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Il n'y a pas lieu à "QPC" sur l'article L.600-5-1 du Code de l'urbanisme dans sa rédaction issue de la loi "ELAN"

Même s'il résulte de la rédaction de l'article L.600-5-1 du Code de l'urbanisme issue de la loi "ELAN" que la mise en œuvre de ce dispositif n'est plus une faculté mais une obligation pour le juge administratif lorsqu'il constate que les conditions sont réunies, il n'y a pas lieu à "QPC" dès lors que ce dispositif, d'application immédiate aux instances en cours dès leur entrée en vigueur, n'affecte pas le droit des requérants de contester un permis de construire devant le juge pour obtenir qu'une telle décision soit conforme aux lois et règlements applicables. Au surplus, la seule circonstance que son recours soit in fine rejeté en raison de la régularisation dont il est à l'origine ne doit pas nécessairement conduire le juge à le regarder comme la partie perdante au sens de l'article L.761-1 du Code de justice administrative.

CE. 24 juillet 2019, req. n°430.473 :

" 1. Il résulte des dispositions de l'article 23-4 de l'ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel que, lorsqu'une juridiction relevant du Conseil d'Etat a transmis à ce dernier, en application de l'article 23-2 de cette même ordonnance, la question de la conformité à la Constitution d'une disposition législative, le Conseil constitutionnel est saisi de cette question de constitutionnalité à la triple condition que la disposition contestée soit applicable au litige ou à la procédure, qu'elle n'ait pas déjà été déclarée conforme à la Constitution dans les motifs et le dispositif d'une décision du Conseil constitutionnel, sauf changement des circonstances, et que la question soit nouvelle ou présente un caractère sérieux.

2. Aux termes de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de l'article 80 de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice entraînant l'illégalité de cet acte est susceptible d'être régularisé, sursoit à statuer, après avoir invité les parties à présenter leurs observations, jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe pour cette régularisation, même après l'achèvement des travaux. Si une mesure de régularisation est notifiée dans ce délai au juge, celui-ci statue après avoir invité les parties à présenter leurs observations. Le refus par le juge de faire droit à une demande de sursis à statuer est motivé ".

3. S'il résulte de ces dispositions que le juge administratif peut, sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5 du même code, être tenu de surseoir à statuer sur les conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable dont il est saisi, en vue de permettre la régularisation en cours d'instance d'un vice qui entache la décision litigieuse et entraîne son illégalité, c'est à la condition que, à la date à laquelle il se prononce, une autorisation d'urbanisme puisse légalement intervenir pour régulariser le projet, compte tenu de ses caractéristiques, de l'avancement des travaux et des règles d'urbanisme applicables, dans les mêmes conditions que si l'autorisation d'urbanisme initiale avait été annulée pour excès de pouvoir. Il résulte également de ces dispositions qu'il lui appartient, avant de surseoir à statuer, d'inviter les parties à présenter leurs observations jusqu'à l'expiration du délai qu'il fixe, qui doit être suffisant au regard de l'objet des observations demandées pour garantir le débat contradictoire et les droits de la défense, puis de faire de même avant de régler définitivement le fond du litige si une mesure de régularisation lui a été notifiée avant l'expiration du délai fixé à cette fin.

4. Ces dispositions, dont l'application immédiate aux instances en cours dès leur entrée en vigueur ne porte atteinte à aucune situation qui serait acquise ou définitivement constituée, se bornent, sans affecter la substance du droit au recours ni porter atteinte à aucun des droits des requérants, à instituer des règles de procédure concernant exclusivement les pouvoirs du juge administratif en matière de contentieux de l'urbanisme. Eu égard à leurs effets et aux garanties procédurales qu'elles prévoient, ni ces dispositions, ni leur entrée en vigueur immédiate, indépendamment de la date d'introduction du recours, ne peuvent être regardées comme portant atteinte au principe d'égalité devant la loi, aux droits de la défense et au droit à un procès équitable garantis par l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789.

5. Elles n'affectent pas davantage le droit des requérants de contester un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou une décision de non-opposition à déclaration préalable devant le juge de l'excès de pouvoir et d'obtenir qu'une telle décision soit conforme aux lois et règlements applicables. Dès lors, les critiques tirées de ce que l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, en ce qu'il conduirait le juge de l'excès de pouvoir à rejeter la requête au vu d'une mesure de régularisation intervenue pendant le délai fixé par le juge, porterait atteinte au droit à un recours juridictionnel effectif et au droit de propriété, garantis par les articles 16 ainsi que 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789, ne présentent pas non plus un caractère sérieux.

6. Au demeurant, la seule circonstance que le juge rejette finalement les conclusions dirigées contre la décision initiale, dont le requérant était fondé à soutenir qu'elle était illégale et dont il est, par son recours, à l'origine de la régularisation, ne devrait pas, pour l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, conduire le juge à regarder nécessairement le requérant comme étant, dans l'instance, la partie perdante pour l'essentiel.

7. Il résulte de ce qui a été dit précédemment que la question soulevée, qui n'est pas nouvelle, ne présente pas un caractère sérieux. Il n'y a, dès lors, pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité invoquée ".

Patrick E. DURAND

Commentaires

  • Cher confrère,
    On aurait pu espérer dans votre commentaire sommaire, un petit sursaut d'éthique de la défense du justiciable, notre mission...
    La question du droit d'accès à une justice effective est sérieusement posée, même si le Conseil d'Etat valide cet artifice qui lui permet de désengorger les tribunaux en dégoutant les requérants de saisir le juge de la légalité...
    Gageons que la CEDH aura à en connaitre un jour..
    Plus sérieusement, ... bel été à toi et aux tiens

  • Salut Emmanuel,
    T'as réussi : tu m'as fait peur...
    Bel été tout pareil.

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