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  • Sur la légalité et l’application de l’article 5 des POS régissant la superficie des terrains issus de la division d’une unité foncière plus vaste

    Si l'article 13 de la loi du 13 décembre 2000 a abrogé l'article L.111-5 du code de l'urbanisme prévoyant que la constructibilité d'un terrain issu d'une division devait être examinée au regard de la constructibilité résiduelle de l'unité foncière initiale, l'abrogation de cette disposition n'a pas eu pour effet de remettre en cause les règlements des plans d'occupation des sols qui prévoient des règles de constructibilité inspirées de ladite disposition abrogée

    CAA. Marseille, 9 octobre 2009, Cédric X., req. 07MA03720

    Dans cette affaire, le requérant avait sollicité un permis de construire sur un terrain classé dans une zone du POS au sein de laquelle l’article du règlement applicable disposait que : « 1 - Pour être constructibles, les terrains doivent avoir une superficie de 4 000 m² en secteur NB1 (...). 2 - En cas de détachement d'une propriété bâtie, la surface indiquée à l'article NB5-1 s'applique également à l'unité foncière restant attachée à la construction ».

    Mais bien que sa demande portait sur un terrain d’une superficie de 4.000 mètres carrés, sa demande de permis de construire devait néanmoins être rejetée au motif que ce terrain était issu de la division d’unités foncière plus vastes dont la superficie, après ce détachement, était inférieure au seuil fixé par l’article 5 du POS communal.

    terrains.jpgLe requérant devait toutefois contester ce refus en soutenant que l’article 13 de la loi du 13 décembre 2000 dite « SRU » ayant abrogé l’ancien article L.111-5 du Code de l’urbanisme – dont on rappellera qu’il disposait que « il ne peut plus être construit sur toute partie détachée d'un terrain dont la totalité des droits de construire, compte tenu notamment du coefficient d'occupation du sol en vigueur, a été précédemment utilisée. Lorsqu'une partie est détachée d'un terrain dont les droits de construire n'ont été que partiellement utilisés, il ne peut y être construit que dans la limite des droits qui n'ont pas été utilisés avant la division » – il s’ensuivait que cette abrogation avait nécessairement eu pour effet d’introduire implicitement une règle selon laquelle les possibilités de construction attachées à un terrain issu d’une division foncière devait être exclusivement appréciées en considération de leur superficie et indépendamment donc de toute considération liée aux droits à construire déjà consommés sur l’unité foncière d’origine ; ce qui avait pour effet de rendre illégales les prescriptions d’un règlement local d’urbanisme maintenant des règles équivalentes au principe posé par l’ancien article L.111-5.

    Mais ce moyen ainsi que l’ensemble de la requête devait toutefois être rejetée au motif suivant :

    « Considérant, en deuxième lieu, que l'article 13 de la loi du 13 décembre 2000 a abrogé l'article L.111-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction issue de la loi n° 75-1328 du 31 décembre 1975 modifiée, laquelle était applicable à la date d'approbation du plan d'occupation des sols de la commune et prévoyait que la constructibilité d'un terrain issu d'une division devait être examinée au regard de la constructibilité résiduelle de l'unité foncière initiale ; que l'abrogation de cette disposition n'a pas eu pour effet de remettre en cause les règlements des plans d'occupation des sols qui prévoient des règles de constructibilité inspirées de ladite disposition abrogée ; qu'ainsi M. Cédric X n'est pas fondé à soutenir que l'entrée en vigueur de la loi du 13 décembre 2000 a eu pour effet de rendre illégal l'article NB5 du règlement du plan d'occupation des sols de la commune de Meyreuil ».

    Même si l’arrêt n’est pas motivé sur ce point, force est toutefois d’admettre que l’on voit mal ce qui pourrait expliquer cette solution si ce n’est l’article L.123-19 du Code de l’urbanisme en ce qu’il dispose : « Les plans d'occupation des sols approuvés avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 précitée ont les mêmes effets que les plans locaux d'urbanisme. Ils sont soumis au régime juridique des plans locaux d'urbanisme défini par les articles L. 123-1-1 à L. 123-18. Les dispositions de l'article L. 123-1, dans leur rédaction antérieure à cette loi, leur demeurent applicables ». C’est d’ailleurs ce dispositif qui avait amené la Cour administrative d’appel de Versailles a adopté la même solution sur ce point (CAA. Versailles, formation plénière, 14 mars 2008, Sté 3A Investissement, req. n°06VE00659).

    Cette analyse n’est cependant pas totalement satisfaisante ou, à tout le moins, génère de très nombreuses interrogations.

    Force est en effet de s’interroger sur la légalité de prescriptions édictant des règles équivalentes à l’article L.111-5 du Code de l’urbanisme mais adoptés postérieurement à son abrogation puisque la Cour a souligné que ce dernier était en vigueur au moment où avait été adopté l’article 5 du POS en cause.

