construire, en toute connaissance de cause, sur la parcelle de leur exploitation, donc sur un lieu déjà, par nature, exposée à des nuisances olfactives. Ne figure, enfin, au dossier aucun élément concret de nature à établir l'ampleur des nuisances olfactives pouvant être perceptibles par les habitants d'une construction située à 25 mètres de cette fosse, de taille modeste, et dont il a été dit en outre qu'elle a été illégalement réalisée. Par suite, les appelants sont également fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Lille a retenu le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation dans l'application de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme pour prononcer l'annulation du permis de construire en litige".

Patrick E. DURAND

Les commentaires sont fermés.