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  • C’est au propriétaire de l’immeuble à vendre et non pas au bénéficiaire de la promesse de vente s’y rapportant d’obtenir l’autorisation de construire une piscine constituant la condition suspensive de ladite promesse

    Il résulte de l’article R.422-3 du Code de l’urbanisme que lorsqu’une promesse de vente est conclue sous condition suspensive d’obtention de l’autorisation d’urbanisme nécessaire à la réalisation d’un ouvrage assujetti à déclaration de travaux, c’est au propriétaire de l’immeuble à vendre qu’il incombe de formuler cette déclaration et non pas au bénéficiaire de cette promesse.

    Cass. civ. 3e, 27 septembre 2006, Epx X., pourvoi n°05-15.433


    Bien que l’affaire en cause ne constitue pas un litige d’urbanisme, l’arrêt de la Cour de cassation apporte une précision importante sur le champ d’application de l’article R.422-3 du Code de l’urbanisme relatif aux personnes habilitées à présenter une déclaration de travaux.

    Dans cette affaire, les époux X avaient conclu avec les époux Y une promesse synallagmatique de vente un ensemble immobilier composé d’un terrain et d’un immeuble, laquelle avait été conclue sous la condition suspensive d’obtention d’une autorisation de construire une piscine non couverte dont on rappellera qu’elle constitue un ouvrage exempté de permis de construire mais assujetti à déclaration de travaux en application de l’article R.422-2-k) du Code de l’urbanisme.

    Mais faute d’obtention d’une telle autorisation à l’expiration du délai de validité de la promesse de vente précédemment conclue, les époux Y devaient solliciter des époux X la restitution de leur dépôt de garantie puis, face à leur refus, les assigner à cet effet.

    La question ainsi posée était donc de savoir s’il incombait aux vendeurs ou aux acquéreurs de formuler la déclaration de travaux en cause et, par voie de conséquence, qui était responsable de l’absence de levée de la condition suspensive nécessaire à la réalisation de la vente projetée. Et à ce sujet, la Cour de cassation a donc jugé que :

    « Attendu que pour accueillir la demande, l'arrêt retient que l'article R. 422-3 du code de l'urbanisme énonce qu'une déclaration de travaux est présentée par le propriétaire du terrain, son mandataire ou la personne ayant qualité pour exécuter les travaux ; qu'il ne saurait être contesté qu'à la date de la promesse synallagmatique de vente, les époux X... étaient toujours propriétaires de "l'ensemble immobilier" à vendre et que c'était donc à eux de déposer la déclaration de travaux en mairie et qu'ils en avaient tellement conscience que M. X... s'en était préoccupé, trop tardivement du fait que la promesse synallagmatique était caduque depuis la veille ».

    A suivre l’arrêt commenté, une promesse de vente ne confère donc pas à son bénéficiaire la qualité requise pour présenter une déclaration de travaux. On sait, pourtant, qu’il est de jurisprudence constante qu’une telle promesse constitue pour son titulaire un titre l’habilitant à présenter un permis de construire sur l’immeuble à vendre.

    Il reste que cette solution procède de l’article R.421-1-1 du Code de l’urbanisme en ce qu’il dispose que « la demande de permis de construire est présentée soit par le propriétaire du terrain ou son mandataire, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain » alors que, pour sa part, l’article R.422-3 du Code de l’urbanisme précise que « une déclaration de travaux est présentée par le propriétaire du terrain, son mandataire ou la personne ayant qualité pour exécuter les travaux ». D’ailleurs, si à notre connaissance, le juge administratif ne s’est jamais expressément prononcé sur cette question, certains arrêts des Cours administratives d’appel induisent, mais très indirectement, qu’une simple promesse de vente ne suffit pas et que le bénéficiaire de cette dernière ne peut régulièrement formuler une déclaration de travaux sur l’immeuble à vendre sans y avoir été expressément autorisé par son propriétaire (CAA. Paris, 20 janvier 2000, M. Griève, req. n°98PA02743).

    En résumé, il résulte de l'arrêt commenté que si le bénéficiaire d’une promesse de ventre dispose en cette qualité d’un titre l’habilitant à construire l’autorisant à présenter une demande de permis de construire, cette même promesse ne lui confère pas un titre l’habilitant à exécuter les travaux et à formuler la déclaration s’y rapportant : en la matière, qui peut le plus ne peut donc pas le moins…

    On précisera, toutefois, que l'interprétation de la Cour de cassation ne lie évidemment pas le juge administratif sur ce point, lequel fait, pour sa part, souvent preuve de pragmatisme. A titre d'exemple, alors que l'article R.130-2 du Code de l'urbanisme dispose que la demande d'autorisation de coupe d'arbres est présentée soit par le propriétaire du terrain, soit par une personne ayant la qualité pour bénéficier de son expropriation, le Conseil d'Etat a admis qu'une telle demande pouvot être régulièrement présentée par le titulaire d'une promesse de vente (CE. 25 mars 1994, Stern, BJDU, n°3/1994, p.92)



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au Barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés

  • Le maire ne peut légalement user de ses pouvoirs de police spéciale relative à la sécurité dans les ERP pour répondre à une préoccupation d’urbanisme

    Un maire qui utilise les pouvoirs de police spéciale qui lui sont conférés pour assurer la sécurité dans les établissements recevant du public (ERP) pour ordonner la fermeture d’un tel établissement en considération d’une préoccupation relevant de la législation d’urbanisme entache sa décision d’un détournement de procédure.

    TA. Versailles, 20 octobre 2006, SCI L’Orée du Parc, req. n°05-02149


    Dans cette affaire, le maire de la commune défenderesse avait usé des pouvoirs de police spéciale qu’il tient de l’articles R.123-52 du Code de la construction et de l’habitation pour ordonner la cessation d’une activité de restauration dans un ERP développant également une activité de centre aéré et, en d’autres termes, ordonner la fermeture partielle de cet établissement.

    En apparence, cette mesure de police fondée sur les dispositions du Code de la construction et de l’habitation relatives à la sécurité dans les ERP était motivée par le fait que l’activité de restauration litigieuse amenait cet établissement à recevoir plus de personnes que le nombre de celles auquel il avait été autorisé au titre de ses activités de centre aéré.

    Il reste qu’il ressortait de l’arrêté ordonnant cette fermeture ainsi que des autres pièces du dossier que le maire reprochait, en réalité, à l’exploitant de cet établissement, d’une part, d’avoir exécuté des travaux modifiant la destination de ce dernier sans avoir préalablement obtenu un permis de construire pour ainsi, d’autre part et surtout, développer dans la zone où cet établissement était sis une activité interdite par le POS communal. En substance, le motif réel de sa décision procédait donc d’une préoccupation relevant de la législation et de la police d’urbanisme.

    Dans un premier temps, l’exploitant saisit le juge des référés du Tribunal administratif de Versailles, lequel devait rejeter sa requête pour défaut d’urgence ou, plus précisément, au motif que l’irrégularité de la situation dans laquelle il s’était placé de lui-même en exécutant sans autorisation des travaux assujettis à permis de construire lui interdisait d’invoquer une quelconque urgence à suspendre la décision contestée (TA. Versailles, 8 avril 2005, SCI l’Orée du Parc05-01996).

    Il est ainsi intéressant de noter que cette appréciation fut ultérieurement censurée par le Conseil d’Etat qui, pour sa part, considéra qu’à « supposer même que la société et la commune se seraient placées dans une situation irrégulière en ne demandant pas de permis de construire, cet arrêté porte aux intérêts de la société L'Orée du Parc une atteinte suffisamment grave et immédiate pour estimer remplie la condition d'urgence posée par l'article L. 521-1 du code de justice administrative » et ordonna la suspension de l’arrêté litigieux en jugeant qu’il existait un doute sérieux sur sa légalité externe (CE. 5 décembre 2005, SCI l’Orée du Parc, req. n°280.070).

    Mais le juge du fond du Tribunal administratif de Versailles devait aller plus loin encore en considérant que non seulement le motif fondé sur la prétendue méconnaissance des règles de sécurité opposables aux ERP n’était pas établi mais qu’en outre et par voie de conséquence, en usant des pouvoirs de police spéciale qu’il tient du Code de la construction et de l’habitation pour assurer la sécurité dans les ERP dans un but relevant de la législation d’urbanisme, le maire de la commune défenderesse avait entaché sa décision d’illégalité interne et en l’occurrence, d’un détournement de procédure :

    "Considérant que si le maire de Choisel soutient que la décision a été prise afin de faire respecter les règles de sécurité opposables aux établissements recevant du public, il ressort cependant des pièces du dossier et, en particulier, des correspondances échangées entre les parties que le véritable motif de l’arrêté est le refus de la commune de Choisel de voir s’implanter une activité principalement commerciale dans une zone protége et la volonté de faire respecter dans cette zone la réglementation d’urbanisme locale ; que par suite, en utilisant une procédure visant à garantir le respect des règles de sécurité prévues au code de la construction et de l’habitation pour assurer le respect des dispositions du code de l’urbanisme, le maire de Choisel a bien commis un détournement de procédure"

    Il faut, en effet, rappeler que s’il s’agit de matières connexes, la réglementation de sécurité des ERP et la réglementation d’urbanisme n’en sont pas moins des législations distinctes et indépendantes. Il s’ensuit que, par principe, une préoccupation relevant de la police des ERP ne peut justifier une mesure de police d’urbanisme et qu’à l’inverse, une préoccupation d’urbanisme ne peut justifier une mesure de police fondée sur la réglementation de sécurité des ERP.

    Or, ce principe, ne connaît qu’une seule exception, en l’occurrence prévue par l‘article L.421-3 du Code de l’urbanisme en vertu duquel le permis de construire a vocation à sanctionner les règles de sécurité des ERP à travers l’avis émis par la commission départementale de sécurité dont l’avis est requis, pour les établissements autres que de cinquième catégorie, par l’article R.421-53 du Code de l’urbanisme (cf : note du 10 août 2006 ; sur sa consultation au titre de l'accessibilité, voir ici), lequel vaut alors autorisation au titre de l’article R.123-22 du Code de la construction et de l’habitation.

    Par voie de conséquence, le maire de la commune défenderesse ne pouvait donc pas utiliser les pouvoirs de police spéciale relative à la sécurité des ERP pour sanctionner des faits qui, à les supposer établis, n’auraient pu justifier qu’une mesure d’interruption des travaux édictée sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme. Il reste qu’une telle mesure n’est légale que pour autant qu’elle soit édictée lorsque les travaux sont en cours, ce qui n’était pas le cas en l’espèce puisque les travaux litigieux étaient déjà achevés au moment où le maire avait édicté la décision litigieuse.



    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés