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Installations & travaux divers

  • Du permis de construire valant « ITD » au permis d’aménager valant permis de construire : la vraie fausse nouveauté de la réforme des autorisations d’urbanisme

    Dès lors qu’un projet d’aménagement inclut, même à titre accessoire, une construction assujettie à permis de construire, le projet doit relever dans son ensemble d’un permis de construire et non pas d’une autorisation « ITD ». Mais à compter du 1er octobre 2007, ce même projet pourra relever d’un permis d’aménager valant permis de construire.

    TA. Nice 16 mai 2007, Mme Abonal, req. n°04-02718 (mentionné dans la lettre_n5.pdf du TA de Nice)


    A l’heure où l’autorisation dite « ITD » vit ses derniers jours, on relèvera avec intérêt ce jugement du Tribunal administratif de Nice en ce qu’il illustre le régime particulier de cette autorisation et, surtout, permet d’appréhender la question des fusions d’autorisations d’urbanisme sur laquelle les auteurs de la réforme entrant en vigueur le 1er octobre 2007 ont beaucoup communiqué alors que non seulement il ne s’agit pas d’une réelle nouveauté et qu’en outre, les cas de fusions prévus par cette réforme sont pour le moins limités.

    Dans cette affaire, un opérateur projetait d’aménager un parc d’attraction et avait obtenu à cet effet une autorisation « ITD » délivrée sur le fondement de l’article R.442-2 du Code de l’urbanisme puisque son point a) assujetti à cette autorisation « les parcs d'attractions et les aires de jeux et de sports, dès lors qu'ils sont ouverts au public ». Il reste que ce projet incluait la réalisation d’un local constitutif d’une construction relevant du champ d’application du permis de construire puisque développant une SHON de 24 mètres carrés.

    Or, le permis de construire a un effet « attracteur » et « absorbant » dans la mesure où dès lors que l’une des composantes d’un projet relève du champ d’application de cette autorisation, celle-ci doit être obtenue pour l’ensemble du projet (voir également, ici). Et pour sa part l’autorisation « ITD » a un caractère subsidiaire, c’est-à-dire qu’elle n’est requise que pour autant que l’aménagement relevant de l’article R.422-2 du Code de l’urbanisme ne soit pas l’une des composantes d’un projet relevant, notamment, du champ d’application du permis de construire ou de la déclaration de travaux. En outre, les dispositions de l’article R.442-2 du Code de l’urbanisme doivent être interprétées de façon stricte puisque si ces dernières assujettissent à autorisation « ITD », d’une part, les aires de stationnement de plus de dix unités ouvertes au public et, d’autre part, les affouillements du sol d’une profondeur de plus de deux mètres et d’une superficie de plus de 100 mètres carrés, il a néanmoins été jugé qu’un parc de stationnement souterrain constituait une construction assujettie à permis de construire et ne pouvait donc pas relever d’une autorisation « ITD » (CAA. Bordeaux, 14 décembre 1999, Epx Mercier, req. n°96BX01480) ; l’exigibilité d’un permis de construire étant indépendant de toute considération liée au caractère enterré ou non de la construction projetée.

    C’est donc fort logiquement que dans cette affaire, le Tribunal administratif de Nice a jugé que dès lors que le parc d’attraction en cause comportait une construction relevant du champ d’application du permis de construire, ce projet ne pouvait relevait d’une simple autorisation « ITD » mais impliquait, pour son ensemble, l’obtention du permis de construire valant autorisation « ITD » en application de l’article R.442-3 du Code de l’urbanisme.

    Mais pour les projets faisant l’objet d’une demande d’autorisation présentée après le 1er octobre 2007, cette jurisprudence et la règle qu’elle illustre seront obsolètes, d’une part, parce que la réforme des autorisations d’urbanisme entrant en vigueur à cette date supprime l’autorisation « ITD », laquelle se trouve absorber par les autorisations nouvelles que sont le permis d’aménager et la déclaration d’aménagement et, d’autre part, parce que dans certains cas, c’est le permis d’aménager qui pourra valoir permis de construire dès lors que le nouvel article L.442-1 du Code de l’urbanisme précise que « lorsque les travaux d'aménagement impliquent, de façon accessoire, la réalisation par l'aménageur de constructions et d'installations diverses sur le terrain aménagé, la demande de permis d'aménager peut porter à la fois sur l'aménagement du terrain et sur le projet de construction ».

    De ce fait, lorsqu’un parc d’attraction sera soumis à permis d’aménager au titre du nouvel article R.421-19, h) du Code de l’urbanisme, celui-ci pourra également valoir permis de construire pour les constructions accessoires qu’implique également ce projet et, par exemple, pour son bâtiment d’accueil ou ses locaux techniques.

    On soulignera, en effet, que cette possibilité de fusion d’autorisation ne vaut que lorsque la construction considérée présente un caractère accessoire par rapport à l’économie générale du projet d’aménagement en cause. A titre d’exemple, si elle semble également pourvoir être mise en œuvre pour construire les locaux sanitaires d’un camping de plus de six tentes ou les locaux techniques d’un golf de plus de vingt-cinq hectares, elle ne saurait en revanche permettre de réaliser tout à la fois un lotissement et les bâtiments pour l’implantation desquels les divisions constitutives de ce dernier sont pratiquées.

    Mais on relèvera, surtout, qu’alors qu’il s’agissait d’un des aspects annoncés de la réforme les plus attendus par les constructeurs, les cas de fusions d’autorisations d’urbanisme sont pour le moins limités puisqu’outre la possibilité offerte pas l’article L.442-1 du Code de l’urbanisme, les seules autres hypothèses prévues sont celles saisies par les articles les nouveaux articles L.441-1 et L.451-1 du Code de l’urbanisme, lesquels en ce qu’il disposent respectivement que :


    « lorsque les travaux d'aménagement impliquent la démolition de constructions dans un secteur où un permis de démolir est obligatoire, la demande de permis d'aménager peut porter à la fois sur l'aménagement du terrain et sur le projet de démolition »;

    et :

    « lorsque la démolition est nécessaire à une opération de construction ou d'aménagement, la demande de permis de construire ou d'aménager peut porter à la fois sur la démolition et sur la construction ou l'aménagement. Dans ce cas, le permis de construire ou le permis d'aménager autorise la démolition »;


    permettront donc qu’un permis d’aménager et/ou un permis de construire valent également permis de démolir…

    Mais outre le nombre très limité de cas de fusion d’autorisations d’urbanisme, il est permis de se demander si, dans certains cas, il n’y aurait pas lieu d’obtenir deux autorisations là ou antérieurement il n’en fallait qu’une. A titre d’exemple, en effet, le champ d’application du permis d’aménager et celui de la déclaration d’aménagement (art. R.421-19 à R.421-23 ; C.urb) recouvre certains travaux, installations et aménagements qui antérieurement relevaient de l’autorisation dite « ITD ». Or, seuls l’alinéa k du nouvel article R.421-19 du Code de l’urbanisme et l’alinéa f du nouvel article R.421-23 prévoient expressément que les travaux qu’ils visent – en l’occurrence certains travaux d’affouillement et d’exhaussement du sol – relèvent de ces procédures « à moins qu’ils ne soient nécessaires à l’exécution d’un permis de construire ».

    Or, si la dispense expressément prévue pour certains travaux d’affouillement et d’exhaussement du sol ne l’est pas pour l’ensemble des autres travaux, installations et aménagements visés par les nouveaux articles R.421-19 et R.421-23 du code de l’urbanisme, force serait d’en conclure que ceux-ci sont soumis à permis d’aménager ou à déclaration d’aménagement même s’ils sont nécessaires à l’exécution d’un permis de construire.

    A s’en tenir la lettre de des articles précités, il s’ensuivrait, à titre d’exemple, que pour la réalisation d’un ensemble immobilier à destination de logements pourvu d’un parc de stationnement de plus de cinquante unités ouvert au public, il faudrait obtenir, d’une part, un permis de construire et, d’autre part, un permis d’aménager puisque bien entendu cette opération ne pourra pas relever d’un permis d’aménager usant de la faculté prévue par le nouvel article L.442-1 du code de l’urbanisme dès lors que les logements ne saurait être considérés comme l’accessoire du parc de stationnement à aménager ; ce qui paraît totalement compatible avec le principe issu de l’ancien article L.421-3,al 1 du code de l’urbanisme – reproduit au nouvel article L.421-6 – selon lequel l’administration doit être en mesure de se prononcer sur la consistante exacte et complète du projet, ce qui implique que la demande et le dossier de permis de construire portent non seulement sur les constructions rendant exigibles un permis de construire mais également sur les aménagements accessoires qui en sont indissociables, notamment, parce qu’il sont nécessaires à la conformité du programme au regard des prescriptions d’urbanisme qui lui sont opposables. On peut donc parier que la jurisprudence nuancera substantiellement la conclusion s’imposant à la lecture des articles relatifs au champ d’application du permis d’aménager et de la déclaration d’aménagement.

    Mais à notre sens, la plus significative des fusions d’autorisations opérées par la réforme n’est pas prévue comme telle par cette dernière et procède du nouvel article R.431-24 du Code de l’urbanisme et, en d‘autres termes, du nouveau régime du permis de construire valant division, lequel, en ce qu’il permet, d’une part, l’obtention d’un permis de construire valant division conjoint (CE. 4 mai 1983, Chapel, req. n°33.620) et s’applique, d’autre part, aux divisions réalisées avant l’achèvement des travaux (CE. 21 août 1996, Ville de Toulouse, req. n°137.834 ; CE. 26 mars 2003, Leclercq, req. n°231.425), fusionne l’ancienne autorisation de lotir et les permis de construire dans un lotissement ; ce que corrobore le fait que contrairement à l’ancien article R.315-2 du Code de l’urbanisme, le nouvel article R.442-1 du Code de l’urbanisme exclut expressément de la notion de lotissement « les divisions de terrains effectuées conformément à un permis de construire prévu à l'article R. 431-24 ».


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • La réalisation d’un parc de stationnement de plus de dix unités ouvert au public est assujettie à autorisation « ITD » et non pas à simple déclaration de travaux même si elle intervient en conséquence de l’annulation d’un précédent permis de construire

    Dès lors qu’un parc de stationnement de plus de dix unités a vocation à être ouvert au public, il relève du champ d’application matériel de l’autorisation « ITD ». Par suite, sa réalisation ne peut faire l’objet d’une simple déclaration de travaux même si elle intervient en conséquence de l’annulation d’un précédent permis de construire.

    CAA. Nancy, 28 septembre 2006, Mme Françoise A, req. n°04NC00175


    Dans cette affaire, un premier permis de construire avait été annulé. En conséquence, le constructeur, en l’occurrence une association cultuelle, avait semble-t-il entendu régulariser la construction ainsi édifiée, du moins au regard de la réglementation de sécurité sur les Etablissements Recevant du Public (ERP), par l’aménagement d’une aire de parking susceptible de recevoir quarante véhicules. Mais pour ce faire, il s’était borné à formuler une simple déclaration de travaux à laquelle le maire ne s’était pas opposée.

    Cette décision de non opposition devait toutefois être déférée par des riverains à la censure du Tribunal administratif de Strasbourg, lequel rejeta toutefois leur requête. Saisie en appel, la Cour administrative d’appel de Nancy devait, en revanche, faire droit à la demande d’annulation de la décision contestée et ce, au motif suivant :

    « Considérant qu'aux termes de l'article R. 442-2 du code de l'urbanisme : « Dans les communes ou parties de communes mentionnées à l'article R. 442-1 est subordonnée à l'obtention d'une autorisation préalable délivrée au nom de l'Etat la réalisation d'installations ou de travaux dans les cas ci-après énumérés lorsque l'occupation ou l'utilisation du terrain doit se poursuivre durant plus de trois mois : b) Les aires de stationnement ouvertes au public et les dépôts de véhicules lorsqu'ils sont susceptibles de contenir au moins dix unités ; c) Les affouillements du sol, à la condition que leur superficie soit supérieure à 100 mètres carrés et que leur profondeur, dans le cas d'un affouillement, excède deux mètres » ; qu'aux termes de l'article R. 442-6 du même code : « L'autorisation (prévue à l'article R. 442-2) peut être refusée ou subordonnée à l'observation de prescriptions spéciales si les installations ou travaux, par leur situation, leur nature ou leur aspect, sont de nature à porter atteinte à la salubrité, à la sécurité ou à la tranquillité publique » ;
    Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que l'arrêté du maire de Kuttolsheim en date du 28 juin 1999 a porté non opposition à la déclaration de travaux présentée par l'association Sakia Tsechen Ling en vue d'aménager un parking destiné à accueillir une quarantaine de véhicules qu'elle avait l'obligation de réaliser à la suite de l'annulation d'un permis de construire délivré le 20 juillet 1994 ; qu'eu égard à la fréquentation de locaux de l'association qui abrite une activité cultuelle ouverte au public, ledit parking doit être regardé comme constituant un parking public ; que, dès lors, ledit aménagement, qui ne portait pas sur des travaux exemptés de permis de construire, était soumis à la procédure d'autorisation prévue par les dispositions sus-rappelées du code de l'urbanisme ; qu'il s'ensuit que l'arrêté attaqué du maire de Kuttolsheim qui a statué sur la demande de l'association en se fondant sur les dispositions des articles L. 422-1 et R. 422-1 du code de l'urbanisme relatives à la déclaration de travaux exemptés de permis de construire, est entaché d'erreur de droit
    ».

    La Cour administrative d’appel de Nancy a donc annulé la décision contestée au motif que le parc de stationnement projeté ne relevait pas du champ d’application de la déclaration de travaux exempté de permis de construire mais de l’autorisation d’installation et de travaux divers, dite autorisation « ITD », dès lors qu’il était susceptible d’accueillir plus de dix véhicules et devait être considéré comme ouvert au public.

    Tout d’abord, on peut relever que l’association défenderesse soutenait que les travaux projetés relevaient du champ d’application de la déclaration de travaux dès lors que le parc de stationnement à aménager était d’usage privatif et qu’en toute hypothèse, la qualification erronée de la décision contestée ne constituait pas un vice de forme ou de procédure substantiel.

    Un tel argument était doublement inopérant et pour partie contradictoire dès lors qu’une aire de stationnement ne relève jamais du régime déclaratif prévu par l’article L.422-1 du Code de l’urbanisme. De deux choses l’une, en effet :

    - soit, le parc de stationnement est enterré et il est alors soumis à permis de construire qu’elle que soit sa destination et le nombre de places à aménager (CE. 26 octobre 1992, Giovanolla, Dr.adm., comm. n°555) sans qu’il soit utile de soutenir qu’il relève du champ d’application de l’autorisation « ITD » (CAA. Bordeaux, 14 décembre 1999, Epx Mercier, req. n°96BX01480) dans la mesure où il s’analyserait, d’une part, comme des travaux affouillement (art. R.442-2-c) ; C.urb) combinés, d’autre part, à des travaux d’aménagement d’aires de dépôt de véhicules (art. R.442-2-b) ; C.urb) ;
    - soit, ce parc est en plein aire et il sera soumis à autorisation « ITD » s’il est ouvert au public et s’il est susceptible d’accueillir plus de dix véhicules (CE. 25 novembre 1988, SARL La Flèche, req. n°72.945).

    Il s’ensuit qu’une aire de stationnement privative et/ou de moins de dix véhicules n’est soumis à aucune forme d’autorisation (CE. 11 mars 1970, Fayaubot, Rec., p.175) et, en toute état de cause, ne relève pas du champ d’application de la déclaration de travaux exemptés de permis de construire.

    Il reste que lorsque ces travaux sont soumis à autorisation « ITD » la formulation d’une simple déclaration de travaux ne peut suffire. Il faut, en effet, rappeler que le régime déclaratif institué par l’article L.422-1 du Code de l’urbanisme est conçue comme une forme d’exception au principe d’autorisation préalable gouvernant la réalisation de tout travaux de construction ou d’aménagement.

    Telle étant la raison pour laquelle le juge considère qu’un permis de construire délivré alors le projet était soumis à simple déclaration est sans incidence sur sa légalité (CAA. Marseille, 15 octobre 1998, SCI Les Oliviers, req. n°96MA01587) mais qu’en revanche, une décision de non opposition à déclaration est illégale lorsque le projet était assujetti à permis de construire (CAA. Marseille, 29 octobre 1998, M. Clerc, req. n°96MA11731). Et ce principe trouve donc à s’appliquer en matière d’autorisation « ITD » qui, rappelons-le, est une autorisation préalable dont le champ d’application et le régime sont fondamentalement distincts de ceux du permis de construire et de la déclaration de travaux, lesquels sont en revanche connexes.