    A priori, la légalité de ces dispositions ne seraient pas contestables dans la mesure où, d’une part, elles n’apparaissent pas excéder l’habilitation conférer aux règlements d’urbanisme locaux par les articles L.123-1 et R.123-9 du Code de l’urbanisme et où, d’autre part, l’abrogation de l’article L.111-5 du Code de l’urbanisme ne s’est pas accompagnée de l’introduction d’un règle expresse et générale selon laquelle les droits à construire attachés aux terrains issus d’une division foncière doivent être établis indépendamment de ceux déjà consommés sur leur unité foncière d’origine.

    Il reste que l’article 18 de la loi du 2 juillet 2003 dite « Urbanisme & Habitat » a ultérieurement introduit un nouvel article L.123-1-1au Code de l’urbanisme – et disposant que « dans les zones où ont été fixés un ou des coefficients d'occupation des sols, le plan local d'urbanisme peut prévoir que, si une partie a été détachée depuis moins de dix ans d'un terrain dont les droits à construire résultant de l'application du coefficient d'occupation des sols ont été utilisés partiellement ou en totalité, il ne peut plus être construit que dans la limite des droits qui n'ont pas déjà été utilisés » – qu’il est difficile de comprendre autrement que comme signifiant que les PLU ne peuvent régir spécifiquement la constructibilité des terrains issus d’une division foncière que s’agissant du coefficient d’occupation des sols.

    Mais comment comprendre alors le nouvel article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme – issu du décret du 5 janvier 2007 – lequel dispose que « dans le cas d'un lotissement ou dans celui de la construction, sur un même terrain, de plusieurs bâtiments dont le terrain d'assiette doit faire l'objet d'une division en propriété ou en jouissance, les règles édictées par le plan local d'urbanisme sont appréciées au regard de l'ensemble du projet, sauf si le règlement de ce plan s'y oppose » alors qu’à suivre l’article L.123-1-1 précité, une telle faculté n’est permise que s’agissant du coefficient d’occupation des sols.

    Certes dans la mesure où il intervient à la suite de l’article R.123-10 du Code de l’urbanisme relatif à la définition et aux modalités d’application du coefficient d’occupation des sols, il pourrait être compris que l’article R.123-10 ne vise que les règles s’y rapportant.

    Il reste que, d’une part, l’article précité vise l’ensemble « (d) es règles édictées par le plan local d'urbanisme » et que, d’autre part et plus spécifiquement, c’est très certainement pour ce qui concerne le coefficient d’occupation des sols que l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme est le moins abouti puisque si les PLU peuvent utilement s’opposer au principe posé par cet article à l’égard des permis de construire valant division dans la mesure où le plan de division dorénavant imposé de façon systématique par l’article R.431-24 n’a plus pour objet de ventiler la SHON constructible, il leur sera plus difficile de le faire à l’égard des lotissements dès lors que l’article R.442-9 du Code de l’urbanisme précise que « lorsqu'un coefficient d'occupation des sols est applicable, la surface de plancher hors oeuvre nette maximale autorisée ne peut être supérieure à celle qui résulte de l'application de ce coefficient à la totalité du terrain faisant l'objet de la demande d'autorisation de lotir. Elle peut être répartie librement entre les différents lots, sans tenir compte de l'application du coefficient d'occupation des sols à la superficie de chaque lot ».

    Force est donc de considérer que l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme induit que les PLU peuvent édicter des règles spécifiques s’agissant de la constructibilité des terrains issus d’une division foncière. Il reste que l’examen des travaux préparatoires à la réforme des autorisations d’urbanisme révèle que cet article est destinée à résoudre les divergences de la jurisprudence sur cette question mais n’a pas vocation formellement à définir les règles que peuvent édicter les PLU à cet égard alors, rappelons-le, qu’une telle possibilité se limiterait, rappelons-le, au seul coefficient d’occupation des sols aux termes de l’article L.123-1-1 du Code de l’urbanisme, lequel n’a pas été modifié par cette réforme. Et au surplus, force est de préciser que si l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme a pour objectif de trancher définitivement la question de l’application des prescriptions des règlements locaux d’urbanisme aux opérations impliquant une division foncière, il reste que la solution ainsi retenue est quasi-identique à celle mise en œuvre par la jurisprudence récente et selon laquelle, par principe, les prescriptions de ces règlements s’appliquent à l’échelle de l’unité foncière et non pas à l’échelon des terrains à constituer dans le cadre d’une division foncière ; sauf à ce qu’il prévoit expressément le contraire (CAA. Marseille, 2 juin 2005, Préfet de la Corse du Sud, req. n°03MA00163 ; CAA. Paris, 31 décembre 2004, Cne de Sceaux, req. n°01PA00560).

    Il incombera donc à la jurisprudence à venir de trancher cette délicate question. Il reste qu’à s’en tenir à l’arrêt commenté, il semble falloir considérer qu’il résulte des dispositions combinées de l’article 13 de la loi du 13 décembre 2000, de article L.123-1-1 et de l’article R.123-10 du Code de l’urbanisme que les prescriptions de règlements locaux d’urbanisme introduisant des règles équivalentes à celles posées par l’article L.111-5 :

    - avant l’entrée en vigueur de l’article 13 de la loi du 13 décembre 2000 et, peut être, avant l’entrée en vigueur de l’article L.123-1-1 du Code de l’urbanise sont légales ;

    - après l’entrée en vigueur de l’article L.123-1-1 du Code de l’urbanisme ne seraient légales qu’à conditions de considérer que ce dernier n’a pas entendu limiter la possibilité de définir des règles spécifiques aux terrains issus d’une division foncière pour le seul coefficient d’occupation des sols mais vise uniquement à encadrer cette possibilité et à en préciser les modalités d’application…

    La question posée par l’arrêté commenté renvoie donc à celle de l’utilité de l’article R.123-10-1 du Code de l’urbanisme au regard des dispositions législatives de l’article L.123-10-1 du Code de l’urbanisme puisque si le principe posé par le premier n’est pas sans intérêt s’agissant des règles relatives à l’implantation des constructions, c’est principalement pour résoudre les difficultés liées à la détermination des droits à construire attachés aux terrains issus d’une division foncière et aux contraintes s’en suivant pour les lotisseurs et les constructeurs qu’il a été voulu…

    Mais quoi qu’il en soit, la Cour administrative d’appel de Marseille a donc par voie de conséquence validé le motif de refus opposé par le Maire à la demande de permis de construire au motif suivant :

    « Considérant qu'aux termes de l'article NB5 du règlement du plan d'occupation des sols : 1 - Pour être constructibles, les terrains doivent avoir une superficie de 4 000 m² en secteur NB1 (...). 2 - En cas de détachement d'une propriété bâtie, la surface indiquée à l'article NB5-1 s'applique également à l'unité foncière restant attachée à la construction ; que s'il est constant que la demande de permis de construire présentée par M. Cédric X porte sur un terrain d'une surface de 4 000 m² situé en secteur NB1 du plan d'occupation des sols de Meyreuil, le permis sollicité porte sur une parcelle provenant de la division de deux propriétés dont les superficies, à l'issue du détachement ainsi opéré ne sont plus que de 1 357 m² et 2 675 m² ; que ces superficies étant inférieures à la superficie de 4 000 m² fixée par l'article NB5 du règlement du plan d'occupation des sols cité ci-dessus, c'est à bon droit que le maire de la commune de Meyreuil a refusé de délivrer un permis de construire à M. Cédric X ».

    A cet égard, l’arrêt commenté peut ici encore être rapproché d’un autre arrêt par laquelle la Cour administrative d’appel de Versailles a jugé que :

    « Considérant qu'il résulte de l'article UE5 précité que chaque terrain issu d'une division foncière doit avoir une surface constructible de 1 200 m2 et 15 m de façade ; que, par suite, la commune d'Orgerus est fondée à soutenir que, pour l'application de ces dispositions, seule pouvait être prise en compte la partie du lot n° 2 qui était située dans la zone UE, à l'exclusion de la partie de cette même parcelle qui était comprise dans la zone NC ; qu'il est constant, en l'espèce, que le lot n° 2, issu de la division du terrain dont le lot n° 1 fait l'objet du certificat d'urbanisme litigieux, ne comporte qu'une superficie de 350 m2 située en zone UE, le surplus de la surface étant classé en zone NC, et qu'elle comporte déjà une construction préexistante ; qu'il s'ensuit que cette division, qui n'a pas laissé au terrain sur lequel cette construction a été édifiée une surface constructible suffisante, n'a pas respecté les dispositions de l'article UE5 ; que, par suite, le lot n° 1 issu de la division est inconstructible, alors même qu'il n'est pas contesté qu'il comporte une superficie supérieure à 1 200 m2 et plus de 15 m de façade ; que le maire était, dès lors, tenu de délivrer un certificat d'urbanisme négatif ; que la commune d'Orgerus est, dans ces conditions, fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a prononcé l'annulation du certificat d'urbanisme négatif délivré à la SCI du Moutier » (CAA Versailles, 28 déc. 2006, n° 05VE01622, Cne Orgerus ; notre note Construction - Urbanisme n° 3, Mars 2007, comm. 63).

    A ce titre, l’arrêt commenté nous semble donc à classer parmi la jurisprudence permettant de dégager la règle de principe selon laquelle pour être légal un permis de construire ne doit pas seulement autoriser un projet conforme aux prescriptions d’urbanisme, son exécution ne doit pas avoir pour effet de rendre des immeubles existants non conformes à ces mêmes prescriptions.

     
    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés