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  • Les incidences sur le permis de construire valant division du projet de décret relatif aux corrections à apporter a la reforme des autorisations d’urbanisme

    Si le permis de construire valant division est peu concerné par le projet de décret devant en principe entré en vigueur le 1er octobre 2012, celui-ci apporte toutefois deux « précisions/modifications » relatives, pour l’une, à l'assiette foncière de cette autorisation et, pour l’autre, à l’articulation de cette procédure avec la règlementation sur les lotissements.


    L’un des principaux apports de la réforme entrée en vigueur le 1er octobre 2007 est d’avoir supprimé la condition dite de la « maitrise d’ouvrage unique » antérieurement issue de l’article R.421-7-1 du Code de l’urbanisme. A cet égard, la réforme a ainsi placé le permis de construire valant division sous le régime de droit commun en permettant notamment que celui-ci soit obtenu conjointement par plusieurs titulaires comme le prévoie expressément l’article R.423-1.

    1.- Il reste que là où l’article R.423-1 induit également clairement qu’un permis de construire peut porter sur plusieurs terrains, l’article R.431-24 dans sa rédaction actuelle définit toujours le permis de construire valant division comme une autorisation se rapportant à une opération groupée portant sur un « même terrain » et ce, comme c’était déjà le cas de l’ancien article R.421-7-1.

    Or, à ce titre, la Cour administrative d’appel de Paris avait comme on le sait pu juger qu’un permis de construire valant division devait porter sur une seule et même unité foncière.

    A priori, cette solution avait donc également vocation à valoir pour application de l’article R.431-24 du Code de l’urbanisme ; ce qui réduisait substantiellement l’utilité du permis de construire valant division conjoint.

    C’est cette problématique que vise à régler le projet de décret devant en principe entrer en vigueur le 1er mars 2012 et aux termes duquel l’article précité devrait prévoir que : « lorsque les travaux projetés portent sur la construction de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette comprenant une ou plusieurs unités foncières contiguës doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance avant l'achèvement de l'ensemble du projet, le dossier présenté à l'appui de la demande est complété par un plan de division (…) ».

    Un permis de construire valant division pourra donc clairement porter sur une, deux ou plusieurs unités foncières pour autant que celles-ci soient contiguës : pour ce qui concerne son assiette, le régime de cette autorisation s’en trouve donc clarifiée.

    Mais pour ce qui concerne le champ d’application de cette procédure, il faut relever que dans sa version à venir l’article précité précisera qu’elle s’applique, notamment, lorsque « le terrain d'assiette comprenant une ou plusieurs unités foncières contiguës doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance ».

    A suivre la lettre de l’article précité, c’est donc seulement « le terrain d’assiette » qui « doit faire l’objet d’une division » et non pas spécifiquement, en cas de pluralité de propriétés, chacune des unités foncières composant ce terrain d’assiette.

    Cette nouvelle rédaction génère ainsi une nouvelle interrogation : deux opérateurs pourront-ils s’associer pour obtenir ensemble un permis de construire valant division portant sur leurs propriétés respectives lorsque l’une seulement a vocation à être divisée et ce, aux fins que le projet développé sur l’autre puisse bénéficier le cas échéant d’une application globalisée des règles d’urbanisme au titre de l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme ?

    2.- Mais par ailleurs, l’institution du permis de construire valant division conjoint, combinée à l’exclusion générale de cette procédure de la règlementation sur les lotissements telle qu’elle résulte actuellement de l’article R.442-1 c) du Code de l’urbanisme, a conduit à certaines pratiques « déviantes » dont au premier chef celle consistant pour le propriétaire du terrain à faire obtenir conjointement cette autorisation par les acquéreurs des terrains et des bâtiments à créer ou à l’obtenir lui-même personnellement avant de le transférer partiellement à ses acquéreurs.

    Comme le sait, cette pratique a toutefois connu un coup d’arrêt lié à l’intervention d’une Réponse ministérielle du 22 mars 2011 :

    « (…) une telle division ne saurait ni remettre en cause le projet d'ensemble, ni permettre de contourner une autre réglementation. Ainsi, elle ne saurait conduire à céder des permis de construire distincts qui n'assureraient plus l'organisation initiale de l'ensemble du projet (accès, réseaux, espaces et équipements communs). De même, sauf à relever de la procédure du lotissement, elle ne saurait intervenir que dans les limites du champ d'application de l'article R. 442-1 d, c'est-à-dire dans la mesure où les droits à construire cédés préalablement à la division portent uniquement sur « un groupe de bâtiments ou un immeuble autre qu'une maison d'habitation individuelle. En effet, toute cession de droits à construire une maison individuelle, emportant cession de l'assiette de la construction à édifier, entre dans le champ d'application des lotissements et ne peut donc être autorisée dans le cadre d'une scission de permis de construire valant division. Les acquéreurs de lots à bâtir une maison individuelle ne sauraient être privés des garanties assorties à la procédure des lotissements : bornage, garantie d'achèvement des travaux de voirie et espaces communs, maintien des règles d'urbanisme pendant cinq ans (…). » (JOAN du 22/03/2011 ; p.2878).

    Le projet de décret tend ainsi à valider cette position de l’administration centrale puisque l’article R.442-1, qui actuellement se borne à disposer sur ce point que « ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l'article R. 431-24 » devrait à l’avenir préciser que « ne constituent pas des lotissements au sens du présent titre les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l'article R. 431-24 lorsque ce permis n’est pas destiné à être mis en œuvre par des maîtres d’ouvrage construisant chacun une maison individuelle au sens de l’article L. 231-1 du code de la construction et de l’habitation ».

    Toutefois, il faut relever que si cette réponse ministérielle ne visait que le transfert partiel du permis de construire valant division, le projet de décret va plus loin puisqu’il en résulte que seront exclus de la procédure de lotissement non plus seulement les transferts partiels mais également les permis de construire valant division initialement obtenus de façon conjointe par les acquéreurs.

    Sur ce point, il faut souligner que sont donc visés et réintégrés à la procédure de lotissement uniquement les permis de construire valant division destinés à être « mis en œuvre par des maîtres d’ouvrage construisant chacun une maison individuelle au sens de l’article L. 231-1 du code de la construction et de l’habitation ».

    A contrario, cette précision tend donc à confirmer que dans tous les autres cas, le permis de construire valant division est exclu de la procédure de lotissement, y compris donc lorsqu’il est destiné à être mis en œuvre par les acquéreurs des terrains et des bâtiments à créer dès lors qu’il ne s’agit pas de maisons individuelles.

    Mais surtout, il faut rappeler que la réponse ministérielle précitée n’interdit pas de façon absolue le transfert partiel d’un permis de construire valant division portant sur ces maisons individuelles puisqu’elle expose simplement que dans ce cas ce transfert ne saurait permettre d’échapper à la procédure de lotissement et induit donc a contrario qu’un tel transfert est donc possible pour autant qu’il soit précédé de l’autorisation de lotissement requise (« sauf à relever de la procédure du lotissement »).

    Or, de façon quelque peu curieuse, le projet de décret va également dans ce sens. En effet, et ainsi qu’il a été pré-exposé, la seule modification apportée par ce projet de décret quant au champ d’application du permis de construire valant division a donc uniquement trait à son assiette puisque les termes « sur le même terrain » seront supprimés et qu’en conséquence, il sera précisé que le terrain d’assiette de cette autorisation peut comprendre « une ou plusieurs unités foncières contiguës ».

    En résumé, et à s’en tenir à lettre de ces articles dans leur rédaction à venir, le nouvel article R.431-24 du Code de l’urbanisme n’exclura pas de son champ d’application, et n’interdira donc pas les permis valant division obtenus conjointement par les acquéreurs des maisons individuelles à édifier et le nouvel article R.442-1 aura pour seul objet et pour seul effet de ne plus les dispenser de la procédure de lotissement.

    A priori, il sera donc toujours possible que les acquéreurs des maisons individuelles à édifier soient conjointement titulaires d’un permis de construire valant division ou en deviennent bénéficiaires par le jeu de transferts partiels ultérieurs, mais ce, à la condition préalable que le propriétaire d’origine du terrain ait satisfait à la procédure de lotissement.

    Or, s’il est à notre sens évident qu’une simple déclaration préalable ne pourra suffire lorsque le projet intègre la réalisation de voies, d’équipements ou d’espaces communs – lesquels ne sauraient légalement relever du permis de construire valant division (voir le futur article L.442-1-2) – force est d’admettre que, dans le cas d’un projet dit « sans travaux », l’intérêt d’imposer au propriétaire du terrain d’origine la formulation d’une telle déclaration est quel que peu limité et le sera d’autant plus avec le futur article R.442-2 qui devrait disposer que « lorsqu’une construction est édifiée sur une partie d’une unité foncière qui a fait l’objet d’une division, la demande de permis de construire tient lieu de déclaration préalable de lotissement dès lors que la demande indique que le terrain est issu d’une division »…

    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés