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  • Sur l’action en répétition des participations d’urbanisme indues prévue par l’article L.332-30 du Code de l’urbanisme

    Voici deux décisions nous semblant faire deux applications différentes de l’article L.332-30 du Code de l’urbanisme s’agissant de l’acceptation de la participation en cause par le constructeur.

    CAA. Versailles, 18 octobre 2007, SCI L’Orée de Noisy, req. n°05VE02210 / CE. 10 octobre 2007, Cne de Biot, req. n°268.205 (mentionné aux Tables du Recueil)


    Dans la première affaire, la société requérante avait obtenu une autorisation de lotir dont il lui été ultérieurement apparu qu’elle ne pouvait la mettre en œuvre dans la mesure où l’une des parties du terrain à lotir ne lui appartenait en fait pas – puisque relevant de la propriété de la commune et, plus précisément, de son domaine public – si bien qu’elle ne pouvait légalement réaliser la voie assurant la desserte de ces lots.

    Cette société et la commune convinrent alors, d’une part, de la délivrance d’une autorisation de lotir modificative et, d’autre part, de ce que la société réaliserait une voie sur le domaine public communal dont elle assumerait la charge tout en versant à la commune une redevance pour occupation du domaine public.

    Mais ultérieurement, après la réalisation de la voie, la société décida d’engager une action en réparation à l’encontre de la commune aux fins d’obtenir le remboursement des frais exposés pour la réalisation de cette voie ainsi que du montant de la redevance versée pour occupation du domaine public.

    Cependant, sa demande devait être rejetée par le Tribunal administratif de Versailles puis par la Cour administrative d’appel de Versailles et ce, au motif suivant :

    « Considérant qu'il résulte de l'instruction que, ainsi qu'elle le relève d'ailleurs elle-même en ce qui concerne l'autorisation de lotir, la somme dont la société requérante demande répétition n'a jamais été mise à sa charge par une quelconque décision de la commune de Noisy-le-Roi, l'autorisation d'occupation du domaine public se bornant à permettre la réalisation de la voie d'accès au lotissement, sans nullement l'imposer ; que si la SCI « L'ORÉE DE NOISY » allègue qu'elle n'avait pas le choix de ne pas réaliser cette voie, cette contrainte résulte de son propre fait dès lors qu'elle n'a pas vérifié être propriétaire de l'ensemble des parcelles du projet lorsqu'elle a déposé sa demande de lotissement ; qu'ainsi la réalisation de cette voie ne peut être regardée comme ayant été obtenue ou imposée au sens des dispositions de l'article L. 332-30 du code de l'urbanisme ;
    Considérant que dès lors que, ainsi qu'il vient d'être dit, la réalisation de la voirie n'a aucunement été imposée à la société, les premiers juges ont pu sans commettre d'erreur de droit lui opposer le fait qu'elle ait accepté, lors de la réunion de travail de septembre 1998, de réaliser la voie à ses frais ; que pour le même motif, et alors surtout que toute occupation privative du domaine public donne lieu à la perception d'une redevance, le jugement n'est pas entaché de contradiction de motifs en tant qu'il retient que la voie réalisée n'est pas un équipement propre du lotissement et estime, néanmoins que la redevance pour occupation du domaine public était fondée ; que pour le même motif, la SCI « L'ORÉE DE NOISY » ne saurait utilement se prévaloir ni de ce que la voie ne serait pas un équipement propre ni de ce que sa réalisation n'a pas été prescrite par l'autorisation de lotir ;
    En ce qui concerne le remboursement de la redevance pour occupation du domaine public :
    Considérant que, s'il est exact que la redevance d'occupation du domaine public a été imposée à la SCI « L'ORÉE DE NOISY » pour éviter de faire jouer le droit de rétrocession, cette circonstance ne saurait, en tout état de cause, utilement être invoquée par la requérante, dès lors que ce choix a été effectué dans l'intérêt de son opération de lotissement, l'autre option étant plus lente compte tenu de la nécessité d'une enquête publique de déclassement, et plus incertaine compte tenu de ce que la requérante n'était pas propriétaire initial de la totalité des parcelles nécessaires au désenclavement du lotissement ;
    Considérant que, pour critiquer le montant de la redevance d'occupation du domaine public mise à sa charge, la société ne saurait utilement se prévaloir des dispositions de l'article A 15 du code du domaine de l'Etat qui se bornent à ouvrir la possibilité d'accorder une autorisation d'utilisation du domaine public à titre gratuit sans en faire une obligation ; que la durée de dix ans retenue par la commune pour l'autorisation n'est pas excessive au regard de l'intérêt de la gestion du domaine public communal qui justifie que la SCI « L'ORÉE DE NOISY », une fois les travaux achevés, assure l'entretien d'une voirie qui dans un premier temps ne desservira que le lotissement et dont les habitants auront la jouissance exclusive
    ».


    En substance, la Cour a donc considéré qu’alors même que la voie réalisée ne constituait pas un équipement propre du lotissement au sens de l’article L.332-15 du Code de l’urbanisme (CE. 17 janvier 1986, Cne de Munster, req. n° 47.905 ; CE. 29 octobre 1997, Cne de Toulouges, req. n° 158.494). et, par voie de conséquence, que la réalisation par le lotisseur d’une voie publique n’avait pas, en l’espèce, de fondement légal alors que la réalisation cette voie était manifestement indissociable de la délivrance de l’autorisation de lotir modificative, celui-ci n’était pas fondé à solliciter le remboursement des sommes liées à la réalisation cette voie et à l’occupation subséquente du domaine public sur le fondement de l’article L.33-30 du Code de l’urbanisme et ce, dans la mesure où la réalisation de cette voie n’avait pas été imposée par la commune mais procédait d’une initiative du lotisseur qui l’avait donc acceptée aux fins de réaliser son projet.

    Une telle décision est quel que peu surprenante dès lors que l’article L.332-30 du Code de l’urbanisme dispose que : « les taxes et contributions de toute nature qui sont obtenues ou imposées en violation des dispositions des articles L. 311-4 et L. 332-6 sont réputées sans cause ; les sommes versées ou celles qui correspondent au coût de prestations fournies sont sujettes à répétition. L'action en répétition se prescrit par cinq ans à compter du dernier versement ou de l'obtention des prestations indûment exigées ».

    Or, à ce titre, il est de jurisprudence constante qu’une taxe ou contribution indûment perçue par la collectivité publique est sujette à répétition dès lors qu’elle a été obtenue par cette dernière, y compris lorsqu’elle n’a pas été imposée par la collectivité et au contraire a été acceptée, même par voie contractuelle, par le constructeur (CE. 20 septmebre 1991, Cne de Villard-de-Lans, Rec., p.1257 ; CE. 14 mars 1997, ETA de Marne-la-Vallée ; CE. 4 février 2000, EPAD, req. n° 202.981 ;CE. 6 mars 1989, Cne de Crolles, req. n°68.461 ; CAA. Lyon, 18 février 1997, SCI « 268, avenue de la Lanterne », req. 94LY01386).

    C’est ce qu’illustre, d’ailleurs, la seconde affaire dans laquelle la société avait acquis un terrain en vue d’y édifier un ensemble immobilier mais à l’égard duquel le règlement du plan d'occupation des sols prévoyait une règle de limitation du nombre de lots constructibles ou de maisons individuelles à laquelle il ne pouvait être dérogé qu'en ce qui concerne les constructions desservies par le réseau public d'assainissement.

    C’est ainsi que la société et la commune devaient conclure une convention par laquelle la commune s'engageait à réaliser les travaux d'extension du réseau public d'assainissement jusqu'à l'entrée de la parcelle acquise par la société et à accorder à celle-ci les autorisations d'urbanisme que nécessitait la réalisation de ses projets. Mais la société s'était en contrepartie engagée à verser au budget de la commune un fonds de concours dont la société s'est acquittée avant que lui soient délivrés plusieurs autorisations de lotir et permis de construire.

    Mais ultérieurement, cette société devait se retourner contre la commune aux fins d’obtenir le remboursement de son fonds de concours. Et nonobstant la circonstance que le versement de ce fonds ait été accepté par la société par voie contractuelle, le Conseil devait jugé que :

    « Considérant que les dispositions précitées de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme fixent de façon limitative les contributions qui peuvent être mises à la charge des constructeurs à l'occasion de la délivrance d'une autorisation de construire ; qu'il en résulte qu'aucune autre participation ne peut leur être demandée ; qu'eu égard au caractère d'ordre public des dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme, toute stipulation contractuelle qui y dérogerait serait entachée de nullité ;
    Considérant que si la convention signée le 18 septembre 1990 entre la société Deviq Rhône-Alpes et la COMMUNE DE BIOT prévoyait une contribution en contrepartie du raccordement du terrain à lotir au réseau public d'assainissement, cette contribution ne correspond ni au cas fixé par le 1°) de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme alors applicable relatif à la taxe locale d'équipement, ni à celui fixé au 2°) de ce même article et résultant de la combinaison des dispositions de l'article L. 332-6-1 du code de l'urbanisme et de celles de l'article L. 34-5 du code de la santé publique, dans leur rédaction alors applicable, en ce qu'il concerne la contribution de propriétaires d'immeubles à une installation d'un équipement individuel d'évacuation ou d'épuration et non celle de propriétaires de terrains devant être lotis et raccordés au réseau public d'assainissement, ni à celui fixé au 3°) de ce même article relatif à la réalisation des équipements propres mentionnés à l'article L. 332.15 du code de l'urbanisme ; que dès lors la cour administrative d'appel de Marseille n'a pas inexactement qualifié la contribution prévue par la convention sus-mentionnée en la regardant, eu égard au lien existant entre l'extension du réseau public d'assainissement et l'octroi à la société des autorisations de lotir et de construire demandées par elle dans le cadre de la réalisation de son projet immobilier, comme interdite par les dispositions de l'article L. 332-6 du code de l'urbanisme ; que la cour a pu légalement en déduire, par application des mêmes dispositions , la nullité de la convention prévoyant cette offre de concours
    » ;


    et par voie de conséquence, confirmer la condamnation de la commune à rembourser le montant du fonds de concours à la société alors qu’il ne ressortait nullement des pièces du dossier que le versement de cette somme avait été imposé par la commune…


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit – Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés

  • Sur les limites du permis de construire modificatif de régularisation (suite)

    Un "modificatif" peut régulariser le vice de forme affectant un permis de construire au regard des dispositions de l'article 4 de la loi n°2000-321 de la loi du 12 avril 2000.

    CAA. Nantes, 27 mars 2007, Cne de la Faute-sur-Mer, req. n°06NT01269



    Dans une note du 16 août 2007, nous avions commenté l'arrêt par lequel la Cour administrative d'appel de Marseille (CAA. Marseille, 16 mai 2007, M.Y., req. n°04MA01336) avait jugé que :

    "Considérant, d'autre part, qu'aux termes des dispositions de l'article 4, alinéa 2, de la loi du 12 avril 2000 : «Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.» ; qu'en application de ces dispositions, l'omission de la mention des nom et prénom du signataire des permis de construire en cause est une irrégularité formelle entachant l'édiction même desdits actes, qui ne peut être régularisée, postérieurement à ladite édiction, par la circonstance que des permis de construire modificatifs, intervenus le 11 juillet 2002 et le 30 septembre 2002 respectivement pour les permis de construire LC041 délivré à B et LC042 délivré à , comporteraient, eux, les mentions exigées par les dispositions précitées ; que, par suite, c'est à bon droit que le tribunal a estimé que les permis en cause étaient irréguliers au regard des exigences sus-rappelées de la loi du 12 avril 2000"

    et, en d'autres termes, considéré qu'un permis de construire modificatif ne peut régulariser un permis de construire primitif ne précisant ni le nom, ni le prénom de son auteur dès lors que cette méconnaissance de l’article 4 de la loi du 12 avril 2000 constitue une irrégularité entachant l’édiction même du permis primitif.

    Tout en admettant le bien fondé d'une telle décision au regard de l'objectif et de l'utilité contentieuse de l'article 4, nous émétions néanmoins les plus vives réserves sur la régularité d'une telle appréciation au regard de la jurisprudence rendue par le Conseil d'Etat sur les vertues régularisatrices du permis de construire modificatif et, notamment, sa capacité à régulariser les vices de formes affectant un permis de construire primiti(CE. 2 février 2004, SCI La Fontaine de Villiers, 238.315) .

    Précisément, la Cour administrative d'appel Nantes a d'adopté une solution plus orthodoxe en jugeant (dans un arrêt diffusé sur Légifrance le 5 novembre dernier...) que :

    "Considérant qu'aux termes de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000 susvisée, relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations : ( ) Toute décision prise par l'une des autorités administratives mentionnées à l'article 1er comporte, outre la signature de son auteur, la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci ; que si le permis de construire contesté du 28 avril 2005, signé pour le maire, l'adjoint délégué, ne comporte pas le nom et le prénom de son signataire, dont les mentions sont exigées par les dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier que, par arrêté du 30 août 2005, le maire de la Faute-sur-Mer a procédé à la régularisation, sur ce point, dudit permis du 28 avril 2005 en délivrant à l'intéressée un permis de construire modificatif comportant, sous la mention pour le maire, l'adjoint délégué assortie du tampon de la mairie, le nom et prénom de son signataire ; que la légalité du permis délivré à Mme X doit être appréciée en tenant compte des modifications apportées à l'arrêté du 28 avril 2005 par l'arrêté du 30 août 2005 ; qu'ainsi, c'est à tort que le Tribunal administratif de Nantes a estimé que la délivrance du permis de construire contesté était intervenue en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000";

    et donc qu'un "modificatif" pouvait régulariser le vice de forme affectant un permis de construire initial au regard de l'article 4 de la loi du 12 avril 2000.


    Patrick E. DURAND
    Docteur en droit - Avocat au barreau de Paris
    Cabinet FRÊCHE & Associés.