Quand le défaut de production de l’étude d’impact au dossier n’affecte pas la légalité du permis de construire
Lorsque l’autorité compétente a eu connaissance de l’étude d’impact dans le cadre de l’instruction de la première demande de permis de construire, le défaut de production de ce document dans le nouveau dossier de demande n’affecte pas d’illégalité le second permis de construire dès lors que les modifications apportées au projet ne sont pas substantielles.
CAA. Douai, 1er juillet 2010, Sté Cicobail, req. n°08DA00429
Rendu en formation plénière, voici un arrêt d’importance ; d’autant qu’il nous permet de faire part de nos très vielles interrogations sur « l’utilité » de l’étude d’impact dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire, du moins dans certains cas.
On le sait, l’ancien article R.421-2 8° du Code de l’urbanisme comme l’actuel article R.431-16 f) impose au pétitionnaire de produire à son dossier une étude l‘impact lorsqu’elle est prévue en application du Code de l’environnement.
Ce document peut être exigible dans deux cas : soit, parce ce que le projet de construction est en lui-même assujetti à cette obligation ; soit, par voie de conséquence, dans la mesure où la demande se rapporte à un projet pour laquelle cette étude d’impact est requise à un autre titre.
Tel est le cas lorsque la demande de permis de construire se rapporte à une installation classée pour la protection de l’environnement soumise à autorisation d’exploiter.
Quelle que soit l’importance et les caractéristiques intrinsèques de la construction, le pétitionnaire doit alors produire à son dossier de demande de permis de construire l’étude d’impact requise à ce titre. Il en va ainsi y compris lorsque les travaux objets de la demande de permis de construire porte sur une installation existante dès lors que ces travaux correspondent à une modification de ses conditions d’exploitation nécessitant une nouvelle autorisation au titre de la législation environnementale (CAA. Marseille, 21 février 2007, ANPER, req. n°03MA00068).
Cette règle de procédure à longtemps fait l’objet d’une application stricte. Ainsi, dès lors que cette étude d’impact n’était pas jointe au dossier de demande de permis de construire, le permis de construire obtenu dans ces conditions encourrait systématiquement la censure, y compris lorsque ce document avait été néanmoins établi et produit au dossier de demande d’autorisation d’exploiter et quand bien même la délivrance de cette autorisation et celle du permis de construire relevaient-elles de la même autorité (CAA. Nantes, 28 juin 2002, Ministre de l’Equipement, req. n°00NT02080) Application stricte mais néanmoins parfaitement conforme :
• d’une part, au principe d’indépendance des législations et des procédures ;
• d’autre part, à la règle selon laquelle l’administration est réputée statuer sur une demande d’autorisation d’urbanisme au seul regard du dossier produit par le pétitionnaire.
Précédemment, c’est d’ailleurs ce qu’avait elle-même jugé la Cour administrative d’appel de Douai (CAA. Douai, 12 avril 2007, Cne d’Oudezeelle, req. n°06DA01023).
Cette règle devait toutefois connaitre un assouplissement substantiel grâce à l’arrêt par lequel le Conseil d’Etat a jugé que « considérant, toutefois, que lorsqu'une étude d'impact a été réalisée et portée à la connaissance, en temps utile, de l'autorité chargée d'instruire la demande de permis de construire, la seule circonstance qu'elle n'ait pas figuré, en méconnaissance du 8° du A de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans le dossier joint à la demande de permis de construire ne suffit pas à faire regarder comme remplie la condition tenant à l'absence d'étude d'impact prévue à l'article L. 122-2 du code de l'environnement » (CE. 13 juillet 2007, SIETOM, req. n°294.603).
Force était toutefois d’admettre que cette décision était propre à la lettre et à l’objet de l’article L.122-2 du Code de l’environnement qui dispose que : « si une requête déposée devant la juridiction administrative contre une autorisation ou une décision d'approbation d'un projet visé au second alinéa de l'article L. 122-1 est fondée sur l'absence d'étude d'impact, le juge des référés, saisi d'une demande de suspension de la décision attaquée, y fait droit dès que cette absence est constatée ».
Mais quoi qu’il en soit, l’arrêt de la Cour administrative d’appel de Douai va donc au-delà en faisant expressément référence, dans le cadre d’un recours en annulation, à la règle dégagée par l’arrêt précité du Conseil d’Etat.
Dans cette affaire, la société requérante avait obtenu une autorisation d’exploiter délivré au vu d’un dossier comportant une étude d’impact et deux permis de construire se rapportant à l’installation à exploiter. Ultérieurement, le pétitionnaire devait toutefois solliciter et obtenir le retrait de ces deux permis de construire ainsi qu’un permis unique portant sur l’ensemble de projet.
Ce permis d’ensemble devait toutefois être délivré au vu d’un dossier ne comportant pas d’étude d’impact ; motif pour lequel cette autorisation devait être annulée en première instance. Mais pour sa part, la Cour administrative d’appel de Douai devait donc juger que :
« Considérant que lorsqu'une étude d'impact a été réalisée et portée à la connaissance, en temps utile, de l'autorité chargée d'instruire la demande de permis de construire, la seule circonstance qu'elle n'ait pas figuré, en méconnaissance du 8° du A de l'article R. 421-2 du code de l'urbanisme, dans le dossier joint à la demande de permis de construire, ne suffit pas à faire regarder comme entachant d'illégalité le permis de construire délivré ; qu'il en va, notamment, ainsi dans le cas où une telle étude a été réalisée et produite préalablement à la délivrance d'un premier permis de construire et qu'elle n'est pas de nouveau produite à l'occasion de l'instruction d'une nouvelle demande de permis portant sur le même projet, sous réserve que ce dernier n'ait pas fait l'objet de modifications qui, par leur nature et leur importance, conduiraient à faire regarder cette nouvelle demande comme différant substantiellement de la précédente ;
Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'une étude d'impact a été réalisée le 7 août 2001 dans le cadre de l'instruction de la demande d'autorisation au titre de la législation sur les installations classées pour la protection de l'environnement requise notamment pour les activités de peinture exercées dans le bâtiment de tôlerie ; qu'il n'est pas contesté que cette étude a été jointe au dossier de demande de permis de construire déposée le 30 juillet 2001 et complétée le 17 septembre 2001, et a ainsi été portée à la connaissance du maire de Saint-Léonard avant que celui-ci ne délivre tant les permis de construire en date du 26 décembre 2001 que celui en date du 14 juin 2004 ; que la circonstance, à la supposer même établie, que cette étude n'ait pas été jointe à l'occasion de cette nouvelle demande, n'est pas, par elle-même, de nature à entacher d'illégalité le permis de construire litigieux ; que si le projet présenté le 1er août 2003 différait sensiblement des précédents, du fait de l'agrandissement du bassin de rétention porté de 4 400 mètres à 5 246 mètres cubes et de l'ajout de quatre cheminées, ces modifications, eu égard à leur caractère limité au regard de l'ensemble du projet, ne constituent pas des circonstances de nature à faire regarder la nouvelle demande comme différant substantiellement de la précédente ; qu'il s'ensuit que c'est à tort que les premiers juges se sont fondés sur l'absence d'étude d'impact jointe au dossier de demande de permis de construire pour annuler l'arrêté en date du 14 juin 2004 ».
Le moyen tiré du défaut d’étude d’impact au dossier de demande a donc été écarté dans la mesure où :
• d’une part, ce document avait été produit au dossier de demande d’au moins un des deux précédent permis ;
• d’autre part, le projet objet du permis de construire contesté ne différait pas substantiellement du projet autorisé par les deux précédentes autorisations.
Bien que la Cour ait repris le « considérant » de l’arrêt précité du Conseil d’Etat (CE. 13 juillet 2007, SIETOM, req. n°294.603), sa décision nous parait néanmoins parfaitement orthodoxe au regard de règles jurisprudentielles bien antérieures à cet arrêt.
On sait, en effet, que le juge administratif fait depuis longtemps preuve d’une certaine tolérance et souplesse en considérant qu’une nouvelle demande de permis de construire n’a pas nécessairement à refaire l’objet d’une instruction complète dès lors que le projet n’a pas été substantiellement modifié ; la circonstance que le premier permis de construire ait été annulé ou retiré n’ayant aucune incidence sur ce point.
Or, l’étude d’impact prévue par l’article R.431-16 du Code de l’urbanisme n’étant qu’une pièce parmi d’autres, on voit mal pourquoi il devrait en aller autrement s’agissant de ce document ; d’autant plus lorsque l’étude d’impact est requise au dossier dans la seule mesure où le projet porte sur une installation classée pour la protection de l’environnement soumise à autorisation d’exploiter.
Il faut en effet souligner que l’article précité précise que le dossier de demande de permis de construire comporte « l'étude d'impact, lorsqu'elle est prévue en application du code de l'environnement ». En outre, si l’étude d’impact est requise dans le cas d’une demande de permis de construire portant sur une installation classée soumise à autorisation d’exploiter, nonobstant la dispense prévue par l’article R.122-6 du Code de l’environnement c’est dans la mesure où l’article R.122-7 précise que « les dispenses d'étude d'impact résultant des dispositions du tableau de l'article R. 122-6 ne sont pas applicables aux catégories d'aménagements, ouvrages et travaux figurant au tableau de l'article R. 122-5 ».
L’étude d’impact requise au titre de l’article R.431-16 du Code de l’urbanisme est donc celle imposée en application de l’article R.122-5 (10°) du Code de l’environnement. Comme l’illustre l’arrêté commenté et l’arrêt du Conseil d’Etat dont il procède, l’étude à joindre au dossier de demande de permis de construire est celle à produire au dossier de demande d’autorisation d’exploiter et, en d’autres termes, « l'étude d'impact relative à l'installation classée » (CAA. Nantes, 25 juin 2008, Cne de Bucy, req. n°07NT03015).
Mais rappelons dès lors que les éventuelles erreurs, omissions ou carences affectant un dossier de demande de permis de construire n’ont d’incidence sur la légalité de l’autorisation délivrée dans ces conditions que pour autant qu’elles aient faussé l’appréciation que les services instructeurs ont pu faire de la conformité du projet au regard des normes qu’un permis de construire a vocation à sanctionner en application de l’article L.421-6 du Code de l’urbanisme.
C’est ainsi qu’il a pu être jugé que le fait que l’étude d’impact jointe à un dossier de demande de permis de construire une installation classée ne traite pas des conditions de remise en état du site après exploitation était sans incidence sur la légalité de l’autorisation obtenue puisqu’il s’agit d’une considération étrangère à la légalité d’un permis de construire (CAA. Bordeaux, 15 juin 2005, Association Vigilance et Intervention pour l’Environnement, req. n°05BX02044).
Il est vrai qu’il s’agit là d’un point particulier d’une étude d’impact relative à une installation classée. Mais pourquoi devrait-il en aller autrement sur les autres aspects du projet saisis par ce document.
Pour l’essentiel, en effet, une étude relative à une installation classée a trait à l’impact de l’activité à exploiter. Et pour cause puisque tel est l’objet de l’autorisation d’exploiter délivrée au titre de la législation environnementale.
Or, comme on le sait, il est de jurisprudence bien établie qu’un permis de construire portant sur une installation classée ayant précédemment fait l’objet d’une autorisation d’exploiter n’a pas vocation à sanctionner les effets de l’activité de cette installation puisque leur contrôle relève de la seule autorisation d’exploiter (CE. 10 octobre 1994, Sté Euroliants, req. n°111.167 ; CE. 15 février 2007, Cne de Fos-sur-Mer, req. n°294.852).
Il s’ensuit donc que, pour l’essentiel, l’étude d’impact à produire au dossier de demande de permis de construire fournit à l’autorité compétente pour statuer sur cette demande des renseignements ayant trait à des aspects du projet qu’une telle autorisation n’a pas vocation à sanctionner.
Sans conclure au caractère totalement superfétatoire de ce document dans le cadre de l’instruction d’une demande de permis de construire se rapportant à une installation classée, il nous semble néanmoins que plutôt que de sanctionner systématiquement les vices substantielles affectant l’étude d’impact par l’annulation du permis de construire, le juge devrait considérer que les éventuelles carences d’une étude d’impact ayant trait à des aspects du projet saisis par l’autorisation d’exploiter ne saurait avoir aucun effet sur la légalité d’un permis de construire dès lors qu’elles n’ont pu avoir aucune incidence sur l’appréciation que les services instructeurs ont pu faire de la conformité du projet au regard des normes qu’un tel permis a vocation à sanctionner.
Patrick E. DURAND
Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
Cabinet FRÊCHE & Associés
Commentaires
(re)bonjour Patrick,
l'unification attendue et annoncée des EI à l'occasion du décret Grenelle2 devrait rendre sans objet la dernière partie de votre raisonnement ;-)) !!!
la France semble en effet enfin décidée à mettre en oeuvre les obligations réglementaires prévues par les directives EI et ESE qui imposent cette unicité du document.
C'en serait donc fini des EI faisant abstraction des conditions de remise en état comme de celles reportant à des études ultérieures à produire à l'occasion de l'instruction d'une IOTA à venir les effets du projets sur les milieux hydrologiques.Très accessoirement, ce manquement dans la transcription des directives peut évidemment être soulevé à l'appui de recours à) l'encontre d'actes pris sur le fondement d'EI manifestement incomplètes, quand bien même ledit décret -dont le projet circule sur la toile- ne serait pas encore publié.
cela n'enlève rien évidemment à l'intérêt de l'arrêt commenté quant à la lecture "intelligente" que le juge fait de la liste des pièces à produire quand elles ont déjà été produites.
Très bien. Mais admettons que le pétitionnaire ait bientôt à produire à son dossier de demande de permis de construire une étude d'impact exposant les conditions de remises en état du site. En quoi un carrence éventuelle de l'étude sur ce point pourrait-elle avoir une quelconque influence sur l'appréciation que les services instructeurs font de la conformité du projet au regard des normes qu'un permis de construire vient sanctionner ?
l'effet irreversible de la construction elle-même sur l'environnement, si l'on ne prévoit pas la remise en état même en l'absence d'exploitation effective, me semble assez prégnant...
prenons un exemple facile -et au contentieux abondant- : la STEP du commune moyenne -je ne parle pas ici des banlieues qui vous sont chères mais d'une installation de petite taille pour 10000eqH et moins... En général installée a proximité des cours d'eau où elle rejettera les effluents après traitement, sa seule construction -en dehors de toute exploitation- entraîne, dans 80% des cas, des destructions notables de zones humides, frayères, forêts alluviales... et autres biotopes fragiles.
L'insuffisance de l'étude d'impact en matière de mesures de réduction à la source des risques environnementaux, des compensation des atteintes et de remise en état en fin de vie me semble parfaitement justifier un refus de PC...
Ou alors il faut renforcer le fait que les travaux de construction ne sauraient démarrer avant délivrance d'une autorisation nécessaire relevant d'une législation distincte (IOTA, ICPE, défrichement, ...) etc... ce qui portera atteinte à votre "sacro-sainte" indépendance des législations...
Que vous répondre Emmanuel ?
En l'état du droit, ce qui vous "semble justifier un refus de PC" ne l'est pas ...
Après ça je n'ai pas d'actions dans le principe d'indépendance des législations ; je me contente de l'appliquer... pour ce qu'il me sert.
Mais nous allons je pense lentement mais surement vers une fusion des procédures et un principe d'autorisation unique, ce qui ne me posera aucun problème lorsque celà aura été décidé. J'espère juste que sa délivrance relevera des Préfet et non pas des Mairies dont les décisions, les refus de PC, me paraissent souvent bien éloignées du droit et des préoccupations environnementales qui vous animent...
évidemment 4000% d'accord avec vous...
mais cette petite pique sur l'indépendance visait directement le communautariste que vous êtes, car les directives EI et ESE ne connaissent pas cette construction prétorienne très gauloise...et l'état actuel du droit français n'est pas seulement ce qui figure dans nos codes mais également ce que prévoient les textes de l'UE qui s'imposent aux autorités administratives et aux juges, quand bien même les requérants en font un usage bien trop... modéré ;-) !!
Communautariste que je FUS (vous vouliez dire "droit national" et non pas droit français : l'applicabilité directe n'a pas encore atteint le principe d'autonomie institutionelle ... manifestement je le suis encore assez pour être de la plus parfaite mauvaise foi...)
C'est vrai que c'est super le droit commautaire et qu'il nous apporte une vraie plus-value : comment a-t-on fait pour vivre sans l'avis de l'autorité environnementale ?
J'ai eu un permis de construire ICPE suspendu pour défaut de cet avis alors que la demane d'autorisation d'exploiter avait été présentée et obtenue avant l'entrée en vigueur du décret du 30 avril 2009. Encore une merveille...
ouaip, n'importe quoi...
les vices de procédures ne font grandir personne ! ... mais la lecture des avis de l'AE est très vivifiante quand même :-))
quel dommage que le administratif juges s'en saisissent avec une telle délectation, se réfugiant trop souvent derrière l'économie de moyen pour ne pas juger... au fond.
au fait, je savais bien que j'avais vu passer quelquechose quant à l'effet de l'insuffisance d'une EI présentée dans un PC : dans le blog d'A.Gossement, on trouve une analyse de l'arrêt de la Cour Administrative d'Appel de Bordeaux, 6ème chambre (formation à 3), 30/07/2010, 09BX02233, Inédit au recueil Lebon.
le juge y confirme, certes partiellement, l'annulation d'un PC pour insuffisance de l'EI...
http://www.arnaudgossement.com/archive/2010/08/17/eoliennes-precisions-sur-la-recevabilite-du-recours-et-le-ca.html
pouf pouf...
et voici, au hasard de mes pérégrinations, un autre arrêt annulant un PC pour insuffisance de l'EI... rendu par la même CAA de Douai et ne contredisant pas celui commenté ici : Cour administrative d'appel de Douai, 1re chambre - formation à 3, 22/01/2009, 08DA00372
;-))
Mais Emmanuel, je n'ai jamais dis qu'un permis de construire ne pouvait pas ou ne devait pas être annulé en raison de l'insuffisance de l'étude d'impact, quelle qu'elle soit !!!