    Ensuite, il convient de rappeler que l’article R.422-2-c) du Code de l’urbanisme assujettit à autorisation « ITD », lorsqu’elles comprennent plus de dix unités, non pas seulement les aires de stationnement publiques – c’est-à-dire celles appartenant à une personne publique – mais, plus généralement, celles « ouvertes au public ».

    Or, au cas présent, le parc de stationnement projeté était affecté à des locaux accueillant une activité cultuelle ouverte au public, ce dont la Cour administrative d’appel de Nancy a déduit qu’il constituait un parc également ouvert au public.

    On peut, d’ailleurs, rappeler qu’un lieux de culte ouvert au public constitue un ERP de type V au sens du Code de la construction et de l’habitation dont le régime juridique s’applique à l’ensemble de l’établissement considéré ainsi qu’à ses dépendances et à ses annexes (à propos, d’un parc de stationnement : TA. Caen, 19 décembre 1974, Association de défense des riverains du parking de la place de la république, Rec., p.782).

    Enfin et plus spécifiquement, il faut souligner que l’arrêt commenté relève que les travaux projetés visaient à « aménager un parking destiné à accueillir une quarantaine de véhicules qu'elle avait l'obligation de réaliser à la suite de l'annulation d'un permis de construire délivré le 20 juillet 1994 ».

    A priori, la démarche de l’association tendait à régulariser la construction objet du permis de construire précédemment annulé au regard de la réglementation de sécurité applicables aux ERP. On rappellera, en effet, qu’en la matière, le permis de construire vaut également autorisation au titre de cette réglementation, laquelle procède de l’avis favorable de la commission départementale de sécurité émis au cours de l’instruction de la demande de permis.

    Il s’ensuit qu’à défaut de permis de construire et donc d’autorisation de ladite commission, un ERP ne peut pas être ouvert d’où, selon nous, l’existence de « l’obligation » mise en exergue par l’arrêt commenté puisqu’en soi, l’annulation d’un permis de construire ne vaut pas obligation de présenter et d’obtenir l’autorisation d’urbanisme nécessaire à régulariser la construction édifiée en exécution de ce permis.

    Il reste que, par principe, des travaux se rapportant à une construction illégale, c’est-à-dire à une construction édifiée sans autorisation ou en exécution d’une autorisation ultérieurement annulée, ne peuvent être autorisés que s’ils sont inclus dans une demande portant également sur la construction existante et ayant pour effet de régulariser l’ensemble de cette dernière au regard des prescriptions d’urbanisme qui lui sont alors opposables (CE. 9 juillet 1986, Thalamy, req. n°51.172). C’est pourquoi des travaux de façade d’une construction illégale ne pourront pas faire l’objet d’une simple déclaration de travaux mais devront relever d’un permis de construire portant sur l’ensemble de la construction (CE. 30 mars 1994, Gigoult, req. n°137.881).

    En première analyse, on aurait donc pu s’attendre à ce que la Cour administrative d’appel de Nancy annule la décision contestée de non opposition à déclaration de travaux non pas parce que les travaux projetés relevaient isolément du champ d’application de l’autorisation « ITD » mais parce que liés à une construction illégale, ils ne pouvaient être autorisés que dans le cadre d’un permis de construire également destiné à régulariser cette dernière.

    On sait, toutefois, que les arrêts faisant application de la jurisprudence « Thalamy » (CE. 9 juillet 1986, Thalamy, req. n°51.172) ont toujours souligné que le principe posé par cette dernière valait à l’égard des travaux devant « prendre appui » sur une construction illégale. C’est ainsi que le Conseil d’Etat a ultérieurement précisé que ce principe ne valait pas pour les travaux projetés sur des constructions dissociables de celles entachées d’illégalité même si elles relèvent toute d’une même entreprise de construction (CE. 25 avril 2001, Ahlborn, req. n°207.095).

    Il semble donc que la Cour administrative d’appel de Nancy a considéré que dans la mesure où les travaux d’aménagement projetés ne prenaient pas appui sur la construction édifiée en conséquence du permis de construire précédemment annulé, ceux-ci n’exigeaient pas d’obtenir un permis de construire de régularisation et, par voie de conséquence, devaient relever d’une autorisation « ITD » ne portant que sur ces travaux.

    Dans cette mesure, l’arrêt commenté peut-être rapproché de celui par lequel la Cour administrative d’appel de Marseille avait validé un permis de construire ayant pour objet la réalisation d’un garage souterrain de trente-cinq places de stationnement affectées à un immeuble précédemment édifié en exécution d’un permis de construire depuis frappé de caducité au motif que ce permis de construire n’était pas illégal du seul fait qu’il ne portait pas sur l’ensemble de la construction antérieurement construite et qu’il ne prévoyait pas un nombre de places suffisant pour régulariser cette dernière (CAA. Marseille 27 mars 2003, Cne de Nice c/ Synd. des copropriétaires de la résidence Pierre Blanche, req. n°98MA0633).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat à la Cour
    Cabinet Frêche & Associés

  • L’aménagement d’une aire de stockage de bateaux est assujetti à autorisation « ITD » et les travaux préparatoires s’y rapportant peuvent, à défaut d’autorisation, être interrompus sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme.

    Un bateau constitue un véhicule au sens de l’article R.422-2 du Code de l’urbanisme. Par voie de conséquence, les aires de stockage de bateaux de dix unités et plus, aménagées pour une durée supérieure à trois mois, relèvent du champ d’application de l’autorisation d’installations et de travaux divers. Par ailleurs, dès lors que les travaux préparatoires en cours d’exécution ne sont pas détachables d’un projet assujetti à une autorisation d’urbanisme, ceux-ci peuvent légalement donner lieu à l’édiction d’un l’arrêté interruptif pris sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme, y compris s’ils ne sont en eux-mêmes assujettis à aucune autorisation.

    CAA. Marseille, 18 mai 2006, M. Georges X…, req. n°03MA00455

    Dans cette affaire, la demande d’autorisation d’installations et de travaux divers (« ITD ») présentée par le pétitionnaire avait été rejetée au motif tiré de ce que l’aménagement projeté – en l’occurrence, une aire de stockage de bateaux assortie d’une rampe d’accès à la mer – méconnaissait les dispositions de l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme ainsi que les prescriptions subséquentes des articles ND.1 et ND.2 du POS communal. Mais nonobstant ce refus d’autorisation, le pétitionnaire devait engager les travaux projetés, lesquels firent conséquemment l’objet d’un arrêt en ordonnant l’interruption sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme.

    Après que le recours en annulation engagé à l’encontre tant de l’arrêté portant refus d’autorisation que de l’arrêté interruptif des travaux eu été rejeté par le Tribunal administratif de Nice, le constructeur saisit alors la Cour administrative d’appel de Marseille.

    S’agissant de la légalité du refus d’autorisation, d’une part, la principale question avait trait à l’assujettissement des travaux projetés à autorisation « ITD » dont le champ d’application est strictement défini par l’article R.442-2 du Code de l’urbanisme, lequel vise notamment « les aires de stationnement ouvertes au public et les dépôts de véhicules, lorsqu'ils sont susceptibles de contenir au moins dix unités» (b), « lorsque l'occupation ou l'utilisation du terrain doit se poursuivre durant plus de trois mois ». En effet, lorsqu’un projet de construction n’est pas assujetti à l’autorisation d’urbanisme pourtant sollicitée par le constructeur, l’administration doit la refuser mais ce, uniquement sur le motif tiré du non-assujettissement à l’autorisation demandée : tout autre motif de refus étant donc illégal (pour exemple : TA. Nice, 18 novembre 1999, M. Carl c/ Cne de Menton, req. n°95-3794).

    Et sur ce point, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé « qu’il ressort des pièces du dossier que le projet en litige visait à organiser sur un terrain de 1940 m2 comportant déjà un bâtiment à usage de garage à bateaux, le stationnement en extérieur de bateaux de plaisance en nombre supérieur à 10 pour une durée de plus de trois mois ; qu'à supposer même que ce projet prenne la suite d'une précédente activité de stockage de bateaux antérieure à l'approbation du plan d'occupation des sols de la commune, qui au demeurant n'avait jamais fait l'objet d'une autorisation, il porte sur une extension de cette activité devant faire l'objet de l'autorisation prévue à l'article R.442-2 du code de l'urbanisme ».

    En d’autres termes, la Cour a donc considéré qu’un bateau constitue donc un véhicule au sens de l’article R.442-2-b) du Code de l’urbanisme et, par voie de conséquence, a donc jugé que l’aménagement d’une aire de stockage de bateaux d’une capacité d’accueil de dix unités et plus exigeait l’obtention préalable d’une autorisation « ITD ». Il faut donc en déduire que l’article précité vise tout type de véhicules, à savoir non seulement les véhicules terrestres mais également les véhicules nautiques, voire les véhicules aériens.

    Constatant que l’aire de dépôt projetée était incompatible avec les prescriptions de l’article L.146-4 du Code de l’urbanisme et, en outre, interdite par les prescriptions combinées des articles ND.1 et ND.2 du POS communal, la Cour administrative d’appel de Marseille a donc validé tant le refus d’autorisation « ITD » opposé au pétitionnaire que son motif.

    Quant à la légalité de l’arrêté interruptif des travaux, d’autre part, le requérant faisait valoir que les travaux constatés par le procès-verbal d’infraction étaient des travaux préparatoires dont l’exécution ne pouvait justifier un arrêté interruptif des travaux dans la mesure où, pris isolément, ces travaux ne relevaient du champ d’application d’aucune autorisation d’urbanisme.

    On sait en effet que le Conseil d’Etat a eu l’occasion de préciser qu’un arrêté interruptif pris sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme est illégal si les travaux sont achevés et qu’il en va ainsi lorsque les travaux en cours d’exécution sont des travaux de finition ne relevant pas en eux-mêmes du champ d’application d’une autorisation d’urbanisme (CE. 2 mars 1994, Cne de Saint-Tropez, req. n°135.448).

    A priori, la même conclusion pouvait s’imposer pour ce qui concerne les travaux préparatoires. Il reste que la position du Conseil d’Etat sur ce point n’est pas si éloignée de celle au terme de laquelle il considère, en tant que juge des référés, qu’il n’y a plus urgence à suspendre un permis de construire lorsque les travaux sont achevés ou quasi-achevés et, par voie de conséquence, il n’y a plus lieu alors de statuer sur les requêtes présentées à cet effet (CE. 26 juin 2002, Demblans, Juris-data n°2002-064059).

    Or, s’il n’est plus utile d’ordonner l’interruption des travaux illégalement entrepris lorsque ceux-ci sont quasi-achevés, force est d’admettre qu’il peut être opportun d’ordonner l’interruption de travaux préparatoires à une opération assujettie à l’obtention préalable d’une autorisation d’urbanisme. D’ailleurs, le Conseil d’Etat déduit l’urgence à suspendre l’exécution d’une autorisation d’urbanisme du seul fait que les travaux ainsi autorisés sont susceptibles d’être entrepris à tout moment.

    Et précisément, la Cour administrative d’appel de Marseille a jugé que « si M. X soutient que le maire de Théoule-sur-Mer ne pouvait ordonner l'interruption de travaux qui n'étaient pas soumis à délivrance d'une autorisation, il ressort de l'instruction que les travaux entrepris n'étaient pas détachables de l'opération dont la réalisation avait fait l'objet d'un refus le 31 mars 2000 ; qu'au vu du procès-verbal constatant cette infraction, le maire de Théoule-sur-Mer était donc tenu, comme il l'a fait le 5 octobre 2001, de prendre un arrêté prescrivant la cessation des travaux en cause, sur le fondement des dispositions de l'article L.480-2 du code de l'urbanisme ».

    S’ils sont illégaux, les travaux préparatoires à une opération assujettie à autorisation d’urbanisme peuvent donc être interrompus sur le fondement de l’article L.480-2 du Code de l’urbanisme, y compris s’ils n’exigent pas en eux-mêmes une telle autorisation puisqu'ils doivent néanmoins relever de celle-ci (sur ce point, voir ici).


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet Frêche & Associés