Je m'interroge sur le cas où cette insuffisance a trait à un aspect du projet n'étant pas saisi par le permis de construire au titre de l'article L.421-6.
Or, l'arrêt que tu cites n'apporte pas grand chose (et toc !:))) dans la mesure où "l'insuffisance" en cause a trait à l'impact des éoliennes sur leur environnement visuel, soit sur un aspect du projet relevant de l'article R.111-21.
tous les aspects du PC ont rapport alors avec le R111-....15 !
hihi.
L'article R.111-5 qui en la matière s'arrête là où commence l'autorisation d"exploiter...
ah bon, où ça donc ? et à quel titre ?
l'un ressort de la police du maire au titre de l'urbanisme, l'autre de celle du préfet au titre de l'ICPE...et alors ?
ben ça sort du truc que t'adores, qu'on appelle l'indépendance des législations et dont il résulte qu'à l'égard d'une ICPE les articles R.111-2 et R.111-14-2 (aujourd'hui 111-15) ne s'interressent pas à l'activité de l'installation (CE. 10 octobre 1994, Sté Euroliants, req. n°111.167 ; CE. 15 février 2007, Cne de Fos-sur-Mer, req. n°294.852; CAA. Nancy, 20 novembre 1997, Denis X., req. n°94NC00651, etc, ect...).
A mais non non non...
Les R111-2 et suivants du code de l'U ne concernent pas l'instruction de l'ICPE mais peuvent parfaitement être opposés lors de l'instruction du PC !
YJégouzo soulignait d'ailleurs dans un article des AJDA (AJDA 2007 p. 249
Les opérations soumises à une autorisation prévue par une législation étrangère à l'urbanisme) le risque de voir "les administrations prendre des décisions contradictoires ; un pétitionnaire peut ainsi obtenir un permis de construire puis se voir refuser l'autorisation requise au titre d'une législation voisine ".
La réforme des ADS de 2007 tend à éviter ces situations en articulant mieux les autorisations mais l'indépendance des législations, qui cette fois sert mon raisonnement, reste entière sur ce point comme tu le proposes.... malheureusement.
Oui R.111-2 est opposable à un PC "ICPE" mais pour ce qui concerne la construction elle-meme et "non les activités qui y sont exploitées, lesquelles relèvent d'une législation distincte" (CE. 10 octobre 1994, Sté Euroliants, req. n°111.167). D'où le risque évoqué par Jégouzo. Et la réforme de 2007 ne change rien: je dois attendre mon autorisation d'exploiter pour engager mes travaux même si j'ai obtenu mon PC avant mais l'illégalité et l'annulation de mon AE n'affectera en rien la légalité de mon PC.
un arrêt "amusant" en passant, se fondant bizarrement sur le L123-1 C.Env et ... la divisibilité du PC reconnue dans l'arrêt Ville de Grenoble... pour justifier la divisibilité de l'enquête publique !
L'arrêt Ville de Grenoble (CE, sect., 17 juill. 2009, n° 301615, Cne Grenoble et Cté agglo. Grenoble Alpes Métropole) rendu en matière d'urbanisme conclut à la divisibilité de l'autorisation d'urbanisme dès lors que le projet a pu être apprécié dans sa globalité par l'administration...
Dans un dossier on ne peut plus proche et se fondant sur cette approche, la Cour d'appel de Lyon rend un arrêt concluant que, dès lors, l'enquête publique préalable au PC peut ne concerner qu'une partie du dossier : COUR ADMINISTRATIVE D'APPEL DE LYON, 12/07/2010, 09LY01860.
"Considérant, en quatrième lieu, que l'enquête publique était préalable à la délivrance à la communauté d'agglomération du permis de construire un stade et non à celle du permis de construire un parking public réalisé par la commune sous celui-ci ; que dès lors, l'appréciation sommaire des dépenses prévues par l'article 6 du décret du 23 avril 1985 n'avait pas à inclure les coûts de réalisation du parking alors même que les deux projets étaient techniquement liés ; "
Une telle approche me semble parfaitement incompatible avec les règles européennes d'organisation de la participation du public aux décisions de l'administration et au principe d'unicité des études d'impact ... et des documents présentés lors de l'enquête publique.
Les décrets à venir sur l'étude d'impact et l'enquête publique post-grenelle viendront, sans aucun doute, interdire ce type de procédé... qui serait donc d'ores et déjà irrégulier depuis le jour où la France devait transcrire les directives afférentes en droit interne, ce qu'elle n'a pas suffisamment fait actuellement.